Ma vie de Bolosse
49 pages
Français

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Description

Le collège se divise en classes.
1) Tout en haut, les populaires, qui dirigent leur petit monde.
2) Au milieu, les normaux, la grande masse des collégiens, des gens sympas qui ne la ramènent pas trop.
3) Et en bas, les bolosses, ou encore les invisibles, qu’on n’entend jamais et qui servent de souffre-douleur. Comme moi. Dans tous les collèges, c’est comme ça.
Chez nous, à Nicolas-Hulot, il y a 365 élèves. Sauf quelques populaires, les autres sont tous normaux, je suis à peu près le seul bolosse.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 06 décembre 2018
Nombre de lectures 18
EAN13 9782211301589
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0500€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Le livre
Le collège se divise en classes.
1) Tout en haut, les populaires, qui dirigent leur petitmonde.
2) Au milieu, les normaux, la grande masse descollégiens, des gens sympas qui ne la ramènent pas trop.
3) Et en bas, les bolosses, ou encore les invisibles,qu’on n’entend jamais et qui servent de souffre-douleur.Comme moi. Dans tous les collèges, c’est comme ça.
Chez nous, à Nicolas-Hulot, il y a 365 élèves. Saufquelques populaires, les autres sont tous normaux, jesuis à peu près le seul bolosse.
 
L’autrice
Dominique Souton aime situer ses livres au croisementde la comédie américaine et du Petit Nicolas . Elle aimel’efficacité scénaristique et le caractère décomplexé ducinéma de Greg Mottola ( Supergrave, Délire Express ), SethMacFarlane ( Ted ) ou des frères Farelly ( L’amour extralarge,Frangins malgré eux ) auxquels elle emprunte le genre dela bromance (romance entre frères). Du Petit Nicolas , elleretient le réalisme et le sens du collectif. Ses héros dela série des Meilleures amies ( Ma meilleure amie a unemeilleure amie… ), ou ceux de Ma vie de bolosse viventleurs aventures en groupe. Et même le groupe, c’estl’aventure.
 

Dominique Souton
 
 


 
 

Illustré par Gabriel Gay
 
 

l’école des loisirs
11, rue de Sèvres, Paris 6 e
Tout le monde le sait, mais je préfère le rappeler,le collège se divise en classes.
1) Tout en haut, les populaires, qui dirigent leur petitmonde.
2) Au milieu, les normaux, la grande masse des collégiens, des gens sympas qui ne la ramènent pas trop.
3) Et en bas, les bolosses, ou encore les invisibles,qu’on n’entend jamais et qui servent de souffre-douleur. Comme moi.
Dans tous les collèges, c’est comme ça. Chez nous,à Nicolas-Hulot, il y a 365 élèves. Sauf quelques populaires, les autres sont tous normaux, je suis à peu prèsle seul bolosse.
Pourquoi moi ?

Chaque bolosse a son histoire. Au CM2, j’ai étémalade : des crises d’asthme à répétition, qui m’obligeaient à rester à la maison. Mes parents ont engagéun étudiant en maths pour me garder. Comme onn’avait rien de spécial à faire, on a fait des maths. Quandje revenais à l’école, j’étais décalé. Je n’avais pas le bonvocabulaire, je ne portais pas les bons vêtements, je nem’intéressais pas aux choses qu’il fallait : j’ai loupé unesaison entière de chasse aux Pokémon. Une année asuffi pour faire de moi un bolosse. Voilà : blouson dejean doublé faux mouton, cheveux longs, épaules voûtées, quand je m’assois, je croise la jambe deux fois : surla cuisse, puis sous le mollet. Mes baskets me font degrands pieds, d’ailleurs j’ai de grands pieds. Quoi d’autre ? Je suis nul en anglais, je me débrouille en maths.Et puis je traîne le même sac à roulettes depuis le CM2.Les roulettes, parce que je suis vite fatigué, un rested’asthme ! À présent ça va mieux. Mais un gros effort,une montée d’angoisse ou de stress, et je dois vite allerrécupérer à l’infirmerie.
– Comment ça va aujourd’hui, Félix ? Dis donc, il estchouette ton T-shirt.
Mme Perdrix, l’infirmière, est la seule à ne pas meconsidérer comme un bolosse. Je crois même qu’elleme trouve cool, haha.

Pas la peine de chercher, je n’ai pas d’ami.
Le matin, quand j’arrive au collège et que je mets unpied dans le hall ou la cour, je suis entouré de garçonset de filles qui courent se retrouver, se sautent dessus,se tapent dans le dos, se serrent dans les bras, se passent la main dans les cheveux les uns des autres, quis’embrassent et qui rigolent, pressés de se raconter destrucs qu’ils ont oublié de se dire la veille.
– Salut, je tente en direction de Kevin Roset, un garçon de la classe qui porte un sweat Gizmo (le plus gentildes Gremlins).
– Bonjour, je dis à Hugo Rohmer, un autre garçonde la classe, mains dans mes poches fourrées.
– Hallo, je lâche à Bilal Assaoui, en rejetant mes cheveux derrière les épaules.
– Hé, je lance au dernier, Justin Berthelot.
Rien.
Ils continuent de parler entre eux, comme s’ilsn’avaient pas entendu. Kevin Roset, Hugo Rohmer, BilalAssaoui et Justin Berthelot sont toujours ensemble etforment une bande. J’aimerais faire partie d’une bande.Si je faisais partie d’une bande, je serais normal. SeulKevin Roset (Gizmo) se retourne. Quand il voit que c’estmoi, il revient à ce qui l’occupait.

– Alors, mon chéri, comment ça s’est passé aujourd’hui ? s’informe maman quand elle rentre du travail.
Je préfère Félix, mais ma mère persiste à m’appeler mon chéri .
– Est-ce que tu sais que…
Et plutôt que de raconter ma journée de bolosse,je lui parle dinosaures, une passion qui date du CM2,l’année où je suis devenu bolosse, justement.
– Est-ce que tu sais que la disparition des dinosaures est due à la conjonction de trois événementsquasi simultanés ?
– Comment ça ? s’intéresse maman.
– La chute d’un astéroïde de dix kilomètres de diamètre, les éruptions d’un super volcan et des mouvements marins qui ont plongé la Terre dans l’obscuritéet le froid.
– Quelle horreur ! dit maman en mettant un goûtersur la table.
Calories = énergie.
– Comment ça s’est passé aujourd’hui, mon grand ?demande papa quand on se retrouve au dîner.
Mon grand non plus, ça n’aide pas.
– Figure-toi que trois paléontologues ont publiéune étude selon laquelle les dinosaures auraient en réalité commencé de disparaître quarante millions d’années avant leur extinction, une disparition progressiveprovoquée par la séparation des continents et une forteactivité volcanique.
Je l’ai dit, les dinosaures, un truc de bolosse.

Aujourd’hui est un autre jour et, comme les précédents, je passe le portail, je traverse le hall. Arrivé dansla cour, je tombe sur Kevin Roset. Et puis ses potes,Hugo Rohmer, Bilal Assaoui et Justin Berthelot. Facile,ils ne se quittent pas.
– Bonjour, je lance à la volée.
Comme j’ai l’habitude de le faire, une main dans lapoche, l’autre sur la poignée de mon sac à roulettes,sans attendre grand-chose en retour.
– Ah, bonjour Félix, me répond quelqu’un.
Quelqu’un m’a dit bonjour ? Je sors la tête de mesépaules : Kevin Roset m’a dit bonjour ? Trop content.Demain, je recommence.

Aujourd’hui, je fais comme hier.
L’air de rien (facile pour un bolosse), je rejoins KevinRoset et ses potes Hugo Rohmer, Bilal Assaoui et JustinBerthelot qui bourrent leurs affaires dans les casiers. Jem’apprête à saluer à la ronde quand Kevin Roset sort latête d’un placard métallique :
– Salut Tomassin.
Tomassin, c’est moi.
J’ai un copain !
Mon premier copain (en y réfléchissant, j’arrive à mesouvenir d’une fille qui prenait ma défense en CM2,mais c’est tout). Je balance un « Salut, les gars ! » général, mains fourrées dans mes poches fourrées, décontracté. Rien ne bouge du côté de Hugo Rohmer, BilalAssaoui et Justin Berthelot. Je ne suis pas le copain descopains de mon copain. Tant pis, j’ai un…
J’AI UN COPAIN. J’AI UN COPAIN. J’AI UN COPAIN. J’AI UN COPAIN.
– Génial, gémit maman, quand je lui raconte.
Et elle me donne cinq euros pour que j’achète desbonbons à mon nouvel ami. Une vraie bolosse.

– Tu veux des bonbecs ? j’arrive à peu près à articuler en retrouvant Kevin Roset, avec sa bande, dans lehall du collège.
Justin Berthelot, Hugo Rohmer, Bilal Assaoui etKevin Roset, tous m’attendent à la sortie. Apparemment, tout le monde aime les bonbons. Direction le bar-tabac de la place de l’église, le plus grand choix de laville : un mur entier de sucreries en vrac. Une pince attend au bout d’une ficelle sous une affiche : « Par mesure d’hygiène, utilisez-moi pour vous servir. » KevinRoset attrape la pince, fait son choix, saisit sa proie, lalaisse tomber dans le bol de plastique, passe l’instrument à son voisin. À la caisse, la dame prend nos bonbons avec les doigts – tant pis pour l’hygiène – et lesfourre un à un dans un sac en papier, en comptant :
– Soixante-dix centimes, un euro cinquante, deuxeuros trente…
Je donne les cinq euros, je ramasse le sac, et onse retrouve dehors pour se répartir le butin, au piedde l’église. Puis on remonte tranquillement la grand-rue en comparant nos bonbecs : un œil pour Kevin Roset,des dents de vampire pour Hugo Rohmer, une tarentulegéante pour Bilal Assaoui et une pizza merguez pourJustin Berthelot. J’ai pris un œil pour faire comme moncopain. Un œil gros comme un œuf, tout blanc, avecdes veines rouges et un iris vert. Arrivés au bout de lagrand-rue, on croise un groupe. Des filles. Non, desmeufs. Chez les normaux, on ne dit pas fille mais meuf .Mon nouveau copain et les copains de mon copainbaissent la tête.
– Regardez pas ! dit Hugo Rohmer.
On continue de causer, en fixant nos pieds. Uneconversation d’ordre général : apparemment, je suis leseul à aimer ce qui est mou, sucré, ou tendre, je suis leseul par exemple à manger des boules coco guimauve,les autres préfèrent les bâtons acides cola et les fraisescitriques. Ben oui, je suis un bolosse.
– Salut, lance une des filles, non des meufs ,depuis le trottoir d’en face.
On continue de regarder nos pieds et de discuter.L’un d’entre nous a vu une affiche, apparemment il fautmanger cinq bonbons par jour. Bizarre. Quelqu’un rectifie : ce n’est pas cinq, mais dix bonbons par jour. Exact,cette fois, on s’en souvient.
– Hé, Kev ! hurle une des filles en s’adressant à monnouvel ami. Tu me passes un bec ?
– Gonflée, la meuf, fait remarquer tout bas HugoRohmer.
Tout le monde est de son avis.
– ALLEZ ! insiste-t-elle. KEVIIIN !
– Elle est lourde, là, dit Bilal Assaoui.
Mais Kevin, tout raide, tout rouge, traverse la rue pourse planter devant elle, et, sans un mot, comme s’il n’étaitplus lui-même, tend sa paume à la fille, non, la meuf. Lepauvre semble manquer d’air, il est tout congestionné.Au milieu de sa paume, la grosse boule blanche.
– Merci, mon Kevin, piaille la fille, en lui arrachantson œil.
Mon Kevin !
Les copains de mon copain regardent la scène avecdes têtes d’émoticônes gênées. La fille gobe l’œil deKevin d’un coup d’un seul, ça lui fait une joue énorme.Elle rigole, bouche pleine, ses copi

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