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Description
Sujets
Informations
Publié par | L'Harmattan |
Date de parution | 01 septembre 2010 |
Nombre de lectures | 179 |
EAN13 | 9782296686557 |
Langue | Français |
Informations légales : prix de location à la page 0,0424€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.
Extrait
DANS LE CREUX DE L’ERRANCE
Poèmes
DANS LE CREUX DE L’ERRANCE
Poèmes
L’H ARMATTAN
Du même auteur
La Mauritanie à l’épreuve du millénaire. Ma foi de « citoyen », Paris, L’Harmattan, en 2006.
Le bivouac, suivi de Fresques d’exil, Paris-Dakar, L’Harmattan-Sénégal, juin 2010.
© L’H ARMATTAN, 2010
5-7, rue de l’École-Polytechnique ; 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattanl@wanadoo.fr
ISBN : 978-2-296-10279-8
EAN : 9782296102798
Fabrication numérique : Socprest, 2012
Ouvrage numérisé avec le soutien du Centre National du Livre
Dédicace
- Aux victimes des événements sénégalo-mauritaniens d’avril 1989.
- À mes enfants afin qu’ils témoignent un jour. Ces vers sont ma présence.
- À tous les enfants de tous les peuples qui se sont absentés un jour.
A VANT-PROPOS
« Mon pays est cette larme
Versée sur le sable brûlant du Sahara
Mon pays est soumis au crépuscule
Aux vagues de l’harmattan
Aux injonctions de la nature
Mon pays est chevauché sans bride
Par un nain majuscule ».
Abdoul Ali War, Le cri du muet, Paris,
Éditions Moreux, 2000, p. 122.
Les poèmes de ce recueil ont été écrits à des phases et en des lieux différents {1} . Je n’avais pas l’intention de les publier. Ils constituaient, pour moi, l’extériorisation d’une certaine sensibilité. L’objectif était de rompre ce silence interne qui envahissait mon âme d’exilé. Ils ne font pas seulement parler ma solitude, mais interrogent quelques événements douloureux vécus dans mon pays d’origine. C’est un hymne rythmé par les battements de mon cœur, mais aussi par la musique suave de la nature et le désir intense de vivre sur la terre qui m’a vu naître et grandir. C’est l’expression donc de ma fibre interne, de ma sensibilité et l’espoir que suscitent en moi tous les chants d’absence, médités dans l’exil momentané de la parole.
Mon pays, gouverné par la vénalité et l’impunité, me regarde avec un air triste. Ceux qui nous administrent sont devenus subitement, les « apôtres de la différence ». Ils régentent le pays avec leurs « idées étroites et rigides » qui s’alimentent à une « mémoire ethnique » qui les « ramène immanquablement vers le bercail » de l’intolérance. Mais en chassant « l’histoire » et en « croyant bannir la superstition ou l’erreur ; convaincus d’émanciper les esprits, ils n’ont réussi qu’à les déraciner. Ces calomniateurs du lieu commun n’ont pas délivré l’entendement de ses chaînes, ils l’ont coupé de ses sources.
L’individu qui devait, grâce à eux, sortir de sa condition de minorité s’est, en réalité, vidé de son être » comme l’écrit Alain Finkielkraut, parlant d’autre chose, dans son ouvrage La défaite de la pensée {2} .
Ils nous ont « exilés » loin dans les flots, les tourments et les labyrinthes de la nostalgie. Nos pensées se sont intériorisées, évoquant le silence d’une longue quête de sens. Pensées nostalgiques ? Mais les mots sont là pour démontrer notre existence, pour déchirer ce silence imposé par la force.
« La parole est ma défaillance ». Je tisse ces mots dans l’antre du vide. Je l’emplis de bruits qui proviennent du tréfonds de mon âme. Ils me transportent « vers l’autre, l’autre mot qui donne un sens, une limite, qui me donne ma limite » devant toutes les souffrances nées dans la nuit du monde. Je viole le mutisme en donnant la parole à mon long et douloureux silence : mon voyage forcé. Ces vers sont les vestiges de mon silence, les buttes-témoins de mon refus de me taire et de faire mourir en moi le désir de témoigner et de parler. La parole est une totalité ; et par elle je deviens sujet actif et prends conscience de l’esthétique qui tisse la liberté de m’exprimer et surtout de partager.
Je n’ai pas respecté les règles de la versification. Je n’ai fait que traduire les angoisses de mon âme. Ces vers coulent comme les flots du sang de nos victimes d’hier et d’aujourd’hui, mais annoncent aussi l’espoir d’une rencontre salvatrice.
Dans le creux de l’errance se psalmodie comme un verset.
P RIÈRE D’OUVERTURE
« Je reconnais au malheur toutes sortes de puissances, excepté celle de me délier de mes serments de fidélité », François René de Chateaubriand (1830).
S ILENCE
Mer d’inquiétude, dans laquelle on se noie.
Désert de solitude, dans lequel on se perd.
Un train passe,
seul signe extérieur de vie,
aux environs d’Inal {3} .
Il n’y a plus de repères
et ma pensée s’use,
mon angoisse s’accentue.
Au-delà des astres
et des vents, qu’y a-t-il ?
Quelques nuées répondent.
Elles viennent obscurcir,
le côté clair de mon horizon.
La vie devient monotone,
car je me perds dans le silence.
Silence des cimetières,
silence des déserts,
du Sahara
et du Ténéré {4} ,
de la Majabat el Koubra {5} ,
la plaine de Bilbassi {6}
et des Tropiques ensoleillés.
L’écho de ma voix
remonte du fond du profond puits d’Arihara {7} .
Le vent emporte mon message
aussi loin que possible,
mais rien ne répond,
sauf l’écho du silence.