Les loutres et les abeilles
212 pages
Français

Les loutres et les abeilles , livre ebook

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212 pages
Français

Description

Irlande 1973 : Shanley, 20 ans et enceinte, doit affronter la colère de sa mère, l'incompréhension de sa famille et le regard de sa communauté. À la naissance de sa fille, elle est placée dans un couvent où durant des années elle connaîtra les mauvais traitements et la violence de sœurs supérieures sadiques. Parviendra-t-elle à en réchapper ? Reverra-t-elle sa fille un jour ?

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Informations

Publié par
Date de parution 15 mars 2016
Nombre de lectures 7
EAN13 9782140004711
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0800€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

les
Laurent Dedryver
Les loutres et les abeilles Roman
Les loutres et les abeilles
collection Amarante
Les loutres et les abeilles
AmaranteCette collection est consacrée aux textes de création littéraire contemporaine francophone. Elle accueille les œuvres de fiction (romans et recueils de nouvelles) ainsi que des essais littéraires et quelques récits intimistes.
La liste des parutions, avec une courte présentationdu contenu des ouvrages, peut être consultéesur le site www.harmattan.fr
Laurent Dedryver Les loutres et les abeilles
Roman
Du même auteur Que le Monde est Petit !, Sokrys, 2014. L'Étrange Vie de Fabien Zara, Sokrys, 2013. Le Carnet secret de Mary Wallace, L'Harmattan, 2012. Neeminah. Légende d'une Aborigène de Tasmanie, L'Harmattan, 2010. © L’Harmattan, 2016 5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris http://www.harmattan.fr diffusion.harmattan@wanadoo.fr ISBN : 978-2-343-08713-9 EAN : 9782343087139
Pour Florence, Julie et Romane
1995 Shanley n'en revenait toujours pas. Elle tenait là, dans ses mains, une vingtaine de lettres peut-être, sûrement plus, que sa fille lui avait écrites pendant des années, cette fille qu'elle avait vue naître et qu'on lui avait aussitôt enlevée comme si ce cadeau que la vie lui offrait était trop beau pour elle. Alors, pour son bien, on le lui avait arraché. Cette enfant, dont elle gardait une vision fugitive, avait représenté l'espace de quelques secondes la chose la plus merveilleuse qu'elle avait réalisée dans sa courte vie avant de devenir, pendant plus de vingt ans, le souvenir le plus terrible qui restât accroché à sa mémoire de femme et de mère. Aussi, elle s'efforçait d'y penser le moins souvent possible, car chaque fois que l’occasion se présentait, les images qui remontaient à la surface de ses souvenirs ouvraient dans son cœur une cicatrice béante difficile à refermer, un gouffre d'amertume insondable. Mais comment une mère peut-elle vivre une vie entière sans jamais penser à l'enfant, qu'un jour, elle a mis au monde pour lui faire découvrir la vie, ses joies et ses peines ? 7
Cette enfant, qu'elle pensait ne jamais revoir, qu'elle avait même crue morte, lui annonçait à travers une correspondance assidue qu'elle désirait la connaître, même si elle ne recevait jamais de réponses aux nombreuses lettres qu'elle expédiait depuis longtemps maintenant. Loin de céder au découragement, elle avait continué, persuadée que sa mère vivait encore sinon, disait-elle, le courrier lui serait revenu avec une mention indiquant que la destinataire ne vivait pas à l'adresse indiquée, ou pire, mais elle n'osait l'évoquer, un message annonçant sa disparition aurait traversé l'Atlantique. Et comme aucune nouvelle de ce type ne s'était jamais manifestée, elle s'était raccrochée à cette maxime connue dans le monde entier et qui expliquait qu'il valait mieux ne pas recevoir de nouvelles du tout si c'était pour en apprendre de terribles. Sa mère vivait toujours, mais pour une raison qui lui était propre, elle avait probablement désiré couper tout lien les unissant. Ses messages demeuraient lettres mortes, et aucun cordon ne nouait plus la mère et la fille. Qu'à cela ne tienne, elle la rencontrerait ! Alors, Gail avait persévéré, cherchant dans son obstination d'enfant, d'adolescente et d'adulte une raison d'espérer. Elle vivait à Manhattan, et ses parents adoptifs lui avaient dévoilé les secrets de son existence dès qu'elle avait été en âge de comprendre les malheurs de la vie. Aussi, aux premières années d'insouciance et de joie succédèrent des périodes d'abattement et d'interrogations, un canevas inégal de gaieté et de tristesse immense. Pourquoi ne vivait-elle pas avec ses propres parents comme tous les enfants de son âge ? Pourquoi l'avait-on soustraite à ce pays lointain, comment s'appelait-il déjà..., ah oui, l'Irlande pour l'Amérique ? Et pourquoi sa mère, 8
puisqu'il fallait l'appeler ainsi, ne répondait-elle à aucune de ses lettres ? Pourquoi ? Pourquoi ? Longtemps, elle avait cru qu'on lui infligeait une punition, semblable à celle qu'elle lisait dans les contes pour enfants, où les méchants loups venaient enlever les mauvais enfants. Pourtant, les gens qui l'avaient recueillie (volée?) n'avaient rien de la cruelle bête de toutes ces fables, bien au contraire. Ils l'aimaient et la choyaient, faisant leur possible pour la rendre terriblement heureuse. Tant bien que mal, les Lewis essayaient de la rassurer et lui expliquaient la situation. On avait dû l'enlever à sa mère pour leur bien à toutes les deux, et comme la fillette ne cessait de les interroger, ils avaient cédé à ses exigences et lui avaient donné l'adresse où elle pourrait contacter sa mère, un couvent dans une ville nommée Dublin, deux mots qui ne signifiaient absolument rien pour la fillette, sinon un mystère de plus à décoder pour résoudre l'énigme de sa naissance. Si les premières lettres, écrites au rythme de deux par an (toujours une en janvier et une autre six mois plus tard) depuis ses dix ans commençaient parMadame O'Creary,nota que cette distance s'était très Shanley rapidement estompée. En effet, laMadame des débuts laissa bientôt la place à un chaleureuxMaman qui émut aux larmes leur destinataire, elle qui malheureusement n'avait jamais eu la chance de revêtir les habits d'une véritable mère. Mais sa fille l'appelait ainsi, et cela suffisait à raviver dans son cœur les flammes d'un espoir dont les dernières étincelles peinaient à briller. Sur ce papier toujours coloré et gai, ornementé de roses magnifiques ou de dessins d'enfant, Gail racontait sa vie sur l'autre continent, chez les Lewis que Shanley n'avait jamais vus et dont elle ignorait jusqu'à ce jour l'existence. 9
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