Lydia, l éclat de l inachevé
210 pages
Français

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Lydia, l'éclat de l'inachevé , livre ebook

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Description


Lydia est une femme très agée, presque aveugle et presque sourde, une vie fragile qui arrive à son terme. Mais Lydia a été une femme forte, courageuse, héroïque, un agent de la Résistance dans la Belgique des sombres années 1943-1944. Ses documents, conservés au mépris de toute prudence, et les journaux de ses deux petites filles, révèlent l’engagement contre l’occupant. La petite Julie est fascinée par ce tas de secrets qu’elle devine en Lydia, son arrière-grand-mère. Entre la vieille dame et la résistante infatigable, un monde, une personnalité hors du commun que Julie touche du doigt et dévoile au lecteur.

Informations

Publié par
Date de parution 01 janvier 2007
Nombre de lectures 20
EAN13 9782876232143
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0116€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Lydia l’éclat de l’inachevé
Huguette de Broqueville
Lydia l’éclat de l’inachevé
roman
MICHEL DEMAULE
Publié avec l’aide du Fonds national belge de littérature.
© ÉDITIONSMICHEL DEMAULE, 2007, 41, rue de Richelieu – 75001 Paris.
Pour Charles-Albert, Clotilde, Isaline, Roxane et Alexandre
Éclairage
Quelques lignes, une page ou deux. Surtout pas de dilution. Julie, six ans, traversera le livre. On évoquera Gisèle sa mère. On parsèmera le texte de la présence d’Isabelle, grand-mère de Julie, fille de Lydia. De Laurence sœur d’Isabelle. Michel, le mari de Lydia, aura sa place. Et un siècle d’histoire, les guerres de 14 et de 40. La Résistance. Les documents ultra-secrets gardés au mépris de toute prudence. Les journaux de deux fillettes. Le génocide rwandais et celui du Kosovo. Et Lydia dans tout ça. Mais que dire d’une vieille femme si ce n’est des banalités: mère admirable, corps et âme dévouée à son mari, aujourd’hui centenaire. Mots creux sur une vie bien remplie. De quoi, au juste? Petites choses qui émaillent le quotidien jusqu’à la déroute finale. Grandes choses durant la guerre. Griffes temporelles chaque année plus profondes sur un visage ravissant. Belle: les hommes à ses pieds n’avaient de cesse de le lui dire. Coquette, rieuse, elle les dédaignait, le beau temps de la femme fleur avant celui plus rude du ma-riage, de la maternité, des responsabilités… Lydia, agent 7502, ma mère.
Lydia et Michel
I I I I I Béatrice, Florence, Laurence, Isabelle, Ferdinand I Gisèle I Julie
Lydia regarde les guêpes se débattre et mourir dans un bocal d’eau sucrée. Lydia regardant les guêpes. Son cou, la mousse des cheveux, la veste de cuir, la jupe de religieuse, les mains, et l’index pointé avec admiration: « La rosse! » dit-elle. Tombées par gourmandise, sans désemparer, elles nagent, se chevauchent, volettent, tombent à l’eau, immobiles un ins-tant. Les ailes frémissent, les pattes remuent et agrippent au passage une guêpe qui sert d’appui. Lydia scrute le combat de l’insecte sauvé, chassé par un autre qui sera éjecté lui aussi. « La rosse! » dit-elle devant l’assaut d’une bestiole qui n’en finit plus de tomber, renaître, tomber, survoler, frémir, s’accrocher, boire, s’agripper, tremper le museau, s’enfoncer, servir de reposoir, secouer l’importune, intensément ramer, car elles rament toutes dans le jus si mortellement tentant. « La sale bête, elle a encore réussi! » Avec une patience de pierre, Lydia attend la fin. — Qu’est-ce que tu fais? demande Julie. — Regarde! Regarde les sales bêtes! — Oh! Les pauvres petites, pourquoi elles ne s’envolent pas? — Parce qu’elles sont piégées. Dans la gorge, la phrase s’enfonce. « Elles piquent, il faut les détruire. » Contre Lydia, l’arrière-petite-fille contemple
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l’amas de pattes, d’ailes, de corselets qui s’ébattent jusqu’à plus soif. Lydia tend son doigt: — Tu vois celle-là, la rosse, elle a noyé sous elle deux de ses sœurs, mais elle finira bien par mourir. — Je ne veux pas qu’elle meure, crie Julie. — Va jouer, dit Lydia. — Tu es méchante. Lydia murmure: « La rosse, enfin! » Enfin la tueuse plonge le nez dans le jus, ouvre les yeux sur le délice de sa mort. Quelque chose en Lydia se réjouit comme si, après tant de luttes contre les Allemands, c’est elle, enfin morte et punie. « La rosse », dit-elle tout haut, ne sachant si elle s’adresse à la guêpe, aux Allemands ou à elle, coupable d’avoir été rosse envers les garçons et victorieuse jusqu’à l’ivresse, car en les dominant, elle dominait sa bête. Julie tire son arrière-grand-mère par la main, « Viens voir les capucines que j’ai semées », ainsi, pense-t-elle, les guêpes ne mourront pas car personne ne les regardera plus. Quand Lydia se mouvait encore, elle peignait. Un pouce de brun Van Dyck à l’ombre d’un pli, un trait de lumière sur la pupille, une touche de rose qui fait chanter le jaune, là, en bas du tableau. L’ombre finissait par atteindre ses yeux. Chez l’oculiste, le couperet tombe: un an de vision. On cache la vérité à Lydia. Jaune cadmium, bleu lapis-lazuli, rouges carmin et ver-millon qu’elle tamisait de terre de Sienne. L’obscurité attei-gnait le tableau, les yeux se fanaient sur du crépuscule. Son pinceau de martre plongeait sur un rouge éclatant qu’elle mélangeait de jaune pour coller du soleil. Elle couvrait la sur-face de blanc, d’émeraude, puis du violet, de l’outremer, tout ça la même chose, sombre, elle sombrait dans la mélancolie, je ne vois plus, saisissait un pinceau aux poils en soie de porc,
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