Le temps d une récréation
214 pages
Français

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Le temps d'une récréation , livre ebook

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Description

Kéto, un enseignant, est affecté à Mabakou dans la partie septentrionale de la République du Saboûna. Dans son entourage, les préjugés tribaux sont si forts que le jeune homme est obligé de laisser sa femme et ses enfants à Etsatsa, la capitale du pays. Faisant contre mauvaise fortune bon coeur, il se dit que là-bas, il sera seul et, provisoirement, libre : ce sera une véritable récréation.
Mais, cette affectation survient quleques mois seulement après l'assasinat du Président Joseph Kikoli. Au moment où se profile le jugement de ses présumés assassins, tous de la même tribu que Kéto...

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 juin 2010
Nombre de lectures 34
EAN13 9782296698031
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0850€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Le temps d’une récréation
© L’Harmattan, 2010
5-7, rue de l’Ecole polytechnique ; 75005 Paris


http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr


ISBN : 978-2-296-11732-7
EAN : 9782296117327

Fabrication numérique : Socprest, 2012
Ouvrage numérisé avec le soutien du Centre National du Livre
André Bouébassihou


Le temps d’une récréation


Roman


L’Harmattan
Chapitre I
Quelque part sur le continent Talavé, un pays s’était gracieusement libéré de l’emprise coloniale. C’était la République du Saboûna. Dans cette nouvelle République, création des Blancs, les jours s’écoulaient apparemment paisibles. Les frustrations, les vexations et les exactions de la période coloniale avaient déjà été classées comme patrimoine du souvenir. C’est que le nouvel Etat avait déjà à son actif quelques saisons de pluies.

Depuis l’indépendance, sa capitale, Etsatsa, se refusait à tout développement. Aussi, se distinguait-elle par son insalubrité. Cette insalubrité, comme on peut l’imaginer, encourageait la prolifération des mouches, des moustiques, des cafards, des rats, etc. Hormis la zone résidentielle, vestige d’un passé à jamais révolu, éclairée par des ampoules faméliques, la nuit plongeait les différents quartiers dans une obscurité noire. Depuis longtemps, les robinets avaient cessé de fournir de l’eau. Ils étaient secs. Secs comme les cœurs des Saboûnais qui, depuis bien longtemps, vivaient de violence et de délation ; des Saboûnais qui ne rêvaient que de revanche. Depuis, de déboires en déboires, de désillusions en désillusions, les Saboûnais se demandaient s’il n’était pas préférable de retrouver le giron colonial.

Dans ce nouvel état, les ambitions égoïstes couvaient. Chaque citoyen, surtout du côté des intellectuels, ne rêvait qu’à renverser le pouvoir en place. Pour y parvenir, chaque protagoniste brandissait l’intérêt de la tribu. Et, dans cette jeune nation, les tribus, il y en avait par dizaines. C’est que les Blancs, dans leurs ambitions hégémoniques, avaient regroupé, dans cette nouvelle entité, des peuplades qui ne se réclamaient pas d’une même culture.

Au Saboûna, les tribus se classaient globalement en deux groupes antagonistes : les Nogo et les Kévé. Dieu, pour calmer les ardeurs des uns et des autres, avait établi un troisième groupe : les Mé, qui occupaient le centre du pays. Une région qui avait pour mission d’annihiler toute visée belliqueuse de l’un ou l’autre camp. Malheureusement, ce groupe se révéla équilibriste et opportuniste. Cette instabilité s’identifia à un manque de personnalité, ce qui valut aux Mé un certain mépris. Et cela n’arrangea pas les choses. Les coups d’Et se succédaient ; civils puis militaires ; militaires puis militaires, etc. Qu’importe !

Cet antagonisme n’était donc pas nouveau. Tout avait commencé à l’époque coloniale. L’histoire nous apprend que, quelques années après leur intrusion sur le continent Talavé, l’arrogance des Blancs s’était brutalement estompée. Les Blancs s’étaient battus entre eux, provoquant des millions de morts au cours de ces deux guerres mondiales. Certains Blancs, aux abois, avaient fait l’effort d’admettre que les Noirs étaient quand même des hommes, comme les autres. Aussi, les avaient-ils appelés à leur secours. Ces demiers ne s’étaient pas fait prier ; le milicien incitant à l’adhésion. Ils avaient volé au secours de cette nouvelle fraternité et s’étaient fait massacrer. Ceux qui avaient survécu à ces hécatombes avaient séjourné dans ces pays libérés où ils avaient joui d’un regard nouveau de la part de ces Blancs. Ils avaient profité des maisons de passe où ils avaient pu apprécier le savoir-faire de ces femmes à la taille de guêpe qu’ils avaient toujours regardées à distance sur le continent Talavé. C’étaient des femmes tout simplement, pareilles aux leurs, peut-être un peu moins performantes, mais vraiment vicieuses. Certains de ces hommes s’étaient amusés à ramener quelques échantillons chez eux. Les moins audacieux s’étaient contentés de regagner la terre natale avec une tête pleine d’aventures amoureuses qu’ils se faisaient le plaisir de raconter à qui voulait les écouter. Ils jouissaient désormais d’une grande audience auprès des Noirs. Ils revenaient des pays des Blancs.

Du coup, la vision du Noir changea. Les Blancs se rendirent à l’évidence. Il fallait libérer ces hommes qui les avaient aidés à libérer leurs pays, surtout qu’un peu partout des foyers de tension naissaient. Des élections furent organisées afin que les Noirs de la Grololie élussent le successeur nègre du grand commandant. Elles opposèrent deux candidats : Robert Nuébé, du Rassemblement des Nègres Intègres (R.N.I.) et Ambroise Liem, du Parti du Peuple (P.P.). Le premier en fut vainqueur, le second en contesta les résultats. Comme dans le pays tout était le reflet des réalités sociales, les Nogo et les Kévé s’affrontèrent. Cette guerre civile ne dura pas longtemps mais elle fit quelques morts. Elle marqua les hommes de façon indélébile. Pourtant, peu de temps après, les Blancs proclamèrent l’indépendance du territoire. Robert Nuébé succéda au grand commandant dans une euphorie mitigée et se hâta de débaptiser le pays pour retrouver la dignité perdue ; une dignité sans contenu. Le territoire de la Grololie mua en République du Saboûna. Sa capitale fut débaptisée Etsatsa.

Les jours se succédaient. Les choses semblaient s’être tassées. Mais, en silence, ces événements se racontaient et se transmettaient de génération en génération, parfois devant des tombes, la main droite sur la poitrine. Les plus intégristes optèrent pour la vengeance. Dès lors, ils choisirent de mener une vie latente, de rester indifférents à l’environnement politique. Les autres, plus enclins au pardon, sans oublier, passèrent l’éponge. Le temps passait ; les hommes se succédaient aux affaires du pays. Peu à peu, la guerre civile de la veille de l’indépendance allait aux oubliettes. Les Saboûnais essayaient de mener, comme ils le pouvaient, leur misérable vie. Ils avaient fini par s’habituer à la dureté de la vie et par s’y résigner.
Chapitre II
Un rapide survol de l’histoire contemporaine du Saboûna édifiait sur ces faits. Kéto revivait souvent ces réalités qui avaient marqué son enfance. Il se les représentait ainsi.

Maurice Yong, après le mouvement de masse qui avait désavoué la gestion de Robert Nuébé, avait introduit le socialisme scientifique au Saboûna. Cette nouvelle idéologie suscita beaucoup d’engouement au niveau des jeunes. Leur enthousiasme débordant leur permit de s’installer peu à peu aux commandes du pays. Maurice Yong imprima rapidement un rythme de travail à son équipe et, très vite, le Saboûna rayonna. Son économie connut une forte croissance, sa diplomatie se fit remarquer positivement à plusieurs reprises dans de grandes réunions. Le domaine culturel prit un essor prodigieux. Le taux de scolarisation atteignit les 100%. L’alphabétisation des adultes se développa. La conscience professionnelle suffisait à l’accomplissement de la tâche quotidienne.

Mais, au fur et à mesure que les jours passaient, l’enthousiasme débordant des jeunes devint intransigeance. Leur vitalité débordante ne s’accommodait plus de l’homme pondéré qu’était Maurice Yong. Les jeunes exigeaient que le socialisme scientifique fût appliqué dans toute sa rigueur au Saboûna. L’impétuosité des jeunes les rendait inconciliables. Les jeunes, sous la direction de Joseph Kikoli, se révoltèrent. Cette dissension dura trois jours. Le quatrième jour, ce mouvement de révolte fut rejoint par les éléments majeurs des forces armées. Maurice Yong démissionna du Parti du Socialisme Scientifique (PSS) et de la présidence de la République du Saboûna.

Joseph Kikoli lui succéda sans coup férir. Il s’auto proclama président de la République. Pour marquer la rupture avec le règne de Maurice Yong, il débaptisa le parti qui devint le Mouvement de la Révolution Populaire (MOURPO). Dès lors, le Saboûna aborda l’étape de la révolution démocratique et populaire. A cette étape, Joseph Kikoli ne pouvait plus accepter que tout fût si terne, que les citoyens évoquassent leurs ancêtres morts, que la religion, l’opium du peuple, eût encore droit de cité. Non ! Il tapa du poing sur la table et tout devint rouge vif. Il décréta que, désormais, tout Saboûnais devait admirer El

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