L écume des lendemains
110 pages
Français

L'écume des lendemains , livre ebook

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110 pages
Français

Description

Ce texte présente en dix-huit pièces admirablement réparties, des énoncés dont l'arête principale s'organise autour du champ sémantique de l'obscurité et de la nuit. Il y est question de "pancréas du monde", de "carences nocturnes", d'exil de "minuit", des "profondeurs" et du temps qui passe.

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Date de parution 01 février 2011
Nombre de lectures 22
EAN13 9782296455559
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0474€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

L’Écume des lendemains
Wilfried Idiatha
L’Écume des lendemains Préface de Bellarmin Moutsinga
Nous sommes conscients que quelques scories subsistent dans cet ouvrage. Vu l’utilité du contenu, nous prenons le risque de l’éditer ainsi et comptons sur votre compréhension.
© L’Harmattan, 2011 5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris http://www.librairieharmattan.com diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr ISBN : 978-2-296-54165-8 EAN : 9782296541658
PREFACE
Wilfried )diatha ou la poétique des aubes constructibles
Doctorant en lettres à l’université de Villetaneuse près de Paris, Wilfried )diatha, né en ͳͻ͹͹ au Gabon, commet ici sa première œuvre :L’Ecume des lendemains, dont on entend d’entrée de jeu flûter l’errance et le lamento, s’égoutter dès le titre la fluctuation d’un prophétisme inquiétant, fluer l’écoulement des complaintes précaires et des allitérations liquides ; la fluidité nasillarde des instants baveux de gravité. Ecumer, c’est enlever la mousse. Mais c’est aussi être furieux, exaspéré, d’où l’écriture de la colère et de l’exaspération qui ponctue ce recueil. L’aube, qui est censée apportée la lumière du jour, est dorénavant une temporalité écrasée qui éructe, mousse la lie des profondeurs, projette les individus dans les sépulcres de la honte et annonce d’étranges ombres noires. Eructant la violence de ses colères, l’espérance que portent ses rêves, l’auteur s’emploie à connaitre par le déploiement des images, l’avenir que pourrait encore porter ou représenter des territoires où la ruine et la désespérance, la mort et le deuil, sont les maîtres-mots.
Ce texte présente en dix huit pièces admirablement réparties, des énoncés dont l’arête principale s’organise autour du champ sémantique de l’obscurité et de la nuit. )l y est question de « pancréas du monde », de « carences », « nocturnes » d’ « exil » de « minuit », des « profondeurs » et du temps qui passe.
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L’exorde paratextuel de cette livraison, qui renvoie à Alphonse de Lamartine, indique d’entrée l’expressivité romantique de la douleur et du râle qui revient en manière de ressac par le poids accordé aux mots de révolte et à la force suggestive des images qui grondent, qui se lèvent, qui se tiennent debout pour éructer toute la dimension du courroux et de l’ire qui habitent le poète. L’ensemble des titres des dix huit poèmes qui composent cette première production plonge d’emblée la lyre du poète dans son objet : la mousse blanchâtre qui se forme à la surface de son verbe comme des liquides agités, comme une mer en ébullition. )l s’agit de regarder en face la bave des lendemains. La première force qui frappe à la lecture de ce texte, c’est le ton fougueux, insoumis, revendicatif, qui négocie son parcours dans la simplicité directoriale du mot dépouillé. )l est de contestation puisque le vocatif sollicité ici y est clairement indexé, vilipendé : « les princes au cœur de pierre ». C’est un monde où « les étoiles, parait-il, s’éteignent ». Ecriture de la présentification déictique, ce recueil est une succession de tableaux, un détour par lequel le poète montre une réalité dont on ne se serait pas aperçu à temps et que son projet, à lui, se charge d’assumer. La poésie d’)diatha se définit d’abord dans le temps éruptif, spasmodique où elle germe, celui des déictiques qui montrent la triste réalité d’un monde brutal et convulsif, dorénavant « tapis de braises » où l’humain n’est plus qu’un « simple grillon », un pauvre troupeau de « défroqués merdiques », « des vieilles ferrailles de peaux brisées » « avec leurs rêves de justice émiettés ». L’heure est celle des hyènes, de ceux qui sèment impunément la mort autour d’eux, qui peint le tableau ombrageux de jours infects, des songes brisés. )diatha dit que « le monde est facturé, édulcoré », l’heure est
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« aux hiboux » et aux « hommes-panthères ». C’est un symbolisme fauve qui prévient un mal aigu. C’est pour cela qu’il parle « d’éléphant qui écrase des cafards ». )nquiet, il ne peut s’empêcher de s’exclamer : « ha ! quel monde on construit là ». )l est question des guerres, des « dictatures émergentes », qui annoncent des brutalités inhumaines, des « tapis de braises charriots de feu ». C’est donc une temporalité de la géhenne où tout brûle et s’embrase. En quoi le poète nous donne de goutter une poésie aux accents bibliques où la supplication devient une modalité de la prière :
 Ô Dieu fait de nous des hommes de foi
 Missionnaires de ton amour sacré
 Dans un monde où la vie éclate en mille choses.
 Fais hommes d’en haut !
de
nous
des
C’est une écriture éclatée, une forme qui crée une autre quotidienneté, un temps autre, celui de l’éclatement et de la peur, de l’explosion du chant qui se fait râle puissant dans l’exposition indécent d’une temporalité écumante. C’est une poésie de la couleur aussi, qui réinvente la noirceur étrange des chutes inexpliquées. Elle regarde vers l’universalité par cela seul qu’en dehors du texte de la langue dans laquelle elle se contemple et se déploie, et dont Senghor célébrait jadis l’universalité, cette poésie se tourne vers les territoires foudroyés par la sépulture, par la mort, par la violence des éléments qui s’abattent quasi quotidiennement sur eux et dont (aïti est l’emblème et le Signe. C’est que le poète se fait chantre de toutes les souffrances d’un monde qui s’embrase mais qui lutte du fonds même
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des entrailles du malheur. Les noms des territoires emblématiques se substantivent dans une différence qui évacue la mêmeté pour dire une noble résistance, pour dire comment ce pays crée de la vie au cœur même des ténèbres et de la mort. « Ayiti » dont l’appellation poétise autrement la mortification et le rêve brisé mais aussi, sublime pied de nez au malheur et au drame, la renaissance, le remembrement, la résurrection et l’espoir infini. La difficulté de dire la terreur d’un pays plongé dans le silence des cataclysmes et de la misère, de la mort, le « silence des corps morts sur le macadam ».
De cette « cruelle heure » de la mort et de la terreur monte l’unique arme contre le désespoir qu’est le cantique spirituel des « Appelés ». Ce sont des « chants mystiques » qui cinglent dans l’apocalypse et l’accablement de la Nuit, au cœur de la rigueur des terreurs et des difficultés, qui amènent le poète à remembrer prophétiquement la renaissance de la première république noire et le goût de la liberté selon Toussaint Louverture. En ce lieu surgit la folle métaphorisation prédictionnelle, insurrectionnelle, lumineuse, qui prophétise « les nouveaux chemins de liberté ». Le champ lexical est tout à la nuit, à la noirceur, à l’enfermement et à la froide forclusion d’un monde-prison, d’un bagne dont il faut absolument, impérativement s’extraire, s’élever pour aller appareiller ailleurs, vers ces « cieux assurés par des blessures mélancoliques ». Car la terre qu’il dénonce est un dévoilement ténébreux des souvenirs en râle, des carences et des profondeurs extatiques qui ponctuent le rythme tout de blues de son verset. Le poète oriente le lecteur vers un horizon d’attente qui énonce, annonce, dénonce, prononce l’Obsécration. Désormais errent des âmes en sursis et des corps
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impersonnels au cœur des « secrètes angoisses des ordres du Bocal » qui imposent des « successions sauvages ». )l édicte une ascèse du langage qui défondamentalise les catégories nucléaires des mensonges de l’histoire avec laquelle )diatha veut en découdre. En quoi l’élection du Mungongu, cette harpe traditionnelle au rythme mélancolique, est l’instrument de choix grâce auquel le poète égrène langoureusement les sons de rupture et les cadences éplorés, tend à détruire l’emprisonnement préfiguré par l’image baudelairienne du bocal, de l’enfermement, tout en charriant la musicalité insurrectionnelle de l’obstination. L’expression artistique des mots surgie donc « pour interdire les cathédrales d’injustices et les désordres du Temps », pour empoigner « les maux du monde » grâce à la force inventive des mots, du poème.
La poésie est l’objet des recherches de Wilfried )diatha qui rédige en ce moment une thèse sur la poésie francophone de son pays. )l n’est pas de ces auteurs qui écrivent de la poésie de manière cérébrale, juste pour exister en littérature. )l est un véritable auteur dont le projet fondamental est de ruiner la langue de la postcolonie. L’inflexion de ses textes croise tour à tour les réminiscences césairiennes du langage par la foi en l’avenir malgré les ombres des monstres blancs qui planent dangereusement sur le monde, qui dominent le monde, et tentent de soumettre les forces du rêve à leur humeur macabre. La poésie d’)diatha édicte le refus de se soumettre, de se rendre esclave des « dictatures émergentes ». Elle vaut par la dénonciation des successions dynastiques des princes « qui empêchent tout le monde de dormir et tout un continent de se réveiller », « voila l’écume des jours », dit-il, « la colonie des dinosaures qui chaque jour baillent sur les visages de masque ». La déclamation
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éruptive de la vie gagne contre la permanence de la mort. Le poète se fait rageusement le chantre des certitudes sereines : « nos mots à nous empoignent les maux du monde ».
Les emprunts à Sony Labou Tansi et à mes textes, dont la posture d’élévation vers l’azur est faite sienne suivent une interlocution enrichissante. Partagé entre le désir du « royaume des Ombres » et le « sort d’une humanité en crise », l’auteur, qui est un solitaire en quête de « fraternité magique », semble faire le choix de cet ailleurs vers lequel il s’élève plus haut et qu’il nomme le « vice à quoi je me livre ». )l peut dès lors chanter sa promesse de fidélité indéfectible à la « ville aux deux syllabes » qui habite toujours ses rêves, qu’il a dû quitter malgré lui, ainsi que la révélation christique d’une vérité qui seule affranchit des mensonges de ce « monde cou-coupé » où « la vie explose en mille choses ». De même, au cœur de l’exil et de l’hiver, dans une géographie dévastée, habitée de grand froid, une admirable prosopopée surgit dans l’évocation exilique de la Mère. Les chants du Ciel, l’appel à la prière et à la méditation distraient de l’errance et de la nostalgie, du deuil qui minent continuellement le séjour du poète en terre étrangère. La vie se trouve alors rattrapée par la dureté de l’existence, la musique et les chants de Dieu servant de viatique au voyageur esseulé qui porte son errance comme un fardeau ou la pierre que Sisyphe roule sans fin. Et dans ce « pays dévasté » et sans espérance, dans lequel le poète plaint sa mère, l’exhortation est à une oraison qui amènera le Ciel à se courber éventuellement sur la situation d’intranquillité que vit sa terre.
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