Le chemin de fer de Djibouti à Addis-Abeba
760 pages
Français

Le chemin de fer de Djibouti à Addis-Abeba , livre ebook

-

760 pages
Français

Description

Issu d'une thèse doctorale récente sur les origines du chemin de fer Franco-Ethiopien, cet ouvrage remet la ligne ferroviaire dans son contexte africain, véritable modèle de chemin de fer colonial. Partie intégrante des projets transcontinentaux des grandes compagnies coloniales au cours du dernier quart du XIXème siècle, ce chemin de fer est présenté sous deux angles : technique et financier. Examen détaillé des deux compagnies ferroviaires qui ont construit et géré le chemin de fer. L'ouvrage démontre le degré d'interdépendance de ces grandes compagnies coloniales, considérées jusqu'ici comme rivales l'une de l'autre. On y discerne les mêmes personnages de la haute banque européenne - Anglais, Français, Belges, Allemands - et leur désir d'établir et de contrôler de grands réseaux internationaux. Pendant les quarante ans que nécessita l'arrivée des rails à la capitale éthiopienne et l'achèvement de la gare d'Addis-Abeba, concessionnaires, entrepreneurs, financiers, même les ouvriers, sont envoûtés par l'Abyssinie, terre de légendes - et du Far West français…

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 juillet 1995
Nombre de lectures 597
EAN13 9782296306868
Langue Français
Poids de l'ouvrage 38 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

LE CHEMIN DE FER
DE DJIBOUTI À ADDIS-ABEBAÉditions L'Harmattan, 1995
ISBN: 2-7384-3506-8Rosanna Van Gelder de Pineda
LE CHEMIN DE FER
DE DJIBOUTI À ADDIS-ABEBA
Éditions l'Harmattan
5-7, rue de l'École-Polytechnique
75005 ParisA V ANT -PROPOS
Cet ouvrage est issu de notre thèse sur les origines du chemin de fer
Franco-Ethiopien, dès sa conception jusqu'au moment où la garantie de l'Etat
français est remboursée. Ainsi, elle est axée sur la période entre le Congrès
de Berlin et la prise du pouvoir légitime par Haïle Selassie l en 1930, la gare
d' Addis-Abeba n'étant inaugurée qu'à la fin de 1929. A ce moment, on
considèrait l'exploitation de la ligne, sous tous ses aspects, comme une belle
réussite de la France. Elle a aussi, en quelque sorte, garanti l'indépendance
de l'Ethiopie qui est entrée dans le XXème siècle avec la promesse d'un
essor technique et commercial exceptionnel. Les trains partent vers le haut
plateau éthiopien apportant de la quincaillerie, des appareils modernes, du
coton, et surtout, des céréales. Ils ramènent des peaux et du café "harrari",
très recherchés en Europe. La succursale de la Banque de l'Indochine à
Djibouti rivalise déjà celles de l'Océan Indien et de la Cochinchine; elle les
surpasse souvent en opérations de change.
Envisagée comme ouverture technique, instrument moderne, et
comme premier pas d'un projet ferroviaire transafricain français, cette ligne,
qui ne mène aujourd'hui "nulle part", eut des origines mouvementées et
complexes. L'histoire des origines du Franco-Ethiopien englobe celle des
relations entre la Côte Française des Somalis, l'Ethiopie et la France
métropolitaine, histoire non encore dechiffrée. Il est vrai qu'à l'époque, on
parlait souvent de l'échec à Fachoda; on ne prononçait que discrètement le
mot" Adoua" en Italie, belle victoire des Ethiopiens "pieds-nus" connus pour
leur force guerrière. Or, fait méconnu du grand public, Haïle Selassie
propose à la France en 1934 l'envoi de deux millions de ses soldats
"pieds-nus" pour l'aider dans la guerre qui, selon lui, s'annonce en Europe,
offre refusée, bien sûr, mais aussi restée méconnue. De même, l'existence
d'une station navale en Mer Rouge (Erythrée) en 1956, avec plus de
3.000 matins américains, est resté secrète. Trop de détails de l'histoire de la
Corne d'Afrique sont méconnus du public. Et on a du mal à comprendre
l'écart entre les quelque 300 millions de francs de marchandises transitant
par le port de Djibouti en 1930 et la misère actuelle de la région.
En essayant de répondre aux questions posées par les paradoxes
observés, nous ne pouvions pas nous limiter au chemin de fer lui-même, tant
les compagnies ferroviaires dépendaient d'autres paramètres. En même
temps, bien que certains termes de la technique ferroviaire soient aujourd'hui
archaïques, nous avons choisi d'utiliser le langage de nos sources; par
exemple, l'usage parfois anachronique de la majuscule. Nous espérons que
ceci, ajouté au fait que le français n'est que notre troisième langue, ne gêne
pas trop le lecteur. Ce sont nos sources qui parlent; ainsi, nos connaissances
techniques proviennent du chemin de fer de la fin du XIXème siècle.
1Un mot s'impose aussi sur les sources. La consultation des archives
françaises a été complétée par la recherche en Angleterre, ce qui a permis de
saisir une vision plus large du sujet et de restituer ce chemin de fer dans son
cadre historique, tout comme le chemin de fer, dit colonial, en général. En
effet, on doit examiner les liens financiers de toutes les lignes ferroviaires
coloniales pour comprendre leur véritable dimension au début du siècle et
celle des hommes qui les ont conçus. De même, pendant la lecture de cet
ouvrage, il faut rappeler que l'Ethiopie est le seul pays africain à rester
indépendant, plus ou moins souverain, pendant la deuxième vague coloniale.
La thèse nous a aussi permis de faire la connaissance des descendants
de deux des premiers aventuriers-commerçants de cette deuxième vague de
colonisation française: Léon Chefneux, concessionnaire du chemin de fer, et
Armand Savouré, l'un des premiers marchands français en Abyssinie. Leurs
liens s'avèrent encore plus étroits dans le temps: deux des filles Savouré
épousèrent les deux fils Chefneux. La famille Chefneux-Savouré nous a
gracieusement accueilli dans leur villa à Grasse, et ouvert, sans restrictions,
les fonds d'archives de leurs aïlleuls. Cette consultation a confirmé nos
hypothèses et nous a fait connaître, à travers les souvenirs de M. Marcel
Chefneux, l'aventurier de la fin du XIXème siècle que fut son père.
La vie des Français en Abyssinie n'est pas connue du grand public.
Les quelques lignes écrites à leur sujet sont remplies d'erreurs, souvent dans
un but publicitaire par des auteurs qui recherchent des liens avec Rimbaud
et n'ayant pas les connaissances historiques pour pouvoir comprendre dans
leur vrai contexte des lettres trouvées au hasard dans les greniers. D'autres
publications sont l'œuvre d'hommes aventurés sur place, plus tard. Ainsi, cet
ouvrage puisse-t-il fournir une base historique de la région qui permettra un
jour des études de fond sur ces aventuriers de la deuxième moitié du XIXème
siècle qui ont donné à Djibouti le nom de Far West français. Puisse cette
étude apporter aussi quelque lumière sur la place du chemin de fer colonial
dans l'Histoire. Quoiqu'il en soit, le sujet a été passionnant par ses multiples
paradoxes. Et nous esperons qu'une partie de cette passion sera transmise au
lecteur, en même temps qu'une connaissance du chemin de fer de Djibouti
à Addis-Abeba.
Nos remerciements vont surtout à M. Jean Martin, qui nous a
proposé ce sujet depuis la Maîtrise et a guidé nos recherches; à M. François
Caron, qui nous a fait comprendre à travers son séminaire d'Histoire des
Techniques combien est étroit ce lien entre Histoire et Technique; à la
famille Chefneux-Savouré pour avoir ouvert leurs archives, la consultation
permettant de confirmer nos recherches.
Et à mes enfants, pour leur soutien et leur appui, sans lesquels cet
ouvrage n'aurait pas été achevé.
2"Theplace, which the wisdom or policy of antiquity
had destined for the residence of the Abissinian
princes, was a spacious valley in the kingdom of
Amhara, surrounded on every side by mountains, of
which the summits overhang the middle part. The
only passage, by which it could be entered, was a
cavern that passed under a rock, of which it has
been long disputed whether it was the work of nature
or of human industry. The outlet of the cavern was
concealed by a thick wood, and the mouth which
opened intO the valley was closed with gates of iron,
forged by the artificers of ancient days, so massy
that no man could, without the help of engines, open
or shut them. "
(Samuel Johnson, The History of
Rasselas. Prince of Abissinia, 1759)
3INTRODUCTION
Samuel Johnson conçoit ainsi la résidence impériale lorsqu'il
commence, en 1759, l'histoire de Rasselas, le "quatrième fils du puissant
empereur" d'Abyssinie, "in whose dominions the Father ofwaters begins his
.
course; over whose bounty pours down the streams of plenty, and scatters
over half the world the harvests of Egypt". Dans cette image de l'Abyssinie
du courant littéraire, dit "Exotique", du XVIIIème siècle, il est facile de
discerner le parallèle établi entre l'Abyssinie, fontaine et source du Nil, et
le Jardin d'Eden, fontaine et source de la Vie: l'Abyssinie est l'image du
Paradis Terrestre. Il est intéressant de noter que Rasselas, le héros de
Johnson, contrairement au héros de Voltaire, Candide, ne cherche pas un
El Dorado, le Paradis sur terre, mais il part du Paradis, pour y retourner,
déçu du monde extérieur. En fait, les racines de la légende abyssine
remontent aux ères bibliques et la terre médiévale du Prêtre Jean fait encore
rêver les aventuriers du XIXème siècle, tel que Rimbaud.
Il n'est pas dans notre intention de dénombrer les reflets légendaires
de l'Abyssinie en Occident; cependant, il est intéressant de constater qu'au
XVlIIème siècle, Johnson, écrivain "moderne", commence son histoire en
liant les abondances du Nil aux hau

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents