Une éternité plus tard
135 pages
Français

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Une éternité plus tard , livre ebook

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Description

Il y a quelques années, le célèbre écrivain Adam Rasselot a vécu une tragédie dont il ne parvient pas à se relever.


Depuis, il est en panne d'inspiration, impossible d'écrire un nouveau roman.


Aujourd'hui, il n'est plus que l'ombre de lui-même.


En errant dans Paris, il va être percuté par un bus.



Cette collision va bouleverser son existence et briser toutes ses certitudes.

Sujets

Informations

Publié par
Nombre de lectures 18
EAN13 9782491580070
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0037€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Nicolas Carteron
Une éternité plus tard
ISBN numérique : 9782491580070
Éditions Thanéot Courriel : editions.thaneot@gmail.com
Le code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou les reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Je dédie ce roman aux quatre fantastiques, mes quatre grands-parents : Ginette et Serge Carteron, Raymonde et Claude Muller.
Ô femme, tu cherches l’amour... et moi, donc ? Gérard de Nerval Les filles du feu
Le 20 juillet.
Chapitre 1
Six romans, six succès, Adam tape sur les touches de son clavier. Une ligne apparaît sur son écran d’ordinateur. Pas bon. Il l’efface. Il regarde un long moment son écran, le curseur clignote. Ce roman le plonge dans un abîme de perplexité. Ce roman qu’il n’a même pas débuté, à vrai dire. Dans le milieu, on appelle cela le syndrome de la page blanche. Une idée lui vient. Adam écrit tout un paragraphe, une page entière en réalité. Il la relit et, comme toujours, c’est noir, sombre, ça parle de mort et d’annihilation. Son personnage principal n’est pas encore développé qu’il sait par avance qu’il va être creux, creux comme son cœur à lui. Sans regret, il supprime tout. Ce rituel est devenu une habitude. Deux ans que ça dure. Lorsqu’un auteur a le vent en poupe, il croit que rien ne pourra l’arrêter mais voilà, une bourrasque en sens inverse et le bateau n’avance plus. Certains navires restent coincés en pleine tempête et ils deviennent des plumitifs, des écrivains en pleine pirerdition, à la dérive. Deux ans qu’Adam est dans cette situation, perdu en pleine mer ; il a bon espo de retrouver un courant favorable par la suite, même si pour le moment son âme n’y est plus. L’horloge murale de son bureau sonne midi. L’inspiration n’étant pas de la partie, il décide de sortir faire sa promenade quotidienne. Pose du vélo contre le banc qui se trouve en face de son immeuble. Choix de la chanson qui va l’accompagner sur son trajet. Mise en place du casque audio, et c’est parti. L’écrivain roule dans les rues de Paris. Le soleil est à son zénith et inonde la ville de sa chaleur. À une époque, le simple fait de pédaler dans la capitale par beau temps aurait suff i à le rendre heureux. Plus maintenant. Cette promenade n’est plus qu’une formalité, une action mécanique qu’il réitère, chaque jour, sans exception. La musique résonne à ses tympans, elle lui permet d ’éteindre le bruit de la ville et de la circulation, une coupure radicale au tumulte extérieur. Adam apprécie ces moments car il ne pense à rien, et c’est ce qu’il recherche. Il ne prête plus attention aux rues qu’il emprunte. Tout est automatique et, en moins de temps qu’il ne faut pour le dire, il arrive à sa destination. La place Saint Michel. Son endroit préféré de Paris, un lieu qui lui rappe lle les plus belles images de son passé. Il s’arrête au pied de la fontaine. L’ange Saint-Michel terrasse le diable dans une pose éternelle. La statue surplombe deux chimères ailées qui crachent de l’eau. Les rayons du soleil viennent s’éclater contre le liquide dans une explosion de scintillements qui embellissent l’œuvre architecturale. Adam s’approche du bassin et il est immédiatement saisi par la fraîcheur. Il quitte son vélo et s’assoit sur une bordu re. La chanson de son baladeur se termine et une nouvelle commence. En introduction, un piano joue un air entraînant, c’est assez pour qu’Adam reconnaisse la mélodie,La fouled’Édith Piaf. Ses yeux fixent les passants et son esprit s’enfonce dans les couloirs de ses souvenirs.
Quelques années plus tôt...
***
Quand il était étudiant, Adam attendait les fins de semaine avec impatience. Le jeune homme réservait ses samedis après-midi à l’achat de livres. Avec quelques francs en poche, il descendait au métro Cluny - La Sorbonne, et remontait le boulevar d Saint-Michel pour s’arrêter chez Boulinier et Gibert Jeune. Il était à chaque fois plus impressio nné en voyant tous ces livres entassés sur les étagères. Souvent, le désarroi l’assaillait car il savait qu’il ne pourrait jamais lire tous les romans de la terre alors il faisait des choix, parfois au hasard, parfois incité par les conseils avisés de professeurs. Ses go ûts littéraires s’élargissaient avec le temps : science-fiction, anticipation, historique, nouvelles, policier, rien ne lui faisait peur. Certains samedis, il restait des heures pour dénicher le roman qui le ferait vibrer le reste de la semaine. Adam finissait par trouver son bonheur dans un ouvrage usé, fatigué, corné qui
était passé de mains en mains, un livre qui avait vécu et qu’il allait continuer à faire vivre, le cercle vertueux de la perpétuité littéraire. Ce jour-là, il sortit avecParadis perdu,de John Milton. Une œuvre que ce jeune lecteur assoiffé attendait depuis un long moment. Des mois entiers, pour tout dire car il cherchait plus prnérécisément la version de ce livre traduite par Chateaubriand. Il était heureux, c’était une belle jou e d’automne. Le soleil jouait à cache-cache avec de gros nuages cotonneux. Adam s’arrêta sur la place et s’assit aux pieds du bienveillant Michel. Il plongea dans le récit. Cette histoire raconte le court passage d’Adam, son homonyme, et Ève au paradis, et la tent ation à laquelle les deux premiers êtres succombèrent. Il dévorait le passage durant lequel Lucifer élaborait un plan diabolique quand une musique le sortit de son immersion. Adam leva la tête et vit une femme qui se tenait devant un amplificateur qui crachotait un son pas très propre. Tout amateur d’Édith Piaf aurait reconnu son air. La femme, petite, rondouillette, pas très bien habillée, entama son chant. Allez venez, Milord, vous asseoir à ma table, il fa it si froid dehors, ici c’est confortable…. La chanteuse roulait les « r » de la même façon que la Môme. C’était pas mal. Très vite, les gens s’arrêtèrent et formèrent un cercle autour de l’attraction. C’est un petit plaisir que l’on ne peut vivre qu’à Paris, dans la ville des artistes. Adam s’approcha pour profiter du spectacle. La femme termina Milordet enchaîna avecL’homme à la moto. La préférée d’Adam. Il savoura la chanson et imagina ce que devait être un concert de Piaf quand elle était encore en vie. Probablement quelque chose d’extraordinaire. Il était subjugué et, dans sa fou gue, il vit qu’à sa gauche, une fille chantait en chœur avec l’imitatrice. Cette femme dégageait un charme auquel Adam s’abandonna. Il voyait l’aura apaisante qu’elle renvoyait d’un simple sourire, so urire qui dessinait une déchirante fossette sur sa jconnaître cette jeune femme qui maîtrisait leoue. Adam admirait ce visage angélique, il voulait répertoire Piaf, etL’homme à la moto, qui plus était. Adam n’était pas d’un naturel timide, mais pas vraiment entreprenant non plus. Il fallait qu’il se décide à lui parler, et vite. La belle inconnue n’allait pas rester là toute la journée. Adam se tortu rait l’esprit, les nœuds qu’il se faisait au cerveau l’empêchait de réfléchir. Il ne cessait de la contempler, dans l’espoir que leur regard se croise et, qui sait, peut-être qu’un lien se tisserait. Il chercha et finit par trouver. La seule chose qu’il savait de cette fille était son goût pour Piaf. Un moyen simple et efficace de débuter une discussion. Il faudrait ensuite qu’il soit assez malin pour en savoir plus sur elle. Adam sentit son cœur s’accélérer. Milton commençait à glisser entre ses mains moites, mais il devait lui parler, c’était vraiment une Belle Inconnue. Il fit un pas en avant et se posta à sa hauteu r. Déception. Elle ne lui prêta pas la moindre attention, elle était totalement captivée par le chant. Adam n’osa pas l’extirper du bon moment qu’elle vivait. Une force invisible remonta en lui et le poussa à ouvrir la bouche. Vous avez une très jolie voix. La honte, comment ai-je pu dire une connerie pareille ? La fille le dévisagea durant un temps qui s’étira à l’infini. Adam avait l’impression que la vie qui l’entourait était en suspens. La chanteuse était en pause, les voitures se trouvaient toutes à l’arrêt, les gens restaient figés dans des positions absurdes. L’inconnue ouvrit la bouche et le monde qui l’entourait reprit son rythme. Je vous connais Milord, Venez dans mon royaume. Les voitures accélérèrent dans le flot de la circulation et les spectateurs frappèrent dans leurs mains. Merci, dit la jeune femme avec un sourire qui dessi na une nouvelle fois sa merveilleuse fossette. Ils restèrent à se regarder, chacun de leur côté. Adam aurait aimé que ce moment ne meure jamais, que son existence entière se déroule de cette façon. Euh… Comment se fait-il que vous connaissiez si bien Piaf ? Nul, Adam, archinul. Parce que j’apprécie ce qu’elle fait. Oui mais ce que je voulais dire, c’était que Piaf n’est pas de notre génération, alors bon… Et de quelle génération pensez-vous que je sois ?
Ah…. Je dirais que l’on a le même âge. En admettant que nous ayons le même âge, il vous semble impossible que j’aime Édith Piaf ? Non, ce n’est pas ce que j’ai voulu dire parce que moi-même j’aime énormément ce qu’elle fait. C’est juste que je suis surpris, c’est tout. Adam sentit arriver de loin le silence pesant qui s’installa entre eux. Il aurait voulu l’éviter. Impossible. Il ne pouvait s’en prendre qu’à lui-même. Il avait provoqué cette situation désagréable. La jeune femme ne cessait de le scruter. Gêné, Adam baissa les yeux à la recherche du réconfort que lui apporteraient ses chaussures. Ce fut à cet instant qu’il vit le livre qu’elle tenait :Sa majesté des mouchesde William Golding. Vous lisezSa majesté des mouches? Non. Elle attend un peu avant de reprendre, en réalité, je le relis. Vous l’avez déjà lu alors ? Je viens de vous le dire. Je ne suis pas archinul, juste le dernier des débiles. J’avais compris, et vous aviez aimé ? Adoré, c’est d’ailleurs pour cette raison que je le relis. J’avais beaucoup aimé aussi. La façon dont Golding transfigure la vie en communauté et en société à travers des enfants, est tout simplement géniale. Je l’ai lu il y a quelques temps mais je me souviens encore parfaitement du personnage de Simon et de son destin tragique. Sans … Adam faisait l’analyse complète de ce roman. Elle l’écoutait avec attention. Au premier abord, ce garçon qui l’avait accostée était timide mais en parlant littérature, il se révélait être une perso nne intelligente et pleine de bon sens… Désolé, reprit Adam, je vous embête peut-être en monopolisant la parole. Non, au contraire, ce que vous dites est vrai. Vous avez mis les mots qu’il fallait sur les sentiments qui se dégagent de ce roman. C’est exactement ce que j’avais ressenti à ma première lecture. Merci, il faut dire que la littérature est une de mes passions. Ah bon, et vous en avez d’autres ? De quoi ? Des passions, bien sûr, pouffa-t-elle. Ah ! … Adam hésita une seconde et se lança. s le voulez.Nous pourrions en discuter autour d’un café, si vou Elle tordit ses lèvres dans une moue attendrissante. D’accord, répondit-elle, je m’appelle Colombe. Enchanté Colombe, moi c’est Adam.
Tandis qu’ils étaient installés à la terrasse d’un café, les boissons chaudes fumaient, Colombe avait entouré la tasse de ses doigts pour se réchau ffer. Adam ne la quittait pas des yeux, il la dévorait tout simplement. Ils échangèrent d’abord quelques b analités, puis des choses plus personnelles, concernant leurs études respectives, leurs goûts, leurs passions. Elle voulait devenir enseignante et lui écrivain. Ils avaient l’impression d’être dans une bulle. Ils restèrent deux heures environ ensemble, Colombe prit congé, expliquant qu’elle avait des devoirs à faire. Elle le remercia, et il lui demanda s’ils pourraient se revoir. Il ne fallut pas plus d’un instant pour que Colombe accepte. Un petit morceau de papier sur lequel était inscrit un numéro de téléphone passa d’une main à l’autre. Le contact physique envoya une décharge invisible que personne ne vit entre ces deux êtres. Adam eut un frisson lorsqu’elle s’éloigna, il ne la lâcha pas du regard, jusqu’à ce que la bouche du métro l’avale.
Adam ne le savait pas. Il n’aurait même pas pu le s oupçonner mais cette rencontre était un tournant de sa vie. Colombe allait être sa future femme et bien plus encore. Adam se dit qu’il y avait des rencontres que l’on n’oubliait jamais.
***
Retour au 20 juillet.
Ce souvenir dessine un sourire sur les lèvres d’Adam. Cela faisait presque dix ans qu’il avait rencontré Colombe et il se souvenait avec précision de chaque détail. Tout avait été magique et fluide, il se demandait si cette rencontre était un fruit tombé d’un des nombreux arbres du hasard ou si c’était écrit quelque part. Il la revoyait partir avec cette démarche si sensuelle. Elle avançait avec cette lenteur
qui … D’un coup, un éclair l’éblouit, Adam entend des sons horribles résonner en écho dans tout son être, verre brisé, crissements, hurlements. Son cœu r s’emballe, l’air a du mal à s’engouffrer dans ses poumons. Il tente de se calmer, il inspire et expire comme il peut. Ce n’est pas le moment de ressasser le passé. Il voudrait effacer cette nuit horrible de son esprit, cette nuit qui est à l’image de Prométhée, cette nuit qui l’a enchaîné à un rocher et qui vient dévorer son âme. Adam décide de quitter la place et de rentrer chez lui. La musique dans son casque est forte. Forcément, c’est du AC/DC. Il se trouve au bord du trottoir, monte sur son vélo et traverse la route. Perdu dans ses pensées, l’écrivain ne fait attentio n à la voie de bus qui va à contre-sens de la circulation. En fond sonore, il entend un klaxon. Adam tourne la tête et voit l’immense véhicule lui foncer dessus. Une montée d’adrénaline explose dans sa cage thoracique. Ses pensées s’emmêlent, impossible de réfléchir, l’impact est inévitable. Il appuie de toutes ses forces sur les pédales. L’angle du bus vient le frapper au niveau de la jambe. Il sent son corps secoué en tous sens. Le monde tourne trop vite. Sa tête cogne quelque chose de dur. Il s’enfonce dans le néant. Adam est mort.
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