La meurtrière innocente
39 pages
Français

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La meurtrière innocente , livre ebook

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Description

Monsieur Séraphin PERVENCHE est un « gentil monsieur » pour les enfants à qui il distribue quelques pièces de monnaie, pour sa concierge dont il semble se soucier, pour les voisins avec qui il est toujours prévenant... mais Séraphin PERVENCHE n’est « gentil » qu’en apparence, parce que sa gentillesse feinte est son meilleur atout pour attirer la confiance des pigeons désespérés à qui il prête de l’argent en s’assurant pouvoir les plumer à tous les coups.


Aussi, quand il est retrouvé mort, dans son lit, asphyxié au gaz, les prétendants au titre de « coupable » sont nombreux.


L’inspecteur Odilon QUENTIN va se charger de trouver l’assassin de ce fieffé gredin qu’il voulait mettre sous les barreaux depuis fort longtemps. Pour cela, le policier va user de sa meilleure arme, son aspect mollasson et son air benêt qui font que personne ne se méfie de lui...


Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 11 mai 2016
Nombre de lectures 1
EAN13 9782373470994
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0007€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Odilon QUENTIN
* 1 *
LA MEURTRIÈRE INNOCENTE
Roman policier
par Charles RICHEBOURG
CHAPITRE PREMIER
Victor, dit Toto, le fils de la crémière, annonça l a bonne nouvelle à ses copains en poussant un glapissement aigu :
— V'là l'gentil monsieur !...
Aussitôt, avec un ensemble digne d'un orchestre phi lharmonique, les cinq autres gosses levèrent la tête, tandis qu'une inten se jubilation éclairait leur petit visage fripé d'enfants mal nourris.
Leur jeu cependant était passionnant, puisqu'il con sistait à faire évoluer des bateaux de papier sur une flaque d'eau sale ; mais ils abandonnèrent sans hésitation la volupté de patauger dans la boue pour se précipiter au-devant de celui qu'ils attendaient comme le Messie.
Le « gentil monsieur » n'avait rien toutefois d'un envoyé de Jéhovah. Sa seule auréole consistait en un vieux chapeau melon, que les intempéries avaient rendu verdâtre, et il avait remplacé le man teau de lumière des habitants du céleste séjour par un pardessus noir, légèrement élimé, dont la coupe démodée témoignait des bons et durables services.
Physiquement, ce personnage espéré avec tant d'impa tience par les Poulbots du quartier ne présentait aucune particula rité digne d'être notée ; il n'était ni grand, ni petit, ni gros, ni maigre. Il avait au milieu du visage un nez désespérément normal au-dessus d'une bouche moyenne , et celle-ci surplombait un menton rigoureusement quelconque. Qu ant aux yeux, il eût été impossible d'en déterminer la couleur.
En un mot, cet homme, extraordinaire par son confor misme, eût posé à Bertillon un problème délicat, et mis en échec les professionnels les plus habiles du portrait parlé : il ne possédait pas un atome d'originalité, et rien ne le signalait à l'attention de ses contemporains.
Rien, si ce n'est un nom idyllique, un nom qui évoq uait à la fois les anges et les fleurs, le paradis et la terre en ce qu'elle pr oduit de plus chatoyant : il s'appelait, tout simplement, Séraphin Pervenche, et exerçait, avec une distinction parfaite et une maestria remarquable, l a délicate profession de rentier.
Quant à l'âge de cet étrange personnage, il était i ndéfinissable ; si l'on considérait ses traits étonnamment mobiles et ses t empes que ne blanchissait aucune pincée inopportune de sel, M. Pervenche deva it à peine friser la quarantaine ; mais si l'on s'attardait à tenir comp te de son dos voûté et de son allure générale, le gentil monsieur devait avoir dé passé le cap des soixante printemps.
Un sourire légèrement fatigué se joua sur ses lèvre s lorsqu'il vit dévaler vers lui l'avalanche indisciplinée de ses petits protégé s, et comme il était un homme rangé, pénétré de principes rigides, il exagéra la sévérité de sa voix pour demander, coupant court à tous les saluts de bienve nue qui fusaient comme autant d'hommages intéressés :
— Avez-vous bien travaillé à l'école ?
La réponse fut unanime :
— Oh ! Oui... m'sieur...
Le gentil monsieur se contenta de ces affirmations gratuites et du reste pratiquement incontrôlables ; il déboutonna son par dessus, et, du gousset de son gilet gris perle, il retira quelques pièces de dix francs.
Ses gestes étaient méthodiques et précis, et il gli ssa dans chacune des menottes avides qui se tendaient vers lui la récomp ense d'un travail scolaire qu'avait mainte fois remplacé l'école buissonnière.
Le gentil monsieur le savait fort bien, mais il n'e n avait cure. Il ne se souciait nullement de ces gosses dépenaillés ; sa pensée éta it pétrie d'égoïsme, et ce qu'il soignait en cet instant, c'était sa popularité personnelle.
Un coup d'œil discret jeté aux alentours immédiats lui apprit que son argent avait été judicieusement placé : trois commères, ra ssemblées sur le seuil d'un immeuble voisin, commentaient déjà sa générosité, e n suivant d'un regard attendri le groupe tumultueux des gamins qui se pré cipitaient vers la boutique du marchand de berlingots.
M. Séraphin Pervenche salua les femmes avec polites se, puis il poursuivit sa route, sans se presser, en rentier véritable qui n'est tenu de respecter d'autre horaire que celui de sa fantaisie.
Il faisait très frais en cette fin d'hiver pluvieux qu'aucun souffle printanier ne consentait encore à réchauffer. Comment des gosses peuvent-ils s'amuser dans l'eau, par un temps pareil ?...
Cette question, le promeneur solitaire se la posa, en enfonçant dans ses poches ses mains gourdes de froid, bien qu'elles fu ssent gantées de grosse laine tricotée.
Au coin de la rue, comme un frisson désagréable lui parcourait l'échine, il s'arrêta devant la vitrine d'un pharmacien, et entr ant dans l'officine, il y fit l'emplette de cachets d'aspirine, de thé, de tilleu l et d'un tube de somnifère.
Réconforté par l'idée qu'il pourrait combattre vict orieusement une grippe naissante et passer une bonne nuit, il regagna son domicile. À la concierge qui somnolait dans sa loge, il lança un « Bonsoir » dis trait, puis, retombant subitement sur terre, il interrogea la pipelette d'un air profondément ennuyé :
— Déjà du monde à ma consultation, madame Blanchette ?
— Deux personnes seulement, monsieur Séraphin, fit la Cerbère locale d'une voix enrouée par des calvados absorbés sans m odération. Elles attendent dans l'antichambre. Et, clignant de l'œil, elle ajo uta en se passant la langue sur ses lèvres lippues :
— Une belle môme, notamment... et distinguée !...
M. Séraphin Pervenche ignora cette remarque intempe stive ; il avait horreur des commentaires superflus ; aussi se contenta-t-il de demander, avec une bienveillance compatissante :
— Et les oreillons de la petite Jeannine ? Ils ne la font plus souffrir ?
Quel brave homme que ce rentier débonnaire... Ne vo ilà-t-il pas qu'il s'intéressait à la petite fille d'une humble concie rge de faubourg ? Du coup, me M Blanchette en oublia ses griefs contre l'aristocra tie ; elle fut émue jusqu'aux larmes, et c'est d'une voix mouillée de sanglots de reconnaissance qu'elle répondit :
— Merci, monsieur Pervenche ; elle va mieux, la pau vre petite ! Mais le Bon Dieu n'est pas juste d'affliger ainsi d'innocents p etits chérubins, incapables de songer au mal ! À quatre ans... pensez donc !...
Cette réflexion, amère, mais simpliste, laissa son interlocuteur froidement indifférent ; néanmoins, il feignit un apitoiement empreint d'une profonde sympathie ; il déboutonna une fois de plus son ampl e pardessus noir...
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