Le bout de l île
149 pages
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Le bout de l'île , livre ebook

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Description

À l’est de l’île de Montréal s’étend une pointe de terre qui, autrefois, était couverte de trembles, d’où son nom de Pointe-aux-Trembles. C’est là que François-Gabriel Dumas, alias Gaby, a passé sa jeunesse dans les années soixante-dix. À l'époque, ce n’était qu’une agglomération de paroisses, c'est-à-dire ni un tout à fait un village, ni la banlieue qu’elle est devenue dans les années quatre-vingt. À l’ombre du plus grand complexe pétrochimique de l’est du Canada dont les cheminées « brûlent jour et nuit » (Richard Séguin), Gaby affronte les voyous du quartier dans un match de ballon-chasseur à la suite duquel il se fera un nouvel ami et connaîtra son premier amour, un amour juvénile, encore pur et innocent.


Le bout de l’île est le roman de la transition, le roman du passage à l’adolescence comme chacun de nous a dû vivre. À l’instar des Allumettes suédoises de Robert Sabatier, il appartient au genre du récit de l’enfance, un genre qui ne se démode jamais et qui, quel que soit la provenance de l’auteur, recèle une portée toujours universelle.


Taille approximative : 156 écrans au format livre de poche, dans la version pdf.

Sujets

Informations

Publié par
Nombre de lectures 18
EAN13 9782923916224
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0026€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

LE BOUT DE L'ÎLE
DANIEL DUCHARME
© ÉLP éditeur, 2011 www.elpediteur.com elpediteur@gmail.com
ISBN : 978-2-923916-22-4
ImagedelacouvertureparDanielDucharme:
ImagedelacouvertureparDanielDucharme: Le pont Le gardeur, vu depuis le bout de l’île.
Avis de l’éditeur
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ÉLP éditeur est une maison d’édition 100% numérique fondée au printemps 2010. Immatriculée au Québec (Canada), ÉLP a toutefois une vocation transatlantique: ses auteurs comme les membres de son comité éditorial proviennent de toute la Francophonie. Pour toute question ou commentaire concernant cet ouvrage, n’hésitez pas à écrire à : ecrirelirepenser@gmail.com
À mon fils Pascal-Ali
À mon ami Yvon Jacques, modèle involontaire de certains passages de ce réci t
LE BOUT DE L'ÎLE
Note de l’auteur
À l’est de la ville de Montréal se trouve une ville du nom de Montréal-Est, ce qui n’a rien d’original compte tenu de sa position géograph ique. Bourgade plus que ville, elle compte sans doute plus d’unités industrielles que d e constructions domiciliaires. Et encore plus à l’est – au bout de l’île de Montréal, en fait – s’étend une pointe de terre qui, autrefois, était couverte de trembles, d’où so n nom de Pointe-aux-Trembles. J’y ai passé ma jeunesse dans les années soixante et soixa nte-dix alors qu’elle n’était qu’une agglomération de paroisses, ni un village, n i la banlieue qu’elle est devenue dans les années quatre-vingt. En ce temps-là, cette zone autrefois champêtre était largement occupée par l’industrie pétrochimique, po ur laquelle bon nombre d’hommes et de femmes travaillaient. Des cheminées de ses us ines – « qui brûlent jour et nuit », comme le dit la chanson de Richard Séguin – se déga geait une odeur souvent nauséabonde que les vents d’ouest renforçaient. C’e st sans doute ce qui expliquait qu’à Pointe-aux-Trembles les vents froids du nord é taient toujours les bienvenus, quelle que soit la saison.
C’est sur cette bande de terre où s’étalent d’ouest en est quelque cent avenues et dont l’espace habité, dans l’axe nord-sud, ne dépas se pas un kilomètre dans son secteur le plus étendu, que se déroulent les événem ents qui sont relatés dans ce récit.
Ces événements sont, bien entendu, fictifs, tout co mme leurs héros, d’ailleurs, dont toute ressemblance avec des personnes existantes se rait le fruit du pur hasard ou, à la limite, le résultat d’une malheureuse coïncidence. Des filles comme Lucie, Gisèle et Nicole, il en existait – et en existe sans doute en core – dans toutes les petites villes du Québec. Même chose pour les bandes de voyous qui, a ujourd’hui, prennent le nom de gangs de rue et sont autrement plus terribles que l es Funny Brothers auxquels il est fait allusion dans ce récit. Par contre, le fleuve et so n bord de l’eau sont toujours là, de même que le collège Roussin, transformé depuis lors en centre communautaire.
Aujourd’hui, la petite ville de Pointe-aux-Trembles de ma jeunesse n’est plus, elle qui ne représente à peine plus que la moitié d’un arron dissement de la ville de Montréal. Mais quel que soit son statut, elle occupe toujoursle bout de l’île.
Chapitre 1
Je sentais qu’il se passait quelque chose en moi, u n changement que je ne pouvais identifier avec précision. Depuis mon anniversaire, le premier mai dernier, il m’arrivait la nuit de me réveiller avec le sexe si gonflé que je n’osais me lever de peur que mon frère Frédéric, qui partageait la même chambre que moi, s’en aperçût. Par ailleurs, j’avais ressenti, avant-hier au parc Saint-Jean-Bap tiste, un léger plaisir à cet endroit délicat alors que je grimpais à la structure d’acie r de la balançoire. Étrange sensation qui m’était inconnue jusqu’alors. Vraisemblablement , je traversais un passage, une période de transition dont j’avais à peine conscien ce encore, car mes préoccupations allaient vers le sport, et non vers le sexe.
En effet, je ne pensais qu’au sport, plus préciséme nt au match de ballon chasseur que je devais disputer le lendemain matin. Cette fi nale opposait mon équipe à celle de la sixième année A dont le chef était le redoutable Richard Pouliot, un garçon costaud qui avait dû redoubler au moins deux fois car il av ait déjà du poil au menton. J’étais chef de classe de la sixième B mais, à côté de Poul iot, je ne faisais pas le poids. Petit, plutôt chétif, voire fluet, je faisais à peine mon âge. Toutefois, mon habileté et ma grande agilité de mouvement compensaient largement ma modeste taille.
Pour gagner, je comptais sur l’aide du capitaine de mon équipe, Luc Piché, un solide gaillard qui me vouait une reconnaissance sans born es depuis que je lui filais un coup de main pour faire ses devoirs, pour ne pas dire qu e je les faisais souvent à sa place. Comme Pouliot, Piché avait redoublé, mais il ne pou vait se permettre de le faire encore sinon son père le tuerait. C’est du moins ce qu’il me racontait, parfois, en me tendant d’un air malheureux un cahier fripé rempli de probl èmes d’arithmétique que je devais solutionner pour lui. Je savais qu’il disait vrai. Pour m’en convaincre, je n’avais qu’à voir les ecchymoses qui couvraient son visage les l endemains de remise du bulletin. Un jour même, peu de temps après qu’il eût coulé la dictée du vendredi, madame Signori l’avait questionné à propos d’un bleu appar u sur son avant-bras. Pour se justifier, il avait marmonné une vague histoire de chamaillage avec ses frères... En bonne catholique respectueuse de l’ordre établi, no tre maîtresse estimait qu’on devait limiter au minimum l’intrusion de l’État dans les f amilles, de sorte qu’elle n’était pas allée plus loin. Cela aurait été bien inutile, d’ai lleurs, car tout portait à croire que, cette fois-ci, Piché réussirait son année scolaire pour e nfin accéder en classe de première secondaire à l’école Daniel-Johnson et, du même cou p, éviter la raclée que son père ne manquerait pas de lui donner en cas d’échec. Mai s il s’agit là d’une autre histoire…
Toujours est-il qu’en cette nuit de juin, j’étais a llongé dans le grand lit de fer que je partageais avec mon frère Frédéric, le cadet des ga rçons de la famille. Claude, l’aîné qui aurait quinze ans à l’automne, dormait sur le d ivan-lit du salon depuis quelques mois, un privilège que mes parents lui accordaient en raison de son âge car, jusqu’alors, mes deux frères et moi avions toujours couché dans la même chambre.
Notre logement, pourtant, était beaucoup plus grand que le modeste trois pièces que nous occupions quatre ans plus tôt sur la rue Franc hère et dans lequel nous étions six à nous entasser depuis la naissance de ma petite sœ ur, quelques mois plus tôt. Cette naissance inattendue fut d’ailleurs l’élément décle ncheur, l’événement qui avait convaincu mes parents de la nécessité de déménager dans un logement plus grand et, par le fait même, de se rapprocher de l’usine de Mo ntréal-Est qui employait mon père
depuis qu’il était en âge de travailler, c’est-à-di re depuis l’âge de douze ou treize ans. Au printemps 1965, mes parents quittèrent donc le q uartier du plateau Mont-Royal où ils avaient toujours vécu, entourés de leurs famill es – mes grands-parents, mes oncles et mes tantes –, pour s’installer à Pointe-aux-Trem bles, cette petite ville champêtre du bout de l’île de Montréal bâtie sur une bande de te rre arable, bordée au nord-ouest par le plus important complexe pétrochimique de l’est d u Canada et, au sud-est, fort heureusement, par les magnifiques cours d’eau que s ont le fleuve Saint-Laurent et la rivière des Prairies.
Mais ce logement de six pièces au premier étage d’u n semi-détaché de la 6e avenue, qui paraissait si grand au départ, avait ra pidement démontré ses limites, car à ma petite sœur s’était ajoutée ma grand-mère matern elle, venue vivre chez nous après la mort de mon grand-père. Du coup, l’espace avait dû être réorganisé : une chambre pour mes parents, une pour ma sœur, une autre pour ma grand-mère et, enfin, la plus grande pour les trois garçons… jusqu’à ce que Claud e, à l’âge adolescent, occupât le divan du salon. Mais cela se vivait dans l’harmonie , sous l’œil bienveillant de ma mère qui avait recommencé à travailler depuis l’arrivée de ma grand-mère.
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À mes côtés, Frédéric dormait depuis longtemps tand is que moi, les yeux grands ouverts, je ne pensais qu’au match. À quelques sema ines de la fin des classes, qui était aussi, en l’occurrence, la fin du cycle des é tudes primaires, toute mon attention se portait sur ce tournoi de ballon chasseur de l’écol e Saint-Enfant-Jésus. Dans mon cœur d’adolescent en devenir, ce match constituait en qu elque sorte une épreuve, une étape que je devais franchir pour passer à la suivante, e t cette réussite avait plus d’importance à mes yeux que celle de mes études pou r lesquelles, d’ailleurs, je n’éprouvais aucune difficulté, étant assuré depuis longtemps de mon passage à l’école secondaire et, qui plus est, à l’école secondaire p rivée – le collège Roussin, école célèbre non seulement à Pointe-aux-Trembles, mais d ans toute la région. Du seul fait que j’aie été admis à cette école-là, je faisais la fierté de la famille, notamment de ma mère qui venait d’accepter un emploi ingrat pour pe rmettre à ses deux plus grands de fréquenter « une école digne de ce nom ». Le cas de Frédéric, le cadet, viendrait plus tard puisqu’il était encore en cinquième année. Une année de sursis pour mes parents qui peinaient à joindre les deux bouts.
Je ne dormais toujours pas, appréhendant ce match a u cours duquel j’allais affronter Richard Pouliot, doyen de l’école, flanqué de son a colyte Leroux.
Ces deux garçons, je les connaissais bien pour avoi r été embêté par eux à plus d’une reprise au cours des trois années de fréquentation de cette école de quartier.
Le premier, Richard Pouliot, allait déjà sur ses qu atorze ans, ayant redoublé deux fois ses classes, les quatrième et cinquième années . Il habitait un logement vétuste de la 8e avenue, situé légèrement au nord de la rue Vi ctoria. Bagarreur, un brin porté sur le racket, il semait la terreur dans le quartier, c ommettant des exactions ici et là, généralement sur des garçons plus petits qui n’alla ient pas s’en plaindre à leurs parents par peur de représailles. D’ailleurs, pas p lus tard que le dernier dimanche d’avril, alors que je me rendais à la messe avec mo n frère Claude, Pouliot nous avait arrêté pour nous « saluer ». Après quoi, il avait d emandé à mon frère combien d’argent il avait sur lui. « Juste de quoi donner à la quête à l’église », avait-il répondu. Je sentais bien que Pouliot était tenté de s’emparer d e cet argent mais, pour une raison
inconnue, il nous avait laissés tranquille. Rien de grave, donc, dans cette scène typique de banlieue sauf que, en voyant mon frère d evenir plus pâle, j’avais tout de même ressenti une certaine humiliation, tout en éta nt à la fois assez fier de mon grand frère qui avait su maîtriser sa peur devant l’ennem i. Moi aussi je maîtrisais ma peur devant les voyous du quartier, et c’est ce qui m’av ait toujours sauvé, pensais-je. D’ailleurs, bien que Pouliot ait souvent proféré de s menaces à mon endroit, il ne m’avait jamais touché.
Quant au second, en raison de la couleur de ses che veux, on ne l’avait jamais appelé autrement que le roux, au point que je me su is toujours demandé quel était son vrai nom, si ce n’était pas Leroux… Il habitait sur la 12e avenue, tout près de l’aréna Roussin. L’hiver dernier, il m’avait volé une ronde lle de hockey à la patinoire extérieure du parc Saint-Jean-Baptiste, une rondelle à l’effig ie du club de hockey leCanadien de Montréal à laquelle je tenais beaucoup, ce que je n e lui avais jamais tout à fait pardonné. En effet, pendant que je m’exerçais au la ncer-frappé, Leroux avait habilement saisi ma rondelle après qu’elle eut rebo ndi sur la rampe de bois. Quand je m’étais approché de lui, il m’avait dit :
« Eh, dis donc ! C’est à moi, cette rondelle ! Où l’as-tu trouvée ?
voix mal assurée. « C’est un Non, elle est à moi », lui avais-je répondu d’une cadeau de ma tante pour Noël.
! Elle est à moi, je te dis ! Tu vois ? Il y a une Menteur scratchlà », avait-il juste ajouté en me montrant la rondelle tout en la tenant fermement avec ses gants de hockey.
En me dandinant en équilibre sur mes patins, mon re gard allait de Leroux à la rondelle en un mouvement continu, de sorte que je v oyais bien la lueur de méchanceté qui ressortait des petits yeux bleu délavé de ce po il de carotte qu’on disait violent et hargneux. Puis, je m’étais dit :Non, je ne vais pas me battre avec cet imbécile. Alors, j’avais capitulé avant même d’avoir engagé le comba t, conscient que je me faisais voler tout rond par ce garçon que je n’osais affron ter. Tout penaud, j’avais quitté la patinoire, en me gardant bien de ne pas éclater en sanglots devant lui. Avant de partir, j’avais tout de même eu le courage de le regarder e n face, comme pour lui signifier que je n’étais pas dupe de sa manœuvre frauduleuse. Dev ant l’adversité, on se console comme on peut.
Le soir même, à la maison, ma mère m’avait fait com prendre que je n’avais perdu qu’un ridicule bout de caoutchouc que je retrouvera is d’une manière ou d’une autre alors que lui, Leroux, avait perdu bien davantage… Et en m’endormant cette nuit-là, j’en étais presque venu à plaindre ce voyou que j’i maginais – trop naïvement, sans doute – rongé par le remords.
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Je pensais un peu à tout ça, étendu dans mon grand lit de fer. Demain matin, pendant la récréation, moi, le chef de classe des s ixièmes années B, devais affronter Pouliot et Leroux en même temps. Certes, je pouvais compter sur l’aide indéfectible de Luc Piché, mon capitaine, qui était au moins aussi costaud, sinon plus, que Pouliot, mais j’avais peur, somme toute, tout en étant farou chement déterminé car ce match mythique représentait à mes yeux l’agilité contre l a force brute, David contre Goliath, et je voulais le gagner à tout prix. J’y mettrais tout mon cœur, toute mon énergie. Le
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