La plus grande peur de ma vie
49 pages
Français

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La plus grande peur de ma vie , livre ebook

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Description

Personne ne s’imagine mourir d’un coup, forcément. Personne ne sait ce que contient le sac de Norbert. Sauf nous trois, Lalie, Jordan et moi, David. Et Norbert bien sûr puisqu’il a osé la prendre et l’emporter en classe avec lui, cachée dans son sac.Il est complètement malade. Il peut nous tuer d’une seconde à l’autre.
Quatre amis découvrent une grenade dans un vieux manoir datant de la Deuxième Guerre mondiale. Que faire avec cette grenade ? La laisser là ou l’amener au collège quand on est soi-même sur le point d’exploser ?

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 28 février 2017
Nombre de lectures 29
EAN13 9782211232562
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0500€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Le livre
Personne ne s’imagine mourir d’un coup, forcément. Personne nesait ce que contient le sac de Norbert. Sauf nous trois, Lalie,Jordan et moi, David. Et Norbert bien sûr puisqu’il a osé la prendre et l’ emporter en classe avec lui, cachée dans son sac. Il est complètement malade. Il peut nous tuer d’une seconde à l’autre.
 
Quatre amis découvrent une grenade dans un vieuxmanoir datant de la Deuxième Guerre mondiale. Quefaire avec cette grenade ? La laisser là ou l’amener aucollège quand on est soi-même sur le point d’exploser ?
 
L’auteur
Enfant, Éric Pessan a joué à la guerre avant de comprendreque ce n’était pas un jeu, qu’une arme est un outil fabriqué pour tuer, blesser, détruire et briser des vies. C’est ceque nous raconte ce livre.
Adolescent, il aimait beaucoup lire. C’est alors qu’il acommencé, tout naturellement, à écrire ses propres histoires. Un jour, bien plus tard, un éditeur s’est intéressé àses textes. De la même façon qu’il était un lecteur curieux,il est devenu un écrivain curieux : la trentaine d’ouvragesqu’il a publiés mêle plusieurs genres, romans pour adulteset romans pour la jeunesse, nouvelles, pièces de théâtre,poésies, textes écrits en compagnie d’artistes ou de photographes, recueils de croquis.
 

Éric Pessan
 
 

La plus grande
peur de ma vie
 
 

Médium
l’école des loisirs
11, rue de Sèvres, Paris 6 e
 

Pour Zoé, Louna, Mélio
 
Le jour de la grenade
 
Quand un adulte approche un collégien, il veut toujourssavoir les mêmes choses, c’est comme un interrogatoirede police, avec le sourire en plus. Les questions concernent l’état civil, la classe, l’avenir et les loisirs. Alors, allons-y : je m’appelle David, je suis en cinquième, je n’ai aucuneidée de ce que je veux faire plus tard, je ne sais rien faired’extraordinaire (je veux dire, je n’ai pas d’activités précises : je ne joue pas au piano, je ne suis pas champion deskate ou de judo, je ne pratique pas de sport dans un club,je ne suis inscrit dans aucune association). Un enquêteurqui fouillerait mon sac découvrirait trois cartes : celle dela piscine, celle de la bibliothèque et celle du collège, biensûr. C’est tout ce qu’il y a à dire de moi, je peux simplement ajouter que j’ai trois amis, des grands amis : Jordan,Norbert et Lalie. Lalie, c’est plus qu’une amie, c’est aussiune fille, mais c’est une autre histoire.
Voilà, le résumé est vite fait. Il y a bien une chose quej’aime faire même si je n’en parle pas vraiment. C’est unechose que je ne peux faire que seul et enfermé dans machambre : j’aime écrire. Ce n’est pas comme être le meilleur buteur de l’équipe de foot du quartier ou le chanteur d’un groupe de rock, ce n’est pas un truc très valorisant,pas un truc que l’on note sur la fiche de renseignementsdu collège, en début d’année, à la rubrique « loisirs ethobbies ». J’ai une collection de cahiers remplis de morceaux d’histoires, de débuts, d’idées, de scénarios. J’écris àla main parce que mes parents me trouvent trop jeunepour avoir un ordinateur. Je m’en fiche. D’ailleurs, sij’avais un ordinateur, j’y ferais tout sauf écrire, je croisbien.
 
Quand on écrit une histoire, l’important, c’est ledébut, la première phrase qui accroche le lecteur, se plantedans son œil et son imagination.
Du genre :
Ce matin-là, j’ai pensé que nous allions tous mourir.
Ou :
C’est sûr, je me suis dit, dans une minute mon corps seradéchiqueté en mille morceaux sanguinolents.
Ou bien encore :
Au sourire de Norbert, j’ai compris qu’un drame terrible sepréparait.
 
Sauf que j’ai du mal à dramatiser cette histoire, à ajouter des effets, des rebondissements, du suspense. Parce quecette histoire est vraie, que Jordan, Norbert et Lalie sontvraiment mes meilleurs amis, et que je veux écrire ausujet d’une chose terrible qui nous est arrivée, une choseque je ne parviens pas à oublier.
C’est l’histoire de la plus grande peur de ma vie.
Voilà, c’est en écrivant que je finis par trouver les motsjustes. J’aurais dû commencer par là.
 
C’est l’histoire de la plus grande peur de ma vie.
 
Comme souvent, Lalie comprend en premier, c’est ellequi a deviné. Je ne sais pas comment elle fait, il lui suffitd’un regard et elle sent qu’il se passe une chose anormale,une chose terrible. Une chose qui n’aurait jamais dû seproduire.
C’est le matin, une banale matinée de novembre, onentre en classe, on a deux heures de français et dehors leciel est chargé de lourds nuages. Gris et bas, gorgés depluie, prêts à se déchirer. Nous avons cours dans le bâtiment B en face du terrain de sport, celui qui n’a pas depréau ou d’auvent. Chaque fois qu’il risque de pleuvoir,on se bouscule un peu, on veut se mettre à l’abri avant ledébut de l’averse.
J’ai entendu des rumeurs sur les gens qui possèdent unsixième sens, ou sur les filles qui auraient une intuitionparticulière dont seraient dépourvus les garçons. Ma mèreen parle souvent à mon père et à moi. Elle dit que lesfemmes sont plus subtiles, qu’elles sentent des choses queles hommes ignorent. Je ne sais pas si elle est sérieuse ousi elle se moque de nous. Sans doute un peu des deux.Moi, je crois que ceux qui remarquent une chose avant les autres font tout simplement preuve d’intelligence. Elleest douée, Lalie, elle m’a surpris à plusieurs reprises, ellesemble toujours savoir ce que j’ai dans la tête.
 
Au moment d’entrer en classe, je croise le regard deLalie et je comprends aussitôt que quelque chose ne vapas.
Mais
vraiment
pas.
Figée comme une statue, Lalie ouvre grand les yeux,je la vois se secouer, hésiter à se diriger vers sa place. Ondirait qu’elle est malade, ou qu’elle se réveille d’un mauvais rêve. Je m’arrête à mon tour pour mieux l’observer.Ses lèvres tremblent. Et brusquement j’ai du mal à respirer, l’air s’est épaissi. Il y a une chose désagréable etinvisible en suspension. Une menace sans rapport avec lapluie qui arrive ni avec une possible interrogation surprise. Une menace qui n’entretient aucun rapport avecnos vies ordinaires. Une chose violente, noire et mauvaisequi est là, cachée quelque part, comme un prédateur tapidans les hautes herbes de la savane qui attend la venued’une proie.
Je sens un frisson courir sur mes jambes et mes bras.Pourtant, je ne suis pas plus trouillard qu’un autre, je n’aijamais peur sans raison. De nouveau, Lalie ne bouge plus,ses yeux ne quittent pas le fond de la classe.
Plusieurs choses alors se produisent simultanément :
Oh, non, je pense,
et je tourne lentement la tête,
et je vois Jordan près de la fenêtre, figé lui aussi,
et je comprends,
je vois qu’il observe le même point que Lalie,
je sais,
Norbert,
là,
tout au fond de la classe,
Norbert, que Lalie et Jordan fixent avec insistance
et effroi,
alors, je n’ai d’autre choix que de regarder Norbert àmon tour.
Rouge vif, il sourit comme jamais je ne l’ai vu sourire.Ses mains tremblent d’excitation et de joie mêlées, il trépigne littéralement et j’ai le temps de penser que la journée va se transformer en catastrophe.
Isolés au milieu du bruit et de la cohue, nous sommestrois : Lalie, Jordan et moi, nous formons une lignepresque parfaite, la diagonale du rectangle de la salle decours, immobiles, occupés à braquer nos six yeux surNorbert qui vibre de plaisir. Nous sommes trois à avoirdeviné.
Un rayon de soleil troue les nuages à cet instant etvient dessiner un arc-en-ciel à travers l’une des vitres dela classe. Je ne sais pas pourquoi je remarque ce détail. Iln’a aucune importance. La beauté de la lumière n’empêchera pas le drame.
Pendant que les autres élèves s’installent, Norbertretire son sac de ses épaules pour le poser à côté de satable. Sous nos yeux horrifiés, il s’empêtre dans une sangle, le sac tombe et heurte le carrelage en produisant ungrand tintement métallique.
Instinctivement, je rentre la tête dans mes épaules, jeserre les dents. Je vois Lalie qui se tasse, Jordan qui sebaisse. Je sais qu’il est croyant, je me demande s’il a eu letemps de recommander son âme à Dieu.
Mais rien ne se produit et le choc passe inaperçu dansle brouhaha habituel d’un début de cours. Les autresélèves s’assoient, parlent, rient, des vestes glissent sur lesdossiers des chaises, des pieds frottent le sol, des mainsempoignent des classeurs et des trousses, quelqu’un tousse,une fille éternue. Il ne s’est pas écoulé plus de trentesecondes depuis que la porte de la classe s’est ouverte.Mon père a une histoire pour parler de la relativité dutemps. Mon père a des histoires pour tout. Il dit que cinqminutes assis sur un poêle brûlant paraissent plus longuesqu’une heure en compagnie d’une belle femme. Je comprends brusquement ce qu’il veut dire : la matinée vadurer une éternité.
Personne ne s’imagine mourir d’un coup, forcément.Personne ne sait ce que contient le sac de Norbert.
Sauf nous trois,
Lalie,
Jordan
et moi, David.
Et Norbert bien sûr puisqu’il a osé la prendre et l ’emporter en classe avec lui, cachée dans son sac. Il est complètement malade.
Il peut nous tuer d’une seconde à l’autre.
 
Ce que Mme Kaplan nous raconte deux heures durant, jen’en garde aucun souvenir, sauf l’instant où elle prononcele mot explosion . Je relève trop tard la tête. Je ne sais pas àquoi elle fait allusion, je n’écoute rien. Le sac de Norbertoccupe tout mon esprit. Mille fois, j’ai envie de lever ledoigt et de le dénoncer, mille fois je ravale mes mots. Sije trahis Norbert, il aura de gros problèmes. Et sans douteses parents aussi. Et sans doute Jordan et moi aussi. Et sansdoute Lalie également. Et je ne veux pas que Lalie soitmêlée à ça. Alors je me tais, je laisse passer la premièreheure, puis la seconde. Le cours de Mme Kaplan s’étire,chaque seconde devient une minute, chaque minute uneheure, elle n’en finit plus de parler, de dicter et je n’enfinis plus de faire semblant d’écrire dans mon classeur. Desa bouche dégringolent des sonorités étouffées qui ne ressemblent pas à des phrases. Ce qu’elle raconte ce matinn’a aucun sens.
Et dehors le ciel a ouvert les vannes en grand : c’est le

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