LE COMBLE ET L AGONIE DU MAL ROMAN
114 pages
Français

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LE COMBLE ET L'AGONIE DU MAL ROMAN , livre ebook

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Français

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Description

Mendem Menkem Angeline est une étudiante âgée de vingt-deux ans. Elle retourne à Anoumbong, son village natal, à la fin du premier semestre de l'année académique, au moment où la population, sous la houlette du chef S.M. Natemah, se prépare à aller en guerre contre des invisibles "mangeurs de la jeunesse". Elle découvre que le sida sévit gravement , et décide d'affronter le redoutable chef et une jeunesse, éprise de modernité, et noyée dans de perverses activités sexuelles.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 septembre 2011
Nombre de lectures 17
EAN13 9782296466845
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Le comble et l’agonie du mal
Dongmo F EUGAP


Le comble et l’agonie du mal
© L’Harmattan, 2011
5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-55436-8
EAN : 9782296554368

Fabrication numérique : Actissia Services, 2012
À

Toutes les personnes engagées dans la lutte contre le SIDA
I.
Le crépuscule avançait irrémédiablement dans le village Anoumbong. On pouvait encore apercevoir des silhouettes très géantes, même de plus petits poussins, que la grosse boule de soleil sur le point de se coucher à l’Ouest du village projetait sur le sol. Les oiseaux rejoignaient leurs nids respectifs dans les grands arbres qui entouraient la vaste concession de Ndi Menkem. Au fond de la cour, Ndukem Elise s’obstinait à faire rentrer sa volaille dans le poulailler qui s’y trouvait. Un coq récalcitrant perché sur une termitière l’obligea à retourner à sa poursuite ; elle vit alors s’approcher une image qui dessinait progressivement la silhouette d’une femme. Celle-ci apparut à l’angle de l’une des cases de la concession : c’était sa fille Mendem, visiblement lassée par les péripéties d’un long et pénible voyage.
Le village ce soir-là, était apparemment paisible. On n’aurait pas cru que deux jours après, on assisterait aux obsèques d’une jeune fille décédée trois jours auparavant car, à Anoumbong, la mort était devenue la chose la mieux partagée. C’était un jeudi « Njiélah », jour du grand marché, au mois de mars.
Ndukem prit sa fille dans ses bras, la serra très fort, tout en la massant chaleureusement le long du corps. Elle ne pouvait pas contenir cette émotion violente, la même qui l’embellissait toutes les fois qu’elle pouvait revoir celle que l’école lui avait arrachée et emmenée à la capitale du Kameroun.
La concession de Ndi Menkem avait quatre cases assez grandes, construites sur le même plan ; en plus de la grande maison, celle du chef de famille, qui cachait une porcherie, sous les arbres, et d’autres petites cases secrètes, qui restaient toujours fermées. Ndukem entra dans sa case, suivie de sa fille qui, à l’inverse, paraissait plus timide, crispée comme une malade. La nuit était complètement tombée. C’est alors que Ngandoh Marius et Dongmo Martin, les deux autres fils de Ndukem, âgés de vingt et dix-sept ans, entrèrent dans la maison au grand éblouissement de leur sœur aînée Mendem, qui se demandait sans doute ce que pouvaient bien faire ces jeunes élèves des classes d’examen dans le village en dehors de leur salle d’études. « Dongmo était dans la chambre. C’est ce gaillard – Ndukem pointa Ngandoh – qui se promène dans tout le village, même dans la nuit. Lui seul nous dira ce qui le fascine tant là dehors ».
Ndukem s’attelait avec célérité à faire la cuisine pour ses trois enfants qu’elle avait rarement vus tous à la fois. Mendem sortit accompagnée de Dongmo et revint une trentaine de minutes plus tard, le temps de faire acte de présence chez son père et chez les trois coépouses de sa mère :
- J’espère que tu n’es pas là uniquement pour les obsèques de ton amie ! Lança Ndukem.
- C’est l’inter semestre et…
- L’inter quoi ?
- En fait… je dois passer trois semaines ici.
- Et les études, tu t’y prends bien, mon père ?
- Tout va bien maman, répondit Mendem, non intéressée par ce sujet. Et si on parlait plutôt de la mort de Sarah, comment cela est-il arrivé ?
Ndukem fit un « oooh » de profond étonnement, en se tapant en même temps dans les deux mains ; et se rapprocha davantage du petit feu de bois :
- Nous ne savons plus comment vivre ici au village. La mort de Noutepo est venue nous sortir du doute, on a pu avoir la certitude qu’il y a des gens dans ce village qui en veulent à nos enfants…
- De quoi parles-tu maman ? Sois plus claire s’il te plaît ; supplia Mendem, en tressaillant.
Sarah Noutepo était la meilleure amie de Mendem. Elles étaient, disait-on, nées le même jour. Malgré son intelligence et son amour pour l’école, elle avait été obligée de mettre fin à ses études après la classe de troisième, sa mère qui s’en était toujours souciée ne pouvait pas l’inscrire au lycée de la ville. Aussi faut-il rappeler que l’alphabétisation des filles était l’initiative de leurs mères, et celles-ci devaient pour cela affronter leurs maris et y investir les fruits de leurs efforts quotidiens. Mendem, l’unique fille de sa mère, avait par contre eu la chance d’aller en classe de seconde, avant que le collège d’enseignement secondaire d’Anoumbong ne fût transformé en lycée. Malgré cette séparation, les deux amies se revoyaient pendant les vacances et, plus tard, avec l’avènement du téléphone portable au village, elles restaient joignables. Mendem était déjà étudiante dans la grande université de la capitale kamerounaise. Elle savait, aux dernières nouvelles, que son amie avait quitté la maison familiale parce qu’elle avait refusé de prendre pour époux un monsieur que lui avaient proposé ses parents, que son père avait même menacé de faire partir sa mère parce que, aurait-il dit, elle avait perverti sa fille par l’école. Elle savait aussi que Sarah avait fait la connaissance d’un monsieur qui prétendait l’épouser, mais qui malheureusement avait rendu l’âme. Elle savait enfin que Sarah était malade, juste malade ; et ne manquait pas de prier pour qu’elle recouvrât la guérison.
Sarah Noutepo était morte à l’âge de vingt-deux ans. Elle accrut ainsi le nombre de jeunes du village Anoumbong qui trépassaient, mystiquement à en croire les villageois. En effet, il se répandait dans ce village un violent vent de soupçons qui avait amené le chef à consulter les ancêtres. Suite au décès de deux autres filles et d’un garçon, élèves du lycée, d’un jeune couple, laissant un nourrisson dont l’état de santé ne reluisait guère, les villageois s’étaient mobilisés autour de leur chef pour retrouver les assassins de la jeunesse. Toute une semaine appelée « sòndè nzè’h », toutes les activités étaient interdites parce qu’il fallait aller à la recherche des mangeurs de la jeunesse, et de nombreux sacrifices furent ainsi faits à l’endroit des crânes. Il ressortit de ces cérémonies qu’au village, des gens auraient signé des pactes sataniques avec des démons qui demanderaient du sang frais. Ces mots captés dans l’entourage du chef pendant cette cérémonie étaient d’autant plus véridiques pour les villageois que ces jeunes disparus devenaient à la mort tous flasques, et squelettiques, bonne preuve qu’ils auraient été copieusement sucés de leur sang. Selon la démarche du chef, il était question d’ordonner la reprise des activités, en attendant la phase suivante, celle dite de « noú ngoú’h », qui consiste à démasquer les sorciers lors d’une autre cérémonie. Entre-temps, personne ne devait quitter le village, et tous ceux qui se trouvaient à l’extérieur devaient y retourner, puisque celui qui se déplacerait ou refuserait de rentrer au village pour quelque raison que ce fût ne serait pas seulement suspect, mais pris pour coupable et éventuellement châtié comme tel.
La jeune Sarah Noutepo était la énième victime de ces sorciers vêtus de noir et enfouis dans les ténèbres. Sa disparition devait donc anticiper l’action du redoutable et incontesté Natemah, chef du village Anoumbong. Mendem suivait attentivement le long discours de sa mère et se mordait chaque fois les doigts qui devenaient de plus en plus moites au fur et à mesure qu’elle parlait de sorcellerie. Mais quelque chose retint son attention, l’aspect squelettique de ces soi-disant victimes de sorcellerie ; et elle voulut en savoir davantage :
- Je sais qu’ici au village, vous vous fondez toujours sur le mysticisme. Pour vous, il n’existe pas de mort naturelle, quand bien même vous savez aussi que la tombe est le destin commun à tout le monde. Néanmoins, c’est très curieux que la jeunesse périsse de la sorte. Sarah était-elle au moins à l’hôpital ? Je le demande parce qu’ici, les seuls garants de votre bonne santé sont les charlatans et les marabouts.
- On l’y a emmenée, mais le docteur a dit qu’elle ne pouvait pas y être soignée.

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