L imam
480 pages
Français
480 pages
Français

Description

De nos jours, le rôle et l'influence des imams sont souvent évoqués ; le roman d'Abdullah Hussain est donc d'actualité, d'autant plus qu'il ne décrit pas une situation évidente mais qu'il propose au lecteur d'abord de connaître le vrai travail d'un imam, et ensuite de décider à laquelle des deux tendances qui apparaissent dans le roman - une conservatrice et une plus moderniste - il adhère. Le rôle d'un imam ne se limite pas à la conduite des prières du vendredi et aux prédications, mais est bien plus important. C'est alors que les traditions sont un peu bousculées et que les oppositions apparaissent.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 21 novembre 2019
Nombre de lectures 15
EAN13 9782140135859
Langue Français
Poids de l'ouvrage 8 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,1450€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Abdullah Hussain
L’IRMomanAM
Traduit du malais par Laurent Metzger
LIMAM
Abdullah Hussain L’IMAM Roman Traduit du malais par Laurent Metzger
© Utusan Publications & Distributors Sdn. Bhd. Translation and publication © Institut Terjemahan & Buku Malaysia © L’HARMATTAN, 2019 5-7, rue de l’École-Polytechnique ; 75005 Parishttp://www.editions-harmattan.fr/ ISBN : 978-2-343-16441-0 EAN : 9782343164410
AVERTISSEMENT DU TRADUCTEUR
TOUTEtraduction est une gageure et celle-ci n’échappe pas à cette règle. Il est toujours difficile de transposer tout ouvrage, y compris un texte littéraire, rédigé dans une autre langue et dans une autre culture que celles du lecteur de la traduction. Néanmoins, le jeu en vaut la chandelle et il m’a semblé intéressant de permettre aux lecteurs francophones de découvrir les controverses islamiques qui ont eu lieu dans un village fictif de Malaisie. Le lecteur francophone peut s’informer du contenu de la prédication dans une église ou un temple, mais a-t-il accès au contenu d’une khutbah, c’est-à-dire le prône du vendredi à une mosquée ? C’est donc le côté différent qui m’est apparu intéressant de montrer au lecteur occidental.
Ce roman nous permet donc de confronter deux grands points de vue sur le rôle d’imam et c’est au lecteur de décider celui qu’il préfère. Abdullah Hussain, l’auteur du roman, ne l’impose pas du tout.
Assurément pour réaliser cette traduction, il a fallu avoir recours à quantité de dictionnaires — aucun dictionnaire n’est vraiment complet — et à des ouvrages de référence. Je peux ainsi citer quelques dictionnaires monolingues, tels que Kamus Dewan, publié par Dewan Bahasa dan Pustaka, à Kuala Lumpur, 3e édition, en 2000, Le Petit Robert, Paul Robert, Paris, Le Robert, 1968, des dictionnaires bilingues, tels que Kamus Lengkap, de Drs Awang Sudjai Hairul & Yusoff Khan, Petaling Jaya, Malaisie, 1977.
Kamus Indonesia-Inggris/An Indonesian-English Dictionary, Jakarta Gramedia, 3e édition, 1994, Dictionnaire général indonésien français, Pierre Labrousse, Paris, Association Archipel 1984, des dictionnaires spécialisés tels que Dictionnaire des synonymes, de Henri Bertaud du Chazaud, Paris, Les usuels du Robert, 1990, et Dictionnaire du Coran, sous la direction de Mohammad Ali Amir-Moezzi, Paris, Robert Laffont, 2007. Il m’a fallu, bien entendu, utiliser une traduction du Coran. En fait je me suis servi de celle de Kasimirski, Paris, Garnier-Flammarion 1970, ainsi qu’un exemplaire du Coran en graphie arabe, en transcription latine et en traduction indonésienne, Al Quran Terjemah Indonesia, Drs H.A. Nazri Adlany, Drs H. Hanafie Tamam, Drs H.A. Faruq Nasution, Jakarta, Sari Agung, 1999. En ce qui concerne les citations de l’ouvrage Mukadima d’Ibn Khaldûn, je me suis permis d’utiliser la traduction en français Les Prolégomènes d’Ibn Khaldûn, de M de Slane, publiée par la Librairie Orientaliste Paul Geuthner en 1936.
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Mes remerciements s’adressent, entre autres, au Professeur Yasien Mohamed de Western Cape University pour la traduction de certains termes arabes. Je tiens aussi à remercier Marie-José Mauri et mon frère Vincent qui ont patiemment relu les épreuves.
Le lecteur trouvera également un glossaire à la fin du roman pour expliquer certains concepts et localiser les toponymes. Enfin pour respecter l’auteur, le traducteur a conservé la façon de parler malais, un peu maladroite, de certains Chinois de Malaisie, par exemple, chez lesquels le « r’ est prononcé « l ».
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INTRODUCTION
BILAL HAJI KULUB descendit de chez lui en toussotant. Cette petite toux indiquait habituellement à son épouse, qui était alors dans la salle de bains devant l’entrée de la cuisine, qu’il se rendait à la mosquée. L’air frais du matin pénétrait jusqu’à l’intérieur des os d’autant plus que la pluie de la veille, de fin décembre, avait été abondante et qu’il avait également plu dans la journée. Bilal Haji Kulub ramena le revers de sa veste sur son vêtement malais pour se protéger le cou. Puis il se baissa pour passer sous la maison afin de prendre son vélo. Il détacha la chaîne qu’il avait attachée à un pilier de la maison et le tira dehors.
Avant de monter dessus, il leva les yeux vers le ciel en direction de l’est. L’étoile du matin scintillait faiblement loin dans le ciel. Ensuite, son regard se porta sur les maisons à droite et à gauche. Presque tous les habitants s’étaient déjà levés. On les entendait s’agiter. Certains toussotaient, des enfants criaient et on entendait l’eau que l’on prenait du puits. Les poules et les canards s’agitaient aussi dans le poulailler. Le cocorico des coqs qui avait auparavant indiqué le lever du soleil se répondait de maison en maison. Sur le vieux ramboutanier, on entendait les ébats et le gazouillis des oiseaux et le battement des ailes au moment où ils s’envolaient.
Haji Kulub poussa un moment son vélo puis monta dessus. À quelques mètres de chez lui, il passa devant la maison d’Haji Mihad. Sa maison était très éclairée et on voyait la lumière par la fenêtre qui était ouverte. Quelques mètres plus loin, il passa devant la maison d’Haji Qamar encore plongée dans l’obscurité et dans le silence. Dans cette maison, il n’y avait ni femme ni enfants pour qu’elle rayonne.
Bilal Haji Kulub pédalait lentement. Il n’était pas pressé, car ce n’était pas encore l’aube et il ne craignait rien puisque Haji Qamar s’était déjà rendu à la mosquée pour ouvrir la porte et les fenêtres et dérouler les tapis de prière.
Il passa ensuite devant la maison d’Haji Syamsuri. C’était une grande maison, très éclairée. Ses habitants étaient réveillés et se parlaient à voix haute. On entendait aussi la radio.
Haji Kulub arriva à l’enceinte de la mosquée. Lorsqu’il voulut y entrer, il descendit de sa bicyclette et la poussa lentement. Une fois parvenu sur l’esplanade assez plate devant la mosquée, il remarqua que derrière celle-ci il faisait clair comme en plein jour, car on avait allumé beaucoup de lampes à pétrole et des torches.
« Les gens sont plus nombreux maintenant », se dit-il à lui-même. La veille, le comité de la mosquée avait décidé d’ériger une palissade tout autour
de la mosquée pour empêcher la venue des orpailleurs. Dès que la nouvelle s’était répandue qu’on avait trouvé de l’or à proximité de la mosquée, tous les jours depuis une semaine, des gens venaient creuser pour chercher de l’or, non seulement les habitants du village, mais il y avait aussi des gens qui venaient de plus loin.
Le dimanche matin, la semaine dernière, lorsqu’ils se préparaient à rentrer après avoir écouté la leçon du matin d’Haji Mihad, Haji Daud, qui habitait dans une petite maison à l’extrémité du cimetière au sud-ouest de la mosquée, était venu à la mosquée, apportant un paquet et l’avait remis à Haji Mihad.
L’arrivée d’Haji Daud, bien qu’il soit souvent présent depuis qu’Haji Mihad était revenu au village, avait étonné et cela d’autant plus lorsqu’il montra des morceaux d’or en ouvrant le paquet qu’il avait apporté. D’après lui, il avait obtenu ce morceau lorsqu’il avait creusé un nouveau puits. Le vieux puits avait été contaminé par la carcasse d’une chèvre qu’on n’avait pas pu sortir du puits. La terre qu’on avait extraite du nouveau puits avait été utilisée pour combler l’ancien.
Haji Mihad avait nettoyé les petits morceaux avec de l’eau et du savon et c’était bien de l’or qui brillait. La foule des fidèles qui se trouvaient là à ce moment s’agita et, comme par hasard, les deux comités, celui de la mosquée et celui du village, se trouvaient alors réunis, on décida de faire une assemblée générale extraordinaire.
Haji Kulub se rappelait encore l’allocution d’Haji Qamar qui était assis à côté de lui. « Ces objets vont apporter le malheur au village. » À ce moment-là il n’avait pas saisi le sens des propos d’Haji Qamar.
Puis l’assemblée décida unanimement de ne pas révéler l’existence de l’or pour éviter que la fièvre ne s’empare des villageois et qu’ils ne se mettent à creuser pour chercher de l’or près de la mosquée. Le chef du canton, Haji Ismail, rappela que les anciens avaient évoqué le fait qu’il y ait de l’or près de la mosquée.
Le comité de la mosquée prit alors la décision de faire construire une palissade solide avec du fil de fer barbelé autour de la mosquée afin de remplacer l’ancienne barrière qui était en mauvais état. Ils devaient en informer Haji Syamsuri qui était l’administrateur de la Fondation Haji Salih.
Mais cette après-midi-là, il y avait aussi des villageois ainsi que des habitants des villages voisins qui étaient venus avec des pioches et des tamis. Ils avaient commencé à creuser la terre dans la zone sud-est près de la cabane d’Haji Daud. Vers le soir, leur nombre s’accrut. Au début, il n’y avait que des Malais, puis arrivèrent aussi des Chinois et des Indiens. Ils apportaient des lampes à pétrole, faisaient des feux de camp, ils avaient monté des tentes et même des échoppes qui proposaient de la nourriture. L’orpaillage et le
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tamisage prirent encore plus d’ampleur lorsque certains d’entre eux commencèrent à découvrir des pépites d’or néanmoins plus petites que celles qu’avait apportées Haji Daud.
Le lundi matin leur nombre augmenta encore, il y avait déjà des courtiers qui avaient établi des stands pour acheter l’or qu’avaient découvert les orpailleurs. Tout autour de cet endroit s’était constitué une sorte de petit marché. Au milieu de la journée, le terrain avait été complètement transformé en bassins et canaux qui partaient dans tous les sens, comme une fourmilière. Les trous étaient de plus en plus profonds et pleins d’eau. Bien que la pluie ait commencé à tomber à verse l’après-midi et que les tranchées qui avaient été creusées se soient remplies d’eau, les gens continuaient d’écoper et de tamiser. Plusieurs ne rentrèrent pas chez eux.
Le comité de la mosquée vint au-devant d’eux pour leur demander de quitter cet endroit. Mais personne ne lui prêta attention. En revanche, ils apparurent hostiles et manifestèrent leur opposition au comité. Alors les deux comités, celui de la mosquée et celui du village, déposèrent une plainte au commissariat et demandèrent à la police de contrôler la zone et d’empêcher la foule de creuser et de tamiser à cet endroit. Le mardi, le nombre des gens présents à cet endroit augmenta encore et certains d’entre eux venaient de très loin, en plus de ceux qui venaient voir le spectacle qui leur était offert. La police ne put pas contrôler la situation. L’avidité et la passion des orpailleurs montraient qu’on ne pouvait plus les en empêcher. La police conseilla alors au comité de la mosquée de construire une clôture solide. Le comité demanda à l’administrateur de la Fondation des fonds pour ériger une telle clôture, mais il ne parvint pas à rencontrer Haji Syamsuri. Finalement le mercredi après-midi, Haji Syamsuri convoqua le comité et enfin le jeudi il put trouver un entrepreneur qui accepta de construire cette clôture.
Bilal Haji Kulub fut surpris de trouver que la porte et les fenêtres de la mosquée n’avaient pas encore été ouvertes. Il se précipita pour ranger sa bicyclette derrière la mosquée dans un petit abri. Bilal Haji Kulub qui avait déjà fait ses ablutions chez lui se dirigea immédiatement vers la porte et l’ouvrit en grand, puis il alluma les lampes tout en ouvrant les fenêtres et fut vraiment étonné de voir qu’Haji Qamar qui était arrivé avant lui n’était pas là.
« Que la paix soit sur toi ! »
Bilal Haji Kulub répondit et se tourna vers la porte. Haji Qamar apparut à la porte la bouche ouverte et il entra. « D’où viens-tu ? » « Je suis allé voir les orpailleurs. Ils sont plus nombreux et je pense que nous ne pourrons pas ériger cette clôture », répondit Haji Qamar.
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