Complète réparation
124 pages
Français

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Complète réparation , livre ebook

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Description

La plupart du temps, les innocentes victimes d'une machination judiciaire, du moins celles qui y survivent, finissent leurs jours à l'écart du monde, brisées, muettes d'effroi, exsangues. Il arrive pourtant que certains de ces justes trouvent encore la force de se relever pour donner un sens aux souffrances qu'ils ont endurées. Le Fur trouve dans le terrorisme une nouvelle raison d'exister. A ses juges, ses procureurs, à la bonne société qui l'emprisonnent, il promet d'appliquer une loi vieille comme le monde, celle du talion, mais quelque peu modernisée...

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 novembre 2010
Nombre de lectures 245
EAN13 9782296710917
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0500€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

COMPLETE REPARATION
Du même auteur


Ouvrage Technique

Le GPS apprivoisé, Editions Teknea, Toulouse 2002.
Gabriel BERTRAND


Complète Réparation


Roman


L’Harmattan
© L’Harmattan, 2010
5-7, rue de l’Ecole polytechnique ; 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-13269-6
EAN : 9782296132696

Fabrication numérique : Actissia Services, 2012
A François Mourmand, écrou 266792 Z et à tous ceux qui ont vécu la rage d’être enfermés innocents.


Lettre à Lydia

« Chère sœur, je viens d’avoir ta lettre qui m’a fait plaisir. […] Tu sais mercredi, comme je suis reparti, j’ai pleuré tout le long de la route. J’étais heureux que vous ne me laissiez pas tomber. Me revoilà, seul, en cellule, sans rien. J’attends un mandat pour pouvoir prendre la télé. […] Lydia, comme tu vas venir, rapporte-moi à manger car ici ce n’est pas bon. Tu sais, avec la prison, je ne suis plus le même, vous avez dû le voir. Allez voir le juge pour le permis [de visite,] des enfants. Ici, ils me bourrent de cachets car ils ont peur que je mette fin à mes jours car maintenant je n’ai plus rien à perdre, s’ils ne me redonnent pas ma liberté, je ne tiendrai jamais dix ans pour une histoire que j’ai jamais fait de ma vie. […] Ton frère qui vous aime. »


Extrait d’un courrier du 29 avril 2002 adressé à sa sœur par François Mourmand, accusé (à tort) d’Outreau, mort lors de sa détention provisoire après une surdose médicamenteuse.
Lundi 15 août 2016. Contournement de Nantes, 7 heures 15.
I l y a des journées d’été qui commencent de façon si enchanteresse qu’on finirait par croire à l’éternelle beauté du monde. Ces jours-là, il vaudrait mieux se méfier. Le Bozec, confortablement installé au volant de sa limousine, ne se méfie pas. Sur la voie rapide, tout est calme. La nuit s’est délicatement retirée pour faire place aux chatoyantes couleurs de l’aube. En dehors de quelques rares voitures qui filent à vive allure de part et d’autre des barrières de sécurité, la circulation automobile est réduite à sa plus simple expression. En temps normal, à cette heure, la situation est tout autre : les sudistes de l’agglomération tentent, par milliers, de franchir la Loire pour rejoindre leur travail, plus au nord de la ville, pendant que les nordistes, tout aussi nombreux, se livrent au même exercice, mais en direction du sud cette fois. Sur l’incontournable pont de Cheviré qui enjambe le fleuve, là où les voies rétrécissent, au moindre incident, pour un insignifiant accrochage ou une stupide panne d’essence, parfois même pour un banal coup de vent, la thrombose du chassé-croisé s’installe, la congestion routière gagne de proche en proche, le ballet échangiste ralentit sa course, se traîne encore quelque temps avant de s’immobiliser dans un concert de klaxons, piégé dans un gigantesque embouteillage.


Que le périphérique et le pont soient déserts ce lundi matin, le sudiste Le Bozec n’en est pas du tout étonné. Il sait parfaitement que l’agglomération nantaise compte, en cette période de congés, dix fois moins d’habitants que d’ordinaire, pour l’essentiel des actifs réquisitionnés, comme lui, par leur employeur à l’occasion du week-end prolongé du 15 août et aussi des personnes âgées dépendantes que l’on n’a pu extraire de la ville. Les autres sont partis en masse au bord de la mer toute proche. D’ailleurs, il fait un temps de rêve, les dernières étoiles s’éteignent doucement, le soleil entame joyeusement sa ronde, le ciel est d’un bleu serein, sans le moindre petit cumulus qui vienne faire tache et tout au loin sur l’horizon, en direction de l’estuaire, l’écharpe violette de la brume d’été déroule les douces promesses d’un anticyclone. Au thermomètre de sa limousine de fonction, Le Bozec lit 23° Celsius. Il va faire très chaud aujourd’hui, pense-t-il, ce sera une belle journée de travail, comme toujours à pareille époque, quand la ville se vide, quand chacun ne pense qu’à s’amuser, à bien profiter des beaux jours sur la plage, une journée estivale sans histoires, comme il les aime. Le téléphone de bord sonne. Un numéro s’affiche sur l’écran à cristaux liquides. Ils ne sont pas nombreux, ceux qui peuvent le joindre directement où qu’il aille, quelques privilégiés, une dizaine tout au plus. C’est Carole, son épouse, qui l’appelle. Il décroche :
Jacques ? C’est Caro. Je ne te dérange pas, mon grand ?
Pas du tout, ma chérie, cela me fait du bien de t’entendre. Je prends à l’instant la sortie qui mène sur les cours. Quoi de neuf à La Baule ?
Devine ! J’ai rencontré les Dieulegarde en faisant mes courses au marché hier matin, tu sais, nos nouveaux voisins, les parisiens qui viennent d’acheter la villa Art déco, au bout de notre allée.
Oui, je vois, des gens assez âgés, l’épouse marche avec une canne, n’est-ce pas ?
C’est cela. J’ai sympathisé avec eux devant l’étal du poissonnier et, tu ne me croiras pas, mais en parlant de choses et d’autres, j’ai appris que le mari avait un poste important à la chancellerie de la Légion d’honneur.
Ah ! Je ne m’en serais jamais douté.
Il m’a indiqué qu’il avait en charge le bureau des propositions aux ordres nationaux et aux médailles militaires.
Rôle éminent en effet !
Je les ai aussitôt invités à prendre l’apéritif samedi soir. Ils étaient libres. Ce sont des gens assez mondains. Monsieur Dieulegarde pourrait peut-être te donner un petit coup de pouce pour ton avancement au grade de Commandeur. Tu te rends compte, Commandeur de la Légion d’honneur à 45 ans ! Ce serait du presque jamais-vu. Et pour ta carrière, quel atout ! Tu vois que je pense toujours à toi.
Je t’aime. J’arriverai d’ailleurs assez tôt samedi, vers 13 heures au plus tard, car à Nantes tout est calme. Je ne te demande pas le temps qu’il fait sur la presqu’île.
Magnifique ! Un vrai régal, vois-tu. Dommage qu’il y ait tant de monde ici cette année et, crois-moi, pas que du beau monde.
Comment cela ?
Il se murmure sur le sable que c’est à cause de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes qui vient juste d’ouvrir ses pistes, à moins d’une demi-heure de route de la baie. Avec les vols low cost qui battent leur plein, il paraît que n’importe qui peut venir passer une semaine ici, à partir de n’importe quel point du globe, pour 500 euros tout compris. Surtout que plus de 800 passagers débarquent à chaque atterrissage de ces nouveaux Airbus 580 !
Airbus A380, Caro chérie, ne m’en veux pas de te reprendre. Mais tu as raison, ce nouvel aéroport est, en effet, le premier au monde à être construit spécialement pour accueillir cet avion géant et ses nombreux passagers.
Bon, A380 si tu préfères, en tout cas tu vois le genre ! Ce n’est pas du tout la clientèle qui fréquente le Castel-Marie-Louise ou le palace de l’Hermitage. Je dirais plutôt que c’est « papiers gras et cornets de frites », la foule quoi ! Et dire que les élus locaux prétendent qu’il s’agit de la plus belle baie du monde. Mais comment se fait-il que personne ici ne se soit indigné de la proximité de cet aéroport ?
Vois-tu, les élus de droite et de gauche étaient, à l’époque, d’accord pour le construire et, de ce fait, il n’y a jamais eu de débat sérieux sur les conséquences environnementales de cet équipement. Et puis tu sais, les vrais Baulois, ceux qui votent, ont beau être vieux, il n’y a pas de vieux Baulois. Ils séjournent dix, quelquefois douze ans sur place tout au plus et ne s’intéressent guère à la vie locale. Quant aux résidents secondaires, beaucoup croyaient qu’avec un nom pareil, Notre-Dame-des-Landes était vénérée plus au nord, en Bretagne profonde. En définitive, personne ne savait où se trouvait le village si proche qui a donné son nom à l’aéroport.
En tout cas, sur la plage, on ne sait plus très bien où étaler sa serviette au milieu de la populace. Le journal local prétend même qu’avec cette canicule, nous devrions, cet après-midi, battre largement le record de la veille et nous retrouver à plus de 20 000 sur la plage. Tu te rends compte ?
Tu dois faire erreur, C

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