LES ENFANTS DU KHAT
194 pages
Français

LES ENFANTS DU KHAT , livre ebook

-

194 pages
Français

Description

Asli n'a pas toujours été cette jeune fille sage, pratiquante et studieuse, cette grande sœur bienveillante et responsable. Elle aussi, à l'instar de ses camarades désœuvrés, délaissés par des parents obsédés par le khat, a goûté aux plaisirs faciles et vains, aux divertissements futiles, aux tentations de la nuit… Cette chronique de la vie quotidienne à Djibouti livre le tableau d'une société gangrénée par le khat et celle d'une jeunesse à l'avenir compromis. Inquiète et révoltée par amour pour son pays, l'auteur conserve néanmoins l'espoir qu'un jour prochain il se réveillera.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 08 janvier 2016
Nombre de lectures 15
EAN13 9782842806880
Langue Français
Poids de l'ouvrage 35 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0374€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

sli n’a pas toujours été cette jeune lle sage, Apratiquante et studieuse, cette grande sœur
bienveillante et responsable. Elle aussi, à l’instar de
ses camarades désœuvrés, délaissés par des parents
obsédés par le khat, a goûté aux plaisirs faciles et
vains, aux divertissements futiles, aux tentations de
la nuit...
Le khat, cette herbe hallucinogène venue de la
péninsule arabique, que les adultes mastiquent à
longueur de journées, les plonge tour à tour dans
l’euphorie et l’hébétude. Cette drogue légalisée par
l’usage régit, par son emprise, non seulement les
comportements mais aussi l’économie du pays.
Cette chronique de la vie quotidienne à Djibouti
livre le tableau d’une société gangrénée par le khat et
celle d’une jeunesse à l’avenir compromis. Inquiète
et révoltée par amour pour son pays, l’auteur
conserve néanmoins l’espoir qu’un jour prochain il
se réveillera.
Née à Djibouti, Mouna-Hodan Ahmed est
professeur de français. Les enfants du khat est son
premier roman.
MOUNA-HODAN AHMEDg
Les enfants g
du khat
ISBN 978-2-84280-162-5 g
al6, av. du Gouv.-G -Binger
94100 SAINT-MAUR-DES-FOSSÉS Ambassade de
France à Djiboutiwww.editions-sepia.com g
KHAT_Couv.indd 1 9/10/09 9:21:39
Photo : © Sépia
MOUNA-HODAN AHMED
Les enfants du khatLes enfants du khat
KHAT_Maket107x178.indd 1KHAT_Maket107x178.indd 1 5/10/09 12:21:095/10/09 12:21:09REMERCIEMENTS
Je remercie tout particulièrement
lleMM. Omar Youssouf Ali et Michel Jannin, M Saada Souleiman,
ainsi que tous ceux qui m’ont aidée et encouragée.
En couverture : la ville de Tadjoura (Djibouti).
Cet ouvrage est publié avec le soutien
de l’ambassade de France à Djibouti.
re1 édition : 2002
e2 2009
© Éditions Sépia, 2009
ISBN 978-2-84280-162-5
KHAT_Maket107x178.indd 2KHAT_Maket107x178.indd 2 5/10/09 12:21:105/10/09 12:21:10Mouna-Hodan Ahmed
Les enfants
du khat
Éditions
al6, av. du Gouv.-G -Binger 94100 SAINT-MAUR-DES-FOSSÉS•
Tél. : 01 43 97 22 14 • Fax : 01 43 97 32 62
www.editions-sepia.com sepia@editions-sepia.com•
KHAT_Maket107x178.indd 3KHAT_Maket107x178.indd 3 5/10/09 12:21:105/10/09 12:21:10À J. D. Penel,
cette âme généreusement amicale.
KHAT_Maket107x178.indd 4KHAT_Maket107x178.indd 4 5/10/09 12:21:105/10/09 12:21:10PREMIÈRE PARTIE
Ainsi donc,
la jeunesse africaine
est à la croisée des chemins.
Pius Ngandu NKASHAMA
KHAT_Maket107x178.indd 5KHAT_Maket107x178.indd 5 5/10/09 12:21:105/10/09 12:21:10KHAT_Maket107x178.indd 6KHAT_Maket107x178.indd 6 5/10/09 12:21:105/10/09 12:21:10CHAPITRE I
L’ousra
ous formons un grand cercle dans une cham-Nbre de taille moyenne, dénuée de tout meuble ;
nous sommes assises sur des matelas, des nattes
multicolores. Quelques-unes ont replié leurs jambes, d’autres
préfèrent les allonger devant elles.
Toutes les filles de l’ousra*, presque une douzaine,
sont là, aucune n’est absente aujourd’hui. Un jour
comme celui-ci est de plus en plus rare depuis que
les grandes chaleurs se font sentir. À part la porte, la
chambre ne possède d’autre ouverture qu’une petite
fenêtre très haut placée et recouverte d’un grillage. Le
ventilateur accroché au plafond tourne à fond, mais ne
répand qu’un air sec et chaud, car aucune brise ne vient
du dehors où la cime des arbres reste figée ! Une chaleur
étouffante succède au hanfi*, ce vent sec qui s’est levé
durant la matinée et a sévi jusqu’au soir. Quelques filles
du cercle ont desserré leur hijab* pour profiter de cet
air et mordillent les épingles qui servent à fixer leur
voile. Notre attention converge vers celle qui prend la
parole ; chacune d’entre nous doit donner son avis sur
KKHAT_Maket107x178.indd 7HAT_Maket107x178.indd 7 5/10/09 12:21:105/10/09 12:21:10la question du jour : est-il nécessaire de compléter son
hijab par le port de chaussettes ?
Zuleikha, notre mualima*, a, selon la bienséance
musulmane, désigné sa voisine de droite après avoir
ouvert le débat. Elle écoute, un sourire angélique sur les
lèvres. Chacune doit appuyer sa démonstration sur un
hadith*, une sourate. Le groupe auquel j’appartiens a
essayé de bien répondre, mais Zuleikha n’en a approuvé
aucune. Mon tour arrive : je bafouille une excuse et me
réfugie derrière mon manque d’expérience. On passe à
ma voisine et l’autre demi-cercle réussit à se défendre
mieux que le précédent.
— Mais c’est insensé de porter des chaussettes par
une chaleur pareille ! argue ma troisième voisine de
droite.
— Il faut bien être couvert de la tête au pied, ma
sœur ! rétorque une fille de mon groupe.
Des réponses incontrôlables fusent de chaque côté.
Zuleikha hausse le ton pour dominer cette cacophonie de
jeunes voix, chacune voulant y aller de son grain de sel :
— Mes sœurs, baissons nos voix et parlons comme
des musulmanes distinguées, non comme des femmes
vulgaires ! Cela dit, je vais donner mon opinion sur la
question du port des chaussettes, mais je ne vais pas
parler sans m’appuyer sur un hadith du Prophète – et
bénédiction de Dieu soit sur lui – où il est conseillé aux
femmes de laisser leurs jupes dépasser de quelques
centimètres sur leurs talons.
— Mais traîner ses habits, n’est-ce pas signe
d’orgueil et d’ostentation ?
— N’est-ce pas du gaspillage que de laisser traîner
ses jupes alors que d’autres n’ont rien à se mettre sur le
dos ? insiste Warda.
8
KHAT_Maket107x178.indd 8KHAT_Maket107x178.indd 8 5/10/09 12:21:105/10/09 12:21:10— Et en plus on ramasse toutes les saletés des rues
avec sa traîne, renchérit Ayane.
— Vous avez raison, c’est pourquoi nous, femmes
modernes et éduquées, nous allons porter des
chaussettes, faisant ainsi d’une pierre deux coups en évitant et le
gaspillage et les saletés ! conclut la mualima.
Des filles intimidées continuent d’échanger des
points de vue à voix basse. Zuleikha balaie l’assistance
d’un doux regard et émet un dernier argument pour
convaincre tout le monde :
— Tout dépend de la foi : il faut consolider votre
foi pour être capables d’obéir à toutes les obligations et
injonctions nécessaires ; je vous souhaite la plus grande
réussite dans le chemin de Dieu.
Elle consulte sa montre, mais aussitôt l’appel à la
prière du maghrib* se fait entendre. Déjà le
crépuscule ! Zuleikha appelle l’une de ses petites sœurs et lui
ordonne de verser de l’eau pour les filles qui n’ont pas
fait leurs ablutions en venant de chez elles ;
quelquesunes se lèvent et s’accroupissent autour d’un seau d’eau.
Elles vont se purifier en passant l’eau sur leur visage,
leurs bras et leurs pieds.
Bientôt, toutes les filles s’alignent pour la prière.
On étale un grand tapis, nous devons former une ou
deux rangées bien droites. Chaque orante se place en
se repérant aux épaules de ses voisines. S’il y a trop de
différence entre voisines, on préfère se ranger par ordre
croissant pour faire plus joli. Tous ces petits ajustements
se font dans l’entente et la fraternité les plus totales.
Zuleikha, se tenant au milieu de la première rangée,
sur la même ligne que les autres, prononce le takbir al
ihram*, un « Dieu est grand » dynamique. Puis, c’est au
tour des autres filles de le prononcer chacune pour
ellemême. Ensuite, la mualima commence à lire la fatiha*
9
KHAT_Maket107x178.indd 9KHAT_Maket107x178.indd 9 5/10/09 12:21:115/10/09 12:21:11d’une voix audible seulement pour la petite assistance.
Elle lit lentement, mélodieusement, cette sourate
généreuse qui est la clef du livre saint. Toutes les orantes
doivent prêter attention puis dire « amin ».
Chacune des filles doit reprendre la fatiha à voix
basse pendant que Zuleikha marque une petite pause.
Quand elle pense que tout le monde a fini, elle récite
une autre sourate ; certaines filles l’accompagnent en
sourdine, d’autres préfèrent écouter et goûter aux
délices des ayats*. La récitation touche à sa fin : un takbir

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