Reconstruction - Partie 6
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Reconstruction - Partie 6 , livre ebook

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Description


Dernier épisode



Elle rêve d'un nouveau départ, mais c'est la mort qui l'attend au tournant. Recueillie par ceux qui l'ont arrachée aux mains de ses agresseurs, c'est dans un monde de ténèbres qu'elle devra tenter de survivre.
Tout a commencé un soir de lune bleue, et tout se terminera dans le sang...










Novella feuilleton en six parties, à raison d'une partie par mois. Chaque partie est écrite et corrigée pour le mois même de sa publication.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 24 octobre 2014
Nombre de lectures 8
EAN13 9782919550944
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0007€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

BaDMOonRiSinG

6eme partie - Reconstruction

Marika Gallman

Éditions du Petit Caveau - Sang%numérique


J’ouvre les yeux en sursaut, désorientée. Pendant un instant, j’ignore totalement où je me trouve ou ce que je fais là. Puis j’entends la respiration de Marcus, lente et régulière, et j’ai soudain conscience de son bras, passé autour de moi de manière protectrice. Dehors, l’aube chasse lentement la nuit à coup de touches claires qui diluent les ténèbres, de sorte qu’il ressemble actuellement au bleu de mes yeux.

— Neela ?

Son torse vibre contre mon dos. C’est une sensation agréable.

Mon premier réflexe est de lui répondre que tout va bien, que j’ai fait un mauvais rêve, voilà tout, et qu’il ne faut pas s’inquiéter. Mais je ne rêvais pas. Je ne sais pas ce qui m’a réveillée en sursaut, et, surtout, tout ne va pas bien. Marcus n’est pas le genre de personne à qui l’on ment. C’est la dernière chose que j’ai envie de faire, je n’en ai jamais ressenti le besoin depuis que j’ai compris à quel point nous étions semblables. Alors, au lieu de ça, je me retourne dans le lit pour lui faire face.

La lumière, bien que faible, me permet de discerner ses traits. Ses yeux semblent noirs dans la semi-obscurité, pourtant ils n’ont pas perdu leurs paillettes. Collée contre lui, je lève la main et caresse sa joue, dégage une mèche de son front, laisse mes doigts s’attarder sur sa peau.

— J’ai eu pitié d’eux, je lui dis. Dans l’entrepôt, avec Doyle. Une de ces créatures m’a défendue. Nous étions liés, je le sentais, aussi clairement que je te sens, là.

Il ne me quitte pas des yeux. Il n’essayera pas de me remonter le moral. C’est une des nombreuses choses que j’apprécie chez lui. Pas de pipeau.

— Je ne sais plus qui je suis, je continue. J’avais envie de partir avec eux. J’avais envie de les sauver.

Je n’arrive pas à aller au bout de ma pensée. Je voudrais dire « Mais ils ont tué Sandra », ou « Et je vais me transformer en l’un d’eux ». Quelque chose. N’importe quoi. Le négatif. Pourtant j’en suis incapable. Le formuler le rendrait réel. Actuellement, ce n’est qu’une réalité alternative qui, si elle me pend au nez, est encore hors de mon champ de vision.

— J’ai peur, je conclus.

Marcus resserre le bras qu’il a toujours passé autour de moi et m’attire au plus près de lui. Je reste là quelques instants, lovée contre sa poitrine à écouter son cœur battre un peu trop vite tandis que les secondes s’écoulent un peu trop lentement.

— Je ferai tout ce qui est en mon pouvoir, dit-il finalement.

— Je sais, je murmure. Je crois que c’est ce qui m’inquiète.

Il ramène son bras de manière à pouvoir soulever mon menton du bout des doigts. Malgré la pénombre, je sais qu’il me voit également trop bien.

— Neela, je ne me sens pas obligé, tu n’es pas un poids. Tu ne me forces pas la main. Si je le fais, c’est parce que j’ai envie de le faire.

Je ferme les paupières et soupire aussi doucement que possible. Ma respiration se perd quelque part entre nos deux corps, fraîche dans la chaleur que nous créons.

— Je ne me pardonnerai jamais s’il t’arrive quelque chose, je lui dis, incapable de le regarder. Pas quand ton père est mort de cette manière...

J’ignore si j’ai commis un impair en mentionnant son père. Malgré les liens qui nous unissent, nous ne nous connaissons pas si bien, et j’ai conscience que ce n’est pas quelque chose dont il parle facilement.

— Il a fait ses propres choix, je ferai les miens.

Il m’embrasse sur le front, et je comprends que, pour lui, le sujet est clos. Je ne remets en aucun cas sa décision en question. Ce que j’ignore, c’est si je serais capable de vivre avec. J’ai déjà survécu à Sandra. Je mourrais si je devais survivre à quelqu’un d’autre. L’ironie de cette pensée m’arrache un sourire sans vie, et je rouvre les yeux. Celui que me renvoie Marcus est tendre, sincère. Il restera à mes côtés. Il sera là jusqu’à la fin. Il veut que je le sache.

— Essaie de te reposer encore un moment, me dit-il doucement. Tu auras besoin de toutes tes forces demain.

Demain, ou la grande et terrifiante inconnue.

Je me retourne pour reprendre ma position initiale, à l’abri dans ses bras, et je tire sur son poignet afin qu’il me serre comme si sa vie en dépendait. Et là, couchée contre l’homme qui m’a sauvée quelques jours plus tôt et serait prêt à recommencer sans l’ombre d’une hésitation, malgré la noirceur des événements à venir, je me sens bien, en sécurité. Pour dire la vérité, je ne me suis peut-être jamais sentie aussi bien.


Le matin est là lorsque je me réveille à nouveau. Nous n’avons pas bougé. Quelque part, je soupçonne Marcus de ne pas avoir fermé l’œil de peur que je m’éclipse pour jouer les héros – ou les antihéros – en allant me sacrifier pour qu’il ne lui arrive rien. On ne se connaît peut-être pas bien, mais il m’a vite cernée. Si j’estime que leur plan n’est pas assez sûr, je m’enfuirai. J’ai décidé ça à l’aube. Marcus est un homme bon. Il prend déjà assez de risques au quotidien pour lutter contre ces créatures. Il n’a pas besoin que je le mette plus en danger pour me sauver et fonce tête baissée dans un nid, ce qui pourrait bien signer son arrêt de mort. Peu importe à combien de balles il a survécu ou contre combien de vampires il peut se battre à la fois ; il y en aurait trop. Or, je pourrai aller dans ce nid sans problème. Les créatures ne me feront rien. Et, si on doit en arriver là, j’ai un plan.

Je m’étire légèrement. J’ai dormi un moment, même si ce n’était pas un sommeil réparateur. Au moins, c’en était un sans rêves, sans cauchemars. Un instant de noir total dans lequel j’ai pu m’oublier.

Marcus se coule contre moi et embrasse ma nuque. Je frissonne et les chatouilles m’arrachent un petit rire. Philippe ne s’est jamais montré câlin envers moi. Ça ne m’a jamais gênée, parce que je ne l’étais pas non plus envers lui. Mon père non plus n’a jamais été très proche. Il n’a jamais vraiment joué avec moi, ne m’a prise sur ses épaules que pour une photo de famille lorsque maman était encore vivante, et ne m’a embrassée que quand cela répondait au protocole. Les deux seules personnes qui m’ont témoigné de la tendresse, réellement, étaient ma mère et Sandra. Aujourd’hui, elles ont toutes les deux disparu, et en recevoir de Marcus me laisse une impression étrange. Elle est loin d’être dérangeante. Bien, bien loin. Mais elle amène une certaine nostalgie, comme si j’avais cruellement manqué de quelque chose toute ma vie sans réellement m’en rendre compte. Et maintenant, c’est trop tard. On pense toujours à ce qu’on ferait s’il ne nous restait qu’une journée à vivre. Est-ce qu’on la passerait avec les gens qu’on aime ? Partirait-on en voyage aussi loin qu’on peut ? S’amuserait-on jusqu’au dernier instant ? On a tous nos plans, tout le monde y a songé un jour ou l’autre. Mais voilà, si on l’a fait, c’est parce qu’on ne sait pas quand ce jour viendra. Que faut-il faire quand c’est le cas ? Il ne me reste probablement qu’un jour à vivre, et je n’ai aucune idée de ce que je veux en faire. Vaut-il mieux se battre en espérant en réchapper, avec la possibilité d’échouer et de ne pas profiter de ce qu’on a, ou démissionner et savourer jusqu’à la dernière miette ?

Je peux essayer de détruire le nid. J’ai des chances d’y parvenir. Elles sont minces, mais elles existent. Sauf que, en cas d’échec, je n’aurai pas profité de l’instant présent, de Marcus, de cette intimité et cette tendresse qui nous lie. Ou alors je peux décider de rester couchée dans ses bras jusqu’à ce que le soleil disparaisse, puis m’en référer au destin. Mais Marcus ne voudra pas. Car, comme moi, son instinct de survie prévaut. Oui, être allongée contre lui est ce que je désire le plus, pourtant je vais me lever dans la minute qui vient et essayer de prendre ce qui reste de ma vie entre mes mains.

— Et si on allait petit-déjeuner ? je demande en m’asseyant dans le lit, lui tournant tout de suite le dos.

Si je le regarde, j’aurai envie de me recoucher. Cependant, comme il ne répond pas, je finis par me retourner et je sens le sourire qui s’immisce sur mes lèvres avant d’avoir conscience de l’esquisser.

Marcus est allongé, un bras replié et posé par-dessus son front. Ses cheveux partent dans tous les sens, ce qui lui donne l’air d’un jeune chien fou. Mais c’est un chien fou que les bras du sommeil n’ont pas encore relâché. Le drap ne le recouvre que jusqu’à la moitié du ventre, et je fronce les sourcils en remarquant les cicatrices qui marquent sa peau. La nuit passée, la lumière était éteinte. Même si j’en avais envie, j’avais besoin de me cacher. Je les ai senties sous la pulpe de mes doigts, mais je n’aurais jamais cru qu’elles étaient si nombreuses et si impressionnantes. Ou peut-être que je ne voulais pas m’en rendre compte. Maintenant que je les vois, mon cœur se durcit.

Je tends la main et suis le contour de la plus profonde d’entre elles, qui s’étend d’un pectoral et part se cacher sous le drap. Je le soulève en la longeant et découvre que la marque s’arrête sur le flanc de Marcus. Elle fait près d’un mètre.

Je relève les yeux et remarque que Marcus m’observe de manière brûlante. Il semble totalement réveillé à présent.

— J’ai essayé de défendre ma mère.

Je hoche la tête, silencieusement. C’était encore un garçon quand il a reçu cette blessure. C’est peut-être la raison pour laquelle c’est la plus impressionnante. Son corps s’est formé autour, a grandi avec. Il a grandi avec.

J’en touche une autre, sur le sommet de sa poitrine, et je sais avant qu’il ne parle ce qui la lui a laissée. Quatre lignes côte à côte.

— Griffure.

S’il est comme moi, il guérit vite et bien. Pour que les marques soient encore là, la blessure qui les a provoquées devait être terrible. Elle a dû lui arracher la peau en profondeur.

Je pourrais continuer à tracer la carte de ses cicatrices, je sais qu’il me laisserait faire et répondrait à mes questions muettes, mais je n’ai pas envie de rendre l’atmosphère plus lourde qu’elle n’a besoin d’être.

— Petit-déjeuner ? je répète en replaçant le drap sur son ventre.

Un coin de sa bouche se relève, ses yeux brillent. C’est le sourire le plus charmant qu’il m’a jamais adressé. C’est peut-être même le premier qu’il m’adresse réellement. Et, soudain, la faim dans son regard me fait frissonner. D’une main, il remonte lentement le long de mon bras, suit la ligne de ma clavicule, et redescend encore plus lentement. Mon corps réagit aussitôt à ses...

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