Les dames de Vestonice
112 pages
Français

Les dames de Vestonice , livre ebook

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112 pages
Français

Description

Dolni Vestonice est une déesse mère d'Europe de l'Est datant du Paléolithique. Elle témoigne, au-delà des temps, d'une relation à la féminité, à la maternité, dans laquelle l'idéal flirte avec le mythe.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 janvier 2012
Nombre de lectures 16
EAN13 9782296478459
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0500€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

© L’Harmattan, 2011 5-7, rue de l’Ecole polytechnique, 75005 Paris http://www.librairieharmattan.com diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr ISBN : 978-2-296-56714-6 EAN : 9782296567146
Les Dames de Vestonice
Manou She
Les Dames de Vestonice
Nouvelles
L’Harmattan
Exo-tisme
h ! Madagascar ! Terre Rouge, si riche de sa flore A comme nulle autre pareille, de sa faune endémique ! Mada qui appelle le vazaha blasé des terres occi-dentales. Interpelle son luxe. Interroge jusqu’au sens de son existence en exhibant son armée de lémuriens et autres caméléons rivalisant de couleur et d’agilité. Ah ! Ce retour à l’essentiel, rythmé par le balance-ment de la pirogue sur laquelle la touriste que je suis se laisse bercer des heures durant pendant que le malgache infatigable musclé peau cuivrée, rame, insensible au soleil autrement plus authentique que les maigres rayons qui per-cent l’atmosphère polluée des pays riches ! Ces longues conversations sur le passé colonial des lieux, sur ses besoins actuels, ses forces, ses faiblesses, qui me permettaient de réinvestir à bas coût les infos piochées dans le guide que j’avais lu et relu avant le départ ! Cette découverte d’un autre modèle, plus spirituel sans aucun doute, dont l’icône la plus représentative est ce sens du partage qui fait mar-cher hommes et bêtes pieds nus sur les mêmes sentiers dé-
vazaha : Blanc, français, en malgache.
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trempés, gluants d’une fine boue puante dans laquelle, en-tre diverses traces de pas, on peut reconnaître ou sentir un large éventail d’excréments ! Las ! Voici que le glauque me tente ! Mais non, ce n’est pas cela, Madagascar ! C’est le voyage, le dépaysement, les vacances. La perte des repères dérisoires dans lesquels je refuse d’enfermer ma vie. Ma détermination m’a lâchée, j’avoue. Pourtant, j’avais accueilli avec enthousiasme la par-tie fluviale du voyage, ramant de temps à autre, campant sur les bancs de sable, goûtant la cuisine malgache rehaus-sée de sable, m’amusant des poulets vivants que les piro-guiers avaient emmenés à défaut de pouvoir les conserver morts dans une glacière… Je me croyais caméléon, lavant mon corps et frottant bravement mon linge dans la grande baignoire commune qui déroulait ses méandres d’un bout à l’autre de l’île. Je faisais montre d’une toute nouvelle passion pour la lessive… hélas très vite mise à rude épreuve devant l’inefficacité toute occidentale de ma tâche : si les malga-ches avaient des vêtements parfaitement blancs, les miens devenaient au fil des jours, malgré un frottage obstiné, ja-louse que j’étais de la réussite de la ménagère locale, incu-rablement jaune sableux boueux pisseux. Faisant fi des contingences matérielles — décidée à profiter de mon séjour et à me malgachiser au mieux — je me dégourdissais les bras et les jambes par quelques minu-tes de brasse quotidienne dans ce fleuve douteux… que
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même les autochtones n’utilisaient pas. Et pour cause ! L’endroit était infesté de troncs d’arbres vivants et goulus. Innocente — voire stupide ? — française. Je croyais — voulais croire ? — que les crocodiles du coin étaient végéta-riens. Et je pestais contre les malgaches glapissant un lan-gage incompréhensible : je croyais qu’ils voulaient m’empêcher de me noyer. Je ne comprenais de leurs aver-tissements que leur inquiétude d’avoir encore embarqué une petite nature qui ne résisterait pas à la première vague-lette ! Je voulais dépasser mes limites ! Être une vraie mal-gache qui aurait eu la chance d’avoir assez d’argent pour prendre le temps de faire trempette ! J’étais, en somme, une touriste appliquée. Quelqu’un a fini par avoir pitié de moi et me dire que non, les crocodiles n’étaient pas végétariens. C’était une blague. Ca n’existe pas, les crocodiles végétariens. As-tu vu la dentition qu’ils ont ? assénait mon cher et tendre.Comment pourraient-ils manger de l’herbe ?! Ceci m’a fait un choc, je l’avoue. J’ai toujours été prête à accueillir les bizarreries de la nature, à remettre en cause mes connaissances ô combien lacunaires sur ce monde étrange qui porte la vie, à m’adapter, à accepter de bonne grâce que ce que je croyais savoir puisse être subite-ment devenu caduc. N’est-ce pas pour cette raison que je me suis rendue si loin de ma terre natale ? Mettre en jeu, tel un joueur de poker, le fragile édifice de ma vie ? Ne som-mes-nous pas sans cesse harcelés de risques évalués, de principes de précaution, de préventions, de protections en
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tout genre ? Comment faire le tri, entre mythologie et réali-té, sans devenir un simple mouton ? Consacrer son exis-tence entière à la validation des innombrables théories pul-lulant autour de l’indésirable spectre de la mort ? Impossi-ble pour moi. J’ai soif de vie. Qu’il se passe quelque chose, que le creux de mon être se remplisse enfin ! Mais avoir si bêtement côtoyé la mort ! Risqué de laisser ma famille éplorée annoncer à mes enfants : hélas, votre mère est morte, victime d’une inexplicable lacune, elle croyait les crocos végétariens ! Mon aînée de 5 ans ne se serait jamais remise d’une telle bêtise ! Quelque peu secouée de devoir prendre en compte la cruauté de la si belle Nature que j’étais venue adorer en ces lieux, j’ai cédé sur le sentier des crottes (si j’en juge à la fréquentation, c’était plutôt une route) et me suis lâche-ment réfugiée sur la charrette à zébu qui transportait nos bagages. Mal à l’aise à l’idée de signer par là, officiellement, mon statut de touriste. Mais vite rassérénée puisqu’à l’occasion de cette faiblesse j’ai pu flatter mon instinct gré-gaire : nous étions nombreux et de joyeuse compagnie, sur la charrette. Tous les touristes de l’île (hommes, femmes, baroudeurs farouches, aventuriers en tout genre aboutis-saient nécessairement à faire l’excursion en pirogue, qui elle-même se poursuivait par la visite du Parc National des Tsingy, pour finir sur l’allée des Baobabs… en passant par le sentier des vaches qui répugnerait tout civilisé digne de ce nom. Nous avons donc mutuellement réconforté nos
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