Maïté Coiffure
84 pages
Français

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Description

Louis Feyrières doit faire un stage d'une semaine, comme tous les élèves de troisième. Où ? Il n'en sait rien. Ce qui est sûr, c'est qu'il n'aime pas l'école et qu'il ne se sent bon à rien. « J'ai ma coiffeuse qui prend des apprentis, dit Bonne-Maman, lors d'un repas de famille. Stagiaire, c'est presque pareil. » Coiffeur ? C'est pour les ratés, les analphabètes, décrète M. Feyrières qui, lui, est chirurgien. Louis se tait. Souvent. Mais il observe. Tout le temps. Comme il n'a rien trouvé d'autre, il entre comme stagiaire chez Maïté Coiffure. Et le voilà qui se découvre ponctuel, travailleur, entreprenant, doué ! L'atmosphère de fièvre joyeuse, les conversations avec les clientes, les odeurs des laques et des colorants, le carillon de la porte, les petits soucis et les grands drames de Mme Maïté, Fifi, Clara et Garance, tout l'attire au salon. Il s'y sent bien, chez lui. Dès le deuxième jour, Louis sait qu'il aura envie de rester plus d'une semaine chez Maïté Coiffure. Même si son père s'y oppose.

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Informations

Publié par
Date de parution 29 juillet 2014
Nombre de lectures 9
EAN13 9782211218641
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0300€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Le livre
Louis Feyrières doit faire un stage d’une semaine, commetous les élèves de troisième. Où ? Il n’en sait rien. Ce qui estsûr, c’est qu’il n’aime pas l’école et qu’il ne se sent bon àrien. « J’ai ma coiffeuse qui prend des apprentis, dit Bonne-Maman, lors d’un repas de famille. Stagiaire, c’est presquepareil. » Coiffeur ? C’est pour les ratés, les analphabètes,décrète M. Feyrières qui, lui, est chirurgien. Louis se tait.Souvent. Mais il observe. Tout le temps. Comme il n’arien trouvé d’autre, il entre comme stagiaire chez MaïtéCoiffure. Et le voilà qui se découvre ponctuel, travailleur,entreprenant, doué ! L’atmosphère de fièvre joyeuse, lesconversations avec les clientes, les odeurs des laques et descolorants, le carillon de la porte, les petits soucis et les grandsdrames de Mme Maïté, Fifi, Clara et Garance, tout l’attireau salon. Il s’y sent bien, chez lui. Dès le deuxième jour,Louis sait qu’il aura envie de rester plus d’une semaine chezMaïté Coiffure. Même si son père s’y oppose.
 
Ce livre a reçu les prix suivants : le prix littéraire des ados dela ville d’Angers édition 2004-2005, le prix des Dévoreursde livres 2004-2005 du département de l’Eure, le prix 2005niveau 5 e de la ville de Cherbourg-Octeville, le 2 e prix descollégiens de la ville de Vannes, le prix Tatoulu 2005, le prixdes Collégiens de l’Estuaire 2004-2005 (4 e -3 e ), le prix 2005des collégiens de 4 e du Territoire de Belfort, et enfin, le 2 e prixdes lecteurs de Sablé-sur-Sarthe 2005.
 

L’auteure
Marie-Aude Murail dit avoir écrit Maïté coiffure en pensantà ces adolescents qui font des choix différents, des choixqui ne correspondent pas aux ambitions de leurs parents, aux attentes des enseignants, des choix moins valorisésque d’autres… Une façon d’illustrer qu’il y a mille façonsde réussir dans la vie. Mais elle dit aussi avoir écrit Maïtécoiffure pour une autre raison : celle d’aimer montrer toutce qu’il y a des chaleureux, de tendre, de romanesque dansla vie de tous les jours, dans les endroits les plus familiers,tel un salon de coiffure !
 
Pour aller plus loin avec ce livre.
 

Marie-Aude Murail
 
 

Maïté Coiffure
 
 

Médium poche
l’école des loisirs
11, rue de Sèvres, Paris 6 e
 

À toutes celles qui ont fait de moi
une coupe courte avec des mèches claires
sur une base plus foncée.
 
C’est une banale song,
mais pour moi super-song.
Alain Souchon
1
Le stage
 
– Un stage ! s’exclama monsieur Feyrières. Mais qu’est-ce que c’est encore que ces inventions ? Les gamins nesavent pas aligner trois phrases de français et il faut qu’ilsfassent des stages. Un stage de quoi, d’abord ?
Il s’adressait à son fils à l’autre bout de la table.
– Mais j’en sais rien, grommela Louis. C’est à nousde trouver, qu’elle a dit, la prof.
– « Qu’elle a dit, la prof », le singea son père. Unstage de balayeur, voilà ce que tu trouveras. Non, pasbalayeur, il faut dire « technicien de surface », maintenant.
Monsieur Feyrières ricana. Lui, il était chirurgien.Bel homme, la voix forte, il meublait à lui seul toutela salle à manger. Pourtant, il y avait quatre autres personnes à table : Floriane, sept ans, Louis, quatorze ans,madame Feyrières et Bonne-Maman.
– Si c’est qu’une affaire d’une semaine, dit cette dernière, je pourrais peut-être lui dégoter quelque chose.
Monsieur Feyrières adressa à sa belle-mère une grimace qui se voulait un sourire d’encouragement.
– J’ai ma coiffeuse qui prend des apprenties, poursuivit Bonne-Maman. Un stagiaire, c’est pas très différent.
Monsieur Feyrières écarquilla les yeux.
– Un stage de coiffure ? Pour Louis ?
– Ouah, trop de chance, murmura Floriane. Moi,je veux faire coiffeuse quand je serai grande.
Madame Feyrières eut un regard indulgent pour sapetite dernière, qui passait ses mercredis à faire descoiffures à sa Barbie Raiponce. Puis elle se tourna verssa mère.
– Tu sais, maman, je ne vois pas trop ce que Louisferait dans un salon de coiffure.
– Y a pas de sot métier, répliqua Bonne-Mamanqui avait commencé dans la boulange à seize ans.
– Ça serait superbe, ricana monsieur Feyrières enfaisant semblant d’admirer une enseigne sur le muropposé : « LOUIS, coiffeur pour dames ».
Mais comme personne n’avait d’autre idée de stage,Bonne-Maman promit d’en parler à Maïté, la patronnedu salon.
– Ça ne t’ennuie pas ? s’inquiéta madame Feyrières.
– M’est égal, grogna Louis.
 
Une fois dans la chambre à coucher, madame Feyrières redouta un accès d’humeur de son mari. Il allaitsûrement se plaindre des idées loufoques de Bonne-Maman.
– Dans le fond, dit-il en desserrant sa cravate, cen’est pas une mauvaise chose, ce stage. Louis vaapprendre ce qu’est le travail, balayer, ranger, rester desheures debout. Je ne te reproche rien, Véra, mais tul’élèves dans un cocon, ce gosse. Il est temps qu’ildécouvre le principe de réalité !
Monsieur Feyrières parlait fort, avec de grandsgestes, comme s’il était entouré de ses étudiants.
– Le travail manuel a ses vertus, approuva sa femmed’une petite voix.
Monsieur Feyrières lui jeta un regard de pitié :
– Oui, la vertu de vous faire comprendre que vousavez intérêt à poursuivre vos études.
Dans sa chambre, Louis pensait précisément à sesétudes. Il ramait en maths, ne comprenait pas ce quelui voulait la prof de français, s’endormait en allemand.De temps en temps, il avait un sursaut, un peu paramour-propre, un peu parce qu’il avait peur de sonpère. Il triait les devoirs et les photocopies qui tapissaient le fond de son sac à dos. Puis il s’enfonçait denouveau dans un marécage de rêves et d’idéesconfuses.
 
Le jour peinait à se lever lorsque Louis partit pourle collège, le lendemain. Il eut envie de faire un crochet par le quartier piétonnier. Maïté Coiffure se trouvait rue de la Cerche, en face d’une briocherie. Enpassant devant la vitrine, Louis ralentit le pas. 9h-20h,c’était l’horaire affiché à l’entrée, mais un néon blêmeclignotait déjà à l’intérieur. Une femme en pantouflespassait une serpillière sur le carrelage. Elle se redressa,une main sur les reins, et regarda vers la rue. Louis vitqu’elle l’avait vu. Il rougit et détala. Cette femmeaccablée par la fatigue le poursuivit toute la matinée.Était-ce elle, Maïté Coiffure  ?
– J’ai trouvé un stage à Radio Vibrations, se vantaLudovic à la cantine. Le présentateur est super-cool, tu peux voir les vedettes et tout. La semaine dernière, ilsont reçu les L5 dans leur studio.
Ludovic Janson avait un père anesthésiste, qui travaillait souvent avec monsieur Feyrières. Celui-ci avaitdonc décidé que Louis et Ludovic étaient amis et queFloriane et Mélissa, les deux petites sœurs, s’adoraient.Par une heureuse coïncidence, Ludovic et Louis (deuxprénoms si proches !) étaient réunis dans la même troisième, cette année.
– T’as trouvé quoi comme stage, toi ?
Louis regarda son camarade en faisant craquer sesdoigts. Il ne comprenait toujours pas pourquoi Ludovic s’asseyait à côté de lui en classe, en face de lui à lacantine. Par moments, il avait envie de lui dire : « Aufait, tu sais quoi ? J’en ai rien à foutre de toi. »
– Rien à foutre, grogna Louis.
Et il tira de ses phalanges un craquement sonore.
– Oui, mais qu’est-ce que tu vas dire à la prof defrançais ?
Ludovic était un bon élève un peu stressé.
– Je vais faire un stage dans un salon de coiffure,dit Louis pour voir l’effet produit.
– Tu te fous de moi ?
Louis pensa « oui » et répondit :
– Non.
– T’as pas peur ? Les coiffeurs, c’est tous desMichoubidou…
Ludovic fit une mimique efféminée tout en tourniquant le poignet.
– Très ressemblant, le complimenta Louis. Maisc’est des coiffeuses chez Maïté Coiffure .
Il revit en pensée la femme qui passait la serpillière.
– Il y en a une, une blonde, quand elle se penchepour les shampooings, tu vois tout.
Ludovic en eut le sifflet coupé pour le restant de lajournée.
 
Quand Louis sortit du bahut, à dix-huit heures, lejour se recouchait déjà dans un bon petit édredon debrumes. De loin en loin, trouant la pénombre, lesvitrines des magasins brillaient d’une façon surnaturelle. Louis se sentit attiré de nouveau par Maïté Coiffure . Il eut un temps d’arrêt sur le trottoir. Ce n’étaitplus le même endroit. Le salon baignait dans unelumière dorée que diffusaient des vasques en forme decoquillage. À la caisse, au milieu des flacons de shampooing, d’après-shampooing, d’avant-shampooing,trônait l’authentique madame Maïté, une dame unpeu forte, maquillée comme une voiture volée. Elleparlait à une cliente en lui posant une main grassouillette sur le poignet. Elles semblaient amies depuisdes années. La cliente s’éloigna, suivie du tendre sourire de la patronne, qui se tourna ensuite vers uneautre dame en train de sortir son chéquier. Louis comprit que madame Maïté allait l’aimer autant que laprécédente, et il plongea le regard dans les entrailles dusalon.
Il y avait trois femmes en batterie sous des casquesà cheveux, feuilletant la presse people pour savoir siMichaël Jackson a vraiment voulu jeter son bébé par lafenêtre, combien a coûté la villa de George Clooney(sept millions d’euros) et le nom de la maladie mysté rieuse qui a frappé le Prince Rainier (une bronchite,on est bien rassurée).
Un petit jeune homme en chemise blanche, le coltrès ouvert, virevoltait autour d’une vieille dame, uncoup de peigne là, un psschit de laque ici, la glace, laglace, s’il vous plaît ! Il appelait une gamine en blouseblanche qui accourut avec un miroir tout rond pourque la cliente puisse admirer son chignon sous tous lesangles.
Le salon de coiffure avait une mezzanine. Tandisqu’il se tordait le cou pour voir l’étage supérieur,Louis crut que la blonde inventée pour l’usage exclusif de Ludovic venait de s’incarner. Elle descendaitl’escalier, juchée sur des talons aiguilles comme onn’en voit qu’assez tard sur les chaînes cryptées. Untee-shirt blanc barré d’un Maïté Coiffure lui moulait lebuste, et ses seins magnifiques lui ouvraient la routecomme la figure de proue d’un bateau. Louis eutenvie d’y enfouir la tête et il a

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