Luéji ya Kondé
170 pages
Français

Luéji ya Kondé , livre ebook

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170 pages
Français

Description

L'agent territorial Henri Drum (alias Gustave Van Herreweghe, 1898-19??) résidait au Katanga dans la région où habitaient les peuples lunda, tshokwe et lwena quand il a mis, par écrit, au début des années 1930, ce mythe de création de l'empire lunda. Dans sa reconstruction du mythe de création de l'empire lunda, Drum relate l'histoire d'amour entre Luéji et le chasseur luba Chibinda Ilunga. Ce faisant, il ne peut empêcher que sa perspective de colonisateur nuance celle du conteur du mythe d'origine d'un peuple.

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Publié par
Date de parution 13 novembre 2018
Nombre de lectures 3
EAN13 9782140105340
Langue Français
Poids de l'ouvrage 22 Mo

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Extrait

(La fille de Kondé)
Yala Mwako avait deux fils et une fille. La fille s’appelait Luéji ya Kondé, ce qui veut dire : fille de Kondé, nom d’une de ses femmes. [...] Luéji était grande, belle et douce. Ses hanches souples, ses seins fermes, ses dents à l’ivoire éblouissant, ses lèvres charnues et voluptueuses, ses larges yeux luisants et doux, ses bras divinement moulés, ses fines attaches en faisaient une vierge d’ébène, plus ravissante que la voûte ombreuse de nos belles nuits africaines. Mais il y avait quelque chose de plus beau que le visage et que le corps de Luéji, c’était la bonté qu’ils exhalaient. Elle se penchait sur toutes les joies et toutes les peines autour d’elle, et elle avait ceci de particulier qu’elle aimait tendrement son vieux père Mwako.
C’est ainsi que commence l’histoire de Luéji ya Kondé, racontée autour du feu par l’historien de la nation lunda. L’agent territorial Henri Drum (alias Gustave Van Herreweghe, 1898-19??) résidait au Katanga dans la région où habitaient les peuples lunda, tshokwe et lwena quand il a mis, par écrit, au début des années 1930, ce mythe de création de l’empire lunda. Fondé au XIV siècle, l’État lunda s’étendit dès le XVII siècle aux confins des actuels territoires congolais, angolais et zambien. Dans sa reconstruction du mythe de création de l’empire lunda, Drum relate l’histoire d’amour entre Luéji et le chasseur luba Chibinda Ilunga. Ce faisant, il ne peut empêcher que sa perspective de colonisateur nuance celle du conteur du mythe d’origine d’un peuple.
Henri Drum
LUÉJI YA KONDÉ (La fille de Kondé) (La fille de Kondé)
Présentation de Thérèse De Raedt avec la collaboration de Roger Little AUTREMENT MÊMES
LUÉJI YA KONDÉ(Lafille de Kondé)
COLLECTIONAUTREMENT MÊMES conçue et dirigée par Roger Little Professeur émérite de Trinity College Dublin, Chevalier dans lordre national du mérite, Prix de lAcadémie française, Grand Prix de la Francophonie en Irlande etc. Cette collection présente en réédition des textes introuvables en dehors des bibliothèques spécialisées, tombés dans le domaine public et qui traitent, dans des écrits de tous genres normalement rédigés par un écrivain blanc, des Noirs ou, plus généralement, de lAutre. Exceptionnellement, avec le gracieux accord des ayants droit, elle accueille des textes protégés par copyright, voire inédits. Des textes étrangers traduits en français ne sont évidemment pas exclus. Il sagit donc de mettre à la disposition du public un volet plutôt négligé du discours postcolonial (au sens large de ce terme : celui qui recouvre la période depuis linstallation des établisse-ments doutre-mer). Le choix des textes se fait dabord selon les qualités intrinsèques et historiques de louvrage, mais tient compte aussi de limportance à lui accorder dans la perspective contem-poraine. Chaque volume est présenté par un spécialiste qui, tout en privilégiant une optique libérale, met en valeur lintérêt historique, sociologique, psychologique et littéraire du texte. « Tout se passe dedans, les autres, cest notre dedans extérieur, les autres, cest la prolongation de notre intérieur. » Sony Labou TansiTitres parus et en préparation : voir en fin devolume
Henri Drum LUÉJI YA KONDÉ(Lafille de Kondé)
Présentation de Thérèse De Raedt avec la collaboration de Roger Little
En couverture : Illustration de la couverture de l’édition originale,Éditions de Belgique, collection « Yvette », 1932
© L’Harmattan, 20185-7, rue de l’École-Polytechnique, 75005 Paris http://www.editions-harmattan.fr ISBN : 978-2-343-16134-1 EAN : 9782343161341
INTRODUCTIONpar Thérèse De Raedt
Du même auteur « Déterminer le rôle du littoral maritime dans quatrelms de Merzak Allouache tournés à Bab el Oued »,The French Review, vol. 91.4 (May 2018), p. 41-56 «Harragas,ou la traversée entre deux rives »,Celaan, vol. XIV, 2 & 3 (Fall 2017), p. 92-110 « Visual and Textual Interplay: Delacroix, Picasso, Djebar, Balzac and Fromentin », inApproaches to Teaching the Works of Assia Djebar,éd.Anne Donadey, New York : Modern Language Association, 2017, p. 59-68 «The Beach as Liminal Site in Abderrahmane Sissako’sHeremakono», inLa Ligne d’écume : Encountering the French Beach,éd. Sophie Fuggle & Nick Gledhill, London : Pavement Books, 2016, p. 193-215 «Congo River, au-delà des ténèbres: lueur d’espoir ou leurre? », International Journal of Francophone Studies, vol. 17, n° 1 (2014), p. 9-29 « Les représentations des couples franco-sénégalais au cours des vingt et vingt-et-unième siècles », inLa Poétique de l’histoire dans les littératures africaines,éd. Mamadou Kalidou Ba, M’Bouth Séta Diagana, Mamadou Ould Dahmed, Paris: L’Harmattan, 2014, p. 89-112 «Le Club Med : l’idéalisme d’une époque»,French Cultural Studies, vol. 21, n° 3 (August 2010), p. 216-235 «Ourika/Urica: deux approches de l’histoire d’une jeune Sénégalaise accueillie dans une famille noble française »,Rivista di Letterature Moderne e Comparate,vol. LXII, n° 2 (juillet 2009), p. 117-141 « Representations of the Real-Life Ourika », inApproaches to Teaching Duras’s Ourika,in Mary Ellen Birkett, Christopher Rivers éd., New York : Modern Language Association, 2009, p. 57-65 « Entretien avec Cheikh Hamidou Kane » (avec Amadou Tidiane Fofana), The French Review,vol. 91.2 (Dec. 2017), p. 190-202«“Donner l’espoir pour l’avenir de la République Démocratique du Congo” : entretien avec Alain Huart»,Dalhousie French Studies,vol. 105 (Spring 2015), p. 91-99 « Entretien avec Bestine Kazadi Ditabala »,Women in French Studies,vol. 23 (2015), p. 143-155 « Entretien avec Freddy Tsimba »,La Matière Congo : Continents manus-crits,4, éd. Claire Riffard (2015) : http://coma.revues.org/611
INTRODUCTION Publié en 1932,Luéji ya Kondéest une version romancée du mythe de création de l’empire lunda. Le roman se présente comme ayant er été rédigé par Henri Drum au bord de la rivière Lulua le 1 novembre 1931. Henri Drum est le pseudonyme choisi par le fonctionnaire colonial belge Gustave-Pierre-Hubert Van Herre-weghe qui résidait à ce moment dans la région occupée par les Lunda, où l’histoire de Luéjicirculait. Luéji est l’ancêtre mythique 1 dont descend le Mwant Yaav,l’autorité suprême des Lunda. Les Lunda viventaujourd’hui encore en République Démocratique du Congo, en Angola et en Zambie. Bien qu’il en existe plusieurs versions, la structure mythologique commune de la création de l’empire des Lunda peut se résumer comme suit. Le père de la nation lunda avait trois enfants : deuxls et unelle, Luéji. Après une dispute avec sesls à propos de vin de palme, le père les déshérita. Luéji reçut le pouvoir symbolisé par le bracelet sacré. Elle épousa Chibinda Ilunga, un prince et chasseur (chibinda signifiant chasseur) luba venu d’ailleurs, qui était d’une culture plus sophistiquée. Elle lui donna le bracelet sacré, ou, selon 2 certaines versions, il le prit. Ses frères, Tshinguli et Tshiniama , furieux, s’en allèrent et fondèrent de nouveaux royaumes : Tshinguli 3 le royaume tshokwe et Tshiniama le royaume lwena . Chibinda Ilunga (oul’un de ses descendants) étendit le royaume lunda et créa une dynastie aux usages policés. 1  On rencontre plusieurs variantes orthographiques pour Luéji : Luweji, Lweshi, Rueji et Ruweej ; et pour le Mwant Yaav : Ant Yav, Mwata Yamvo, Mwata Yanvo, Mwata Yavo, Mwanchianvwa, Mwachiamvwa, Mwata Jamvo, Mwantianvua, Muata Yanvo, Mwaniyanvwa ; et pour le peuple lunda : Luanda, Luunda, Luwanda, Luhunda, Londa, Lounda avec les préfixes A-, Ba-, Ma-, U-, etc. 2 On trouve aussi Kinguri ou Cinguri pour Tshinguli ; et Kiniama, Ciniama et Yala pour Tshiniama. 3 D’autres variantes orthographiques pour les Tshokwesont : Tchokwe, Tshiokwe, Tshiboke, Chokwe, Chibokwe, Kiokos, Quiocos avec les préfixes A-, Ba-, Ma-, U-, etc. ; et pour les Lwena: Luena, Lovale, Wena avec les préfixes A-, Ba-, Ma-, U-, etc.
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Comme nous le verrons, le roman de Drum se base sur des écrits d’explorateurs et vraisemblablement aussi sur des récits recueillis par des fonctionnaires coloniaux belges, auxquels il a incorporé ses propres observations ainsi que des enquêtes faites sur place. Un fonctionnaire territorial au Congo belge qui écrit 1 Né à Bruxelles le 6 novembre 1898 , Gustave-Pierre-Hubert Van Herreweghe effectuera neuf séjours au Congo pour un total de 2 quasiment 24 ans . Il vit au Congo de 1928 à 1955, époque où le 3 pays était une colonie belge . Avant sa carrière coloniale, il suit de septembre 1919 à juillet 1921 des cours de philosophie au scolasticat des pères du Très Saint Sacrement à Ixelles, et l’année suivante (de e septembre 1921 à juillet 1922) il enseigne en 5 latin-grec dans un 4 Petit Séminaire .À partir d’août 1922, il est employé, puis repré-1 La datede son décès reste inconnue. Il s’est marié avec Denise-Émilie Dubourg le 26 juin (ou juillet selon les sources) 1926 avec qui il eut une fille Jeanine née le 27 avril 1936. Tous les renseignements sur la vie de Gustave Van Herreweghe proviennent du dossier personnel de G. Van Herreweghe gardé aux Archives de l’État rue du Houblon à Bruxelles. Ils ont été complétés par les notifications trouvées dans l’annuaire du Ministère des colonies, Bruxelles S. A. Annuaires Lesigne.2 Un séjour durait normalement 3 ans (une dizaine de jours de congé était donnée par an) après quoi le fonctionnaire colonial passait 6 mois de « congé de convalescence » en Belgique. er 1 séjour 26-4-28 7-2-31 2 ans 9 mois 12 jours e 2 séjour 16-8-31 1-11-34 3 ans 2 mois 16 jours e 3 séjour 22-5-35 11-8-38 3 ans 2 mois 20 jours e 4 séjour 15-2-39 16-2-43 3 ans 11 mois 29 jours e 5 séjour 17-4-43 27-11-44 1 an 7 mois 10 jours e 6 séjour 26-3-45 30-9-46 1 an 6 mois 5 jours e 7 séjour 22-6-47 27-11-49 2 ans 5 mois 5 jours e 8 séjour 3-5-50 8-2-53 2 ans 9 mois 6 jours e 9 séjour 29-7-53 24-12-55 2 ans 4 mois 26 jours 3 Avant d’être une colonie belge, le Congo avait appartenu au roi Léopold II au terme de la Conférence de Berlin (15 novembre 188426 février 1885). Le roi gouverna seul sur ce territoire nommé État Indépendant du Congo pendant 23 ans. Le parlement belge vota son annexion le 15 novembre 1908. Dès lors la Belgique administra ce qui devint le Congo belge. La colonisation belge dura 52 ans et se termina le 30 juin 1960. 4 Mes recherches ne m’ont pas permis de trouver de quel Petit Séminaire il s’agit. Avant ses études supérieures, il avait, de 1912 à janvier 1918, suivi des cours au Petit Séminaire St Jean à Baronville (dans la commune de Beauraing)
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sentant, au service de différentes maisons de commerce. Il obtient un diplôme de sténographie délivré par le jury central de sténographie à Bruxelles et suit « les cours inférieurs» de l’École Coloniale à Bruxelles qu’il termine le 24 mars 1928.Il entame sa carrière coloniale le 2 avril 1928 (sa prestation de serment remonte au 29 mars 1928). À l’ÉcoleColoniale, il a suivi des cours de 1 tshiluba et, plus tard, sur place, il apprend le kiswahili . À cette époque, la « cellule de base» de l’administrationcoloniale est le territoire. Chaque fonctionnaire se voit attribuer un territoire. Les territoires dépendent d’un district. Les districts forment une province. Le grade que le fonctionnaire territorial reçoit dépend de ses études. Il monte en grade grâce à son expérience et 2 son ancienneté . Van Herreweghe entame son parcours dans la e 3 province du Katanga en tant qu’«agent territorial2 classe » . Il y er reste pendant dix-huit ans. Le 1 juillet 1930, il devient « agent re territorial1 classe » à titre provisoire et, le 25 avril 1931, il est er nitivement nommé. Sept ans et demi plus tard, le 1 janvier e 1938, il reçoit le grade d’«classe » et, leadministrateur territorial 2 er re 1juillet 1944, celui d’«administrateur territorial 1 classe. » Dès er le 1 janvier 1944, il acquiert aussi le statut de « régisseur du cadre des journalistes et personnel radio par voie de mutation ». À partir de son septième séjour, il réside dans la capitale, à Léopoldville (= Kinshasa) où il terminera sa carrière : « En 1947, il
1  Il avait aussi une connaissance orale et écrite du français, du néerlandais et de l’anglais.2 Aux différents grades correspondaient différents barèmes. Les grades étaient les e e suivants : agent territorial 3 classe, agent territorial 2 classe, agent territorial re e re 1 classe, administrateur territorial 2 classe, administrateur territorial 1 e classe, commissaire de district adjoint, commissaire de district 2 classe, re commissaire de district 1 classe. 3 e Il ne fut nommé qu’«agent territorial 2 classe » car ces deux années de philosophie au séminaire n’étaient pas considérées équivalentes à deux années re d’études universitaires ce qui était requis pour le grade d’agent territorial 1 classe. Van Herreweghe demanda que ceci fut révisé. «C’est effectivement en raisondu fait que les études justifiées par Mr. Van e Herreweghe, G., Agent territorial de 2classe, n’ont pas été considérées comme équivalentes à un diplôme universitaire comportant deux années d’études, que re l’intéressé n’a pu être agréé en qualité d’Agent territorial de 1 classe. » Lettre datée du 26 mars 1930 et signée pour le ministre par le secrétaire général en réponse au gouverneur général Duchesne qui avait demandé des explications quant à son grade.
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