Les mémoires de la violence
243 pages
Français

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Les mémoires de la violence , livre ebook

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Description

Les succès controversés des Bienveillantes de Jonathan Littell ou de Inglorious Basterds de Quentin Tarantino attestent que le besoin de mémoire est toujours aussi vivace mais interrogent les modes de revenance des horreurs du XXème siècle par les arts. Cet ouvrage explore aussi bien les possibilités qu'offre l'écrit qui fixe la mémoire que l'image qui donne à voir ce que le texte ne dit pas.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 décembre 2009
Nombre de lectures 36
EAN13 9782336262123
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0900€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

En couverture: Môme-momie © Bernard Kœst
Tous droits de traduction, d’adaptation et de reproduction, par tous procédés, réservés pour tous pays.
© L’Harmattan, 2009
5-7, rue de l’Ecole polytechnique, 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr
9782296105195
EAN : 9782296105195
Sommaire
Page de Copyright Page de titre Collection Eidos Mémoire multiple Moment I - Documenter
Chapitre 1 - Eclats d’images et traces de vie, Chapitre 2 - Cinéma documentaire et littérature de témoignage Chapitre 3 - Vivre et raconter Chapitre 4 - Histoire d’exil et exil de l’Histoire
Moment II - Présentifier
Chapitre 5 - Contre le silence. Littérature et photographie Chapitre 6 - De l’intolérable à la tolérance. Littérature, photographie & philosophie Chapitre 7 - Voir et savoir. Littérature et cinéma Julio Cortázar, Hugo Santiago, Rolo Díez, Chapitre 8 - Mémoire et oubli. La littérature face à l’histoire
Moment III - Figurer
Chapitre 9 - Littérature et peinture Chapitre 10 - Langue et images, langues en image Chapitre 11 - D’un absolu à l’autre
Quel récit possible, à présent ? Les auteurs
Les mémoires de la violence
Littérature, peinture, photographie, cinéma

Michel Gironde
Collection Eidos
Directeurs Michel Costantini, François Soulages & Marc Tamisier
Série RETINA
Publié avec le concours du CERC (Centre d’Etudes et de Recherches Comparatistes de l’Université Paris III) et du groupe de recherche RETINA International (Recherches Esthétiques & Théorétiques sur les Images Nouvelles & Anciennes)
Mémoire multiple
La construction d’une mémoire personnelle ou collective relative à un événement traumatique conjugue trois enjeux liés : un enjeu psychologique de type thérapeutique ou cathartique, un enjeu politique car percutant l’histoire officielle, et un enjeu éthique lié à des notions de devoir, d’hommage et de leçon tirée sur le passé. Le besoin correspondant de la parole qui veut rendre compte, comprendre, expliciter, et surtout exprimer, trouve, selon nous, son expression idoine dans le domaine de la littérature - nous pensons en particulier à l’essai de Jean Hatzfeld, Une Saison de machettes 1 , dans lequel les bourreaux hutus du génocide rwandais témoignent : la question est alors de saisir sa spécificité expressive. Mais les autres arts ont aussi leur mot à dire : on connaît la puissance expressive de la photographie — exemple frappant, celui des images prises dans les camps de concentration nazis venant d’être libérés ; la peinture non plus n’est pas en reste, comme en témoignent les œuvres de Felix Nussbaum ou de Zoran Music ; ni le cinéma qui donne à voir, qui confronte avec l’événement, ce que réussit de façon saisissante Shoah 2 , le film de Claude Lanzman. Quelle est donc la spécificité de la littérature par rapport à chaque art dans la remémoration du traumatisme, et quelle complémentarité peut-on dégager ? Dans ce cadre, quelles sont les fonctions de la mise en mots en soi et par rapport à celles de l’image - littéraire, photographique, cinématographique ou picturale ? Telles sont les questions que ce livre aborde.

Continuité de la recherche
L’idée de ce livre est née de rencontres qui se sont tenues à Quito, en Equateur, en février 2008. Son organisatrice, Maria Fernanda Troya, professeur d’Arts Plastiques à l’Université San Francisco de Quito, estime que son pays manque cruellement de mémoire politique 3 , malgré une histoire extrêmement agitée, de dictatures en soulèvements d’Indiens, en passant par un conflit frontalier quasiment permanent avec le Pérou. Par conséquent, selon elle, l’Equateur a besoin d’une réflexion profonde sur la mémoire, et la période actuelle qui voit l’organisation démocratique équatorienne se stabiliser est propice à la discussion. D’où ces « Rencontres de la raison incertaine » 4 à Quito, qui traitaient des relations entre mémoire et expressions artistiques en sollicitant des disciplines aussi variées que l’histoire, l’histoire de l’art, l’anthropologie, l’archéologie, la peinture, la photographie, le cinéma, la littérature et la danse.
Ces rencontres étant centrées sur l’Equateur tout en étendant la réflexion aux autres pays d’Amérique latine, nous nous sommes demandé si, en élargissant la réflexion à tous les événements traumatiques du XX ème siècle, particulièrement fertile en horreurs sur toute la planète, du massacre au génocide, nous ne pourrions pas obtenir une vue relativement complète des modalités d’expression de la mémoire et de ses enjeux, de la transcription la plus fidèle possible jusqu’à l’art le plus imaginatif dans l’assouvissement du besoin de remémoration. Nous avons conservé l’idée que la mémoire est multiple : elle est sensation, image, son, volume, bien avant d’être écrit. Mais elle demande, exige à être écrite : il ne peut y avoir de mémoire sans littérature qu’elle soit muthos, logos ou ce que Platon ne nommait pas encore histoire. C’est ainsi que le projet de ce livre fut posé.

Mémoire et...
L’actualité en France nous montrait aussi vivement l’intérêt de ces réflexions sur la mémoire. Rappelons-nous les débats houleux, il y a peu, sur la question de l’enseignement en histoire des aspects positifs de la colonisation, ou de la commémoration de l’abolition de l’esclavage. Hors de France, en Grèce, en 2006, des controverses avaient été provoquées par le lancement d’un manuel scolaire d’histoire traitant de l’exode des Grecs d’Asie Mineure en 1922. Tout cela induit à se demander ce qu’il faut dire et comment le dire. Mémoire et éthique.
Pourtant, certains événements paraissent suffisamment lointains dans le temps, comme ceux liés à l’esclavage par exemple, pour qu’il n’y ait plus forcément besoin du travail de remémoration. C’est alors que surgit le texte exemplaire qui en traite, c’est alors que surgit la parole qui les évoque : on se souvient du roman Texaco de Patrick Chamoiseau en 1992. Mémoire et temps.
Mais ce besoin de parole est-il en fait si évident ? Beaucoup de rescapés de l’horreur ont préféré se taire pour enfouir celle-ci dans l’oubli, même s’il est impossible d’oublier : Primo Levi s’est suicidé en 1987. Mémoire et oubli.
Pourquoi alors se souvenir ? Les philosophes apportent des réponses. Walter Benjamin estime que le présent a une dette envers le passé : « Nous avons été attendus sur la terre. », dit-il 5 . Quel passé ? Paul Ricœur désigne le passé des vaincus, des perdants de l‘histoire 6 , que les vainqueurs ont tendance à faire disparaître de l’historiographie officielle. Pour contrer les abus de cette dernière, l’écrivain mexicain Carlos Fuentes brandit l’arme de la littérature qui possède de surplus la vertu de panser les blessures de l’histoire, et surtout de pouvoir tirer des leçons du passé pour envisager un avenir meilleur 7 . Mémoire et politique.
Cette réflexion induit d’autres articulations de la mémoire. Les questions éthiques et politiques peuvent conduire à opposer art et mémoire dans la mesure où la dimension imaginative de celui-là pourrait se heurter au réel du passé dont celle-ci s’estimerait la gardienne. Cependant, l’opposition existe-t-elle vraiment, quand on sait à quel point la mémoire peut en toute bonne foi affabuler et chérir tellement son affabulation qu’elle la préfère au réel ? Salman Rushdie avoue : « ... même après m’être rendu compte que ma mémoire me jouait des tours, mon cerveau refusait simplement de se laisser mettre en ordre. Il s’accrochait aux faux souvenirs et les préférait aux événements réels » 8 . Mémoire et imagination.
Mais si on considère, comme Henri Rousso, que la mémoire est un vécu, elle est donc de l’ordre de l’intime, du subjectif. A son opposé, on trouverait l’histoire pensée comme reconstruction abstraite. Mémoire et histoire.

Contenu et forme
Les enjeux de ces articulations de la mémoire et de la société se comprennent en fonction de la « matière » et de la manière dont on veut la traiter. De quoi et de qui parle-t-on ? Y a-t-il des sujets abordables ou non ? Y a-t-il des victimes légitimes et d’autres qui le sont moins ? Faut-il dire le fait brut, sans commentaire, et surtout sans éclat ? Faut-il ainsi ne tâcher de le restituer que dans sa nudité ? Et si on n’arrive pas à dire, comment dire l’indicible ? Comment rendre présent ce qui s’est tu, ce qui est mort ? Comment représenter ? Quand on n’a pas été témoin, et même si on le fut, peut-on imaginer?

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