Le sacrifice se conjugue au féminin
185 pages
Français

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Le sacrifice se conjugue au féminin , livre ebook

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Description

Est-ce vraiment la volonté d'Allah qu'une femme soit faible et asservie ?

Quand il fait un travelling arrière sur son passé, en Aïcha, Hadi ne voit pas sa mère. Il voit en elle le symbole du dévouement, de la servitude, de la résignation et du don de soi. Elle ne s'était jamais rebellée ni n’avait contesté son statut d'esclave. Peut-être, dans des moments de profonde solitude, elle s'était plainte de son sort ou elle s'était posé des questions sur ce qu'elle aurait pu faire de mal pour mériter cette peine ! Elle croyait que c'était réellement la volonté d'Allah et que toutes celles qui songeaient à faire autrement n'étaient que des complices de Satan. Une femme doit craindre Allah, le Prophète et tous les hommes. Une femme est faible, fragile et par conséquent source de malheur, pensait-elle. À son mari et à Sidi, elle leur devait obéissance inconditionnelle, respect absolu et effacement total. Aux autres enfants, elle leur devait corvées et labeur.

Dans ce roman, Hadi revient sur le passé et sur les souvenirs qu'il garde de sa mère, une femme dévouée, obéissante et effacée. Un récit touchant qui soulève de nombreuses questions.

EXTRAIT

— Mais pourquoi mes oncles me cherchent, je n’ai rien fait de mal ? s’inquiéta Houda.
— Pour les éclairés comme moi, tu n’as pas fait de mal. Mais pour les obscurs ignorants, et la ville en regorge, tu t’es affranchie des traditions et tu as mis l’honneur de ta famille sur la place publique. Ne perds pas de temps, ils ne vont pas tarder à repasser. Si tu ne sais pas où aller, dirige-toi vers La Mecque et marche. Et, si on te demande ta destination, dis-leur La Mecque. Ça atténuera leurs éventuelles intentions malsaines, aux mécréants.
— Je veux bien le faire, mais je n’ai jamais mis les pieds hors de chez moi. Et, je n’ai pas le moindre dirham, même pour acheter une galette de pain.
— Ma fille, dans les circonstances actuelles, dis-toi que l’argent ne t’aidera pas beaucoup. Si tu tiens à ta vie, il faut avoir une conscience irréprochable. Du besoin matériel, tu peux avoir tout ce que tu veux, il te manquera le dernier jour. Ta conscience, tu mourras avec. Elle ne t’abandonnera guère, dit-il.
— Comment dois-je faire pour veiller sur ma conscience ? Il y aura bien des jours où il me sera difficile de choisir ou de comprendre ?
— Tu verras mon enfant, c’est facile, il te suffira de rester digne en toutes circonstances. Quand tu dois choisir, pose-toi cette question : est-ce digne de moi ?
Houda se releva, le salua et lui demanda :
— Pouvez-vous m’indiquer la direction de La Mecque, s’il vous plaît ?
— C’est par là. Et si tu ne sais plus, le matin tu marcheras face au soleil et, l’après-midi tu marcheras dos au soleil.
Puis il mit sa main dans une poche de sa djellaba, sort un mouchoir en aumônière contenant quelques dirhams et dit à Houda :
— Approche petite.
Elle s’exécuta, il lui tendit le bras pour lui donner l’aumônière. Elle en fit autant en tendant la main pour la prendre. Aussitôt, il retira son bras et lui dit d’un air professoral :
— Tu ne tendras la main que pour donner. Pour accepter un geste de générosité, laisse l’opportunité au donateur de déposer son offrande, mais ne tends jamais la main. C’est une basse habitude qui s’apprend vite et mettra à terre ta dignité.

À PROPOS DE L'AUTEUR

Hamda Ouakel est né en Tunisie dans une famille Arbi (Intouchables en Inde) nombreuse et miséreuse, pendant une nuit sombre, peu de temps avant l’indépendance. Exilé politico-économique et installé en Suisse depuis bientôt quarante ans où il a fait ses études et a recréé une famille, il se bat aujourd’hui contre les discriminations en général et plus particulièrement contre celles dont seules les femmes sont la cible.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 12 juillet 2019
Nombre de lectures 58
EAN13 9782851135933
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0020€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Hamda Ouakel
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Le sacrifice se conjugue au féminin
 
d’Aïcha à Khadija, bêtes noires d’Allah
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 


 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
© Lys Bleu Éditions – Hamda Ouakel
ISBN : 978-2-85113-593-3
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
À ma petite-fille Namoussa
 
 
 
 
 
 
Sans la volonté de Christine et son minutieux travail, ce livre n’aurait pas existé. Alors pour la remercier et, ne sachant pas quoi dire, je lui avais écrit :
« Chère Christine,
L’ingénuité et moi, nous avons rompu, depuis des temps lointains. Les rares fréquentations qui nous réunissaient pendant les nuits tempétueuses qui faisaient tanguer mes esprits n’habitent même plus mes souvenirs.
Depuis quelques jours, vous êtes entrée dans ma vie comme par effraction. Et pourtant ! Et pourtant, je ne constate aucune résistance de ma part. Aujourd’hui, en voulant vous répondre, je me suis trouvé désemparé, un peu perdu. Une situation étrange pour moi. Bêtement, vous remercier ? Quelle banalité ! Vous demandez vos motivations ? Quel manque d’élégance ! Me dire que votre présence sur ma route en ce moment n’est qu’un pur hasard et ce n’était qu’une récompense divine pour mes belles pensées humanistes ? Quel blasphème à mon esprit qui s’est aguerri à lutter contre les tempêtes et les nuits sombres !
Je veux penser que notre rencontre est une conséquence logique du désordre naturel et universel. Aussi, je reconnais que cela est dénué de toute dimension poétique. C’est là, la force de la vérité.
Sans toi, rien de ce qui suit n’aura été possible.»
 
 
Mes remerciements vont aussi à Deniz Basgoren de Turquie pour sa contribution bénévole et spontanée dans la réalisation des trois cartes géographiques du conte Mythe ou Racines.

 
 
 
 
 
Pris dans les filets de l’urgence matérielle. Pris dans le tourbillon de l’absolue nécessité de réussir, dans une société occidentale où tout se définit et se mesure par rapport à l’argent. C’est ainsi que, pour gagner, j’allais perdre le sens de la vie.
Contaminé par une médiocrité mercantile et poussé par un orgueil démesuré et sans limites, tête baissée, je continuais à lutter vainement contre tous les éléments. Au fond de moi, je ne croyais plus, j’avais perdu tout espoir, mais je ne voulais pas rendre les armes. Je voulais mourir debout. Avec le temps, je ne faisais que plier et m’enfoncer chaque jour un peu plus.
À cause de mes basses préoccupations, je suis devenu une proie de choix pour un prédateur qui rôdait autour de moi en m’enveloppant d’une toile qu’il tissait discrètement, mais sûrement : la cruelle solitude. Elle m’a arraché à mes proches. Hormis ma petite-fille Namoussa, la solitude m’interdisait de passer un peu de temps en leur compagnie, de partager quelques moments de complicité, d’échanger quelques mots, des instants de bonheur, à défaut, de bons moments tout simplement. Je n’avais plus le temps de penser aux autres, ni en bien ni en mal. Je n’avais plus le temps d’aller les voir. Comme s’ils n’existaient pas. Les plus téméraires d’entre eux osaient, de temps à autre, venir troubler notre intimité et notre tranquillité, ma solitude et moi. Je les recevais avec beaucoup de diplomatie, mais sans doute avec peu de réjouissances. Comme, ils n’étaient pas dupes non plus, ils s’en rendaient bien compte évidemment, mais, à leur tour, avec énormément de subtilité, ils faisaient mine de ne rien sentir. Moi, je faisais tout pour limiter leur présence, pour qu’ils ne s’attardent pas trop. Je les poussais dehors avec un extraordinaire savoir-faire, pensais-je. Je ne voulais pas me mettre à nu devant eux, raconter mes déboires et mes problèmes, qui me pesaient violemment, je ne voulais pas que mes proches aient pitié de moi. J’avais honte. Et puis, seule ma solitude avait réussi à m’apprivoiser. Très jalouse, elle se mettait en beauté pour moi, elle ne s’absentait que pour me surprendre quelques instants plus tard. À chacune de ses fréquentes apparitions, j’accourais vers elle comme un animal de compagnie bien dressé. Je lui faisais la cour, je lui racontais mes cauchemars. Elle m’écoutait avec attention, elle me donnait de bons conseils. En bonne maîtresse, elle m’interdisait de jouer au rêveur. Par contre, les tourments, elle en raffolait. Pour lui faire plaisir, j’en inventais de toutes pièces, au point de devenir un grand spécialiste. Je transformais tout en cauchemars, même les brindilles de rêves.
Parmi les proches téméraires, il y a une personne, plus que d’autres, elle habite à quelques lieues de chez moi. De temps à autre, elle venait me voir par surprise. Quelles étaient ses motivations profondes, conscientes ou inconscientes ? Noyé dans un verre d’eau, je ne me posais pas la question. Tellement préoccupé par ma situation, que je n’accordais aucune importance à celle des autres. Pour détourner son attention et camoufler mes camouflets, je l’évitais. Je ne lui posais pas de questions non plus, ou alors des questions futiles qui concernaient essentiellement son chien.
Je faisais comme si elle était condamnée au bonheur, comme si elle ne traversait pas le même fleuve de la vie que tout le monde, avec ses crues et décrues, comme si elle vivait dans une tour d’ivoire. Quand soudain, j’apprends qu’elle mène un combat d’une autre nature et d’une autre intensité contre un cancer qui la ronge de l’intérieur depuis quelques mois déjà. J’ai cru que le ciel me tombait sur la tête, je n’ai rien vu de son malheur. Comment ai-je excellé à ce point dans l’art de l’aveuglement ?
Avec du recul, avant de partir en expédition pour venir me voir, je l’imagine faire ses emplettes, un gros panier de sourires, un autre d’oubli de ses propres malheurs, un autre de mots gentils et d’encouragements, un autre de petites attentions, etc. Toutes ses provisions, qui lui auraient manqué, elle les prenait sur elle. En partie dans son cœur et en partie sur son visage. Elle me les offrait pour me soutenir, pour me redonner goût à la vie. Alors que la sienne était suspendue au verdict des médecins et qu’elle était prise en otage par ce salaud de cancer.
Depuis ce jour, j’ai décidé de m’affranchir de ma solitude, de lui fausser compagnie. Mieux, avec force et assurance, je lui ai fermé la porte au nez, je l’ai renvoyée. Dehors. Je lui ai interdit de prendre quartier aux alentours. J’ai allumé mon ordinateur, et avec mon cœur et mon âme, j’ai tapoté sur le clavier un premier message, auquel cette personne a répondu tout de suite et avec enthousiasme et plaisir. Ainsi, j’ai continué, un deuxième, puis un troisième, etc.
À part des mots, je n’avais rien d’autre à lui offrir pour la soutenir dans sa lutte pour la vie. Alors, j’ai essayé de m’appliquer dans le choix et l’ordonnancement de ceux-ci. Aussi, je me suis employé 

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