La Damnation de l ange
161 pages
Français

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La Damnation de l'ange , livre ebook

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Description

"Se libérer de ses chaînes. S’ouvrir au monde. Être capable d’aimer et d’être aimé en retour. Abandonné par la vie, rejeté par la Mort, tel un fantôme. Je n’étais plus que l’ombre de moi-même, un Ange de la Mort, jusqu’à ce que je te rencontre..."

Cela fait cinq siècles qu’il fauche les mortels pour les envoyer dans le Néant. Puni par le Créateur, Aaron ne ressent plus la moindre émotion, il fait ce qu’on attend de lui. Les âmes ne forment qu’une liste...


Jusqu’au jour où Emory, un jeune homme pour qui l’Ange de la Mort ne peut retenir son attirance, est en danger. Acceptera-t-il de remettre en question l’essence même de son existence d’Immortel pour le sauver ? À travers les obstacles, la Mort et les interdits, l’attirance se transforme en un sentiment puissant que personne ne pourra plus entraver.


L’amour vaut il tous les sacrifices ? Car, comme le disait Nietzsche : « L’amour ne veut pas la durée, il veut l’instant et l’éternité. »

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 14 juillet 2015
Nombre de lectures 76
EAN13 9791092954449
Langue Français

Extrait

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Westley Diguet

La Damnation de l'ange


Maux Célestes - Tome 1



MxM Bookmark


Le piratage prive l'auteur ainsi que les personnes ayant travaillé sur ce livre de leurs droits.

Cet ouvrage a été publié sous le titre :

La Damnation de l'ange

MxM Bookmark © 2015, Tous droits résérvés

Illustration de couverture © MxM Bookmark

Relecture et correction © Danièle M.


À tous ceux qui croient que l’amour mérite tous les sacrifices.

Prologue


— Qui êtes-vous ? souffla la jeune femme en ouvrant les yeux.

Elle resta un petit moment éblouie par la luminosité du plan astral, puis répéta sa question :

— Qui êtes-vous ?

L’homme qui se tenait devant elle l’observait avec attention, le visage en apparence impassible.

— Je suis la Mort, répondit-il.

— Quoi ? Vous êtes qui ?

— Venez avec moi, Linda, vous n’avez plus rien à faire ici. Votre vie s’arrête là.

Il avait dit ces mots avec douceur mais fermeté. Il n’y avait aucune négociation, aucune conversation à avoir. Les choses étaient ainsi. Les mortels vivaient et mouraient. Cela avait toujours été et cela serait toujours. Son rôle à lui était aussi défini et il se forçait à ne rien ressentir depuis bien longtemps. Faucher des âmes était un travail difficile, psychologiquement, et il en avait vu suffisamment pour se borner à rester derrière l’imposant mur qu’il avait érigé entre les mortels et lui.

— Comment vous appelez-vous ? demanda Linda en quittant son lit d’hôpital.

— Je n’ai pas de nom, je ne suis que la Mort. Allez, venez, partons.

Son nom, il préférait le tenir secret. Ces âmes qu’il venait chercher n’avaient pas besoin de le connaître. Le lien qui se créerait entre eux serait difficile à briser. Il finirait, nécessairement, par avoir des remords. Son prédécesseur les avait laissés le ronger et il avait été éradiqué puis remplacé.

Depuis combien de temps faisait-il ce travail ?

— Longtemps, répondit-il à voix haute.

— Pardon ?

Linda l’observait sans comprendre. S’était-il répondu à lui-même ? Presque amusé, il laissa échapper un sourire sans joie.

— Je parlais tout seul, reprit-il. Excusez-moi. Vous êtes prête ?

Cette question, il se forçait à la poser à chacune de ses missions… Pour autant, les mortels n’avaient jamais de réponse à lui fournir. Comment pouvait-on être prêt à disparaître pour toujours dans le Néant ?

Il lui tendit sa main. Linda l’observa quelques secondes, sans savoir quoi faire, avant de comprendre qu’elle n’avait pas le choix.

— C’est terminé, n’est-ce pas ?

Il hocha la tête.

— D’accord.

Des larmes coulèrent sur les joues de la jeune trentenaire lorsqu’elle saisit la main de la Mort. Le silence le plus complet accueillit cette nouvelle âme esseulée. Linda Devon n’existait plus. Mais la Mort, quant à elle, devait continuer. L’homme réapparut quelques instants plus tard, ferma les yeux, inspira grandement et disparut de nouveau, en direction de la prochaine âme destinée au Néant.

1

La Mort, son credo, son existence, son but. La mort, sa mission, sa personnalité. La Mort, son surnom. Redoutée par les créatures vivantes, rejetée par le monde surnaturel, elle est pourtant essentielle au Grand Dessein.

Le vent soufflait fort depuis plusieurs heures déjà. Une tempête avait été annoncée et n’allait plus tarder à s’abattre sur le pays. S’il restait à l’affût, sachant pertinemment que les morts allaient fleurir durant toute la durée des intempéries, il ne semblait pas avoir le cœur à l’ouvrage.

Perché sur la pointe du plus haut building de la ville, l’Ange de la Mort observait. Lorsque la pluie redoubla d’intensité, il replia ses ailes et repoussa sa capuche, dévoilant sa chevelure enflammée. Les paupières closes, il savourait la douceur des grosses gouttes d’eau lorsqu’elles heurtaient son visage. Son souffle lent renvoyait de longues volutes de vapeur qui se perdaient rapidement dans la nuit.

Il leva la tête et lut dans le ciel. La nuit – qui avait, une nouvelle fois, été sans étoile et sans lune – s’apprêtait à laisser place au jour. Ce qui n’allait pas l’arranger. Durant la journée, les mortels sortaient bien plus que la nuit. La liste des âmes qu’il allait devoir récupérer s’allongerait, il n’en doutait pas.

Un petit tintement dans son oreille lui intima de se mettre en route. Dans un mouvement mesuré, presque animal, il se leva, déplia de nouveau ses ailes qui mesuraient plus de deux mètres de long chacune, et se laissa choir en arrière. Dans le vide.

Durant sa chute, les yeux clos, il vit un visage flou, sans aucun trait distinct ; et une destination. Les informations nécessaires pour trouver sa future cible. Il pivota sur lui-même et sentit le vent souffler sous son corps et son ventre. Les bras le long du corps, la Mort changea de cap et se dirigea vers celle qui allait cesser de vivre.

Il traversa les cieux à une vitesse vertigineuse, le regard obstinément rivé vers l’horizon. Cela faisait longtemps qu’il avait cessé de s’intéresser aux mortels encore en vie. Ces petits êtres, jeunes et insouciants, incapables de comprendre l’importance de vivre, l’importance de vivre le moment présent. Mais lui savait. Il avait vu tellement d’âmes disparaître dans le Néant depuis sa prise de fonction… Il savait qu’au dernier moment, les Hommes regrettaient toujours. Les remords d’avoir répandu le mal, d’avoir menti, d’avoir trahi, d’avoir volé, fait du tort. Et il avait suffisamment vécu d’expériences dans ce domaine pour savoir et comprendre ces choses-là. Lui-même ne pouvait s’empêcher de nourrir des regrets au sujet de sa vie passée, qu’elle fut mortelle ou immortelle. Mais c’était une autre histoire. Les mortels étaient si fragiles, un rien les fauchait…

Non. C’était lui qui les fauchait. Parce que c’était son rôle. Sa vie ne lui appartenait plus depuis longtemps. Elle était entre les mains de son patron. En âme damnée, il devait être l’Ange de la Mort. La raison était cachée dans l’épais dossier que le Créateur gardait sur lui, dans son propre bureau. Toutes les actions menées par l’Ange de la Mort durant sa vie humaine l’avaient conduit vers cette existence sombre qu’il ne pouvait s’empêcher d’appréhender avec une certaine réticence. Ce masque qu’il devait porter, cette apparente froideur, était difficile au quotidien. Mais tout s’était brisé en lui, plusieurs années auparavant et aujourd’hui, les émotions qu’il ressentait encore – malgré sa position – semblaient n’être que des restes à peine vivaces.

Soudain, un éclair zébra le ciel et passa juste à côté de l’ange. Il eut tout juste le temps de faire claquer ses ailes pour virer à gauche afin de ne pas finir grillé. Légèrement sonné par ce qu’il venait de vivre, il prit de l’altitude, montant jusqu’aux limites jouxtant la cité Céleste. Là, le ciel était calme et il put se reprendre.

Que venait-il de se passer ? Avait-il oublié de surveiller le ciel ou son supérieur avait-il voulu remettre de l’ordre dans ses pensées ? Conscient d’être quasiment surveillé à chaque instant, il continua à voler, plus vite encore, afin d’atteindre sa cible avant qu’elle n’expire son dernier souffle de vie.

— Hâte-toi, le moment est proche, gronda une petite voix dans sa tête.

L’ange serra les dents mais ne répondit pas. Il tenta de faire le vide dans sa tête et soudainement, piqua vers le sol. Il traversa les nuages à vive allure, les ailes tendues en arrière. Le vent griffait son visage et il se sentit mieux, libre. Au bout de quelques instants, la terre apparut et il aperçut la ville dans laquelle résidait sa cible.

Il ferma les yeux et revit son visage. Instantanément, les informations relatives à la jeune femme apparurent dans son esprit.

Meredith Peters, vingt-quatre ans, accident de voiture, laisse une petite fille de deux ans et un fiancé.

Ces informations n’étaient que des détails pour lui. Rien ne comptait finalement. Les mortels vivaient et mouraient et il les aidait à passer d’un état à l’autre. Rien de plus. Il connaissait sa mission et n’avait certainement pas de temps – ni l’envie – à perdre à s’apitoyer sur le sort des mortels. Mais finalement, à quel moment avait-il cessé de ressentir la douleur de la disparition ? Comment la Mort, dans ce qu’elle avait de plus pur, pouvait-elle concevoir cet état de fait avec si peu de considération ?

Il n’avait aucune réponse à ces interrogations. Aussi loin que ses souvenirs remontaient, il avait agi ainsi, occultant le terrible rôle qu’il occupait dans l’Ordre Cosmique du monde. Mais il savait pertinemment qu’il se mentait à lui-même. Ce masque n’était que celui qu’il affichait aux yeux de tous – mortels et immortels – et qu’il tentait d’accepter lui-même.

Cela faisait longtemps que l’Ange de la Mort qu’il était souffrait de cet emploi qu’il n’avait jamais désiré. Mais que pouvait-il faire, si ce n’est continuer d’aider les mortels – dont il se fichait cependant – à passer de l’autre côté ? S’il n’agissait pas, son District serait livré à lui-même. Or, il le savait bien, le Créateur avait besoin de lui.

Sans avoir besoin de se repérer avec ses yeux, l’ange savait où se diriger. Il pivota légèrement sur la droite et bifurqua vers une route de campagne. Elle était là, à quelques mètres de lui.

Le spectacle était réellement angoissant. Bien qu’il se forçât à ne pas ressentir l’horreur de la situation, il ne pouvait que concéder sur le caractère horrible de la situation.

Meredith Peters était au volant de sa citadine lorsqu’elle avait percuté un arbre bordant la route de campagne qu’elle parcourait chaque jour pour rentrer du travail. Cette fois, malheureusement, l’humaine avait entendu son téléphone portable lui signaler l’arrivée d’un message électronique. Habituée à la route, la jeune femme l’avait quitté des yeux un instant pour se saisir de son mobile.

Au final, elle avait perdu le contrôle du véhicule et un défaut mécanique ne lui avait pas permis d’empêcher sa voiture de s’enrouler autour d’un gros chêne.

La jeune femme était coincée entre son siège et l’avant du véhicule qui lui broyait littéralement le bassin. Seule la pression exercée par le métal la maintenait en vie… pour quelques secondes encore.

Invisible aux yeux des mortels, l’Ange de la Mort s’avança sans un bruit. De son habituelle démarche féline, il fit le tour du véhicule et observa le visage de la jeune condamnée. Ses yeux commençaient à se brouiller légèrement et du sang coulait de sa bouche. Il grimaça en voyant les premiers rayons du soleil apparaître à l’horizon. Il allait devoir se hâter.

Peut-être que la fatigue de la jeune femme avait aussi joué sur la situation. Entre la fatigue, le défaut du véhicule, les intempéries et la distraction électronique, Meredith Peters n’avait aucune chance de s’éloigner de son Destin.

Il avait prévu qu’elle meure, et elle était sur le point d’accomplir sa volonté.

D’un air détaché, l’ange s’approcha de la jeune femme. Pour le moment, encore bien vivante, elle ne pouvait pas le voir. Mais petit à petit, son âme commencerait à se détacher de son enveloppe charnelle et elle entamerait son chemin vers le plan astral sur lequel il l’attendait.

Comme pour confirmer ses pensées, Meredith Peters toussota difficilement et une ombre passa dans son regard. Durant une seconde, elle resta immobile puis un soubresaut parcourut son corps. Et son âme apparut à l’Ange de la Mort qui l’attendait.

Toujours immobilisée dans la voiture, son âme commençait tout juste à prendre sa véritable apparence. Bientôt, elle pourrait parler et se lever.

Les paupières de Meredith Peters papillonnèrent en le voyant et elle voulut dire quelque chose, en vain.

— Ne parlez pas, lui ordonna-t-il d’une voix douce mais ferme. Pour le moment, vous ne pouvez pas. Votre transition est en cours. Restez calme.

La jeune femme l’observait les yeux écarquillés, sans comprendre ce qu’il disait, ni même ce qu’il faisait là. Comme beaucoup, elle se demandait pourquoi il ne l’aidait pas à sortir de là pour sauver sa vie. Et la question était légitime. Pourquoi ne les aidait-il pas ? Pourquoi ne décidait-il pas de sauver quelques vies, alors qu’il en prenait tant chaque jour ?

À ça, son amie Liv avait pour habitude de lui répondre par une autre question :

— Pourquoi eux et pas les autres ?

Et il n’avait rien d’autre à ajouter. En effet, pourquoi sauver Meredith Peters et non le prochain nom de la liste ? Son rôle ne lui permettait pas de tels choix.

Malgré le flot incessant de pensées inondant son esprit, l’ange ne détachait pas son regard de la jeune femme qui ne tarderait plus à achever son transfert.

Quelques secondes encore.

Finalement, elle cessa d’exister. Une bonne fois pour toutes.

Bien entendu, ils n’avaient accompli que la moitié du boulot. Il fallait que l’âme de la jeune femme décide de quitter son enveloppe et qu’elle accepte de le suivre. D’ordinaire, l’Ange de la Mort n’avait de problème avec ce moment. Plutôt grand, de larges épaules, un corps musclé et surtout d’immenses ailes de la couleur du sang avaient tendance à intimider les mortels. Quelques mots de lui suffisaient à les persuader qu’ils devaient le suivre, coûte que coûte.

Après plusieurs siècles de bons et loyaux services, l’Ange de la Mort n’avait presque jamais failli. Et il ne comptait pas que cela commence avec Meredith Peters. Ainsi, il s’approcha encore de la jeune femme, déploya au maximum ses ailes et les fit claquer doucement dans son dos. Sans sourire, il lui tendit une main ouverte.

— Venez, Meredith, le moment est venu.

Elle ouvrit la bouche plusieurs fois, mais aucun son ne sortit. Choquée et impressionnée, la pauvre défunte restait coite devant l’ordre de l’ange.

— Mais… ma fille, réussit-elle à dire, finalement.

— Vous ne pouvez plus rien faire, venez, c’est terminé. Votre vie s’arrête ici.

Les larmes se mirent à couler sur les joues de Meredith Peters, mais l’ange resta impassible. Pourtant, apercevoir la tristesse d’une âme était un spectacle particulièrement émouvant. À cet instant-là, les larmes ne sont pas de vulgaires liquides biologiques prouvant la peine du sujet. Lorsqu’une âme pleure, elle irradie légèrement et ses larmes sont de véritables perles précieuses que l’Ange de la Mort se force à préserver. Malgré son masque, l’ange ne put retenir ses mots :

— Tout ira bien, faites-moi confiance.

Le processus pouvait être long et variait en fonction du sujet. Souvent, les mortels négociaient avec l’ange, tentaient d’obtenir des années supplémentaires. Mais il n’était pas un démon, il ne faisait pas de pacte, ne donnait pas de seconde chance. Lorsqu’une âme arrivait jusqu’à lui, elle finissait forcément par rejoindre le Néant. Il n’y avait aucun retour en arrière possible. Aucun. Et pourtant, l’occasion n’avait pas manqué…

Il secoua la tête pour chasser une pensée qu’il ne voulait pas revoir surgir.

— Mais…

Le temps, sur le plan astral, continuait de s’écouler, mais il s’était arrêté dans le monde des vivants. C’est ce qui permettait à l’Ange de la Mort d’accomplir ses multiples missions sans devoir brusquer ses désignés.

Il tendit de nouveau sa main à la jeune femme et insista :

— Allez, Meredith. Vous savez qu’il n’y a plus de retour possible. Votre corps est brisé et votre enveloppe ne peut plus vous accueillir. Votre seule option, désormais, c’est de continuer votre route.

Il existait des échappatoires, il le savait parfaitement. Mais la femme n’avait pas besoin de le savoir. Elle devait continuer.

— Vers quoi ? pleurait-elle.

— La suite, répondit-il, laconiquement.

À quoi bon lui dire la vérité sur ce qu’il y avait derrière le grand voile de la mort ? Rares étaient ceux qui pouvaient témoigner de la réalité, et ceux qui en seraient capables ne le voulaient pas. Ce qu’Il réservait aux âmes ne méritait pas que l’on s’étende sur le sujet.

— Vous venez ? demanda-t-il doucement.

Lentement, elle hocha la tête. Elle capitulait. Bien que satisfait, l’ange savait qu’il n’avait pas de quoi se réjouir. Il ne faisait que ce que l’on attendait de lui, point à la ligne. Meredith devait le rejoindre, c’était écrit.

Avec douceur, l’âme de Meredith se détacha de son enveloppe qui disparut immédiatement du plan astral. Elle se retrouva alors debout, face à l’Ange de la Mort.

— Qui êtes-vous ? demanda-t-elle.

— Je suis là pour vous aider à passer de l’autre côté. Je suis l’Ange de la Mort.

— Oh.

Que pouvait-elle répondre d’autre, après tout ?

— Vous êtes prête ? souffla-t-il en lui tendant de nouveau sa main.

Meredith ferma les yeux, et ses larmes cessèrent. Elle inspira profondément et ses lèvres bougèrent rapidement sans qu’aucun son ne sorte. Priait-elle ? L’homme resta attentif, en silence. D’un moment à l’autre, elle prendrait sa main et tout serait terminé. Elle disparaîtrait définitivement de tous les plans.

Comme si l’univers attendait cet instant, le silence se fit. Meredith ouvrit les yeux et lui sourit. S’il en fut étonné, il n’en montra rien. Il lui répondit par un hochement de tête aimable et tenta de sourire… sans y parvenir.

Elle sembla comprendre mais ne dit mot. Lentement, elle lui prit la main et l’ange vit la paix apparaître sur son visage. Ils disparurent tous les deux dans un silence total. Un instant plus tard, il réapparaissait, seul.

Il lança un regard à la voiture accidentée tandis que les deux plans se retrouvaient. Il vit les services d’urgence tenter de faire revenir Meredith Peters, en vain. S’ils avaient su qu’elle était déjà loin, ils ne se seraient pas donné toute cette peine.

Mais il était conscient que les mortels avaient besoin de sentir qu’ils avaient une prise sur leur Destin et sur leur vie. Quand bien même il n’en était rien, l’impression les réconfortait et cela semblait leur suffire.

Alors que le visage de Meredith – et son inattendu sourire – réapparaissait devant son regard, il se détourna. L’ultime réaction de la jeune femme l’avait touché, secoué même. Il n’était pas coutumier de cela et avait plutôt l’habitude de réactions hostiles ou difficiles – comment les blâmer ? Mais le visage de Meredith demeurait gravé derrière ses paupières et chaque fois qu’il clignait des yeux, elle apparaissait et fissurait sa muraille intérieure.

Il s’apprêtait à prendre son envol, lorsque la petite lueur dans son bras gauche s’illumina. Sous sa peau, la lueur s’intensifia et devint bleue. Le Sceau. Dans son oreille, il entendit :

— M24811, clama la voix, rendez-vous au QG dans vingt minutes. Soyez à l’heure. Fin de la communication.

La lueur s’éteignit et il se retrouva tout seul de nouveau. La pluie redoubla bientôt d’intensité et il n’avait que vingt minutes pour se rendre au QG de la SUTA1.

2

La résignation est un mode de vie. Une façon d’accepter l’inacceptable, une façon d’accepter qu’il n’existe aucun moyen d’empêcher une action d’arriver. Être un Ange de la Mort oblige à être résigné.

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