Le Quatrième Partage de la Pologne
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Description

Peut-on encore, trois quarts de siècle après le quatrième partage de la Pologne et les tragédies qui ont suivi — et que notre colloque rappelle —, accepter le dépeçage d’un État souverain par son voisin puissant désireux d’assouvir ses visées expansionnistes ?

Il est vrai que les changements des frontières de l’Europe sont la cause ou la conséquence d’une longue histoire de notre continent. Des trahisons aussi, comme du mensonge et de la lâcheté, dont l’exemple est le Pacte Ribbentrop-Molotov, et ses dramatiques conséquences. La Pologne est le témoin privilégié. On peut être Polonais et avoir vécu, sans quitter sa ville natale, dans quatre pays différents, sans parler des régimes politiques.

À un moment, assez récent d’ailleurs, lorsque le Mur de Berlin s’est effondré, on s’imaginait entrer à l’époque de la « fin de l’histoire ». Le monde allait dorénavant avancer à partir d’un consensus démocratique et construire l’avenir sans antagonismes sociaux.

Or, il n’en est rien. Et le seul pouvoir que nous avons sur l’avenir, est la maîtrise du passé. Ce colloque était destiné à nous le rappeler, une fois de plus.

Avec les contributions de : Stéphane Courtois, Philippe Degouis, Hervé Hasquin, Bernard Joliot, Joël Kotek, Adam Micknik, Andrzej Paczkowski, Yves Santamaria, Timothy Snyder

Sujets

Informations

Publié par
Nombre de lectures 7
EAN13 9782803104635
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0030€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

LE QUATRIÈME PARTAGE DE LA P OLOGNE
A C , B , 21 22 2014 CTES DE OLLOQUE RUXELLES ET MARS
Le Quatrième Partage de la Pologne
S J K OUS LA DIRECTION DE OËL OTEK
CLASSEDESLETTRESETDESSCIENCESMORALESETPOLITIQUES
ACADÉMIEROYALEDEBELGIQUE
Académie royale de Belgique rue Ducale, 1 - 1000 Bruxelles, Belgique www.academieroyale.be
Informations concernant la version numérique ISBN : 978-2-8031-0463-5
© 2015, Académie royale de Belgique
Mémoires de la Classe des Sciences, Collection in-8°, série IV tome IX N° 2101
Diffusion Académie royale de Belgique www.academie-editions.be
Crédits Conception et réalisation : Grégory Van Aelbrouck, Laurent Hansen, Académie royale de Belgique Publié en collaboration avec
Bebooks - Editions numériques Quai Bonaparte, 1 (boîte 11) - 4020 Liège (Belgique) info@bebooks.be www.bebooks.be
Informations concernant la version numérique ISBN 978-2-87569-169-9 A propos Bebooks est une maison d’édition contemporaine, intégrant l’ensemble des supports et canaux dans ses projets éditoriaux. Exclusivement numérique, elle propose des ouvrages pour la plupart des liseuses, ainsi que des versions imprimées à la demande.
POUR INTRODUIRE LE SUJET
HERVÉHASQUIN Secrétaire perpétuel
Ce n’est pas un moindre paradoxe de notre temps qu’un débat qui se voulait être une réflexion historique soit rattrapé par l’actualité. Les événements que vit l’Ukraine de nos jours montrent une fois de plus que l’Europe médiane constitue, depuis plus d’un siècle déjà, la « terre de sang », comme l’appelle Timothy Snyder, ou une « chaudière » selon Timothy Garton Ash. En historien, je sais que les événements ne se répètent pas mais il est impossible de ne pas y percevoir des parallèles et de faire des rapprochements. Comment, sinon, apprendrions-nous quoi que ce soit de l’Histoire ? En quoi son analyse nous serait-elle utile ? Comment pourrions-nous concevoir l’avenir sans vouloir la comprendre et la maîtriser ? Lorsque Czeslaw Milosz parle en 1964 d’« une autre Europe », il s’adresse aux Occidentaux pour lesquels la frontière de l’Europe se situe, à l’époque, sur la ligne qui va de Hambourg à Venise. Au-delà d’elle se trouveterra incognita, plus exactement un territoire qui n’est familier qu’à quelques initiés, aventuriers ou rêveurs. Dans le monde d’alors, l’Europe a été coupée en deux et il a fallu attendre vingt ans pour que Milan Kundera s’élève contre le mur imaginaire qui les sépare, en parlant d’un Occident kidnappé, à savoir de l’Europe centrale, qui fait historiquement, culturellement et spirituellement partie de l’Occident mais qui fut kidnappée et rattachée politiquement à l’empire soviétique. Ainsi se définit le concept des trois Europe, cher aux dissidents centre-européens, comme György Konrad, Arpad Göncz ou Jenö Szucs en Hongrie, Vaclav Havel et les signataires de la Charte 77 en Tchécoslovaquie, aux Polonais Adam Michnik, Jacek Kuron, Tadeusz Mazowiecki et bien d’autres qui, cependant, lui préfèrent, pour des raisons géo-historiques, le terme de l’Europe de Centre-Est. C’est alors que le mouvement est lancé : les Polonais, avec Solidarnosc et les discussions de la Table ronde deviennent le moteur de la pression exercée d’en-bas sur le pouvoir, alors qu’en Union soviétique, à ce moment-là, les changements viennent d’en-haut, certes, dans le contexte favorable de la perestroïka de Michail Gorbatchov, mais comme durant toute son histoire. Une fois de plus se manifestent deux traditions différentes : celle européenne, démocratique, occidentale, et celle autoritaire, théocratique, impériale qui fait avancer et reculer le monde russe. Après 1989, les frontières de l’Occident ont changé. Trop lentement pour certains, trop rapidement pour d’autres. Elles englobent « l’autre Europe » : les pays baltes, la Pologne, la République tchèque, la Slovaquie, la Hongrie, la Slovénie, la Croatie, la Roumanie et la Bulgarie. La démocratie qui n’est pas un acquis mais un long processus se construit dans ces « nouveaux » pays et modifie ainsi notre vision de l’Europe. Celle d’aujourd’hui et, espérons-le, celle de demain. Après deux Europe, ensuite trois Europe, on peut enfin parler d’une Europe. Mais au-delà de cette Europe « politique », il y a une Europe géographique et culturelle. Où sont ses frontières ? Les événements en Ukraine remettent cette question à l’ordre du jour. Peut-e on encore, en 2014, trois quarts de siècle après le 4 partage de la Pologne et les tragédies qui ont suivi — et que notre colloque rappelle — accepter le dépeçage d’un État souverain par son voisin puissant désireux d’assouvir ses visées expansionnistes ? Il est vrai que les changements des frontières de l’Europe sont la cause ou la conséquence d’une longue histoire de notre continent. Des trahisons aussi, comme du mensonge et de la lâcheté, dont l’exemple est le Pacte Ribbentrop-Molotov, et ses dramatiques conséquences. La Pologne est le témoin privilégié. On peut être Polonais et avoir vécu, sans quitter sa ville natale, dans quatre pays différents, sans parler des régimes politiques. À un moment, assez récent d’ailleurs, lorsque le Mur de Berlin s’est effondré, on s’imaginait
entrer à l’époque de la « fin de l’histoire ». Le monde allait dorénavant avancer à partir d’un consensus démocratique et construire l’avenir sans antagonismes sociaux. Or, il n’en est rien. Et le seul pouvoir que nous avons sur l’avenir, est la maîtrise du passé. Ce colloque était destiné à nous le rappeler, une fois de plus.
RETOUR SUR L’ALLIANCE SOVIÉTO-NAZIE, 70 ANS APRÈS
STÉPHANECOURTOIS CNRS, Université de Paris X
Le gouvernement du Reich et le gouvernement soviétique doivent, tirant la leçon de toute l’expérience du passé, tenir pour certain que les démocraties capitalistes de l’Occident sont les ennemies implacables à la fois de l’Allemagne nationale-socialiste et de l’URSS.
Joachim von Ribbentrop, 15 août 1939.
Le 23 août 1939, l’Allemagne nazie et l’Union soviétique annoncèrent la signature d’un pacte de non-agression. Même si la Russie bolchevique avait longtemps entretenu des relations privilégiées avec l’Allemagne des années 1920, l’événement stupéfia la plupart des observateurs, tant l’opposition idéologique semblait irréductible entre le nazisme et le communisme soviétique. Or, cette alliance entre les deux grands dictateurs totalitaires, Hitler et Staline, devait avoir les plus funestes conséquences, qui marquent aujourd’hui encore le corps d’une Europe réunifiée.
1. UNTABOUMAJEUR
Peu d’événements historiques ont suscité autant de querelles historiographiques et renvoyé à autant d’enjeux idéologiques et géopolitiques que le pacte germano-soviétique du 23 août 1939. La raison principale en est la chape de plomb dont l’Union soviétique couvrit toute l’affaire après que Hitler eut attaqué l’URSS le 22 juin 1941 et que Staline eut déclaré « la Grande Guerre patriotique » comme une cause sacrée, fondatrice de l’identité soviétique e jusqu’à aujourd’hui. À cela s’ajouta pendant longtemps, au moins jusqu’au XX congrès du PCUS et au « rapport secret » de Khrouchtchev, la croyance en l’infaillibilité de Staline. Pour les Soviétiques et l’ensemble du camp communiste, le pacte avait été une manœuvre défensive qui avait permis de retarder l’attaque allemande contre l’URSS. Cependant, quand la Guerre froide commença à devenir chaude et que la bataille idéologique et propagandiste atteignit son armée, les Américains publièrent un volume de documents tirés des archives du ministère allemand des Affaires étrangères de la période 1939-1941, qui montraient que loin de relever d’une manœuvre défensive, le pacte avait au contraire été une alliance offensive des deux grands régimes totalitaires, d’abord contre la Pologne, puis contre les démocraties en général (Nazi-Soviet Relations,NSR, 1948). Très vite, ces révélations donnèrent lieu à des publications informées sur ce qui se révélait une véritable alliance, mettant ainsi à mal la posture antifasciste des communistes (Rossi, 1947, 1954). S’engagea dès lors un violent combat de l’ensemble du camp communiste contre ces révélations, Soviétiques et communistes français multipliant les publications qui dénonçaient de faux documents, et niaient en particulier l’existence des fameux protocoles secrets accompagnant les traités du 22 août et du 28 septembre 1939, lesquels révélaient comment Hitler et Staline s’étaient partagé la Pologne et l’Europe centrale et orientale (Les falsificateurs, 1948 ; Bouvier, Gacon, 1953 ; Courtois, 1983). Il fallut attendre quarante ans pour que, lors de la réunion du Congrès des députés du peuple en mai 1989, le pouvoir
soviétique commence à reconnaître ces faits. Depuis l’effondrement du communisme en Europe centrale et orientale et l’implosion de l’URSS, les archives se sont en partie ouvertes, permettant de mettre à jour des documents fondamentaux qui éclairent les raisons, la signification et la portée de l’alliance entre Hitler et Staline (en particulier, Dimitrov, 2005). Ce retour sur les années 1939-1941 est absolument indispensable pour interpréter ce que l’on a appelé « la guerre froide », la période de l’après-Yalta durant laquelle Staline n’a fait que poursuivre les objectifs qu’il s’était fixés à l’été 1939.
2. AUXORIGINESDELALLIANCEGERMANO-SOVIÉTIQUE
Les relations entre les leaders bolcheviques et l’Allemagne ont été inaugurées de manière très particulière, quand, en avril 1917, les services secrets allemands décidèrent de faciliter le retour en Russie de plusieurs dizaines de révolutionnaires, afin d’y intensifier la désagrégation de l’armée russe, parmi lesquels un certain Vladimir Ilitch Oulianov, alias Lénine. On connaît la suite : la prise du pouvoir à Saint-Pétersbourg par les bolcheviks le 7 novembre 1917, puis le traité léonin de Brest-Litovsk, de mars 1918 — par lequel Lénine concédait à l’Allemagne 2 800 000 km et le quart de la population de l’empire tsariste —, la guerre civile et enfin la stabilisation des bolcheviks au pouvoir en URSS. Dès 1920, Lénine a fondé la politique étrangère bolchevique sur trois principes. Le premier insistait sur la « défense de la patrie socialiste », à l’intérieur par la terreur et à l’extérieur en s’appuyant sur une puissante Armée rouge. Le deuxième aspirait à l’expansion de la « grande révolution prolétarienne mondiale », étant entendu pour Lénine que la prise du pouvoir en Russie n’était que le début d’un processus révolutionnaire destiné à bouleverser toute l’Europe, et en priorité l’Allemagne, dont la puissance industrielle et le prolétariat ouvrier viendraient conforter le pouvoir bolchevique. Cette expansion empruntait deux chemins, nullement contradictoires : la subversion intérieure à chaque pays — par le biais des partis communistes organisés au sein de l’Internationale communiste (ou Komintern) —, et l’action offensive de l’Armée rouge qui, après avoir été une armée de guerre civile en Russie, porterait la guerre civile internationale, et ce en ne tenant aucun compte des règles traditionnelles des relations entre États. Le troisième principe reposait sur « l’exacerbation des contradictions inter-impérialistes » : en clair, tout faire pour dresser les pays « bourgeois » et « capitalistes » les uns contre les autres, de manière à ce qu’ils s’affaiblissent réciproquement — comme durant la guerre de 1914-1918 — et favorisent la puissance révolutionnaire. Avec à la clef la double idée de laisser les « impérialistes » s’épuiser et de « transformer la guerre impérialiste en guerre civile » — le slogan stratégique de Lénine dès l’automne 1914. Ainsi, lors d’un plénum du CC du PCUS de janvier 1925, Staline déclarait : « Si la guerre commence, nous y entrerons les derniers pour peser d’un poids décisif dans la balance ». La première application spectaculaire de ces principes a concerné l’Allemagne. D’un côté, le Komintern y a longtemps mené une politique subversive, en s’appuyant sur le Parti communiste allemand qui, jusqu’en 1933, n’eut de cesse de combattre la République de Weimar, y compris parfois en collusion avec les nazis. D’un autre côté, Lénine, qui cherchait à détruire l’organisation de la nouvelle Europe issue de la guerre sous la houlette de la France et de la Grande-Bretagne, conclut à la surprise générale, le 16 avril 1922, le traité de Rapallo, par lequel l’URSS et l’Allemagne se reconnaissaient mutuellement et annulaient leurs dettes réciproques. Dès 1923, sous l’égide de la Reichswehr, furent signés les premiers contrats avec l’URSS, pour la construction près de Moscou d’une usine de fabrication d’avions de combat, ainsi que la vente aux Soviétiques de centaines de milliers de fusils, d’explosifs et autre matériel de guerre. En contrepartie, la Reichswehr allait bénéficier, jusqu’en 1933, de la possibilité de contrevenir aux clauses du traité de Versailles, qui limitaient fortement ses possibilités de réarmement. Ainsi, loin des yeux indiscrets, elle put mettre au point et expérimenter en URSS des technologies et des prototypes d’avions de combat et de chars. Elle installa en URSS des camps d’entraînement clandestins où des centaines d’officiers purent se familiariser à l’utilisation de ce matériel ultramoderne ; parmi ceux-ci, le fameux général
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