La dernière allumette
51 pages
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La dernière allumette , livre ebook

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Description

Dernière cigarette pour des soldats sur le front. Dernier recours d’une jeune mère dans un bidonville. Dernier appel d’un romancier claustrophobe. Dernières larmes versées en plein désert. Dernier repas du condamné. Dernier combat de boxe… qui se termine mal.
Qu’elles soient campées au Canada, aux États-Unis, au Mexique ou en Égypte, les onze nouvelles réunies dans ce recueil font entendre des voix parfois désespérées, souvent désemparées, ironiques ou tendres. Acculés à leurs derniers retranchements, les personnages de La dernière allumette se retrouvent en équilibre sur le mince fil du présent, prêts à basculer dans le vide.
Dans une écriture vive et sensible, Aurélie Resch propose des histoires singulières et touchantes, qui rappellent la fragilité de la destinée humaine.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 11 octobre 2011
Nombre de lectures 3
EAN13 9782895971955
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0500€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

LA DERNIÈRE ALLUMETTE
DE LA MÊME AUTEURE
Nouvelles
Le bonheur est une couleur, Ottawa, Éditions L’Interligne, 200 8.
Obsessions, Ottawa, Éditions L’Interligne, 2005 .
Les yeux de l’exil, Ottawa, Éditions Le Nordir, 2002.
Jeunesse
Les voleurs de couleurs, Ottawa, Éditions L’Interligne, 2010 .
Histoires d’amitié (collectif), Ottawa, Éditions du Vermillon, 2009 .
Contes de la rivière Severn, Ottawa, Éditions du Vermillon, 2005 .
Poésie
Cendres de lune, Paris, L’Harmattan, 2010.
Haïti, je t’aime (collectif), Ottawa, Éditions du Vermillon, 2010 .
Aurélie Resch
La dernière allumette
NOUVELLES
Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives Canada
Resch, Aurélie, 1971-
La dernière allumette / Aurélie Resch.
(Voix narratives)
ISBN 978-2-89597-167-2
I. Titre. II. Collection : Voix narratives
PS8585.E79D47 2011 C843’.6 C2011-900846-7

ISBN format ePub : 978-2-89597-195-5

Les Éditions David remercient le Conseil des Arts du Canada, le Secteur franco-ontarien du Conseil des arts de l’Ontario et la Ville d’Ottawa. En outre, nous reconnaissons l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Fonds du livre du Canada pour nos activités d'édition.

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Télécopieur : 613-830-2819
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Tous droits réservés. Dépôt légal (Québec et Ottawa), 1 er trimestre 2011
À mes amis et complices d'écriture, Marguerite, Aristote et Paul
NOUVELLES
La dernière allumette
Le froid recouvre la plaine et détaille les contours des taillis et des buissons. Les hiboux et autres prédateurs nocturnes ont préféré la chaleur de leur nid à l’encre de la nuit. Tout est calme et silencieux. Pourtant l’air est lourd, chargé d’électricité. Cette terre aride, champ de bataille depuis plusieurs mois, n’a pas fini de compter ses morts et ses blessés. Depuis octobre, les deux camps se font face. Impitoyables, ils visent, chargent et tirent sans relâche, infligeant de lourdes pertes à l’ennemi. Combien de corps, jeunes, vieux, légers ou robustes ont déjà été rendus à leur famille? Combien d’hommes continuent d’alimenter de leurs chairs pourrissantes la vermine des tranchées? Entre vent glacial et pluie pénétrante, les soldats ont eu à lutter contre la maladie, le découragement et l’épuisement avant de succomber aux balles de l’adversaire. Et pourtant, nul n’a capitulé. Il n’y a pas eu de rappel à l’ordre ou de retrait des troupes. Même le sol est resté de marbre. Impassible. Impénétrable. Malgré la grêle, les obus et les coulées de sang, il est resté sec, indifférent. Il ne lui reste plus d’arbres ni de fleurs pour chanter… Pourquoi continuer à croire et à faire semblant? Il laisse la guerre se faire, se lasser et s’épuiser. Un jour, ils finiront bien par s’arrêter.
Dans leur tranchée, ils restent sur le qui-vive. Ils ont l’habitude de ce silence pesant qui précède l’assaut brutal. L’ennemi est sans pitié. Sans fatigue aussi. À eux de se montrer vigilants. De tenir jusqu’à l’aube et de reprendre le combat. De vivre et de vaincre. Voilà le leitmotiv de ces années-ci. Les composantes de l’homme. Tenir, vivre et survivre. Pour vaincre. Et tuer. Plus personne n’y croit. En tout cas, plus personne vivant encore dans les tranchées. Peut-être que là-bas, dans les quartiers généraux, un peu en retrait, on discute encore de tactique et de victoire. Dans la boue, les viscères, la roche et le froid, on s’est lassés. On s’est même laissé convaincre qu’on ne viendrait jamais les chercher. Tenir bon, pour un jour pouvoir rentrer chez soi, retrouver un lit douillet, un doux fumet ou des bras accueillants. Et encore! Tenir bon, juste pour ne pas être un cadavre de plus qui embarrasse les copains et qu’on ne montrera pas à la famille tant il est repoussant. Tenir donc. Tenir.
La nuit doit être bien avancée, car il fait de plus en plus froid et humide. Je sens plus mes muscles. Encore une journée pourrie avec une bruine fine et des tirs à n’en plus finir. Douzet et Maurand ont été désignés volontaires pour vider notre tranchée des cadavres puants. Avec leurs tripes à l’air et leur cervelle dispersée à peu près partout autour de nous, on fait pas moins salubre ici. Et nous, il faut qu’on reste et qu’on résiste. Dieu sait encore combien de temps cela va durer! Hier, ils ont été deux, deux jeunes blondins, à péter les plombs. Ils en pouvaient plus d’attendre et préféraient regarder la mort en face. Une rapide qui n’aurait pas le temps de les angoisser encore plus longtemps. Ils ont pas été déçus : à peine ont-ils dressé la tête de notre saignée, à peine avaient-ils engagé un bras ou une jambe hors du trou, que de brèves rafales les ont fauchés. Ils sont retombés avec un bruit mou et un trou entre les oreilles, les épaules déchiquetées. On n’a pas vraiment cherché à les retenir. On est trop fatigués pour ça et pour se soucier de qui tient et qui ne tient plus. N’empêche que ça n’a réjoui personne, ces deux jeunes corps balayés dans leur trentaine. Surtout pas Douzet et Maurand qui ont dû se taper deux morts en plus. Pendant qu’en face, ils devaient brailler victoire, ils ont dû prendre des risques pour évacuer plusieurs kilomètres au sud les morts. On les enterre pas. On les brûle pas. On les sort juste du trou. Qu’ils aillent nourrir cette fichue terre et les vers qui vont avec ailleurs. Ici, on a suffisamment à faire pour rester en vie. Pas la moindre idée du compte. Plus de cadavres chez eux ou chez nous? On a l’impression d’en abattre un grand nombre, mais comme la mauvaise herbe, comme nous peut-être, ils repoussent. Et il y en a toujours d’autres pour nous bombarder, nous empêcher d’aller pisser ou de fermer l’œil quelques minutes. Un instant d’inattention et hop! C’est le charnier assuré. Tout ça, quand c’est pas à nous de faire feu et d’infliger le maximum de dégâts. Au résultat, on n’en peut plus et on continue. Parce qu’il faut bien. Parce qu’on aimerait bien sortir de cette foutue tranchée. Parce qu’on ne sait plus.
Je me suis pas fait de copains. Pas envie de pleurer quand l’un d’eux meurt. On communique, on se comprend. Parfois on se soutient. Ça s’arrête là. C’est moins dur. De toute façon qu’est-ce qu’on aurait à se dire? On peut plus rien entendre avec nos tympans crevés et nos oreilles qui sifflent en permanence. Et avec le froid, on n’est pas enclins à étirer les mots pour que l’autre puisse lire sur nos lèvres, alors… De parfaits petits soldats. Bien programmés. Pour durer, pour tuer. On a même arrêté de râler. Le rêve pour nos supérieurs, non? À savoir s’ils sont encore en vie. Plus d’envie, plus de haine. Juste la routine qui est bien bête, faut l’admettre, mais qui aide à passer à travers tout ça et à tenir. Jusqu’à ce que ça finisse. Parce que ça, on y croit tout de même encore un peu. Ça finira bien par arrêter. L’Histoire l’a déjà montré plein de fois. Il y a toujours un moment d’accalmie. À c’te heure, il y en a qui écoutent les informations à la radio, qui font l’amour ou qui regardent les étoiles. Moi, je cale mon menton sur ma poitrine pour m’empêcher de trembler. Avec l’humidité qui s’infiltre partout, on est transis jusqu’à la moelle. Pas moyen de tenir son fusil droit! J’ai pas sommeil. J’aurai tout le temps de dormir quand je serai mort. Comme tant d’autres, je guette une faiblesse en face. Le moment propice où je pourrai en descendre un de plus. On ne dort plus. On gagne ça sur le temps. On étire notre vie.
J’en vois un, pas loin, qui me regarde. Fournier, je crois qu’il s’appelle. Dans l’obscurité, c’est dur d’être sûr à 100 % de ce qu’on voit, mais il me semble bien distinguer le balai de poils durs sous les narines qui le caractérise. Fournier, quand il est arrivé, il était de joyeuse humeur, toujours prêt à rempiler, à monter au créneau, à relever le moral des troupes. Et depuis sa descente ici… Il a pas changé. Enfin, pas beaucoup. Alors que tant d’entre nous sombrent dans le dégoût, la peur et l’amertume, lui, il continue de sourire. Un sourire plus pâle certes, mais bien là. Il parle moins, m

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