Les pattes du chacal
162 pages
Français

Les pattes du chacal , livre ebook

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162 pages
Français

Description

Des pattes de chacal, une cuiller, un démon, des poupées, une fleur, un varan, des sandales... Autour d'une énigme, de légendes familiales ou tout simplement en contemplant les nuages, venez découvrir, après "Graines de chagrin" et "La sorcière dans la lune", de nouveaux contes d'une Afrique rêvée, entre tendresse et cruauté, joies et tristesses, humour et sagesse...

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Informations

Publié par
Date de parution 01 avril 2015
Nombre de lectures 14
EAN13 9782336373997
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0550€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Annie Ferret
Les pattes du chacal
et autres contes d’une Afrique rêvée
Les pattes du chacal
Et autres Contes d’une Afrique rêvée
La Légende Des Mondes Collection dirigée par Isabelle Cadoré, Denis Rolland, Joëlle et Marcelle Chassin Dernières parutions Thibaut C. D. MAKOU FACHINA,Le chasseur et les filles-oiseaux, Contes fon du Bénin, 2014. Boubacar DIALLO,Démon Taureau, Contes de Guinée-Conakry, 2014. Pierre GBOLO,To et le caméléon, Contes gbaya de Centrafrique, 2014. Ali Ekber BASARAN,Sagesses et Malices de Téméle, Histoires lâz d’Anatolie, (bilingue turc-français), 2014. Mamadi KABA,Farafina Todi, Contes de la République de Guinée,2014. Annie FERRET,La sorcière dans la lune et autres contes d'une Afrique rêvée,2014. Mohamed MANKOUR,Aïni la mésange, Contes kabyles, 2014. Gilles KERLORC’H,Trésors, diables et sortilèges des provinces de France, 2014. Shodiyor DONIYOROV,Le bûcheron et le lion, Contes ouzbeks, Trilingue français-ouzbek-russe, 2014. SAABU-France,? ContesPourquoi le crapaud chante la nuit songhaï du Burkina Faso,2012. Maïa VARSIMASHVILI-RAPHAEL,Le chat et le tigre. Contes de Géorgie, 2011. Jean-Claude RENOUX et Chu Thi Huyên Linh,Le roi et la poule rouge (bilingue français-vietnamien), 2011. Georges MAVOUBA-SOKATE,N’Dandu le vieux pêcheur et l’enfant du fleuve. Contes du royaume de Kongo, 2011. Oumar Abderrahmane DIALLO,Barowal le cheval sacré, 2011. France VERRIER,Le château entre ciel et terre. Contes populaires serbes, 2011. Anastasia ORTENZIO,Ourson et les Narecnizi, 2011. Yves Junior NGUANGUÉ,M’pessa et Jengu la déesse des eaux, 2011.
Annie Ferret Les pattes du chacal
Et autres Contes d’une Afrique rêvée
© L'HARMATTAN, 2015 5-7, rue de l'École-Polytechnique ; 75005 Parishttp://www.librairieharmattan.com diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr ISBN : 978-2-343-05755-2 EAN : 9782343057552
Ciprien dans les nuages
Ciprien était un homme qui était né sous une drôle d’étoile. Déjà tout petit, il ne voulait rien faire et il le savait depuis toujours. Il l’affirmait même sans cesse bien nettement et bien fortement : — Je ne veux rien faire, disait-il, rien de rien. En réalité, Ciprien était un contemplatif. Il était fait pour le rêve et la songerie. Enfant, écolier, puis tout jeune homme, les grandes personnes lui demandaient, comme elles aiment tellement le faire : — Que voudras-tu faire plus tard, Ciprien ? Que vas-tu devenir ? — Mais rien du tout, répondait Ciprien. Je ne deviendrai pas quelqu’un d’autre que ce que je suis aujourd’hui. — Rien ? Mais comment ça rien ? Tu feras bien quelque chose de ta vie ? — Mais non, rien ! Vraiment rien ! Parfois, le maître d’école, un parent ou un vieux insistait : — Tu dis ça parce que tu manques d’idées, c’est ça ? Tu ne sais pas encore ? — Mais non, pas du tout. Je sais parfaitement que je ne veux rien faire. — Mais enfin, Ciprien, il faut bien faire quelque chose. Il te faudra choisir un jour ou l’autre ce que tu vas faire de ta vie. Qu’aimes-tu faire ? — Mais rien, puisque je vous dis que je n’aime rien faire du tout. Je n’aime pas semer et récolter les champs, je n’aime pas couper le bois, je n’aime pas pêcher, je n’aime pas chasser ni nourrir les bêtes, je n’aime pas
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construire des palissades, je n’aime ni faire ceci ni faire cela. Ce que j’aime, moi, c’est regarder le ciel… C’était vrai, c’était à cela que Ciprien passait tout son temps… Regarder les gros nuages pousser les petits nuages, regarder les moyens nuages faire la course entre eux et les minuscules nuages s’amasser en denses flocons pour ne plus former qu’un seul gros nuage et se disperser de nouveau en mille petits points blancs… Et puis, après un moment, de nouveau ils s’assemblaient en un gros, de nouveau ils se divisaient en mille minuscules, et comme ça à l’infini… Il était impossible, vraiment impossible de tirer autre chose de Ciprien, qui ne voulait décidément rien faire et qui était heureux comme ça. Ses amis grandissaient et allaient à l’école. Ils apprenaient à lire, à compter, à devenir responsables, mais ils n’y voyaient pas souvent Ciprien. Toutes ses journées, alors, à quoi les passait Ciprien ? Il était difficile de croire qu’il ne s’ennuyât jamais un instant. Et pourtant, comme il le disait, comme il le répétait : il ne faisait rien. Il passait le temps à rêvasser, à flâner, à contempler la beauté du monde et le vent dans les arbres, à lever la tête au ciel pour y observer les nuages, les gros poussant les petits, les moyens faisant la course entre eux et les minuscules s’amoncelant pour en former un gigantesque et redevenir petits flocons. Et puis, après un moment, de nouveau ils redevenaient un seul gigantesque, et puis ils se séparaient encore en mille petits flocons, et comme cela toujours, à l’infini… Et la vie de Ciprien passait ainsi. À l’âge où les jeunes gens de sa génération apprenaient un métier, s’établissaient, commençaient à gagner leur vie comme ils pouvaient à la sueur de leurs efforts, Ciprien grandissait également et continuait à ne rien vouloir faire d’autre de sa vie, et rien ne semblait l’inquiéter. Les autres
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se faisaient du souci pour lui, mais c’était pourtant inutile. Tant qu’il avait les nuages au-dessus de sa tête, Ciprien semblait content. Maintenant, vous attendez probablement que je vous raconte comment Ciprien perdit ainsi sa vie et son temps sans le savoir et sans même s’en rendre compte. À ce rythme-là, en effet, on pouvait parier qu’il n’arriverait jamais à rien. Il n’aurait ni métier ni situation et mourrait bientôt de faim sans rémission possible, un jour ou l’autre. Et quand son père et sa mère seraient vieux, qui les aiderait, qui serait là pour eux ? Qui gagnerait l’argent pour leur pain ? De quel soutien pourrait leur être Ciprien et quel mauvais exemple il donnait au village ! On commençait à trouver que c’était un personnage bien détestable, même s’il avait paru sympathique jusque-là. Mais les choses ne se passèrent pas du tout de cette façon. Ciprien avait une chance insolente, parce que son champ, ou plutôt le champ de son père, continuait à donner une belle récolte, sans que personne n’y touchât plus depuis longtemps. Les bananiers de sa parcelle étaient toujours les plus chargés de tous et ni Ciprien ni ses parents ne manquaient jamais de l’essentiel. Sans doute que Ciprien allait quand même au champ, direz-vous, sinon comment cela serait-il possible ? Oui, il y allait, très souvent même. Il s’allongeait sur un lit de feuillage. Les yeux perdus dans le ciel, il regardait les gros nuages en pousser de plus petits, les moyens nuages faire la course entre eux, les minuscules nuages s’agiter et s’amonceler pour en former un énorme, puis, après un moment, ils se dispersaient en mille minuscules, puis de nouveau ils s’assemblaient en un énorme, puis de nouveau mille minuscules, puis de nouveau un énorme, et comme cela toujours, à l’infini…
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