Superglu
31 pages
Français

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Description

Depuis qu'Ulysse Colmar a décidé d'être son ami,Thomas est malheureux. Mais personne ne veut le croire.
Ulysse est un type aimable, généreux et intelligent. Il a plein de choses à raconter. Avec lui, les devoirs sont expédiés en dix minutes.
Il a une excellente influence sur toi, dit Couzenil, la prof principale. Il est charmant, disent les parents de Thomas. Il est génial, affirment ses soeurs. Il est vachement intéressant, dit Quentin. Même Juliette et Valentine ne sont pas insensibles à ses nombreux mérites.
Pourtant, à cause d'Ulysse, la vie de Thomas est devenu un cauchemar. Et elle sera gâchée, peut-être pour toujours.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 16 décembre 2015
Nombre de lectures 18
EAN13 9782211226547
Langue Français

Extrait

Le livre
Depuis qu’Ulysse Colmar a décidé d’être son ami,Thomasest malheureux. Mais personne ne veut le croire.
Ulysse est un type aimable, généreux et intelligent. Il aplein de choses à raconter. Avec lui, les devoirs sont expédiés en dix minutes.
Il a une excellente influence sur toi, dit Couzenil, laprof principale. Il est charmant, disent les parents deThomas. Il est génial, affirment ses sœurs. Il est vachementintéressant, dit Quentin. Même Juliette et Valentine nesont pas insensibles à ses nombreux mérites.
Pourtant, à cause d’Ulysse, la vie de Thomas est devenuun cauchemar. Et elle sera gâchée, peut-être pour toujours.
 

L’auteure
Brigitte Smadja est née à Tunis en 1955. Normalienne etagrégée de lettres, elle est aujourd’hui professeure à Paris etdirige la collection Théâtre à l’école des loisirs.
Celle qui confie : « j’écris toujours en pensant à undestinataire ou plusieurs et je leur raconte une histoire.Qu’elle devienne un livre, je n’en suis jamais sûre », a toutde même publié une cinquantaine de romans.
Quand on lui demande d’où vient son inspiration, ellerépond très simplement qu’elle découle « de choses trèsconcrètes qui rappellent un souvenir, une émotion, unétat. »
 

Brigitte Smadja
 
 

Superglu
 
 

Neuf
l’école des loisirs
11, rue de Sèvres, Paris 6 e
 

Pour Léon et Quentin
1
 
Jamais je n’aurais cru en apercevant cetype très ordinaire au fond de la courqu’il allait briser ma vie. Lui, il a dû lesavoir dès cet instant. Il n’est pas venuvers moi tout de suite, il m’a observé,longtemps.
Pourquoi moi ?
 
Après deux mois d’été, je venais deretrouver Valentine, Quentin, Simonet Juliette, mes copains de toujours.
Depuis la maternelle, nous avons eule temps de nous battre, de nous fâcherà mort, de nous traîner aux anniversaires les uns des autres, de nous faire descadeaux nuls imposés par nos mères quiexigent qu’on offre des trucs qui ne servent à rien parce que ça ne se fait pasd’aller à un anniversaire les mains vides.Pour l’anniversaire de Valentine, enjuin, je n’avais eu aucune idée, commed’habitude. Ma mère m’avait suggéréune plante. Je n’ai pas eu le courage dedire non, comme d’habitude.
J’avais l’air du parfait crétin devantcette porte ouverte, avec mon pot dansles bras. Simon qui lui avait offert deschocolats fourrés en a profité, il estdevenu hystérique, il me pointait dudoigt et se tordait de rire. C’est unlâche, Simon, mais il a des circonstances atténuantes : il est vraimentmoche. Il était vexé, en fait. La mèrede Valentine a trouvé ma plante « ravis sante ». Ce n’était pas une hyper mauvaise idée, cette plante.
Le jour de la rentrée, Valentine trèsbronzée, ce qui lui va bien, très bien,m’a avoué qu’elle avait arrosé la plantetout l’été. Puis elle m’a dit en regardantses pieds :
– Thomas, ta plante est toujours vivante, elle a des fleurs, maintenant.
Je suis un peu lent à déchiffrer cegenre de code. Quentin qui est nettement plus brillant et qui déclenche desémeutes quand il traverse la cour avecses cheveux en broussaille en annonçantqu’il a passé la nuit du dimanche dans unstudio d’enregistrement avec son père, atout de suite traduit :
– Valentine est dingue de toi. Elle amaintenu votre amour vivant, pendantdeux mois, c’est sérieux.
Quentin ne parle pas comme tout lemonde, il paraît qu’il parle comme unlivre, ce qui ne m’avance pas beaucoup,moi je ne lis jamais.
 
C’est à l’instant où Valentine attendait ma réponse à propos de cette planteet que mon cerveau manifestait desérieux signes de fatigue que j’ai vu letype ordinaire au fond de la cour, ducôté des cinquièmes. Un nouveau quin’avait vraiment rien de spécial. Il étaithabillé comme nous ou presque, coiffécomme nous ou presque. J’ai mis dutemps à comprendre ce que je voulaisdire par ce presque. C’est quand je l’ai vufaire ce geste de rejeter ses longs cheveuxen arrière que je me suis dit : il est trop,ce type-là. Pour moi, ça voulait direquelque chose. Chaussures trop belles, Nike bien sûr, tee-shirt repassé made inU.S.A., jean extra-large et les cheveuxsurtout, propres, superpropres. Même deloin, ça se voyait qu’il avait passé desannées devant son miroir pour épater lesfilles. Pourtant, je ne me suis pas inquiététout de suite.
 
En attendant, je n’avais rien dit àValentine sur ce miracle qu’elle avaitaccompli en arrosant cette plante quej’avais totalement oubliée pendant l’été.Quentin est venu à mon secours enmurmurant sa phrase géniale mais jen’ai pas eu envie de la répéter tellequelle à Valentine. Je connais les filles.Elle aurait trouvé ça lourd si je lui avaisdit : merci Valentine d’avoir maintenunotre amour vivant, je suis très touché.Impossible à dire, surtout que je n’étais pas vraiment touché ni même certaind’avoir envie de m’encombrer d’unamour aussi fleuri. Je n’ai aucun talentde jardinier et l’idée de me retrouverchez Valentine à contempler ému cetteplante verte ou à lui donner sa rationd’engrais, d’eau et de lumière m’a faitun peu peur. J’ai préféré un sourire. Unsourire, avec les filles, c’est cool. Ellesimaginent ce qu’elles veulent et elles nepeuvent pas nous en vouloir.
C’est dangereux les filles qui vous enveulent. Elles deviennent complètementfolles. Quentin était le seul jusqu’ici àavoir échappé à leurs foudres. Quentinest fort, vraiment fort.
Mais pour moi, il n’a rien pu faire,rien. Le type du fond de la cour allait serévéler beaucoup plus fort que lui, quenous tous, une force gluante.
2
 
J’en étais certain, je l’aurais juré, le types’est retrouvé dans notre classe tout seulau premier rang, personne n’a osés’asseoir à côté de lui et risquer de froisser son tee-shirt. Il a assisté commenous au discours de Mme Couzenil,notre professeur principal, dans unsilence à clouer sur place une caserneentière : « Vous êtes ici pour préparervotre entrée en quatrième ! » a hurléMme Couzenil, ce qui a fait tremblerses seins cachés par une tuniqueindienne... « et je vais vous y préparer,vous pouvez me faire confiance ! »
Aucun d’entre nous n’avait lamoindre envie de faire confiance àCouze-Couze.
C’est Quentin qui l’a baptiséeCouze-Couze en nous faisant passerun dessin : une assiette de semoule etde merguez, et ce nom en lettres capitales. Je ne sais pas comment il a faitpour ne pas se faire repérer mais enquelques secondes toute la classe étaitau courant et réfrénait un fou rire.Simon n’a pas résisté et s’est retrouvé àla porte avec une punition géante.Quentin regardait Couze-Couze,imperturbable. Elle n’a jamais soupçonné qu’il puisse être l’auteur decette agitation. Personne ne soupçonne jamais Quentin, son visage setransforme à toute vitesse, ses yeuxrient et une demi-seconde plus tard, il est sérieux comme un champion detennis qui s’apprête à servir.
Le nouveau imitait les autres. Il neriait pas vraiment, il faisait semblant etil se retournait pour nous montrer qu’ilétait complice mais ça n’allait pas : il enfaisait trop.
Couze-Couze a mis ce rire nerveuxsur le compte de son discours musclé.On pardonne aux soldats d’être nerveux avant d’aller à l’abattoir.
– Le colonel Couze-Couze est magnanime, m’a dit Quentin.
J’ai répondu oui, mais je neconnaissais pas le mot.
Puis Couze-Couze a vérifié l’identité de ses troupes et c’est là qu’on adécouvert que le nouveau s’appelaitUlysse.
« Si son nom de famille, c’est Homère, je me jette par la fenêtre », a murmuréQuentin tandis que Couze-Couze s’extasiait sur ce prénom « si original », « simerveilleux » et tout et tout, et déjà,c’était foutu pour Ulysse, il ne feraitjamais partie d’aucune bande. Nul nes’intéresse à un garçon qui a un prénom« merveilleux » pour une prof aussi baraquée et naine en plus : notre colonelmesurait à peine un mètre cinquante.
Mais Ulysse n’était pas le héros del’ Odyssée, il

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