Ostinato
255 pages
Français

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Description

Au commencement était la lutte. Placer l'écriture de Louis-René des Forêts sous le signe de la lutte n'est pas le fruit d'une vérité théorique mais le résultat d'une confrontation de plusieurs années avec les textes.
Une vérité de parole s'en est dégagée, vérité d'expérience, celle donnée par un homme, à la fin de sa vie, en un passage de siècle et de millénaire, sous une forme inachevée et fragmentée. Ce livre propose au lecteur d'entrer dans les flots héraclitéens de l'écriture desforestienne. L'oeuvre entière de l'auteur est convoquée autour d'Ostinato, ce coeur battant qui compte "au nombre des plus beaux livres de la seconde moitié de ce siècle".

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 juin 2010
Nombre de lectures 46
EAN13 9782296257610
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,1000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

OSTINATO

DE L OUIS- R ENÉ DES F ORÊS

L’écriture comme lutte
© L’Harmattan, 2010
5-7, rue de l’École-polytechnique ; 75005 Paris

http://www.librairieharmattan. com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-11975-8
EAN : 9782296119758

Fabrication numérique : Socprest, 2012
Ouvrage numérisé avec le soutien du Centre National du Livre
Emmanuelle Rousselot


OSTINATO

DE L OUIS- R ENÉ DES F ORÊTS

L’écriture comme lutte
Critiques Littéraires
Collection dirigée par Maguy Albet
Dernières parutions
Constantin FROSIN, L’autre Cioran , 2010.
Jacques VOISINE, Au tournant des Lumières (1760-1820) et autres études , 2010.
Karine BENAC-GIROUX, L’Inconstance dans la comédie du XVIIIe siècle , 2010.
Christophe Désiré Atangana Kouna, La symbolique de l’immigré dans le roman francophone contemporain , 2010.
Agata SYLWESTRZAK-WSZELAKI, Andreï Makine : l’identité problématique , 2010.
Denis C. MEYER, Monde flottant. La médiation culturelle du Japon de Kikou Yamata , 2009.
Patrick MATHIEU, Proust, une question de vision , 2009.
Arlette CHEMAIN (Textes réunis par), « Littérature-Monde » francophone en mutation , 2009.
Piotr SNIEDZIEWSKI, Mallarmé et Norwid : le silence et la modernité poétique en France et en Pologne , 2009.
Raymond PERRIN, Rimbaud : un pierrot dans l’embêtement blanc. Lecture de La Lettre de Gênes de 1878, 2009.
Claude MAILLARD-CHARY, Paul Éluard et le thème de l’oiseau, 2009.
Idrissa CISSÉ, Césaire et le message d’ Osiris , 2009.
Christine RAMAT, Valère Novarina. La comédie du verbe , 2009.
David N’GORAN, Le champ littéraire africain , 2009.
Carlos ALVARADO-LARROUCAU, Ecritures palestiniennes francophones. Quête d’identité en espace néocolonial , 2009.
Gabriella TEGYEY, Treize récits de femmes (1917-1997), de Colette à Cixous , 2009.
Christopher BOUIX, L’épreuve de la mort dans l’œuvre de T.S. Eliot, Geroges Séféris et Yves Bonnefoy , 2009.
Françoise J. LENOIR JAMELOT, Stéréotypes et archétypes de l’altérité dans l’œuvre romanesque de Stendhal , 2009.
Gisèle VANHESE, Par le brasier des mots. Sur la poésie de Jad Hatem , 2009.
Aux pères et mères de tous ordres

A ceux qui ont lutté
et luttent
dans et par l’écriture
INTRODUCTION
Au commencement était la lutte. Placer l’écriture de Louis-René des Forêts sous le signe de la lutte n’est pas le fruit d’une vérité théorique mais le résultat d’une confrontation de plusieurs années avec les textes. Sur un "livre de bord" (O, TF, p.271) {1} qui aurait narré notre première approche de cette écriture, on aurait pu lire : abordage difficile. Il fallut suivre le cours imprévisible et insaisissable de la vie. Une reprise du Bavard fut révélatrice de changements. La découverte, la même année, de fragments d’ Ostinato et des Poèmes de Samuel Wood fut, cette fois, une épiphanie. A la manière de des Forêts parlant de sa première lecture du poète anglais Gérard Manley Hopkins, nous pourrions dire : "j’en ai subi un choc" {2} .
Une "vérité de parole" {3} s’en dégageait. Non une vérité théorique imposée mais une vérité d’expérience, celle donnée par un homme, à la fin de sa vie, en un passage de siècle et de millénaire, sous une forme inachevée et fragmentée. Mais la prévention pessimiste qui pesait sur l’œuvre a provoqué cette première question : que reste-t-il comme salut possible ? Cette question fut le point d’origine de notre recherche. Un peu par défi contre un sentiment dominant, par désir aussi de "risquer" un "sens" {4} , "au nom d’une idée de la poésie comme souci du salut et tentative pour changer la vie" {5} . Nous plaçant ainsi en situation de "transgression positive" {6} , nous nous mîmes à traquer les cellules de salut, lecture après lecture, en rechercher, fragment après fragment, les motifs. La formule du salut dans Ostinato nous apparut sous la lumière d’une trinité : lucidité, lutte, unité. Le premier et le dernier motif mettaient à jour une "face lépreuse" (O, MF, p.97) et un "bien pur" (O, MF, p.21).
La recherche "à tâtons" (PSW, p.7) des motifs de salut dans les fragments d’ Ostinato nous avait conduit à cette coexistence, nourrie par la critique, et consubstantielle à l’écriture de des Forêts, de la lucidité et de l’unité, de la face sombre et de la face claire, de la finitude et de l’ouvert, du nihilisme et de l’espoir. A leur croisée, le motif moteur de la lutte.
La conscience de cette coexistence plaçait en face d’une réalité conflictuelle incarnée dans le texte. Ce sont ces moments où l’être d’ Ostinato , armé de son tempérament, de son énergie et de son expérience, assume sa lucidité et entre dans une lutte qui devient comme sa "religion". Il s’élève alors au rang de "héros de légende" (O, MF, p.36). Dans un style qui fait face, l’écriture incarne ce corps à corps, ce mot à mot. Le héros lutte, littérairement et littéralement. Il se bat, et se débat, désespérément, mais ne cessera le combat que toutes forces éteintes sans s’occuper ni des chances ni des issues. Seuls l’énergie, le mouvement et la force le maintiennent, non la probabilité d’aboutir. Le salut n’est plus alors dans une issue mais dans la lutte même, au cœur de sa contradiction assumée.
Et l’analyse étymologique confirmait cette approche en mettant à jour une riche source commune entre les deux termes de notre hypothèse, écriture et lutte. Le verbe "écrire" vient du latin scribere, lui-même issu du grec graphein qui signifie proprement "creuser" : "les anciens écrivaient en creusant des tablettes de cire avec des stylets" {7} . Et le Dictionnaire historique de la langue française {8} précise la parenté avec des termes indoeuropéens signifiant également "gratter, inciser". Cet acte d’abord physique de l’écriture renvoie aux premiers vers des Poèmes de Samuel Wood : "Ecoutez-le qui grignote à petit bruit" (PSW, p.7) ; "Aussi se tient-il voûté sur un champ tout étroit/Comme une bête creuse un trou" (PSW, p.8). L’écriture est d’abord cet acte musculaire qui investit le corps du scribe aux prises avec la matière de la tablette, comme déjà dans un corps à corps. Et le mot lutte, issu du latin lucta, exprime justement ce combat corps à corps dont le modèle originel est la lutte gréco-romaine. Ecrire et lutter renvoient donc tous deux à des actes élémentaires, physiques et musculaires, dont il demeure en "manière de traces" (O, MF, p.15) cette inscription dans l’arène et sur le support du combat.
L’étymologie morphologique confirme cette approche. En effet le mot écriture s’est formé à partir du participe futur du verbe scribere : scriptura. Dans la grammaire latine, tout participe futur a nécessairement un sens actif, par opposition au participe parfait impliquant un sens passé et passif comme c’est le cas pour le participe scriptum qui a donné le mot "écrit". Ainsi l’écriture, par son étymologie même, est active ; elle se projette vers l’avenir, par opposition à l’écrit qui est voué à être figé. Seule l’écriture, et non l’écrit, peut être comparée à cette lutte dont "la forme indique probablement un fréquentatif" {9} . Qui dit fréquentatif entend répétition des gestes et exercices, cette répétition dont toute l’importance se manifeste dans Ostinato aussi bien que dans l’entraînement des lutteurs.
Un dilemme ici se pose, car l’écriture est vouée à devenir écrit, l’actif à devenir passif, le futur passé. L’écriture se fige en écrit dans le tissu du texte. Pour respecter le sens étymologique de l’écriture, il s’agirait donc de demeurer dans le mouvement, dans l’énergie, dans le conflit, dans la lutte, et ne pas se laisser piéger dans l’écrit, dans le maillage devenu rigide. Le texte ne doit pas devenir "piégé entre les quatre murs" (O, MF, p.23) d’une maille morte, mais demeurer mouvement et fluidité. Comment alors garder le caractère actif et lutteur de l’écriture dans le

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