SECRET DE GABRIELLE   RECIT
112 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

SECRET DE GABRIELLE RECIT , livre ebook

-

112 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Description

Ma mère est triste ce jour-là, elle se souvient d'une dispute avec quelqu'un de la famille qui lui a jeté à la figure : "De toute façon, vous n'êtes que la fille d'un bâtard !" Lorsqu'elle me raconte la suite de l'histoire, je me promets de découvrir, de tenter de comprendre et de dénouer les fils de ce secret de famille, parce que ce bâtard... c'est mon grand-père.ŠLe secret de Gabrielle a d'abord existé sous la forme d'un film documentaire (le livre est d'ailleurs vendu avec un dvd). Emmanuelle Petit a donc entrepris d'en écrire le récit pour développer ce qui n'avait pu trouver de place dans le film.Š

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 juin 2011
Nombre de lectures 87
EAN13 9782296466142
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0800€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Le secret de Gabrielle
Emmanuelle Petit


Le secret de Gabrielle

Récit


L’Harmattan
DU MÊME AUTEUR


Les silences d’Honorine, roman (Gulf Stream Editeur)

Elle n’était pas Marilyn, roman (Editions Belin)

Dans les brumes de Majuli, documentaire (Editions L’Harmattan)

Envoyer/recevoir, roman (Editions Jeanne Courtois)


Le code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


© L’HARMATTAN, 2011
5-7, me de l’École-Polytechnique ; 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr
ISBN : 978-2-296-55333-0
EAN : 9782296553330

Fabrication numérique : Socprest, 2012
Ouvrage numérisé avec le soutien du Centre National du Livre
À ma mère,
Une carte postale, une simple carte postale. Datée d’il y a plus de quatre-vingts ans. 1919, le cachet de la poste faisant foi. Un cachet de Grande-Bretagne…
C’est qui ce William ?
Mais tu sais bien !
Ma mère prend son air de "Evidemment que je t’en ai déjà parlé !". Eh, bien, non, tu ne m’en as jamais parlé ! Alors qu’est-ce que c’est que cette histoire d’Anglais ?

J’ai vingt-six ans. Ma mère est triste ce jour-là, elle se souvient d’une dispute avec quelqu’un de la famille qui lui a jeté à la figure : « De toute façon, vous n’êtes que la fille d’un bâtard ! »

Lorsqu’elle me raconte la suite de l’histoire, je me promets de découvrir, de tenter de comprendre et de dénouer les fils de ce secret de famille.

Parce que ce bâtard… c’était mon grand-père.
BÂTARD : Né de parents non légitimement mariés.
Qui n’est pas de race pure.
La décision de faire le film
Je suis affairée à chercher des papiers dans le placard de la maison familiale, quand je tombe par hasard sur une carte postale jaunie par le temps et écrite en anglais. Attirée par récriture d’origine britannique, j’interroge ma mère, qui tente bien entendu d’éluder la question. Dans un élan de pugnacité, j’insiste et elle me répond :
Mais tu sais bien, c’est le soldat anglais, on en a déjà parlé !

Non, je suis bien certaine que l’on n’en a jamais parlé !
Elle me révèle alors le secret de la naissance de mon grand-père, comme si elle me parlait de la pluie et du beau temps. Le père biologique de mon grand-père n’était donc pas César, mais un soldat anglais de passage…

Interloquée, je replace la carte postale dans le classeur où elle a été préalablement rangée. Il me faut préciser que ma mère, non seulement est très rigoureuse avec les papiers, mais aussi qu’elle ne jette rien. Les caves, garages, greniers de la maison regorgent donc de vieux objets et archives ayant appartenu à la famille depuis des générations. Tous les documents sont classés dans des pochettes annotées, elles-mêmes positionnées dans des classeurs étiquetés.
Sur le coup, le refus visible de ma mère d’en dire plus à ce moment – prétextant que ma grand-mère ne souhaite pas que l’on en parle – me dispense de poser des questions supplémentaires. Mais, au fil du temps, ce secret que j’ai percé me revient par vagues.
Je pense jusqu’alors, comme beaucoup, que notre famille a été épargnée par les secrets, mais plus j’y réfléchis, plus mon incompréhension grandit. Pourquoi se taire ? D’accord, il était honteux d’avoir un enfant naturel à l’époque, mais, de nos jours, n’est-il pas courant d’avoir un enfant sans être marié ? Les mentalités ont quand même évolué ! Je me rends compte petit à petit que cela n’est pas aussi simple, que la honte s’ancre dans les générations comme un poison. Mais comme je n’aime pas les conventions, ni admettre la bêtise des autres sans réagir, encore moins ne pas poser de questions, régulièrement et évidemment dans les moments où cela se prête le moins – soit sur le coup de l’impulsivité – je vais me mettre à poser des questions, à me battre pour que le sujet secret devienne une discussion que l’on peut aborder. J’ai envie de savoir, mais je crois aussi que j’ai envie que l’on sache, que l’on s’approprie cette histoire, l’on en déniche la part positive qu’elle se doit forcément de porter.

Toute mon enfance, j’ai regretté que l’intégralité de notre famille soit concentrée à Berck depuis des générations, aussi bien du côté de ma mère que de mon père. Je trouvais merveilleux les enfants ayant de la famille ailleurs en France, se réunissant entre cousins dans une grande maison familiale en Bretagne ou en Provence. Certes, il est sympathique de retrouver nos aïeux dans les vieux ouvrages sur la marine berckoise, mais avoir un arrière-grand-père et, par conséquent, une partie de la famille en Angleterre, sans le savoir, cela me semble terriblement romantique !

Les mois passent. Au cours d’un repas de famille, ma tante évoque l’arbre généalogique qu’elle a entrepris de faire. Alors qu’elle s’acharne depuis un moment à relater ses trouvailles sur les Lœuillette – le nom officiel de mon grand-père –, je lance :
À quoi bon, ils ne sont même pas de notre famille !
Regard foudroyant de ma mère, qui aussitôt jette un coup d’œil à la sienne. Incompréhension de mes sœurs et de mes cousins présents (je me rendrai compte plus tard que plusieurs d’entre eux ont occulté cette scène, « refusant » d’apprendre le secret à ce moment-là). Avec un soupçon de provocation, je me tourne vers ma grand-mère et m’adresse à elle directement :
Ah bon, on n’a pas le droit d’en parler ?
Ma grand-mère, les lèvres pincées, admet que l’on peut en parler, qu’il n’y a pas de problème. Je sais bien sûre qu’elle n’est pas sincère, qu’elle dit cela pour me faire plaisir et, qu’au fond d’elle-même, elle abomine cet échange. Ma jeune cousine intervient :
De quoi on parle là ?
Du vrai père de Papi, le soldat anglais !
Nouveau regard furibond de ma mère devant mon aplomb.
Mais, puisque Mamie a dit que l’on pouvait en parler ! insisté-je lourdement.
Ma tante, un peu déstabilisée, ajoute :
Qu’est-ce que tu veux que l’on mette dans l’arbre ? On ne connaît même pas son nom. On ne va pas mettre un point d’interrogation !
Cela se solde par :
Ramène donc ce plat à la cuisine ! appuyé par un dernier regard noir de ma mère.

Je comprends qu’il vaut mieux en rester là pour le moment. Telle une fille obéissante, je vaque aux obligations ménagères, accompagnée d’un sourire intérieur : j’ai crevé l’abcès !

Je me lance alors avec passion dans l’étude des mécanismes des secrets de famille, lisant divers ouvrages passionnants. À partir de là, de temps en temps et avec plus de diplomatie (!), je me mets à aborder le sujet avec ma mère. Elle se prend au jeu et suffisamment de temps a passé à parler du sujet en général, pour un jour faire référence à nouveau à celui qui nous concerne, à travers le dossier d’un film. En effet, après un long cheminement de pensée, j’ai décidé de mettre fin au secret. Je veux connaître la vérité, l’offrir à ceux qui en éprouvent le besoin, la transmettre à notre famille.
Exerçant depuis plusieurs années le métier de réalisatrice, je prends la décision de réaliser un documentaire sur cette histoire. Me « cacher » derrière mon métier m’aidera à me confronter aux gens de ma famille et me donnera le recul nécessaire pour ne pas trop tomber dans l’affectif. Ma caméra me protégera !
Je commence par écrire le dossier destiné à trouver des financements pour faire le film.
Le dossier de présentation du film
Il était une fois pendant la Première Guerre mondiale, un homme qui rencontra une femme. Il venait de Manchester. Il était jeune et

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents