Morale et Politique
192 pages
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Morale et Politique , livre ebook

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Description

Extrait : "Tous les morceaux qui composent ce volume ont déjà paru et n'ont aucun lien ; après cet aveu, je désire expliquer ce qui m'a fait les réunir. On n'exige pas des poètes de ne publier que des poèmes ; pourquoi exigerait-on des prosateurs de ne publier que des histoires ou des traités ? On permet aux poètes de publier ensemble des pièces détachées, pourvu qu'il y ait dans chacune d'elles une idée, un sentiment, une forme ; pourquoi ne donnerait-on pas la même..."

À PROPOS DES ÉDITIONS LIGARAN :

Les éditions LIGARAN proposent des versions numériques de grands classiques de la littérature ainsi que des livres rares, dans les domaines suivants :

• Fiction : roman, poésie, théâtre, jeunesse, policier, libertin.
• Non fiction : histoire, essais, biographies, pratiques.

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Informations

Publié par
Nombre de lectures 27
EAN13 9782335102291
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0008€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

EAN : 9782335102291

 
©Ligaran 2015

Avertissement
Tous les morceaux qui composent ce volume ont déjà paru et n’ont aucun lien ; après cet aveu, je désire expliquer ce qui m’a fait les réunir. On n’exige pas des poètes de ne publier que des poèmes ; pourquoi exigerait-on des prosateurs de ne publier que des histoires ou des traités ? On permet aux poètes de publier ensemble des pièces détachées, pourvu qu’il y ait dans chacune d’elles une idée, un sentiment, une forme ; pourquoi ne donnerait-on pas la même permission aux prosateurs, aux mêmes conditions ? Ces conditions se rencontrent-elles dans les pièces qui sont ici ? Le lecteur en jugera ; tout ce que je puis dire, c’est qu’il n’y en a pas une seule qui n’ait été écrite avec un profond respect de la vérité et de l’art, et du public, à qui j’ose les représenter. Nous sommes quelques journalistes consciencieux, qui nous usons à son service ; nous le prions, en retour, de pardonner notre attachement pour ces pages fugitives : nous les avons méditées, les yeux fixés sur notre feu, dans les longs hivers ; nous les avons portées avec nous dans nos promenades solitaires ; nous pourrions dire où elles sont nées, au milieu de quelles préoccupations et de quel évènement, dont elles seules gardent la trace, que seul nous reconnaissons à une certaine teinte gaie ou triste, à un accent qui nous émeut encore ; elles sont nous-mêmes, elles sont nos années, qui ne reviendront pas. Aussi nous nous révoltons contre l’oubli qui les gagne ; elles ont vécu une heure, nous voudrions les faire vivre tout un jour.

ERNEST BERSOT.
Versailles, mars 1868.
I L’avertissement de M gr Dupanloup
Je viens de lire la brochure intitulée : Avertissement à la jeunesse et aux pères de famille sur les attaques dirigées contre la religion par quelques écrivains de nos jours, par M. l’évêque d’Orléans, l’un des quarante de l’Académie Française . Aucun écrit de M. l’évêque d’Orléans ne passe inaperçu ; celui-ci doit être remarqué pour des raisons particulières. Disons d’abord en quoi il consiste. C’est un recueil de citations tirées des livres et des articles des écrivains incriminés ; les hommes sont nommés : ce sont MM. Littré, Maury, Renan et Taine. Je distingue, comme le public a dû le faire, deux choses dans l’ Avertissement , l’ Avertissement en lui-même, puis le moment où il a paru.
Ce moment est celui d’une élection à l’Académie Française, où M. Littré se présentait. Avant tout, il y a une chose qui nous a touché. L’élection avait lieu le jeudi ; la brochure a été rendue publique la veille ou l’avant-veille, et la candidature de M. Littré est arrivée au scrutin sous le poids d’accusations énormes, qui auraient exigé bien du temps pour être éclaircies. Il est vrai que Mgr Dupanloup écrit dans sa brochure : « J’accepterai, je publierai toutes les rectifications, et on ne peut me faire un plus grand plaisir qu’en me prouvant que j’ai tort (p. 10). » Si Mgr Dupanloup avait reçu des rectifications de M. Littré, aurait-il eu le temps de les publier avant l’élection ? et que valaient-elles le vendredi ? J’ai vu ailleurs de telles surprises employées, et presque toujours avec un succès certain, mais je n’ai pu encore m’y faire et, je le dis avec un extrême regret, je n’y reconnais pas M. l’évêque d’Orléans.
La liberté que prend un académicien de discuter ouvertement les mérites littéraires d’un candidat lui appartient certainement, et il ne reste qu’à en examiner la convenance ; mais l’intervention de Mgr Dupanloup se complique ici de deux circonstances : il est évêque et il interroge les candidats sur la religion. Il me semble qu’en portant la question sur ce terrain, il a dû créer une situation pénible à ses confrères, pénible aux partisans et aux adversaires de M. Littré : aux partisans, qui avaient l’air de faire une profession de foi à propos d’un nom ; aux adversaires, qui avaient l’air de voler sur commandement. Seul évêque dans cette assemblée des quarante, et évêque « qui ne peut pas plus oublier sa mission que son titre, » il dit à ses confrères : « Vous m’avez nommé tout entier (p. 11). » Je crois qu’il se trompe. L’Académie ne prend personne tout entier ; si elle agissait ainsi, comme elle est composée des éléments les plus contraires, elle serait un monstre ; jalouse de recueillir tous les talents, elle ne prend de chacun que son talent particulier et la part d’illustration qui s’y attache.
Entends-je que l’Académie, en nommant Mgr Dupanloup, voulait ignorer qu’elle nommait un évêque ? Non certainement. Pas plus qu’en nommant le Père Lacordaire, elle ne voulait ignorer qu’elle nommait un moine. Ce sont de ces habits qui se voient, et elle les voyait ; mais elle tenait à prouver par ces choix éclatants qu’elle n’avait aucun préjugé que celui du mérite personnel, et en faisant entrer chez elle MM. Dupanloup et Lacordaire, elle y faisait entrer avec eux la tolérance. Il paraît que ce n’est plus cela maintenant ; nous en sommes attristé, nous n’en sommes pas inquiet, et nous continuerons de combattre pour la liberté de conscience, sans craindre pour elle, car il y a une chose que la France, qui tolère bien des choses, ne tolérera jamais, c’est l’intolérance.
Venons à l’ Avertissement lui-même. Tout son esprit est contenu dans cette phrase : « Je dépouillerai leurs ouvrages et déchirerai tous leurs voiles. Je veux les mettre dans la nécessité ou de me démentir en affirmant qu’ils croient à Dieu, à l’âme, à l’immortalité, à la religion, ou d’accepter et de porter publiquement les noms d’athées et de matérialistes devant lesquels ils reculent (p. 9). » Qu’y a-t-il donc de nouveau pour que Mgr Dupanloup adresse cette sommation aujourd’hui ? Dans tous les écrits qu’il cite, il n’y en a pas un de récent, il y en a même, et il y a abondamment puisé, qui datent de quinze ou vingt années. Si donc Mgr Dupanloup a pris son heure pour accuser, ces messieurs auront le droit de prendre aussi leur heure pour répondre ; et s’ils étaient plongés dans quelque grand travail, ils auront la permission de ne pas l’interrompre, pour entrer dans une discussion qui pourrait durer longtemps. M. Maury continuera d’amasser et de mettre en œuvre avec son libre esprit, une érudition immense, M. Taine préparera son Histoire de la littérature anglaise , M. Littré s’occupera de finir son Dictionnaire historique de la langue française , et M. Renan corrigera les épreuves de sa Vie de Jésus. En lisant la sommation que nous avons rapportée, il vient une réflexion. Mgr Dupanloup parle de cette discussion tout à son aise. Est-il bien sûr que ces messieurs aient, dans cette affaire, autant de liberté que lui ? Ferme-t-on les chaires des églises comme on ferme les cours des Facultés ? Poursuit-on devant les tribunaux une apologie du catholicisme, comme il est arrivé que l’on poursuivit la réfutation ? Ne se fait-il pas quelque illusion sur les conséquences des débats auxquels il provoque, lorsque, après avoir signalé avec mécontentement la position officielle que MM. Maury et Renan occupent dans l’enseignement, celle dont il est question pour M. Taine, et après avoir publié cet écrit, pour enlever à M. Littré les modestes jetons de présence de l’Académie, il dit : « Je n’écris pas une ligne pour empêcher ces hommes d’arriver à la fortune. » (p. 23).
Les citations rapportées dans l’ Avertissement sont nombreuses et paraissent accablantes ; il s’en faut de beaucoup qu’elles le soient. Pour qu’une citation soit fidèle, il ne suffit pas qu’elle soit copiée dans le livre même et reproduite entre guillemets : une phrase prend son véritable sens de ce qui l’entoure, chaque phrase jette son reflet sur les autres, comme chaque couleur jette son reflet sur les autres dans un tableau. Pour exprimer la pensée d’un écrivain, les mots isolés sont sans doute quelque chose, mais c’est quelque chose aussi que le mouvement, le ton du discours où entrent ces mots. Une pensée était sur le second plan, on la met sur le premier ; elle était une atténuation, on en f

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