Les enfants du barrage
246 pages
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Les enfants du barrage , livre ebook

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Description

1960 : le village de Roselend disparaît sous les eaux. Le barrage qui produira suffisamment d’électricité pour éclairer toute la Savoie est terminé. Ainsi finit la vie de l’alpage, sacrifié pour le bien commun.  Thierry Verron nous conte les destins croisés d’Emilio, le maçon italien, de Damiano, son petit-fils, coureur du Tour de France, de Marie, la jeune alpagiste... Il nous rappelle les marmottes, les vaches tarines, les bonheurs simples de la nature respectée au fil des siècles, la communauté des hommes. Avec délicatesse, il nous livre sans manichéisme, dans une histoire sans bons ni méchants, le difficile équilibre du progrès et des traditions, du bien commun et de l’intérêt individuel, dans une jolie leçon de vie.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 janvier 2019
Nombre de lectures 13
EAN13 9782842066970
Langue Français
Poids de l'ouvrage 48 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0796€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Les enfants du barrage
Les enfants du barrage Roselend, le village sous les eaux
Roman
hîerry Verron
© La Fontaine de Siloé MND Difusion 38 avenue Jean Jaurès 73000 Chambéry Tél. 04 79 68 22 15 www.ontainesiloe.com contact@ontainesiloe.com
Maquette couverture : ©Pascal Tournaire Maquette intérieure et mise en page : ©La Fontaine de Siloé
Dépôt légal :novembre 2019
Crédits photographiques : Toutes les images©Fond personnel de Thierry Verron Sauf :©Evelyne Sorrel (illustrations),©Bruno Couttet (p.199)
La loi du 11 mars 1957 n’autorisant, aux termes des alinéas 2 et 3 de l’article 41, d’une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective », et, d’autre part, que les analyses et courtes citations dans un but d’exemple et d’illustration, « toute représentation ou repro-duction, intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’au-teur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite. » (article 40, alinéa 1). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les arti-cles 425 et suivants du Code pénal. Tous droits de traduction, de reproduction et d’adaptation réservés pour tous les pays.
© La Fontaine de Siloé, 2019 ISBN : 9782842066970
orsque es premîers rayons de soeî commencèrent à cau-er es murs en tu de a petîte capee, en cette mî-juîet, on pouvaît apercevoîr une emme aux ongs ceveux noîrs, e regard Ixé sur e ac. À cette époque de ’année, ’eau de onte ne manquaît pas, pourtant e nîveau du barrage étaît encore assez bas et es eaux des torrents des vaons de Treîco et du Cormet arrîvaîent à peîne à comber e vîde îmmense de a vaée. Durant e rîgoureux îver précédent, es turbînes de a centrae ydroéectrîque avaîent onctîon-né à peîn régîme pour satîsaîre es besoîns quotîdîens en énergîe. ï aaît maîntenant attendre patîemment a onte totae de ’épaîsse couce de neîge pour que e ac reprenne ses droîts, prenne ses aîses.
Assîse sur e muret soutenant ’édîIce, pensîve, ee espé-raît sans doute que a magîe du temps découvrîraît e ond du vaon, aîssant apparatre es dernîères traces d’un passé engoutî avant ’înexorabe remontée… Pourquoî attendaît-ee ce mîrace ? Pourquoî, depuîs es premîères ueurs du jour, espéraît-ee un sîgne du passé ? Et que passé ?
Roseend, e vîage sous es eaux• 5
Gîna venaît de aîre e voyage de Pont Serrand. Ee avaît quîtté son vîage nata de a vaée d’Aoste et venaît à un rendez-vous qu’ee n’auraît manqué pour rîen au monde… Un rendez-vous et aussî, et d’abord, une vîsîte îmagînée, une promesse qu’ee s’étaît aîte, quand ee étaît encore gamîne, à ’âge où î est dououreux de quîtter son père, de e voîr partîr pour des moîs, des années. Des sîèces dans a tête d’une enant. À partîr des années 1950, a petîte commune îtaîenne voyaît sa popuatîon ondre crueement. ’après-guerre et son cortège de mîsères poussaîent es abîtants à s’exî-er dans es vîes ou à ’étranger e pus souvent. Maçons réputés, es ommes s’enrôaîent dans es cantîers ormî-dabes de a reconstructîon de ’autre côté de a rontîère, cez es cousîns savoyards. a course à ’énergîe étaît ancée, es décîsîons de condamner et d’înonder pusîeurs vaons en atîtude prîses. Un Lot de maîn-d’œuvre européenne et arîcaîne vînt contrîbuer à ’éévatîon des murs de béton dans es Apes rançaîses, au percement des gaerîes d’ame-née d’eau des ruîsseaux et torrents. es jeunes emmes, quant à ees, pouvaîent acîement trouver un empoî de bonne, de cuîsînîère, sî ees suîvaîent eur marî, eur rère ou eur Iancé. Gîna avaît sîx ans. De nature joyeuse, épanouîe, sage et combée, ee étaît encore une enant înconscîente de tous es tourments de ’exîstence. Ee grandîssaît dans une a-mîe modeste, soudée ; on avaît e nécessaîre pour vîvre et on tîraît son boneur des opportunîtés ofertes par a Na-ture en travaîant rudement, onnêtement. Et, ors de ces beaux jours de juîet 1958, a maîson s’agîtaît. Ee remar-quaît des préparatîs înabîtues. Contraîrement aux autres années, ce n’étaît pas unîquement es va-et-vîent pour es
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Gîna venaît de aîre e voyage de Pont Serrand.
Roseend, e vîage sous es eaux• 7
auts apages, es transports de ravîtaîement pour es ber-gers. Certes, e second grand caudron de cuîvre avaît été sortî dans a cour, à ’abrî sous e toît du bûcer. e vîeux muet uî-même sentaît que e temps de retourner à a mon-tagne approcaît. ï s’agîtaît et ses grands yeux, à caque oîs que ’on venaît s’occuper de uî, sembaîent demander a date du départ. e ravîtaîement des bergers caque se-maîne reposaît sur son courage et sa orce. Maîs queque cose se préparaît dans e sîence et personne ne pensaît à avertîr a jeune enant. Peut-être pour uî épar-gner et repousser provîsoîrement des armes et sans doute pour proIter des utîmes înstants de boneur en amîe. Emîîo, son père, avaît rangé ses afaîres dans une grande vaîse beue aors que, d’abîtude, î es posaît dans des sacs de toîe qu’î accrocaît aux bâts de a bête de somme. Posée près de a massîve porte d’entrée scuptée, sa vaîse aîsaît e gros ventre, empîe du costume du dîmance, d’une cargaî-son de caussettes et de pus, de pantaons de aîne. Pas es afaîres de ’apage… Aaît-î partîr pour e Grand Nord ? Gîna n’osaît questîonner et es regards amîîers d’Ondîna, sa maman, ne a rassuraîent guère. es jours précédant e départ du père urent pénîbes pysîquement, et a atîgue du soîr aîdaît à atténuer es doutes et înterrogatîons. Troîs jours durant, on aîsaît en sorte de ne rîen oubîer : nî es outîs, nî es petîtes coses essentîees pour un séjour quî devaît être ong. Emîîo avaît rouvert a vaîse pour y gîsser un cadre décro-cé du mur de a cuîsîne. ï emportaît avec uî es vîsages de ses amours : es potograpîes uî seraîent d’un grand secours, es jours sombres de soîtude quand î seraît oîn derrîère e co du Petît-Saînt-Bernard.
8 •Les enants du barrage
Gîna avaît sentî es coses maîs n’osaît e dîre ; son papa ne ’abandonnaît pas. ï devaît, c’est vraî, es quîtter pour queques jours. ï ’avaît déjà aît quequeoîs pour aîder un cousîn à a constructîon de sa maîson vers Turîn, î revîendraît vîte. Une îstoîre courte tout au pus. D’aîeurs, à côté de a va-îse, î avaît caé son sac de toîe peîn d’outîs ; e mance de son marteau de taîeur de pîerre s’en écappaît. a Iette ne savaît pas qu’ee e reverraît seuement à a Noë… e repas du soîr eut une saveur partîcuîère : pas un repas de ête, pas un repas d’adîeux. Une tabe modeste sur a-quee reposaît au centre une sîmpe pasta ascîutta, mîse à pour donner e courage nécessaîre à Emîîo, quî Inît par évoquer à voîx eutrée son départ : ce seraît pour demaîn. ï partîraît, î s’en îraît oîn pour gagner queques sous quî manquaîent tant… Bîzarrement, î n’y eut pas de armes. Non que Gîna ne comprt pas, maîs ee restaît avec sa mère et eur compîcîté, es îens quî es unîssaîent, uî înspîraîent conIance. Ee savaît bîen qu’î ne es quîttaît pas par paî-sîr, on ne rouaît pas sur ’or dans ce coîn d’ïtaîe. Juste un regard tendre écangé avec son père… e sacrîIce en vaaît a peîne, e coupe mûrîssaît des tas de projets. a erme érîtée de grand-mère Evîra avaît subî e poîds des années, e toît étaît à reaîre, ’umîdîté n’étaît pas bonne pour a santé de a Iette. ïnstaer e conort moderne, sae de baîns et toîettes, devenaît une prîorîté. Et es rêves de créer une romagerîe moderne, d’aceter une dîzaîne de vaces, eur trottaîent dans a tête… Ce seraît en queque sorte préparer ’avenîr de eur gamîne, contînuer e travaî des ancêtres maîs en mîeux, en moîns arassant. Transmettre es vaeurs du passé, de a vîe en montagne, sans e poîds paraonîque des travaux usant es corps et
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es âmes ; garder es nobes pratîques en s’arrangeant a vîe. Ce seraît e dernîer voyage d’Emîîo. ï travaîeraît dur maîs revîendraît es poces peînes pour enIn construîre une nouvee vîe. Tous ces espoîrs, ces projets urent ex-pîqués à ’enant sans tabous, sans mensonges. Vînt e moment d’aer dormîr et on soula a Lamme de a ampe-tempête. a umîère dîsparut, Pont Serrand s’endormît, un peu comme par e passé au départ des sodats. Cette oîs, es papas s’en aaîent îvrer une guerre économîque pour obtenîr a îberté de vîvre dîgnement et déendre e droît d’être sîmpement eureux.
Dans e regard de Gîna, ypnotîsée par es reLets du ac de Roseend, ressurgîssaîent queques souvenîrs du moîs de juîet de ses sîx ans. e came encanteur des îeux berçaît sa mémoîre. entement, des îmages apparurent, des îmages précîses et queques paroes. a dernîère oîs que son père rancît a porte en uî tenant a maîn, cette maîn qu’ee ne vouaît pas âcer. Sa mère quî a prît dans ses bras pour e regarder monter dans ’autobus vert au bas du cemîn, dans e vîrage où î aaît attendre e véîcue de ramassage des ouvrîers. e bruît du moteur que a Iette entendît a premîère, quî uî It sursauter e cœur. e dernîer baîser de son père et ’odeur du savon de rasage sur sa joue. Ses bras de géant quî a souevèrent avant d’en aîre autant avec sa
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