Le verbe et le discours politique dans Un fusil dans la main, un poème dans la poche
84 pages
Français

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Le verbe et le discours politique dans Un fusil dans la main, un poème dans la poche , livre ebook

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Description

Dans son roman, Un fusil dans la main, un poème dans la poche, Emmanuel Dongala montre les difficultés de l'intellectuel africain qui rentre au pays pour s'engager aux côtés du peuple dans la lutte révolutionnaire armée. La réalité est bien loin du rêve et le chemin qui mène à la libération du peuple est long et dangereux.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 février 2012
Nombre de lectures 19
EAN13 9782296480834
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Le verbe et le discours politique
dans Un fusil dans la main, un poème dans la poche
d’Emmanuel Dongala
Approches littéraires
Collection dirigée par Maguy Albet
Dernières parutions
Agnès AGUER, L’avocat dans la littérature de l’Ancien Régime, 2011.
Christian Schoenaers, Ecriture et quête de soi chez Fatou Diome, Aïssatou Diamanka-Besland, Aminata Zaaria, 2011.
Sandrine Leturcq, Jacques Sternberg, Une esthétique de la terreur, 2011.
Yasue IKAZAKI, Simone de Beauvoir, la narration en question, 2011.
Bouali KOUADRI-MOSTEFAOUI, Lectures de Assia Djjebar. Analyse linéaire de trois romans : L’amour, la fantasia, Ombre sultane, La femme sans sépulture, 2011.
Daniel MATOKOT, Le rire carnavalesque dans les romans de Sony Labou Tansi, 2011.
Mureille Lucie CLÉMENT, Andreï Makine, Le multilinguisme, la photographie, le cinéma et la musique dans son œuvre, 2010
Maha BEN ABDELADHIM, Lorand Gaspar en question de l’errance, 2010.
A. DELMO11E-HALTER, Duras d’une écriture de la violence au travail de l’obscène, 2010.
M. EUZENOT-LEMOIGNE, Sony Labou Tansi. La subjectivation du lecteur dans l’œuvre romanesque, 2010.
B. CHAHINE, Le chercheur d’or de J. M. G. Le Clézio, problématique du héros, 2010.
Y. OTENG, Pluralité culturelle dans le roman francophone, 2010.
Angelica WERNECK, Mémoires et Désirs. Marguerite Duras/Gabrielle Roy, 2010.
Agnès AGUER, L’avocat dans la littérature du Moyen Âge et de la Renaissance, 2010.
Sylvie GAZAGNE, Salah Stétié, lecteur de Rimbaud et de Mallarmé. Regard critique, regard créatif, 2010.
Élodie RAVIDAT, Jean Giraudoux : la crise du langage dans La guerre de Troie n’aura pas lieu et Electre, 2010.
Camille DAMÉGO-MANDEU


Le verbe et le discours politique
dans Un fusil dans la main, un poème dans la poche
d’Emmanuel Dongala


L’H ARMATTAN
© L’H ARMATTAN , 2012
5-7, rue de l’École-Polytechnique ; 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-55697-3
EAN : 9782296556973

Fabrication numérique : Actissia Services, 2012
Introduction
Le roman surprend d’emblée et intrigue. L’auteur aura-t-il réussi le paradoxe d’opérer une collusion des mots « fusil » et « poème », réputés par nature antinomiques ?
À les cerner de près, le premier, « fusil », évoque le combat, la guerre, l’armée, la tuerie, en tout cas l’hostilité et le conflit.
Quant au second, « poème », il connote à souhait la rêverie, la méditation, l’évasion, le romantisme. A n’en point douter, ces deux vocables, a priori , s’excluent l’un l’autre.
Serait-ce cependant une gageure que d’avoir « un fusil dans la main et un poème dans la poche » ? Par quelle alchimie du verbe parviendrait-il à subsumer deux réalités antithétiques ? Il lui faut pourtant trouver un point d’ancrage et une plate-forme de conciliation.
Le vaillant compagnon d’armes de l’auteur-narrateur, Meeks, tente de percer l’énigme. Pour ce faire, conscient de l’ambivalence inextricable des sentiments, il a tôt fait d’user d’une formulation imagée. Ainsi donc le « cœur » référerait-il à « poème », qui est une évocation de l’amour, de la douceur, de la paix et le « poing fermé » révélerait la colère, la puissance, le combat, d’où l’allusion au « fusil » :
Tout est résumé dans sa forme ambiguë : à la fois celle d’un cœur et d’un poing fermé {1} .
Le personnage, ainsi écartelé, oscillant entre deux pôles divergents, devrait être soumis à une profonde déchirure.
Enfin devenu lucide, il fait un aveu. Il confesse son impuissance à échapper à des sollicitations contradictoires. Il ne peut avoir aucune option et demeure prisonnier de son dilemme, quand bien même il pencherait davantage pour l’armée et la politique. Il semble s’insinuer en lui, de façon sous-jacente, la vocation ambiguë du héros du livre de Stendhal Le Rouge et le Noir :
Dire que j’ai pensé un moment devenir prêtre ou médecin pour soulager les malades, les nécessiteux… Ou romancier. Oui je voulais écrire des livres, des poèmes pour témoigner… quelle idiotie et quelle prétention ! Non vraiment, il n’y a que l’action politique qui puisse sauver le monde {2} .
Sa participation héroïque à la guerre de libération en Afrique du Sud n’en fait pas un soldat au cœur d’airain. Dans sa fuite éperdue sur le chemin du retour, il laisse épancher son cœur. Il dévoile avec une suavité romantique sa vraie nature. Il en est pétri comme d’une substance magique. Il s’analyse, exalte sa sensibilité. Son évocation fervente et lyrique de la nature où il se pâme lui confère une douceur rousseauiste.
Pour la première fois, il se mit à douter de la valeur humaine de son engagement politique. Il avait découvert en lui-même une âme très sensible : sensible à la nature, à la poésie, à l’amour ; une sensibilité qu’il avait délibérément étouffée : on ne fait pas la révolution avec des sentiments. Et pourtant, il ne s’était jamais trouvé aussi complètement homme, aussi heureux que pendant ces jours de voyage où aucune pensée politique n’avait effleuré son esprit. Mayéla fit alors un effort sur lui-même afin de ne pas se laisser aller à la nostalgie.
« C’est mon côté mystique », se dit-il en souriant {3} .
Mayéla est présomptueux. Malgré son apparence pudique : « quelle idiotie, quelle prétention », il est dévoré par l’ambition. Il pratique le culte du moi et est entiché d’égotisme. Il rêve de célébrité et d’immortalité, soit comme écrivain, soit comme chef d’État. Force est de reconnaître que cette gageure a été tenue. La suite du récit en portera témoignage :
(…) j’ai écrit un livre politique, les Mémoires d’un guérilléro… J’ai commencé une révolution… J’ai essayé… Me suis-je trompé après tout ? J’aurais dû devenir écrivain, romancier, poète et témoigner de mon temps. Comme ces conteurs et griots africains qui nous ont légué notre histoire.
Au XXI e siècle, les élèves, les étudiants, tous les intéressés se retourneraient vers moi pour avoir une image, même floue, de cette moitié du XX e siècle sur notre continent {4} .
Quoi qu’il ait pensé, quoi qu’il ait dit, ce « poème dans la poche » est transporté par l’engagement et la révolte ; il est voué à exalter le courage et à galvaniser la passion épique du héros. Plutôt que de distraire et d’amollir, le poème se sait une arme et participe de l’action. Il sous-tend puissamment l’énergie vers l’atteinte de l’objectif désiré. Tout incline à conclure avec A. Maurois que « l’homme d’action est avant tout un poète ».
Il faut aussi bien songer à V. Hugo désireux de consacrer « le poète-mage », guide et écho sonore de son peuple ». Rimbaud enchaîne sur le même ton : le poète est celui qui « est en avant », il constitue une figure de proue.
Enfin, pour Césaire, le poème doit être révolutionnaire, il est un « cri contre l’oppression et l’aliénation ». Césaire veut être un « héraut » et le porte-parole du peuple. Il veut l’assumer littéralement et avec ostentation. {5}
Il revendique cette responsabilité pour l’homme de culture, qui doit jouer le rôle de ferment de la révolution {6} . Et de renchérir sur la dimension politique de son engagement. Il le dit sans ambages à Philippe Decraene :
Poète ou chef d’État ? Poète ou chef d’État ? Je le répète : fondamentalement poète, mais poète engagé. Je ne pense donc pas dissocier la poésie de l’action. Je n’aurais pas pu vivre uniquement dans le continent, car mon action politique s’inscrit dans un contexte beaucoup plus vaste. Tout ce qui est culturel reste essentiel à mes yeux. D’ailleurs, la politique ne mériterait pas une pareille énergie si elle n’était justifiée par un projet culturel {7} …
Le narrateur se réclamerait-il de cette prestigieuse lignée ? Intransigeant sur les principes, il s’insur

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