Moi, Salikéra...
45 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

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Description

Salikéra habite avec sa maman dans le sud de la France, un petit village des Albères, sur le bord de la Méditerranée. Ses cheveux très bouclés, son teint mat, son sourire aux dents blanches ne peuvent néanmoins chacher une "différence" que certains enfants à l'école lui renverront cruellement. Qui est son père ? Sa maman diffère toujours le moment de l'aveu, mais un concours de circonstances provoqué par l'enfant va obliger sa mère à révéler enfin ce secret.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 février 2019
Nombre de lectures 0
EAN13 9782336862965
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0500€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
4e de couverture
Titre
Elizabeth Fromenteau-Pucheu





Moi, Salikéra…

Un jour je ferai un grand voyage
Copyright

Du même auteur


Moi, Sachem… Blanc de parents noirs, Hachette Calédonie, Editions du Cagou, 2010

Moi, Shéreissa… ou le retour en tribu , Hachette Calédonie, Editions du Cagou, 2012













Illustration de couverture : Jean-Jacques MAHUTEAU



© L’H ARMATTAN , 2019
5-7, rue de l’École-Polytechnique, 75005 Paris
http://www.editions-harmattan.fr
EAN Epub : 978-2-336-86296-5
Métissage
Depuis nos premiers ancêtres hominoïdes du grand rift africain, depuis des milliers d’années, les hommes marchent, depuis des milliers d’années, les hommes migrent, se séparent, s’éloignent, se différencient au cours de leurs longues sédentarisations et subissent les changements climatiques. Leur morphologie et la couleur de leur peau s’adaptent. Quand ils se retrouvent, parfois ils s’aiment et se métissent…

Elizabeth FROMENTEAU-PUCHEU
Chapitre 1
Moi, Salikéra, un jour, je ferai un grand voyage ! Loin, très loin, au-delà des océans… Je le sais, je le sens…
J’habite pour le moment, dans le sud de la France, avec ma maman Géraldine. Je viens de rentrer en sixième. De quitter la petite école de mon village. Je prends le bus tous les jours. J’adore les bus, les autoroutes, les trains. J’aime monter à la Jonquère, tout près de chez moi, première petite ville espagnole frontalière avec le département des Pyrénées Orientales, là où s’arrêtent tous les jours des milliers de camions sur d’immenses parkings.
J’aime leurs plaques d’immatriculation de toute l’Europe. Oui, j’habite en Catalogne nord mais je me sens de partout. Je ne sais pas comment expliquer … Je voyagerai plus tard, je voudrais en faire mon métier.
J’habite un village au pied de la montagne à quelques kilomètres de la mer, dans les Albères françaises, le bout de la chaîne des Pyrénées qui se jettent dans la Méditerranée. Le rêve ! Oui, enfin, presque ! Le rêve si j’avais un papa ! Bien sûr que j’en ai un, je ne suis pas née dans une rose ! Quoique ! J’adore les jardins potagers des pépés de mon village, ceux dont les rangs de légumes sont bordés par des rosiers. Quand je vois que personne ne pourra me surprendre, je pénètre discrètement dans celui du père Mattei, juste pour aller sentir ses fleurs. Tiens ! Peut-être qu’un jour je vais y trouver une petite sœur ou un petit frère ? Je rigole ! Je crois qu’il n’y a pas de risque que je sorte de ma solitude d’enfant …
Voilà, oui, j’ai la peau très bronzée, toute l’année, « caramel or », dit maman. J’ai des yeux verts, « exceptionnels », me dit-on toujours. Maman, de taille moyenne, a le teint clair, des cheveux bruns bouclés milongs, des yeux bleus qui foncent quand elle est heureuse ou en colère. Et mon père ? Mon grand absent mystérieux doit être un peu noir, mais pas trop, j’imagine… J’ai les cheveux milongs très frisés, juste avant le stade crépus, le nez plutôt fin, pas long. Bon, c’est vrai qu’en Catalogne française où j’habite, je pourrais être originaire du sud de l’Espagne ou d’Afrique du nord, comme beaucoup de jeunes ici. Et en plus avec mon prénom qui sonne arabe…
C’est en maternelle que j’ai vraiment compris que je n’étais pas une « vraie blanche ». A la maison, je ne le savais pas.
Un jour, un garçon m’a traitée de « café au lait ». Quand j’ai demandé à maman pourquoi il m’avait lancé ce qu’il avait voulu être blessant, elle m’a juste répondu que c’était parce que ma peau était très bronzée. Comme j’étais trop jeune, je n’ai pas deviné que c’était sûrement à cause de mon papa que je n’avais encore jamais vu.
Maman me coiffe souvent avec plein de fines tresses qui se terminent par des perles sinon mes cheveux, difficiles à démêler, me feraient vite une énorme tête de loup.
Ma maman Géraldine travaille à la pharmacie du village d’à côté. Elle prépare des poudres de perlimpinpin, des crèmes magiques à base d’huile d’olive pour les fesses des bébés. Le problème, c’est qu’elle rentre tard le soir.
Depuis que je suis petite, je sais me débrouiller toute seule. Le matin, nous prenons quand même le petit déjeuner ensemble, les jours où je pars à l’école. Le mercredi et le samedi, je reste dormir plus longtemps, et là, je n’ai personne à qui dire bonjour. Maman est déjà partie au travail. Non, je mens un peu. Je siffle fort sur le pas de la porte et ce n’est pas un chien qui revient du jardin en courant. Non, c’est ma chatte Finette que j’appelle ainsi ! Et ça marche !
Elle saute sur mes genoux et ronronne de bonheur. Quand j’ai fini de boire mon chocolat, elle sait que je lui laisserai laper le fond de mon bol. Elle me rejoindra ensuite sur le lit de maman.
Je n’ai le droit de regarder les dessins animés à la télévision, que les matins de congés. Alors je me glisse dans son lit. Hum ! J’adore son odeur. Les draps sentent son parfum. Finette vient se coucher sur mon ventre, les pattes en sphinx et les yeux éperdument fixés sur moi, tellement fendus qu’ils finissent par se fermer. Son « usine à bonheur » tourne à plein régime, comme dit maman de ses ronronnements.
A dix heures, j’en ai assez. Une petite douche et hop ! Je saute sur mon vélo et pars faire le tour du village. Maman m’a autorisée à prendre les sentiers qui mènent aux vignes de muscat. C’est beau la vigne. A chaque saison, c’est « une palette de peintre », comme elle dit.
Quand j’ai bien pédalé, je passe chez ma copine Charlotte. Elle a une vraie famille, elle ! Un papa, une maman et même une sœur. Mais pas de chatte ! Ah, décidément, rien n’est parfait !
Ma mère aime bien les parents de Charlotte. Elle dit qu’ils lui donnent une bonne éducation. Enfin, cela veut dire qu’elle applique la règle BASM, qu’elle sait dire : « B onjour, A u-revoir, S ’il vous plaît, M erci » quand il le faut. En fait, si elle savait tous les gros mots que Charlotte m’apprend justement ! Elle est bonne à l’école mais quand elle va en vacances chez ses cousins qui habitent dans je ne sais plus quelle HLM de banlieue, ils lui en racontent de belles, avec plein de gros mots ! Des histoires « mégasexuelles », bien sûr, sinon ce ne serait pas aussi drôle ! On rigole bien ! Evidemment, maman ne sait rien ! Je ne voudrais pas qu’elle l’apprenne, cela l’inquiéterait peut-être et elle pourrait en parler aux parents de ma copine. Bref, trop risqué ! Et puis, les adultes ont bien des secrets, alors nous aussi les enfants, non ?
Quand maman rentre vers midi et demie, il faut que la table soit mise. C’est tout ce qu’elle exige de moi. Elle est super forte, maman ! Elle réussit à préparer le repas en cinq minutes. Elle « s’organise », comme elle l’explique à ses copines.
J’ai quand même le droit de préparer des desserts. Et quand je ne sors pas le matin, j’aime bien faire un gâteau yaourt. C’est facile. Je varie : version chocolat ou version tranches d’ananas au caramel dans le fond du moule à manquer, ou bien poudre de noisettes ou amandes effilées. Je sais faire les tartes. J’ai appris à faire la pâte brisée, en vacances chez ma grand-mère Nanie, en Ariège, au-dessus de Foix.
Maman a perdu son père l’année où elle a obtenu son bac. Elle était bonne en philo, m’a-t-elle raconté. Je ne sais pas trop ce que c’est, la philo. Il paraît qu’il s’agit de cours où il faut réfléchir sur la vie. Que ça rend plus tolérant. Faudra que je cherche dans un dictionnaire en ligne, sur internet, le mot « philosophie ».
Cette année, on a un C.D.I., » le lieu de toutes nos réponses », s’est vantée la documentaliste. Rien que ça ! Pourtant je suis sûre qu’il y en a une que je ne trouverai pas !
Les jours de classe, je prends le bus. Un magnifique, jaune flambant neuf, avec des paysages peints sur la carrosserie : nos montagnes des Albères.
Notre chauffeur, Hughes, est jeune, contrairement à ceux des bus des élèves qui arrivent des autres villages. Nous avons de la chance ! Je n’avais jamais entendu un prénom comme celui-ci auparavant, Hughes !
Il nous a prévenus : son bus, c’est aussi le nôtre ! Nous devons respecter notre propre cadre de vie, sinon, c’est que nous ne nous aimons pas nous-mêmes, qu’il nous a expliqué. Il parle comme maman. Donc, pas de papiers de bonbons, pas de chewing-gums. Et bien sûr, « que je ne surprenne pas les grands en train de fumer au fond du bus ! »
C’est vrai que les garçons de quatrième et troisième sont un peu frimeurs. Dès qu’ils sortent une cigarette, ça y est, « regarde, j’ suis un homme » !
Moi, je ne fumerai pas. Maman ne fume pas et elle m’a expliq

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