Le Testament d un excentrique
370 pages
Français

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Le Testament d'un excentrique , livre ebook

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Description

William J. Hypperbone, l'un des plus éminents membres de l'Excentric Club de Chicago, vient de mourir, laissant une fortune de 60 millions de dollars et aucun héritier! Son testament cause un grand émoi dans Chicago, sur tout le territoire américain et dans le monde entier : il lègue toute sa fortune à celui des six participants choisis au hasard qui gagnera une partie basée sur les règles du «Noble Jeu de l'Oie» et qui s'intitule «Le Noble Jeu des États-Unis» : en prenant tous les états américains d'alors, en y ajoutant le district de Columbia et le territoire indien, et en répétant 14 fois l'Illinois, on obtient 63 cases, comme dans le Jeu de l'Oie. Le jeu sera mené par le notaire Tornbrock, qui jettera les dés chaque deux jours et qui enverra ainsi les participants d'un état à l'autre, le gagnant étant celui qui arrivera le premier à la 63e case. Bien sûr, il y a des pièges...

Informations

Publié par
Date de parution 30 août 2011
Nombre de lectures 116
EAN13 9782820610263
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0011€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

LE TESTAMENT D'UN EXCENTRIQUE
Jules Verne
Collection « Les classiques YouScribe »
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ISBN 978-2-8206-1026-3
Quoi qu’il en soit, la ville offre peu de curiosités aux touristes, si ce n’est les ruines d’une église bâtie par les Espagnols près de trois siècles auparavant, et un « Palais des Gouverneurs », humble bâtisse dont l’unique rez-de-chaussée est orné d’un portique à colonnettes de bois. Quant aux maisons, espagnoles et indiennes, construites en adobes ou briques non cuites, quelques-unes ne forment qu’un cube de maçonnerie, percé d’embrasures irrégulières, comme il s’en rencontre dans les pueblos indigènes. Harris T. Kymbale fut accueilli ainsi qu’il l’avait été sur tout son parcours. Mais il n’eut pas le temps de répondre aux sept mille mains qui se tendirent vers lui autrement que par un merci général. En effet, il était déjà onze heures cinquante, et il fallait qu’il fût au bureau du télégraphe avant que le dernier coup de midi eût sonné à l’horloge municipale. Deux télégrammes l’y attendaient, expédiés le matin et presque en même temps de Chicago. Le premier, signé de maître Tornbrock, lui notifiait le résultat du deuxième coup de dés qui le concernait. Par dix, formé des points cinq et cinq, le quatrième partenaire était expédié à la vingt-deuxième case, South Carolina. Eh bien, cet intrépide, cet infatigable « traveller », qui rêvait d’itinéraires insensés, était servi à souhait ! Quinze cents bons milles à dévorer en se dirigeant vers le versant Atlantique des États-Unis !… Il ne se permit que cette observation : « Avec la Floride, j’aurais eu quelques centaines de milles en plus ! » À Santa Fé, les Anglo-Américains voulurent fêter la présence de leur compatriote en organisant des meetings, des banquets et autres cérémonies de ce genre. Mais, à son grand regret, le reporter en chef de la Tribunerefusa. Instruit par l’expérience, il était résolu à tenir compte des conseils de l’honorable maire de Buffalo, à ne s’attarder sous aucun prétexte, à voyager par le plus court, quitte à excursionner quand il serait arrivé à son poste. Au surplus, le dernier télégramme, à lui envoyé par le précautionneux Bickhorn, contenait un nouvel itinéraire, non moins bien étudié que le précédent, auquel ses confrères le priaient de se conformer en partant dès la première heure. Aussi se décida-t-il à quitter le jour même la capitale du New Mexico. Les cochers de la ville n’ignoraient pas ce que ce voyageur ultra-généreux avait fait pour Isidorio. Il n’eut donc que l’embarras du choix, et tous lui offrirent leurs services dans la pensée qu’ils ne seraient pas moins bien partagés que leur camarade.
Sans doute, on s’étonnera qu’Isidorio n’eût pas réclamé l’honneur – presque le droit – de reconduire le reporter à la plus prochaine ligne de railroad, et qui sait ?… avec la pensée d’ajouter cent mille dollars à ceux que lui assurait l’engagement d’Harris T. Kymbale… Mais il est probable que ce très pratique Hispano-Américain était non moins satisfait que fatigué. Il vint cependant faire ses adieux au journaliste qui, après avoir traité avec un autre conducteur, se préparait à partir dès trois heures de l’après-midi. « Eh bien, mon brave, lui dit Harris T. Kymbale, ça va bien ?… – Ça va bien, monsieur. – Et, maintenant, je ne crois pas en être quitte avec toi, parce que je t’ai associé à ma fortune… – Mille et mille fois bon, monsieur Kymbale, je ne mérite pas… – Si… si… j’ai des remerciements à t’adresser, car, sans ton zèle, ton dévouement, je serais arrivé trop tard… j’eusse été mis hors de partie, et il ne s’en est fallu que de dix minutes !… » Isidorio écouta cette élogieuse appréciation, calme et goguenard suivant son habitude, et dit : « Puisque vous êtes content, monsieur Kymbale, je le suis, moi aussi… – Et les deux font la paire, comme disent nos amis les Français, Isidorio. – Alors… c’est comme pour les chevaux d’attelage… – Juste, et quant à ce papier que je t’ai signé, conserve-le précieusement. Puis, lorsque tu m’entendras proclamer dans le monde entier comme le vainqueur du match Hypperbone, fais-toi conduire à Clifton, prends le chemin de fer qui te débarquera à Chicago et passe à la caisse !… Sois sans inquiétude, je ferai honneur à ma signature ! » Isidorio hochait la tête, se grattait le front, clignait de l’œil, dans l’attitude d’un homme assez indécis, qui veut parler et hésite à le faire. « Voyons, lui demanda Harris T. Kymbale, est-ce que tu ne te trouves pas suffisamment rémunéré ?… – Sans doute, répondit Isidorio. Mais… ces cent mille dollars… c’est toujours… si vous gagnez… – Réfléchis, mon brave, réfléchis !… Est-ce qu’il peut en être autrement ?… – Pourquoi pas ?… – Voyons… me serait-il possible de te verser une pareille somme, si je
n’empochais pas l’héritage ?… – Oh ! je comprends, monsieur Kymbale… Je comprends même très bien !… Aussi… je préférerais… – Quoi donc ?… – Cent bons dollars… – Cent au lieu de cent mille ?… – Oui… répondit placidement Isidorio. Que voulez-vous, je n’aime pas à compter sur le hasard… et cent bons dollars que vous me donneriez tout de suite… ce serait plus sérieux… » Ma foi, – et peut-être au fond regrettait-il sa générosité, – Harris T. Kymbale tira de sa poche cent dollars, et les remit à ce sage, qui déchira le billet et en rendit les morceaux. Le reporter partit accompagné de bruyants souhaits de bon voyage et disparut au galop par la grande rue de Santa Fé. Cette fois, sans doute, le nouveau conducteur, le cas échéant, se montrerait moins philosophe que son camarade. Et quand on interrogea Isidorio sur la détermination qu’il avait prise : « Bon ! fit-il, cent dollars… c’est cent dollars !… Puis… je n’avais pas confiance !… Un homme si sûr de lui !… Voyez-vous… je ne mettrais pas vingt-cinq cents sur sa tête ! »
XI – LES TRANSES DE JOVITA FOLEY.
Lissy Wag était, par son numéro d’ordre, la cinquième à partir. Neuf jours allaient donc s’écouler entre celui où Max Réal avait quitté Chicago et celui où elle devrait quitter à son tour la métropole illinoise. En quelles impatiences elle passa cette interminable semaine, ou, pour dire le vrai, Jovita Foley la passa en son lieu et place ! Elle ne parvenait pas à la calmer. Son amie ne mangeait plus, elle ne dormait plus, elle ne vivait plus. Les préparatifs avaient été faits dès le lendemain du premier er coup de dés, le 1 du mois, à huit heures du matin, et, deux jours après, elle avait obligé Lissy Wag à l’accompagner jusqu’à la salle de l’Auditorium, où le second coup allait s’effectuer en présence d’une foule toujours aussi nombreuse, toujours aussi émotionnée. Puis les troisième et quatrième coups furent proclamés à la date des 5 et 7 mai. Quarante-huit heures encore, et le sort allait se prononcer sur les deux amies, car on ne les séparait pas l’une de l’autre : les deux jeunes filles ne faisaient qu’une seule et même personne. Il faut s’entendre, cependant. C’était Jovita Foley qui absorbait Lissy Wag, celle-ci étant réduite à ce rôle de mentor, prudent et raisonnable, qu’on ne veut jamais écouter. Inutile de dire que le congé accordé par M. Marshall Field à sa sous-caissière et à sa première vendeuse avait commencé le 16 avril, le lendemain de la lecture du testament. Ces deux demoiselles n’étaient plus astreintes à se rendre au magasin de Madison Street. Cela ne laissait pas, cependant, de causer quelque inquiétude à la plus sage. Car, enfin, en cas que l’absence se prolongeât des semaines, des mois, leur patron pourrait-il si longtemps se priver d’elles ?… « Nous avons eu tort… répétait Lissy Wag. – C’est entendu, répondait Jovita Foley, et nous continuerons d’avoir tort tant qu’il le faudra. » Cela dit, la nerveuse et impressionnable personne ne cessait d’aller, de venir dans le petit appartement de Sheridan Street. Elle ouvrait l’unique valise qui renfermait le linge et les vêtements de voyage, elle s’assurait que rien n’était oublié pour un déplacement peut-être de longue durée ; puis elle se mettait à compter, à recompter l’argent disponible, toutes leurs économies converties en papier et en or, que les hôtels, les railroads, les voitures, l’imprévu, dévoreraient à la grande désolation de Lissy Wag. Et elle causait de tout cela avec les locataires, si nombreux dans ces immenses ruches de Chicago à dix-sept étages. Et elle descendait par
l’ascenseur et remontait dès qu’elle avait appris quelque nouvelle des journaux et des crieurs de la rue. « Ah ! ma chérie, dit-elle un jour, il est parti, ce monsieur Max Réal, mais où est-il ?… Il n’a pas même fait connaître son itinéraire pour le Kansas ! » Et, effectivement, les plus fins limiers de la chronique locale n’avaient pu se jeter sur les traces du jeune peintre, dont on ne comptait pas avoir de nouvelles avant le 15, c’est-à-dire une semaine après que Jovita Foley et Lissy Wag seraient lancées sur les grandes routes de l’Union. « Eh bien, à parler franc, dit Lissy Wag, c’est, de tous nos partenaires, ce jeune homme auquel je m’intéresse le plus… – Parce qu’il t’a souhaité bon voyage, n’est-ce pas ?… répondit Jovita Foley. – Et aussi parce qu’il me paraît digne de toutes les faveurs de la fortune. – Après toi, Lissy, j’imagine ?… – Non, avant. – Je comprends !… Si tu ne faisais pas partie des « Sept », répondit Jovita, tes vœux seraient pour lui… – Et ils le sont tout de même ! – C’est entendu, mais comme tu en fais partie, et moi aussi en qualité d’amie intime, avant d’implorer le ciel pour ce Max Réal, je t’engage à l’implorer pour moi. D’ailleurs, je te le répète, on ignore où il est… cet artiste, pas loin de Fort Riley, je suppose… à moins que quelque accident… – Il faut espérer que non, Jovita ! – Il faut espérer que non, c’est entendu… c’est entendu, ma chérie ! » Et c’est ainsi que Jovita Foley, le plus souvent, ripostait par cette locution, ironique dans sa bouche, aux observations de la craintive Lissy Wag. Puis, l’excitant encore, elle lui dit : « Tu ne me parles jamais de cet abominable Tom Crabbe, car il est en route avec son cornac… en route pour le Texas ?… Est-ce que tu ne fais pas aussi des vœux pour le crustacé ?… – Je fais le vœu, Jovita, que le sort ne nous envoie pas dans des pays aussi éloignés…
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