Ethnographie d un village si ordinaire
215 pages
Français

Ethnographie d'un village si ordinaire , livre ebook

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215 pages
Français

Description

Saint-Denis-les-Eaux, village tranquille d'Eure-et-Loir tout proche de Châteaudun, abrite toute une galerie de personnages divers : une professeur qui attend le grand amour, un jeune arabe perdu depuis le décès de sa mère, un Américain loufoque et jardinier, des piliers de comptoir racistes, un maire plein de bon sens... Deux faits divers vont perturber le calme de la commune et une succession d'événements vont faire que plus rien ne sera jamais comme avant.

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Informations

Publié par
Date de parution 01 décembre 2012
Nombre de lectures 37
EAN13 9782296510548
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0850€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Bertrand Arbogast
Ethnographie d’un village si ordinaire
ETHNOGRAPHIQUES
© L’Harmattan, 2012 5-7, rue de l’Ecole polytechnique, 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr
ISBN : 978-2-336-00463-1 EAN : 9782336004631
Ethnographie d’un village si ordinaire
Ethnographiques Collection dirigée par Pascal LE REST
Ethnographiquesentraîner l’œil du lecteur aux veut couleurs de la vie, celle des quartiers et des villes, des continents et des îles, des hommes et des femmes, des jeunes et des vieux, des blancs et des noirs. Saisir le monde et le restituer en photographies instantanées, de façon sensible et chaude, proche et humaine, tout en préservant la qualité des références, des méthodes de traitement de l’information et des techniques d’approche est notre signe et notre ambition.
Déjà parus
Pascal LE REST,La marche du temps, 2011. ème Pascal LE REST,printempsBanlieue sud et le 17 , 2011. Bertrand ARBOGAST,La tondue, 2010. Muriel SANTORO,Mon voisin de maíz. Voyage au Guatemala au cœur de la culture maya, 2010. Pascal LE REST,Ethnographie d’un parcours adolescent, 2010. Bertrand ARBOGAST,Voyage initiatique d’un adolescent… Lancelot et le vieux, 2009. Mohamed DARDOUR,Corps et espace chez les jeunes français musulman. Socioanthropologie des rapports de genre, 2008. Jacques HUGUENIN,La révolte des « vieilles » : Les Panthères Grises toutes griffes dehors, 2003. Pascal LE REST,Des Rives du sexe,2003.
Bertrand ARBOGAST
Ethnographie d’un village si ordinaire
L’Harmattan
Du même auteur chez L’Harmattan :
Voyage initiatique d’un adolescent… Lancelot et le vieux (octobre 2009) La tondue… Un amour de jeunesse franco-allemand (octobre 2010)
Lucien sue à grosses gouttes assis sur son tabouret de bar. La douleur est insupportable, toute sa jambe droite est prise. Pourtant il s’efforce d’avaler son troisième demi. Dès le matin il a senti venir la crise de goutte. Il a pris le dernier cachet qui lui restait dans la boîte mais rien à faire la douleur s’est installée petit à petit et il en est maintenant au paroxysme. Pas de toubib un dimanche pour lui ordonner d’autres cachets, il ne va quand même pas se précipiter aux urgences pour une simple crise de goutte. Il faut faire avec ce mal atroce qui lui brûle toute la jambe. Le grand gaillard à la crinière blanche, au visage buriné avec des yeux noir intense, un ventre en forme de ballon, de gros ballon, a été un beau garçon dans le temps. Lui qui est toujours souriant a le visage fermé avec la douleur qui s’intensifie. Les habitués du dimanche commencent à faire leur entrée dans le café des Deux Amis, la cloche de l’église toute proche, sonne ses douze coups, la messe se termine, il doit faire bonne figure, pas question de casser l’ambiance. Pour tous ces petits travailleurs et ces quelques chômeurs, le pot du dimanche midi est sacré, on retrouve les copains, on se marre un peu, on picole pas mal, voire beaucoup, on tente de ne pas penser à la semaine à venir, qui sera aussi fatigante et frustrante que les semaines passées. Un homme entre, la quarantaine, déjà quelques cheveux gris, des lunettes, un visage un peu rouge, il a encore une belle silhouette, ancien rugbyman, il est vêtu d’un jean et d’un polo Eden-Park style XV de France, avec des rayures à dominante rose. Un tabouret est libre à côté de Lucien et il s’y installe. C’est la deuxième ou troisième fois qu’on voit cet homme dans le bar, d’après certains il vient de s’installer dans l’ancienne maison du père Billard, au centre d’un petit lotissement dont les rues portent des noms de fleurs, non loin du stade du village. Le père Billard est décédé il y a un an et son fils unique avait mis
la maison en vente. C’est donc cet homme qui l’aurait achetée. L’homme observe Lucien un long moment, il boit une gorgée de bière et se décide à lui parler. — Vous souffrez d’une crise de goutte ? Lucien le regarde étonné. Il n’a pas une gueule de médecin, ce mec. — D’abord bonjour et comment t’appelles-tu ? — Noël. — Bonjour Noël, moi c’est Lucien. Comment as-tu deviné que c’est une crise de goutte ? — Bonjour Lucien, je te tutoie aussi si tu es d’accord, c’est tout simple, je souffre aussi de temps en temps de la goutte, ton visage grimaçant et suant, ta main qui frotte ta jambe, tu es exactement comme je suis quand je suis en crise. Et d’après moi, tu n’as plus de colchicine ! — Putain, tu es devin, toi ! Tu en as des médocs en rab ? — Oui, et je reviens dans dix minutes, j’ai ce qu’il faut pour que tu tiennes deux jours. Noël s’est levé, a abandonné son demi aux trois quarts plein et est sorti. Lucien se sent déjà mieux, il sait que s’il prend deux cachets maintenant, la douleur va s’estomper et qu’il va se sentir très vite beaucoup mieux. Il va pouvoir finir son verre et même en commander un autre. Noël est vite de retour avec les précieux cachets. Lucien en met deux dans sa bouche et les avale avec une gorgée de bière. Il remercie chaleureusement son sauveur. La conversation s’engage entre les deux hommes. Noël explique qu’il vient d’acheter la maison du père Billard et raconte sa séparation avec sa femme, son divorce, ses deux enfants à la garde de son ex, sa joie de les retrouver un week-end sur deux et une partie des vacances. Lucien ne s’étend pas sur sa vie familiale, il dit juste qu’il vit avec une copine dans le lotissement voisin de
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celui de Noël et qu’il travaille comme plaquiste à Vendôme. — Ça m’intéresse, tu travailles au noir ? — Cela peut se faire, ça dépend du chantier, il y a beaucoup de cloisons à monter ? — Le mieux c’est que tu viennes voir, je t’expliquerai sur place. — Tu es libre quand ? — Demain je suis en RTT. — Super, je ne travaille pas le lundi. Les deux hommes se donnent rendez-vous à 10 heures le lendemain et commandent une dernière bière avec de rentrer manger.
Achir se réveille. Il est nu sur son lit, été comme hiver il dort à poil. Tout petit déjà il retirait son pyjama la nuit. Demain c’est son anniversaire, il aura 15 ans et personne ne le lui fêtera, à part sa grand-mère, ce qui est déjà pas mal. Pour marquer l’événement, il se fera un cadeau. Sa mère est morte depuis deux mois maintenant et elle lui manque terriblement. Il regarde autour de lui. Le papier peint des murs est marron triste, il y a une armoire à glace dont le plaquage se décolle, une étagère en fer. Cette chambre d’emprunt est laide, il n’est pas chez lui mais chez sa grand-mère, il n’a pas le choix, c’est ça ou l’errance. Il regrette sa chambre colorée dans l’appartement de Beauvoir, à Châteaudun, à quelques kilomètres d’ici. Bien qu’il aime beaucoup sa grand-mère, il n’a aucune envie d’installer ses affaires dans ce nouveau domicile, il laisse ses objets préférés dans les cartons, ici il campe avant peut-être de décamper un jour. Il entend le bruit dans la cuisine, il va bientôt être appelé pour passer à
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