Les mangeurs de Carême
234 pages
Français

Les mangeurs de Carême , livre ebook

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234 pages
Français

Description

Il n'aurait pas dû être expulsé de France parce que Français. Il n'aurait pas dû, à son arrivée en Algérie, se faire héberger par un avocat converti au christianisme et Kabyle de surcroît. Il n'aurait pas dû se trouver parmi les "mangeurs de Carême" lors de la descente de la police algérienne venue les arrêter. Il n'aurait pas dû témoigner à leur procès. Amalou, jeune informaticien à France Télécom, n'aurait pas dû...

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Informations

Publié par
Date de parution 01 novembre 2013
Nombre de lectures 13
EAN13 9782336330235
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

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Extrait

Les mangeurs de Carême
Derri Berkani
Derri Berkani Les mangeurs  de Carême Roman
Les mangeurs de Carême Lettres du monde Berbère
MANGEURS DE CARÊME LES
Lettres du Monde berbère La collection accueille les ouvrages littéraires francophones ou traduits (romans et recueils de nouvelles, contes) issu de l’aire culturelle berbérophone d’Afrique du Nord.
Derri BERKANI  LES MANGEURS DE CARÊME
Du même auteur Ne montre à personne (1998) La Kahéna de la Courtille (2002) Le tournesol fou (2004) Le retourné (2007) Périple andalou (2011)Prime time (2012)
« L’indestructible est supérieur au pouvoir de destruction. »  Saint Augustin (L’Aveu) « Il est de l’honneur, comme d’un vieux vêtement plus il est usé, moins on en prend soin. »  Apulée (Apologie)  À M. À tous ceux qui, en en pays musulman sont stigmatisés parce qu’ils vénèrent un autre dieu qu’Allah, ou qu’ils osent ne croire en rien.
out a commencé exactement le 13 Tseptembre 2010, second jour de jeûne du ramadan ce que j’ignorais. Les dates de ce mois d’abstinence, basées sur la lune, varient si souvent, qu’un incroyant comme moi se trouve forcément largué. Technicien à France Télécom, je vérifiais en compagnie de deux collègues le fonctionnement de l’antenne qui dessert le quartier Stalingrad-La Chapelle. À treize heures pétantes, je m’étais proposé d’aller jusqu’à la boulangerie de la rue Bellot chercher les sandwichs réservés le matin.  Le planning conçu par notre employeur interdisait toute pause déjeuner, nous disposions juste d’une poignée de minutes pour avaler un sommaire casse-croûte sur le lieu de notre travail. La frugalité au service du rendement, en somme.  Rue de Tanger, sur le trajet du retour, je m’accordais un peu d’avance en mordant ma baguette jambon. Fatalitas ! c’était devant la mosquée «Ad Dawa» que j’entamais, en toute innocence, mon repas.
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 Mangeurs de carême  Soudain, un hurluberlu barbu,khamis blanc, calotte ajourée, qui n’était autre que l’imam Abou Bakr, me barra le chemin en hurlant «Alahima ina saïm» ( Au nom de dieu, ici on observe le jeûne) «Ya muslimin nahaou adh el kafar» (ô musulmans chassez cet impie.) Il me bloqua dans une encoignure près de l’entrée. Je l’écartai sèchement d’une bourrade, il trébucha, s’accrocha à mon blouson en braillant contre mon visage «Aâly’a!Ya Mouminins » (À moi, ô croyants !) Le cri de guerre que poussaient, avant la bataille, les combattants des épopées mahométanes au temps duKhalifeHaroun E’Rachid. Alors que je me détournais pour esquiver son haleine aussi chargée qu’un gaz anti-émeute, deux colosses armés de bâtons giclèrent de la librairie coranique adjacente pour décharger sur moi leur hargne avec une vigueur barbare. Comme fauves en chasse, ils bondirent sur l’occasion de casser leKafir, le mangeur de carême, le sacrilège, le profanateur que j’étais à leurs yeux. Ils y mettaient tout leur cœur. Dans la bagarre, les tartines sacrilèges volèrent, une tranche de jambon bien beurrée se plaqua sur la porte, glissa jusqu’à la poignée qu’elle recouvrit entièrement tel un foulard satanique.  Mes deux collègues alertés par le raffut de la rixe, dévalèrent du toit comme d’un toboggan pour me porter secours armés l’un d’un marteau l’autre d’une clé à molette, lesdjihadistesbattant en retraite
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 Mangeurs de carême me laissèrent à terre avec deux côtes fêlées et des hématomes sur tout le corps. Alertés par des passants témoins de l’agression, les keufs intervinrent mollement, enregistrèrent ma plainte traînant du stylo, émettant de sérieuses réserves quant à la fiabilité de ma déposition. Pour eux, mon acte était réfléchi, prémédité.vous êtes livré à une provocation« Vous délibérée en « mangeant du cochon, un jour de carême devant la mosquée. »Circonstance aggravante, le morceau de porc qui pendouillait toujours sur l’huis de l’édifice interdisait l’entrée de la salle de prière aux fidèles ; pas un n’avait osé prendre le risque d’une damnation en maniant cette viande impure. Cette anodine tranche deprosciutto crudodevenue pièce à conviction et preuve flagrante du délit de« profanation d’un lieu de culte musulman, »plombait mon cas. Gravissime. Me voilà assimilé, nonobstant ma gueule d’arabe, à ces nervis du Front identitaire qui à Nice exposent à l’entrée des sanctuaires musulmans des têtes de truie.  La suite doit beaucoup à ma fureur à la sortie du commissariat. Complaisant, l’inspecteur de police avait enregistré tous les propos de l’imam intégriste comme parole de Coran, alors qu’il avait décortiqué, passé au crible du doute la moindre de mes affirmations. De victime, je devenais accusé…  Abou Bakr plus qu’un simple prêcheur de quartier devait être, en réalité, une taupe introduite par le pool antiterroriste dans les milieuxdjihadistes.
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