Les Alcooliques associés
260 pages
Français

Les Alcooliques associés , livre ebook

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260 pages
Français

Description

Quatre couples d'amis se retrouvent pour quelques jours à la campagne. Certains sont alcooliques, pratiquants à la dérive ou abstinents chancelants, les autres, désespérément droits dans leurs bottes, attendent ou abandonnent. Aucun cependant ne sera épargné par le génie de la bouteille qui va s'inviter à la fête et redistribuer les cartes de façon inattendue.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 15 mai 2019
Nombre de lectures 4
EAN13 9782140121685
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0900€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Je me plantai devant elle et lui envoyai une bouFée de tourbé dans les narines. « Mais votre convicïon inïme, docteur ? » Elle balaya mon haleine d’un revers de la main. « Ouf, ma convicïon inïme, jeune homme, c’est que si vous avez l’intenïon de sorïr ce soir, vous devriez bien vous couvrir, les nuits sont fraîches pour les alcooliques ces temps-ci. Quant à mon avis personnel, je ne suis pas sûre que vous vouliez l’entendre. » Je jetai un œil aux autres, les quatre femmes, à la fois dans l’expectaïve et dans l’appréhension, Éïenne, qui tenait son rôle de traducteur avec un empressement croissant, Robert, plus goguenard. Je me tournai à nouveau vers le docteur en prenant soin d’exhaler de biais. « Dites toujours. »
à la campagne. Certains sont alcooliques, praIquants à la dérive ou absInents chancelants, les autres, désespérément droits dans leurs boTes, aTendent ou
les cartes de façon inaTendue.
 vit dans le sud de la Bretagne. Il a exercé une variété de professions et longtemps voyagé et résidé à l’étranger. Il a également fait de nombreuses rencontres. Au moment de l’écriture de cet ouvrage, il travaillait dans l’industrie.
JeanPierre Pisetta Alain Raffaëlli
Les alcooliques associés Roman
Les alcooliques associés
Écritures Collection fondée par Maguy Albet et dirigée par Carole Martinez Potier (Sophie),Courts métrages de la Mouette, 2019. Lissorgues (Yvan),Maurice, collabo !, 2019. Adam-Jeyes (Franc),Rue des Trois limites, 2019. Fève (Martine),Le chemisier blanc, 2019. Cladart (Thierry),Sauver ce qu’il reste de l’humanité, 2019. Bracco (Pierre-Paul),Une liaison à suivre, 2019. Galluzzo (Rosine),La lumière froide des lucioles, 2019. Inzani (Isabelle),Démontée !, 2019. Pialot (Robert),Dragons rouges, diables noirs, 2019. Delval (Brigitte),Reviens quand tu pars, 2019. Ciron (Alain),La vie perdue de Maria Montessa, 2019. Desprès (Raymond),Clothaire, 2019. Dulaurier (Sarah),Alizée, 2019. Gavriloff (Georges),L’ombre adultère, 2019. Rouet (Alain),Elle est lui, 2019. * ** Ces quinze derniers titres de la collection sont classés par ordre chronologique en commençant par le plus récent. La liste complète des parutions, avec une courte présentation du contenu des ouvrages, peut être consultée sur le site www.editions-harmattan.fr
Alain Raffaëlli Les alcooliquesassociés Roman
Du même auteur Mangolérian Mon petit éditeur, 2015 Avec Pascal Ouvrard : Loire, Baltes et mourir Elzévir, 2008 Vendanges fatales pour les triades Mon petit éditeur, 2012 © L’Harmattan, 2019 5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris http://www.editions-harmattan.fr
ISBN : 978-2-343-17554-6 EAN : 9782343175546
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Robert et Géraldine nous avaient tous invités à venir passer un moment chez eux dans l’ouest de la France. Un petit espace de mise à jour entre les uns et les autres, m’avait dit Robert, lors de notre dernier déjeuner mensuel dans la capitale. J’y voyais moi la griffe de Géraldine. Nous étions tous au fait des péripéties de chacun et la nécessité d’une telle réunion m’échappait. Mise à jour. Je pensais plutôt à une mise au point, mais je me méfiais aussi de mon mauvais esprit, surtout dès lors que Géraldine était quelque part dans le décor. Le fait est qu’ils invitaient rarement, et rarement les gens ensemble, une façon de préserver l’intensité des rencontres peut-être. Ils étaient aussi très pris par ailleurs, surtout Géraldine. J’avais eu l’occasion bien sûr de séjourner chez eux, et les autres également, mais c’était la première fois pour tout le monde en même temps. Robert m’avait présenté la chose sous un côté retrouvailles informelles, mais je n’y croyais pas entièrement. Lui-même ne semblait pas y souscrire vraiment ou même de savoir de quoi il retournait, au fond je crois qu’il s’en foutait. Mais une fois encore, je me laissais sans doute déborder par mon imagination. La vérité, c’est que Robert n’avait plus le cœur à faire la fête depuis de nombreuses années. En fait, depuis qu’il avait arrêté de boire pour l’amour de Géraldine. Ce que je n’avais pas fait, moi. Sous mes yeux l’autoroute presque déserte plongeait dans un air pur et minéral vers un splendide soleil d’hiver. Versus la nationale, je pensais que j’avais fait le bon choix. Comme toujours le mouvement ininterrompu était propice à la réflexion. Il y aurait aussi moins de gendarmes.
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Je n’avais rien contre l’idée de revoir mes amis, mais j’étais intrigué. Le format un peu officiel, le caractère impérieux de la démarche alimentaient ma suspicion. Je devais aussi reconnaître qu’en matière de divertissement socio-cérébral, je n’avais pas grand-chose à me mettre sous la dent, menant une vie d’une platitude sidérale, et la nature ayant horreur du vide, un tel événement se devait d’occuper le terrain. Soulever les hypothèses les plus impertinentes était un trait propre au visiteur avide de variété. Robert et Géraldine avaient une très grande maison à l’écart du village, avec de nombreuses pièces, mais je redoutais l’ambiance huis clos. L’idée de devoir gérer une tranche de vie dans la promiscuité me mettait mal à l’aise. Sueurs et tremblements. Il allait falloir se surveiller, presque paraître, même aux yeux de mes trois compagnons de bamboche, d’autrefois du moins. En tête-à-tête, je pouvais me laisser aller, surtout avec Gabriel, les trois ensemble, c’était une autre histoire. Et puis il y avait les compagnes. Géraldine, je ne connaissais que trop, Francine, beaucoup moins, mais je ne tenais pas à connaître plus, et une poupée russe. Et je ruminai une fois de plus que je n’étais moi-même pas idéalement accompagné. Pour parfaire le tableau, je commençais seulement depuis quelque temps à m’avouer des choses déplaisantes qui traînaient et le temps n’arrangeait rien à l’affaire. Je nourrissais de multiples complexes à l’égard de Robert, Gabriel et Étienne. J’avais une profession manuelle et servile, un salaire modeste, je n’étais jamais sorti de France et j’avais une très mauvaise habitude qui me gâchait la vie. À ma décharge, et avec pas mal de mauvaise foi, je me disais que j’opérais dans un bouge de luxe, que l’argent des autres ne me rendait presque pas envieux, partir en Savoie pour voir ma famille me suffisait
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amplement et au chapitre de la consommation, mes amis avaient un lourd passif, aussi. Ma mère, que j’aimais tendrement, avait eu en outre l’illumination de m’affubler d’un prénom indigène – duc de Savoie oblige, sans parler de nos voisins les couteaux suisses - tout-à-fait désuet en métropole. Comme Robert, d’ailleurs, mais moi, j’en faisais un complexe. Lui, Robert, ça lui allait bien. Tout en conduisant, j’imaginais à l’avance les repas où forcément la conversation roulerait de temps à autre sur des sujets qui me seraient distants. Tous voyageaient ou séjournaient régulièrement hors de France, et faisaient des rencontres hors du commun, tutoyaient les aéroports et l’exotisme. Gabriel nous ramenait une Russe, et Étienne revenait sur le territoire vraisemblablement pour reconquérir son intello de journaliste. Et moi, à mon âge, je n’avais jamais pris l’avion. J’étais toujours puceau. Je soupirai. Mon égo allait vivre des moments inconfortables. Je réalisai qu’un schéma à peu près identique s’appliquait aux quatre femmes. Les mêmes éléments, les mêmes décalages, peut-être les mêmes complexes. Un plop suivi d’un pschitt vint appuyer mes craintes, comme un écho à mes pensées. À côté de moi, Agnès avait ouvert une cannette d’Atomisator. La troisième, la quatrième bière, peut-être, depuis ce matin. Besoin de décompression. Soit. Je pouvais comprendre que la perspective de se retrouver avec des presque inconnus fût stressante. Et puis nous étions en vacances, me faisait-on régulièrement remarquer. Tout de même, il s’agissait de ne pas faire une arrivée fracassante. Connaissant Géraldine, cela pourrait altérer la prise de contact initiale et les présentations. Mais je n’étais moi-même pas totalement à jeun. Probablement pour les mêmes bonnes raisons. Agnès et moi nous fréquentions depuis trois ans, mais c’était la première fois que je l’emmenais en weekend. Les projets
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