Penser l'élémentaire

Alain Trouve

Description

Que signifie le mot élémentaire lorsque l'on parle d'école ou d'enseignement "élémentaire" ? Comment cette notion a-t-elle pu disparaître de l'horizon de la pensée éducative ? A quels enjeux fait-elle référence ? Est-elle encore pertinente ? Sous quelles formes pourrait-elle être repensée ? Telles sont les questions traitées dans cet ouvrage. A l'heure où nous sommes en proie à une grande perplexité quant à l'idée de la construction d'une "culture commune", peut-être convient-il de réfléchir à nouveau sur la signification à accorder à l'idée de savoir élémentaire.

Sujets

• Enseignement
• Pédagogie
• Éducation

Informations

• Publié par: L'Harmattan
• Date de parution: 01 février 2010
• Nombre de lectures: 186
• EAN13: 9782296248939
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 3 Mo

Extrait

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Pédagogie : crises, mémoires, repères
Collection dirigée par Loïc Chalmel, Michel Fabre,
Jean Houssaye et Michel Soëtard

La collection « Pédagogie : crises, mémoires, repères » répond à un triple
objectif :
1 - Elle se propose de soumettre à la réflexion théorique les
problématiques et les situations de crise qui agitent le monde
pédagogique.
2 - Elle vise à vivifier les mémoires historiques capables d'éclairer le
pédagogue pour l'action présente.
3 - Elle entreprend de décrypter les repères philosophiques, éthiques,
politiques qui portent le pédagogue en avant des réalités.

AlainTrouvé

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La Notion desavoirélémentaireàl’école.Doctrines
L’Harmattan,coll. «Savoiret Formation »,2008.

© L’Harmattan,2010
5-7,rue de l’Ecole polytechnique,75005Paris

http://www.librairieharmattan.com
[e-mail]
[e-mail]

ISBN :978-2-296-11183-7
EAN : 9782296111837

et

enjeux,

Paris,

À Dominique, pour sa patience

Introduction

Cet ouvrage fait suite à une première publication également
consacrée à l’élémentaire, mais celle-ci s’était restreinte à un état des
lieux des principales doctrines philosophiques et pédagogiques ayant
développé, plus ou moins explicitement, une conception originale du
savoir élémentaire. Il s’agissait alors de dégager trois choses principales :
1) d’abord, préciser ce que recouvre la notion d’élémentaire ; 2) montrer
ensuite que, en dépit de sa trivialité, cette notion parcourt toute l’histoire
de la pensée occidentale, qu’elle est même constitutive de notre
modernité malgré les interprétations différentes et opposées dont elle
avait fait l’objet ;3) rappeler enfin que la pensée pédagogique moderne
celle quiva de Descartes etde Locke à Pestalozzi en passantpar
Condorcet– a forgé, plus oumoins explicitement,une pensée de
l’élémentaire. Il nous estapparuen effetque la notion de savoir
élémentaire surgissaitauconfluentde deux traditions philosophiques
rivleales :rationalisme, qui pensait trouver les principes de la
connaissance ausein de la raison pure ; etl’empirisme(avec son dérivé,
lesensualisme) qui recherchaitleur origine dans l’expérience.
Cependant, ces deux traditions ontdéveloppé la même rhétorique selon
laquelle l’acquisition des connaissances etl’ordre de l’apprentissage ne
pouvaients’effectuer que selonun ordre élémentaire, c’est-à-dire selon
une progression allantdusimple aucomplexe, dufamilier aulointain, du
« concret» à l’ « abstrait», duplus facile auplus difficile. Pour autant, le
désaccord étaitapparuà propos de la définition de la simplicité, laquelle
a été perçue soitcommeévidence intellectuelle, soitcommeévidence
sensible. Au-delà de ces divergences doctrinales, nous avons rapidement
constaté que plusieurs conceptions dusavoir élémentaire se faisaient
concurrence, l’élémentaire pouvantdésigner aussi bien lanotion
abstraite(évidence intellectuelle) que laperception concrète(évidence
sensible) ;l’ordre descommencementsde l’apprentissage que celui des
principes(archê; le) de la connaissancerudiment, simpleviatique d’un
savoir abrégé, que l’élément(stoïkhéion), propédeutique d’un savoir
élargi. L’étatde lieuxque nous avions dressé seterminaitpar le constat
selon lequel la question dusavoir élémentaire n’avaitjamais étévraiment
réglée dufaitqu’elle oscillaiten permanence entre ces conceptions
divergentes.

7

1
Le présent travail s’inscrit dans la continuité duprécédentoù
nous examinions les grandes doctrines fondatrices de la notion desavoir
élémentaire. Mais il s’agitcette fois-ci de confronter la notion
d’élémentaire auregard de l’actualité, des questions etdes débats qu’elle
soulève. Nous nous sommes aperçuen effetque l’ambiguïté que nous
évoquions quantà l’interprétation de l’élémentarité débouchaitsurun
ensemble de questions centrales qui, curieusement, sontréapparues avec
insistance aucours destrois dernières décennies, etdontles deux
principales sont:Que faut-il enseigner?? De quelle manièreNous
devons cependantavertir le lecteur que nous ne prétendons pas à
l’exhaustivité quantà la question de l’élémentaire, etencore moins
apporterune solution définitive auxdifférents problèmes que cette
dernière suscite. Comme, par exemple, celui de savoir si l’élémentarité,
enracinée dans le paradigme épistémologique de simplicité, estencore
pertinente à notre époque oùla catégorie de complexité s’est
progressivementsubstituée à celle de simplicité ;oubien celui de
l’éventuelle articulation de l’ « élémentation » des savoirs (leur réduction
en des éléments simples etfacilementaccessibles) avec les impératifs de
latransposition didactique ; oubien encore celui de savoir si la catégorie
d’élémentaire estrecycclable dans celles de «ulture commune »oude
« soclecommun » ;ou, enfin, celui de décider péremptoirementsi
l’élémentaire appartient uniquementà l’univers dudiscours
«néorépublicain »ets’il estimpossible dans celui dudiscours
« pédagogiste ». Ce sontpourtantces questions que nous avons abordées
augré des différents chapitres de cetouvrage, mais nous sommes bien
conscientque prétendreyrépondre complètementetdéfinitivementnous
paraît unevéritable gageure, car, en dernière analyse, elles demandent
une réponse qui puisse conjuguer ensemble des logiques contradictoires,
notammentcelle de l’enseignementavec celle de l’apprentissage etcelle
de l’ordre des principes avec celui des commencements.
Envérité, l’objectif de ce livre consiste plutôtenunetentative
pour penserune catégorietombée peuà peuen désuétude, mais qui,
selon nous, n’en exerce pas moins encore, parune espèce de rémanence,
une influence sur nos préoccupations actuelles en matière d’éducation ou,
àtoutle moins, sur les discussions qui ontlieuactuellementà ce sujet.
Prolonger la réflexion à propos de la notion de savoir élémentaire ne
nous semble donc pasuntravail inutile. Mais cela suppose prendre
quelques précautions que nous pouvons résumer de la manière suivante :

1
La notion de savoir élémentaire à l’école. Doctrines et enjeux, L’Harmattan,2008.

8

1) dégager la notion d’élémentaire de sa relégation dans le domaine
historique (bien qu’il soitaudemeurant toutà faitéclairantde révéler les
conditions de son enracinementdans l’histoire) :nous considérons que
cette notion n’estpas àvisiter commeune banale curiosité ;2) la dégager
égalementde l’accaparementdontelle a fait(etfait toujours) l’objet
dans la rhétoriqunéo-répe «uoblicaine »u« conservatqrice »ui, malgré
son intérêt, a fini par en faireun slogan audétrimentde sa pertinence ;3)
tenter de réactualiser la réflexion à son propos, comptetenudes
évolutions de la pensée en matière d’éducation etde culture (philosophie
de l’éducation, didactique etpédagogie). Mais ce dernier pointpeut
paraîtreune entreprise risquée étant1°) le passif de la nodonné :tion
d’élémentaire (satrivialité etson apparente caducité) ;2°) sa
régionalisation épistémologique (la pensée analytique n’a plus le
monopole de la découverte) ;3°) son dépassementdidactique
(l’apprentissage n’estplus pensable à partir de la seule juxtaposition
linéaire etprogressive des éléments). Toutefois, comptetenudes
multiples enjeux(épistémologique, pédagogique, culturel, éthique et
politique) que la discussion sur l’élémentaire génère, en particulier celui
qui concerne le choixentreune conception aurabais, majoritairement
utilitaire, et une