Le Cartel des volcans
90 pages
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Description

San Martín (Mexique), décembre 2010. L’explosion gigantesque d’un pipeline secoue toute la ville et une marée de pétrole en feu se déverse dans les rues, emportant tout sur son passage. Les responsables de ce désastre : des narcotrafiquants.
Inspiré de ce fait divers, Le cartel des volcans raconte l’histoire tragique de Juan Esteban Duarte, un jeune délinquant qui sombre dans la violence et les activités criminelles, sous la férule de Ramón qui, depuis un soir d’été de son enfance, est devenu l’homme qu’il déteste le plus au monde. Son frère cadet, Diego, assiste, impuissant, à sa descente aux enfers.
Sous les étoiles, apparemment calmes, les volcans Popocatepetl et Iztazihuatl se profilent à l’horizon, toujours silencieux. La nuit, Juan Esteban et ses compères siphonnent le pétrole et le revendent, impunément. Les hommes de Ramón sont heureux jusqu’à ce que Juan Esteban ne puisse plus contenir sa colère et sa soif de vengeance…
Le cartel des volcans, un roman noir, réaliste et engagé, qui dénonce les ravages de la drogue et du crime organisé dans un pays pas très éloigné du nôtre.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 29 mai 2013
Nombre de lectures 4
EAN13 9782895974055
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0600€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

LE CARTEL DES VOLCANS
DU MÊME AUTEUR

Le chenil , Ottawa, Éditions L’Interligne,
coll. « Cavales », 2010.

L’homme qui mangeait des livres ,
Ottawa, Éditions L’Interligne, 2010.
Patrice Robitaille
Le cartel des volcans

ROMAN
Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives Canada

Robitaille, Patrice, 1964-
Le cartel des volcans [ressource électronique] / Patrice Robitaille.
(Voix narratives)
Monographie électronique.
Publ. aussi en format imprimé.
ISBN 978-2-89597-404-8 (PDF). — ISBN 978-2-89597-405-5 (EPUB)
I. Titre. II. Collection : Voix narratives (En ligne)
PS8635.O2694C37 2013 jC843’.6 C2013-902179-5

Les Éditions David remercient le Conseil des Arts du Canada, le Secteur franco-ontarien du Conseil des arts de l’Ontario, la Ville d’Ottawa et le gouvernement du Canada par l’entremise du Fonds du livre du Canada.

Les Éditions David
335-B, rue Cumberland
Ottawa (Ontario) K1N 7J3

Téléphone : 613-830-3336 / Télécopieur : 613-830-2819

info@editionsdavid.com
www.editionsdavid.com

Tous droits réservés.
Dépôt légal (Québec et Ottawa), 2 e trimestre 2013
À la mémoire des personnes qui ont péri à
San Martín et de celles qui meurent encore
au Mexique à cause du cartel de la drogue.
À Manon, que j’aime.
Toute ressemblance avec
des personnes existantes ou ayant existé
ne serait que pure coïncidence.
1
Cette nuit-là, un vent chaud transportait l’odeur du pétrole en feu sur toute la plaine. La ville, qui s’était endormie dans la plus parfaite obscurité, s’était réveillée dans les cris et les hurlements déchirants des enfants et des femmes emprisonnés dans leurs maisons. Elle s’était éclairée entièrement, rougie par le feu, jusque dans ses quartiers les plus misérables et s’était remplie de cette lueur vermeille qui illuminait de tous ses feux la ligne d’horizon de San Martín. Ses collines et ses volcans, Popocatepetl et Iztazihuatl, semblaient, malgré le feu grandissant, dormir à tout jamais.
Un vent chaud, puant l’hydrocarbure enflammé, se levait et retournait les ramures des cyprès qui avaient été jusque-là plus silencieux qu’à l’habitude. L’incendie courait dans les rues comme une lave qui détruit tout sur son passage. La lune, belle et ronde de la veille, laissait toujours par endroits, de façon surprenante, sa lumière bleutée jaillir derrière les nuées noires et épaisses qui parcouraient le ciel. La fumée envahissait l’espace tout autour. Comme d’habitude, il faisait chaud à la casa de niños * .
Diego et Évélia avaient été réveillés par les cris déchirants de Daniela. Jamais ils n’auraient pu se douter même dans les pires scénarios imaginables que, pour fuir les autorités, Juan Esteban aurait pu s’en prendre au père Fernand Dion avec autant de malveillance. Fernand Dion, c’était Fernando pour eux, ce missionnaire venu du Canada pour aider les enfants abandonnés de la ville. Il était là depuis toujours, si longtemps en fait, qu’il avait fini par devenir un ami. Jamais ils n’auraient cru Juan Esteban capable d’agir de la sorte, sans réfléchir, dans un élan de folie meurtrière qui le rangeait désormais du côté de Ramón Herrera Diaz, l’homme qu’il avait détesté le plus au monde.
Daniela, qui avait été avec le prêtre depuis le début, était à genoux sur les carreaux blancs de cette cuisine où elle s’était tant dévouée pour les enfants, ces enfants que Fernando avait recueillis à la casa de niños . Elle pleurait abondamment, sans pouvoir s’arrêter. Elle avait pris son chapelet de la Vierge de Guadalupe, qu’ils venaient de fêter, et l’avait placé sur la compresse ensanglantée couvrant la plaie de l’homme qui ne bougeait plus, mais qui regardait, sans parler, les enfants affolés qui se tenaient debout autour de lui et qui pleuraient à chaudes larmes en le voyant dans cet état.
Fernando regardait au plafond cette ampoule qu’il avait si souvent remplacée à l’aide de son vieil escabeau de bois recouvert de peintures de toutes sortes, cet escabeau qu’il avait utilisé pour rendre cet immeuble délabré plus joli. L’escabeau, il ne l’utiliserait plus jamais. L’ampoule projetait sur toute la pièce une lueur blafarde qui lui rappelait tous les moments qu’il avait passés là à rire avec ces orphelins qui pleuraient maintenant sans lui, dans cette cuisine qui avait été l’endroit de tant de joies, de tant de paroles et de tant de chagrins partagés. Cette cuisine avait été le lieu où tout avait été dit, et cette casa tout entière portait en elle les souvenirs qui avaient été pour lui, en vieillissant, son plus grand bonheur.
Daniela pleurait comme la madone et ses larmes qui tombaient sur le prêtre blessé traduisaient non seulement toute l’affliction dans laquelle cette terrible tragédie la plongeait, mais aussi tout son refus de le voir la quitter si abruptement pour l’autre monde, le monde des êtres aimés et disparus à jamais. Elle refusait de voir Fernando étendu là, mourant, tout près d’elle et qui ne bougeait plus, mais qui priait avec eux, paisiblement, avant de partir. Lui, l’homme qu’elle avait tant aimé dans ce travail de tous les instants, était dans cette mare de sang qui s’était répandue tragiquement autour de lui sans s’arrêter. Daniela pleurait, affichant toute la douleur de perdre celui qui leur avait tout donné ; tout donné à ces enfants dont personne d’autre ne prenait soin et pour qui ils étaient devenus la seule famille au monde.
Le regard du prêtre s’effaçait, se voilait dans les larmes de la prière de cette vieille dame devenue une amie irremplaçable qui veillait sur lui avant l’arrivée des secours. Oui, son regard s’effaçait, subjugué par l’engourdissement qui vient avec les dernières images qui apparaissent avant de fermer définitivement les yeux. Immobile, il s’accrochait. Il avait pris la main de Daniela dans la sienne comme pour la rassurer, lui faire comprendre que les choses sont ce qu’elles sont, irrémédiablement, qu’il ne pouvait rien y faire ; que ce départ précipité, il ne l’avait pas choisi ; que s’il avait pu rester à la casa pour l’amour des enfants, il l’aurait fait de tout cœur, sans regretter quoi que ce soit, surtout pas d’avoir donné sa vie pour les orphelins de San Martín.
Après avoir raccroché le téléphone, Diego s’était approché de lui. Son cœur voulait s’arrêter devant cette scène terrible et injuste qui le ramenait à lui si douloureusement, parce qu’il n’avait jamais voulu dénoncer à la police fédérale — pas plus que le père Fernando en fait — les activités criminelles de son frère.
Évélia pleurait. Elle revoyait Fernando, les dimanches, dans la cour intérieure avec tous ces enfants abandonnés qui riaient de ses grimaces théâtrales et de ses petits jeux divertissants qui visaient à ensoleiller leurs jours. Tous ces enfants qui avaient tant eu besoin de lui dans le passé et qui ne cherchaient rien d’autre que l’amitié désintéressée de cet homme, si bon pour chacun d’entre eux et pour Juan Esteban aussi. Le prêtre gisait maintenant à ses pieds, cet homme qui s’était complètement effacé pour eux, pour leur rendre la vie acceptable.
Le bruit de la sirène s’était amplifié avant de s’éteindre. Les gyrophares de l’ambulance éclairaient les fenêtres de la casa , reprenant les lueurs de cette toile de feu qui projetait cet incendie sur toute la ville, mais qui n’était jamais arrivé à l’endroit où se trouvait depuis toujours l’orphelinat de San Martín.
Diego se pencha pour regarder le prêtre de plus près, pour le réconforter, lui dire de tenir bon. Il lui releva la tête qui baignait dans le sang et plaça une serviette enroulée sous sa nuque. L’homme était devenu trop faible pour réagir. Il ne respirait presque plus, mais il souriait légèrement et cligna deux fois des yeux avant de ravaler cette salive qui ne venait plus. La douleur et la brûlure de la plaie se dissipaient d’elles-mêmes. Puis il ferma les yeux avant de leur dire, paisiblement, qu’il les aimait tous :
— Les quiero a todos.

* Pour la traduction des mots espagnols, se reporter au lexique .
2
Alors qu’ils étaient jeunes, quand les camions à benne des éboueurs de San Martín étaient repartis, que les bruits des bulldozers dont les chenilles étaient recouvertes de boue s’étaient éteints et qu’on n’entendait plus rien à des kilomètres autour, Juan Esteban et Diego étaient les rois de la décharge qu’ils écumaient pour en extirper des trésors. Ils jouaient dans les ruelles adjacentes à l’orphelinat du père Fernando, la casa de niños du vieux franciscain située non loin de la cathédrale. Leur monde, c’était le centre de San Martín dont les murs étaient recouverts d’un mortier inégal. Ce mortier avait la couleur des flancs des collines qui coulaient au nord de la plaine. Cette plaine menait aux quartiers de la Santísima et de la Colonia Petrolera , des quartiers réservés aux mieux nantis, les ricos qu’ils les appelaient, ces gens riches qui se promenaient avec leur jolie femme dans leur Mercedes, leur BMW ou leur Volvo rutilantes. Ils conduisaient en contournant les oubliés de l’orphelinat. Ils étaient des vedettes insouciantes parce qu’ils croyaient posséder le monde. Ils avaient la cigarette à la main, étaient sans ridules ni plis sous les yeux parce qu’ils n’avaient jamais marché sur la décharge pour survivre au temps qui déchire la peau quand on est un enfant qui n’a plus de parents. Ils passaient tous les jours dans leur bolide sur les grands boulevards de San Martín. Cela faisait rêver les orphelins d’un monde meilleur, mais ce bonheur leur semblait cruellement inatteignable.
Ce dont ils rêvaient le plus, c’était de se procurer, un jour, un de ces bolides tout neuf pour cracher le dinero comme ces ricos . Ils rêvaient de se promener dans les rues empoussiérées de la ville, de cueillir des femmes, de les balader à leur tour et de découvrir, avec elles, les larges rues des plus beaux quartiers où se cachent les villas les plus cossues de San Martín. Mais là où ils avaient grandi, les tacots restaient immobiles sous le soleil et les hommes qui cultivaient la terre n’avai

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