La lettre de Charlotte
285 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
285 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Printemps 1941. Trois femmes, Marie, sa sœur Charlotte et leur mère Madeleine, vivent misérablement. La présence des occupants les divise. Marie fréquente un jeune résistant, Jean, alors que Madeleine se rapproche des soldats allemands afin de survivre. Lors d'un bal où les jeunes filles sont invitées, Charlotte rencontre un jeune officier allemand et tombe sous son charme. Mais lorsque Jean est arrêté et torturé, la suspicion exalte les esprits... Qui l'a dénoncé ?

Sujets

Informations

Publié par
Nombre de lectures 51
EAN13 9782812914867
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0029€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Roger Faindt



La Lettre de Charlotte















Établi en Franche-Comté, Roger Faindt s’est lancé avec passion dans l’aventure de l’écriture. Il est scénariste, « prêteur de plume », auteur de nombreuses nouvelles, d’ouvrages de science-fiction et de plusieurs romans ayant souvent pour toile de fond les deux grandes guerres du xxe siècle. Il a été récompensé par le Prix Louis Pergaud 2001 pour La lettre de Charlotte.





Du même auteur

Aux éditions De Borée


Bleuvent
Le Dernier Soldat
Les Âmes Simples


Autres éditeurs


10 h 59
Ils ont cru aux larmes des femmes
La petite maison jaune
Le silence des roses, un été 1944
Le Souffle du Passé
Les fleurs de Nouara
Niobé, la fille aux lèvres bleues
Quand les ombres s’allongent









En application de la loi du 11 mars 1957, il est interdit de reproduire intégralement ou partiellement le présent ouvrage sans autorisation de l’éditeur ou du Centre français d’exploitation du droit de copie, 20, rue des Grands-Augustins, 75006 Paris.

© De Borée , 2017
© Centre France Livres SAS, 2016
45, rue du Clos-Four - 63056 Clermont-Ferrand cedex 2








J’essaye de trouver des hommes qui avec moi étaient restés de ma mère les contes sur l’enfer disaient la vérité De réels hommes j’en trouverai j’en rencontrerai deux ou trois dans la terre endolorie nous planterons des bois. Homme, tends-moi donc la main ta chaleur je veux sentir et maintenant dis-le bien ciel ou enfer veux-tu bâtir ?

Andrej P lávka
Les feux sur les montagnes







Avertissement




La trame de ce roman qui mêle histoire personnelle et histoire collective relève de la fiction. Faire du vrai avec du faux et inversement est à la fois jubilatoire et frustrant. Le roman touche à la vérité. Une vérité qui est rarement confortable et que beaucoup gardent enfouie au plus profond d’eux-mêmes. La guerre est une chose atroce et on ne le dira jamais assez. Peut-on oublier ceux qui en ont été les victimes et la première de toutes : la vérité ?







Remerciements




Je remercie Hélène Faindt, Yvain Guerrero, Philippe Guyot et Odile Martini qui ont été les premiers lecteurs de ce livre.
Je veux également dire ma gratitude à Françoise et Gérard Comtet pour leur aide à la traduction des correspondances et documents militaires en langue allemande.

Roger Faindt








À celles et à ceux dont les vies oubliées ont investi mon corps… J’entends vos paroles, vos rires et vos pleurs. Votre souffrance coule de mes yeux et à votre sang se mêle. J’ai peur de ne pas avoir rêvé !

Roger Faindt







Besançon. Septembre 1944.

Marie haletait. Les hurlements injurieux de la foule s’amassaient en un vacarme assourdissant. Des paroles dénuées de sens et qui tranchaient sa vie au même rythme que les coups qu’on s’appliquait à lui donner.
Il venait encore de la frapper. Toujours le même, ce résistant aux cheveux noirs dont les yeux la violaient. Je suis sûre qu’il en a envie, pensa-t-elle ! Comme s’il eût deviné sa pensée, il la frappa de nouveau, plus violemment, d’un coup de crosse dans le genou. Marie s’effondra. Sa tête cogna lourdement le sol. Un filet de sang coula de son nez.
Charlotte vit tomber sa sœur et se précipita vers elle. Le garçon qui l’avait tondue l’en empêcha.
« Tiens, prends ça, salope ! »
Il donna un coup de pied dans le ventre de Marie qui étouffa un cri. Un autre homme, un grand gaillard avec un béret, l’imita. Les enfants lui jetaient des pierres et les femmes lui crachaient au visage. L’homme au béret la retourna de sa botte.
« Allez, lève-toi !
– Elle a son compte, cette putain ! »
Aux fenêtres des maisons, les gens criaient et hurlaient. Ils avaient des bouches énormes, des bouches qui vociféraient des mots que Marie n’entendait plus. Le faciès haineux du résistant cachait leurs visages lorsqu’il parlait ! Il répétait toujours la même phrase, toujours les mêmes mots !
« Lève-toi, salope ! Lève-toi ! »
Quelqu’un la releva brutalement et lui planta quelque chose dans le dos. Elle en eut la respiration coupée. Marie frissonna sans crier. Une chaude caresse glissa sur sa peau. Un homme rangea discrètement son couteau.
« Dégage !
– Elle ne va pas s’en tirer à si bon compte !
– Qu’est-ce que tu as fait ? T’es cinglé ! »
Il y eut un silence. Le jeune homme qui avait pris le parti de Marie se pencha sur elle. Marie grelottait. Le garçon avait un beau regard, un gentil regard. Marie eut l’impression qu’elle le connaissait. La silhouette de sa tête trouait le ciel et les visages de ceux qu’elle refusait de voir y disparaissaient.
« Apporte une couverture ! » demanda-t-il, à l’un de ses camarades.
Il avait une voix douce, une voix de gamin ; il ne devait guère avoir plus de dix-sept ans. Il ressemblait à cet officier allemand que Marie croyait avoir oublié. Son prénom arriva dans sa bouche avec une vague de sang.
« Willi, j’ai froid ! » balbutia-t-elle.
Le jeune garçon posa la couverture sur elle. René enclencha son arme.
« Je vais lui régler son compte à cette salope !
– T’es malade ! Laisse tomber, je m’en occupe ! » cria le jeune résistant.
René partit en jurant, suivi du grand gaillard au béret. Le jeune garçon lui passa la main sous le corps pour glisser quelque chose sous sa tête. Marie vit à son bras son brassard FFI.
Willi n’avait-il pas promis de revenir ? Le jeune garçon lui prit la main. Il avait si chaud ! Marie sentit ses forces l’abandonner. Elle murmura :
« Charlotte ! »
Le regard du jeune résistant se troubla et le coin de ciel bleu dans lequel Marie avait vu se dessiner le visage de Willi disparut. Marie ferma les yeux.







Au village. Mai 1941.

Quand elle ouvrit la porte, Marie Rey reconnut le jeune officier qu’elle et Charlotte avaient croisé dans la cour du château en allant rapporter le linge. Sa sœur avait salué le soldat avec un grand sourire en faisant la coquette. Cela lui avait paru déplacé. Si elles se devaient de rester polies, Marie ne voyait pas les raisons d’en faire plus. Elle en avait fait part à Charlotte qui avait éclaté de rire et avait dit :
« T’es bien aussi bête que Julie qui dit que les bonbons que les Boches donnent aux enfants sont empoisonnés ! »
Marie avait haussé les épaules et Charlotte avait fait une telle grimace en la regardant, que Marie n’avait pu s’empêcher de pouffer de rire. Leur conversation lui revint à l’esprit :
« Si tu te voyais ! C’est plutôt cette tête-là que tu devrais faire aux Allemands !
– Un sourire, ça coûte quoi ? T’es trop bête, tiens !
– Les gens causent déjà bien de trop !
– Eh bien qu’ils causent ! Moi, je ne crache pas dans la soupe ! Tu n’es pas contente d’avoir du ravitaillement ? Ce n’est pas avec la maigre pension de maman et les quelques sous que nous donne la Châtelaine pour son linge qu’on pourrait s’en sortir !
– Comment font les autres ?
– Les autres ! La plupart sont des paysans ! Ils ne savent pas ce que c’est que d’avoir faim et de marcher avec des chaussures trop petites ! Nous, nous n’avons rien à troquer pour un morceau de pain ou de beurre ! »
Charlotte passa la main dans ses cheveux en renversant la tête en arrière, prit sa sœur par le cou et ajouta d’un air chafouin :
« Je l’ai trouvé beau garçon, cet Allemand !
– Arrête ! Je n’aime pas quand maman va les voir ! Il ne faut pas si longtemps pour faire un ourlet de pantalon ou pour recoudre un bouton ! Tu sais ce que disent les gens ?
– Laisse-les dire ! Il y en a qui seraient prêts à faire du mal à leur voisin pour un quartier de viande ou je ne sais quoi d’autre ! Maman, elle n’a jamais fait de misère à personne ! Si elle ne restait pas de temps en temps pour jouer aux cartes et boire du schnaps avec les officiers, tu n’aurais pas grand-chose

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents