Soie et métal
67 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Soie et métal , livre ebook

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Description

Sur un apparent coup de tête, une femme quitte sa famille. Clara, sa fille de seize ans ne l'accepte pas et la renie : quand on aime, on ne quitte pas! Huit ans plus tard, un inconnu lui envoie un carnet portant le nom de sa mère et l'exhorte à le lire. Le passé justifie-t-il toujours tout?

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 08 octobre 2019
Nombre de lectures 0
EAN13 9782806122896
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0850€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
4e de couverture
La collection évasion

La collection évasion
Avec la collection Évasion, empruntez un chemin tout en aventures et en émotions où tous les styles sont permis. Accompagnez nos talents belges pour une échappée belle en toute liberté !
Sélectionnés lors de deux sessions de speed-dating organisées chaque année, les auteurs d’Évasion vous proposent des histoires captivantes, à l’écriture fluide et de qualité, qu’il vous sera difficile de lâcher !

Une collection emmenée par Anne Ledieu, Laurence Ortegat et Françoise Rihoux.

Damienne Lecat, Le pisseux , 2019.
Dina Kathelyn, Passe le train , 2019.
Tuyêt-Nga Nguyên, Soie et Métal , 2019.
Copyright










Email de l’auteure : tyanaswan@hotmail.com



D/2019/4910/47
EAN Epub : 978-2-8061-2289-6

© Academia – L’Harmattan s.a.
Grand’Place 29
B-1348 Louvain-la-Neuve

Tous droits de reproduction, d’adaptation ou de traduction, par quelque procédé que ce soit, réservés pour tous pays sans l’autorisation de l’auteur ou de ses ayants droit.
www.editions-academia.be
Titre






SOIE ET MÉTAL
Tuyêt-Nga Nguyên
De la même autrice

De la même autrice

Le Journaliste français , Bruxelles, Luc Pire, 2007.
Soleil fané , Bruxelles, Luc Pire, 2009.
Les Guetteurs de vent , Waterloo, La Renaissance du Livre, 2013.
Les mots d’amour, je les aime tant , Waterloo, La Renaissance du Livre, 2018.
Exergue

Entre le bien et le mal existe une rivière. Je t’y rejoindrai.
Rumi
Clara
Elle ne s’en remet toujours pas. Cinq minutes déjà qu’elle se fâche, s’en veut. Cinq minutes qu’elle fulmine et se traite de tous les noms, et cela n’est pas près de s’arrêter. Elle avait beau avoir inspiré profondément et expiré longuement une vingtaine de fois pour se calmer, c’était peine perdue : sa colère expulsée à chacune de ses expirations rappliquait à chacune de ses inspirations, comme aspirée par les tourbillons de sa tempête intérieure.
Elle s’était pourtant promis de ne jamais ouvrir un courrier sans avoir au préalable vérifié l’identité de l’expéditeur. Elle s’était dit que le contraire équivalait à ouvrir sa porte à n’importe qui, que c’était idiot, stupide, inconséquent, dangereux. Et elle a ouvert l’enveloppe les yeux fermés.
Elle a des circonstances atténuantes : dix jours plus tôt, à la veille de son départ pour une semaine de congé, le secrétariat de l’hôpital universitaire où elle fait son internat lui a promis de lui envoyer les documents qu’elle réclamait depuis des lustres, lui assurant qu’elle les trouverait dans sa boîte aux lettres à son retour sans faute, mais vraiment sans faute. Alors, cette grande enveloppe en papier kraft et à soufflet qui sent l’administration à plein nez, elle l’a ouverte en zappant la case vérification.
Et après ?
Le mal est fait.
Seuls des timbres pouvaient la sauver. Certains sont si beaux. Et surtout, ils parlent. Ils disent d’où ils viennent, d’ici ou d’ailleurs, de quelques rues plus loin ou de l’autre bout du monde. Avec eux, on sait où on va. Mais il faut du temps pour les fabriquer et les manipuler et le temps, c’est de l’argent. Aussi les remplace-t-on de plus en plus par ces choses laides et sans âme qui s’appellent cachets postaux, qui se tamponnent à la queue leu leu plus vite tu meurs à l ’aide de machines travaillant jusqu’ à pas d ’heure, que personne ne regarde en tout cas pas elle, sinon l’enveloppe aurait volé, intacte, dans le cimetière des arbres tués pour rien, au lieu de trôner sur sa table, béante à côté de son contenu.
Le cimetière des arbres tués pour rien, c’est la corbeille dans laquelle Clara jette, sans les ouvrir, les envois indésirables (catalogues publicitaires, dépliants commerciaux, sollicitations diverses) en pensant aux forêts qu’on massacre pour vendre n’importe quoi, idées ou casseroles.
Il a suffi d’une seconde.
Sa journée avait pourtant si bien commencé.
D’abord, on est samedi. Le week-end devant soi. Réglé sur huit heures moins des poussières, son réveil l’a sortie de son sommeil avec un bulletin météo qu’elle a écouté avec délices : ciel azur, température entre dix-huit et vingt-huit degrés, vent faible à modéré. « Profitez bien de cette belle journée d’août », a conclu la présentatrice qu’on devinait de fort bonne humeur derrière son micro. Et comment donc ! Elle a sauté du lit, direction la salle de bains. Sous la douche, sa tête foisonnait de projets plus ensoleillés les uns que les autres, le premier étant une bonne heure de vélo dans la forêt toute proche pour s’oxygéner. Mais d’abord, se sustenter. Habillée, les cheveux encore humides, elle s’est activée dans sa cuisine américaine et son studio n’a pas tardé à embaumer l’odeur du café et du pain grillé. Pendant que l’un coulait et que l’autre dorait, elle a préparé le plateau : du jus d’orange frais, du beurre, de la confiture, du miel et un yaourt entier bien onctueux. Avec le café et les toasts, c’est le menu de son petit-déjeuner du week-end qu’elle prend à une petite table près de la fenêtre, entre l’espace cuisine et l’espace séjour, en y mettant le temps, comme il se doit. En semaine, c’est jus et café qu’elle avale debout coudes sur le comptoir avant de filer à l’hôpital.
Le plateau complété, elle l’a posé sur la table, à côté du courrier remonté à son retour la veille au soir et mis en attente sous une paire de ciseaux : la pile était haute, l’heure tardive et elle, fatiguée. Elle s’en occuperait le lendemain, entre tartines et confiture.
Elle en était à sa deuxième tartine quand elle est arrivée à l’enveloppe. Papier kraft et promesse de l’hôpital en sus, elle l’a décapitée aussi sec – l’enveloppe, pas la promesse – avec la paire de ciseaux, l’a renversée sur la table. Il s’en est échappé un paquet entouré d’un papier cadeau et fermé par un ruban satiné. « Décidément, les filles ont voulu se racheter pour m’avoir fait poireauter si longtemps avant de recevoir mes documents », a-t-elle éclaté de rire devant l’emballage first class. Fatale erreur. Le ruban dénoué, le papier écarté, ce n’étaient pas ses documents qu’elle voyait mais une enveloppe bleu clair contenant, selon toute vraisemblance, la lettre d’accompagnement à l’objet qui se trouvait en dessous, un carnet de bonne épaisseur, un Atoma A4 de fabrication maison, à voir ses bords irréguliers. Elle n’a pas eu le temps de se poser mille questions ni une à son sujet : collée en plein milieu de la couverture, une étiquette d’écolier l’a renseignée séance tenante à travers un titre écrit à la main comprenant un nom sur lequel ses yeux se sont brûlés, comme sur des braises incandescentes.
Si seulement on avait utilisé des timbres, certains sont si beaux qu’on les collectionne. A-t-on jamais vu quelqu’un collectionner les cachets postaux ?
C’est ce qu’on appelle l’effet papillon.
Un froissement d’ailes ici provoque à terme un cataclysme là-bas. Un événement anodin au départ déclenche un grand chambardement à l’arrivée. Mangez des fraises en hiver et les ours polaires deviennent des SDF à errer de banquise en banquise jusqu’au jour où il n’y en aura plus. Encore une espèce en voie d’extinction. Les ours, pas les banquises. Quoique…
« Effet papillon, j’exagère », se dit-elle.
Il n’empêche. Elle n’est plus dans sa cuisine qui embaume. Elle est dans la maison où le séisme a eu lieu. Elle n’est plus dans aujourd’hui où il fait si beau. Elle est dans ces hiers sombres qu’usant pelle et pioche elle a dûment enterrés. Sa dernière gorgée de café lui reste sur la langue, aussi amère que les souvenirs remontés à la surface d’une mémoire ressuscitée malgré elle.
« Histoire de Kim-Lan », le titre du carnet.
« Kim-Lan », le nom sur lequel ses yeux brûlent toujours. Huit ans déjà.
Huit ans depuis que, le teint pâle mais la voix passionnée, elle a prononcé ces pa

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