Le secret du valet de cœur
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Le secret du valet de cœur , livre ebook

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Description

Joachim, alias Monseigneur, est un étrange personnage bourgeois-bohème, toujours accompagné de son fidèle Diabolo, un berger allemand qu’il a élevé et dressé lors de sa détention à Buchenwald pour fait de résistance. Il n’est pas rare que le duo fasse office de « consultant » pour les forces de l’ordre.


Mais, alors que Monseigneur s’évertue à retrouver Pierrotte, sa protégée qui s’est échappée de la clinique privée dans laquelle elle était en convalescence, le commissaire de police est à la recherche de l’assassin d’un riche et puissant cinéaste américain.


Aussi est-il hors de question, pour le premier, d’assister le second jusqu’à ce qu’un élément apparaisse... Un valet de cœur a été découvert près du mort... précisément l’unique carte manquant dans le jeu trouvé dans la chambre de la jeune fille...


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Informations

Publié par
Nombre de lectures 4
EAN13 9782373474060
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0007€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Monseigneur et son « clebs » - 4 -
LES ECRETDU VALETDECŒUR
De Marcel PRIOLLET
I
La scène n'avait pas duré deux minutes.
Les rares témoins s'attroupaient autour de la victi me.
Là-bas, à l'angle de la place, le taxi achevait de disparaître.
Ceux qui n'avaient rien vu venaient maintenant gros sir le nombre des autres.
— Qu'est-ce que c'est ? Qu'est-ce que c'est ? fit l 'agent 314 en jouant des coudes pour se frayer un chemin.
Il rentrait chez lui, son service terminé. Il avait aperçu le rassemblement. Il jugeait de son devoir d'intervenir.
Des bribes de phrases montèrent :
— Un chauffeur de taxi qu'a été attaqué...
— On lui a volé sa bagnole...
— Y a plus de sécurité pour les honnêtes gens...
— C'est pas la peine qu'on paie tant d'impôts pour être si mal protégé...
Le chauffeur, aidé par deux des assistants, se rele vait. Quelqu'un lui tendit sa casquette qui avait roulé à terre et qu'il essuy a machinalement. Il semblait sortir d'un rêve.
— Blessé ? interrogea l'agent.
— J'crois pas ! Mais qu'est-ce que j'ai pris ? Vous parlez d'un costaud... Y m'a sonné !
Encore éberlué, il parut s'aviser seulement de la d isparition de sa voiture.
— Ah ! la v... ! gronda-t-il.
Il faisait un temps de chien. Janvier sévissait. Un e petite pluie, qui ce soir se transformerait en verglas, tombait inexorablement. Bien qu'on fût au début de l'après-midi, nombre de boutiquiers avaient allumé leurs vitrines.
Le chauffeur se remettait un peu.
— Vous allez saisir, m'sieu l'agent... Oh ! je ne m araudais pas. On connaît les règlements. Je stationnais là, un instant, pour allumer une cigarette, histoire de me réchauffer un brin...
Il avait désigné, à dix mètres de lui, l'angle de l a place Saint-Michel et de la rue de la Huchette. Il poursuivait :
— Un client s'est amené. Un drôle de type, ma foi ! Il m'a demandé de le conduire à Neuilly. Une sacrée trotte, comme vous v oyez. C'est ce que je lui ai dit. Comme il n'avait pas l'air de rouler sur l'or, j'ai voulu savoir s'il avait de quoi me payer et ce qu'il donnerait comme pourboire. Ça n'a pas eu l'air de lui plaire. Là-dessus, le v'là qui veut s'installer dans le tax i, d'autor'. Pas de ça, Lisette ! C'est tout de même pas des façons ! Je le repousse. Y m'empoigne. Pas commode, le citoyen ! Mais moi aussi, j'ai mauvais caractère quand on m'asticote. Seulement, j'étais pas le plus fort. Y m'a sorti de mon siège et balancé par terre en moins de deux...
— Ensuite ? réclama l'agent, mollement intéressé.
Le chauffeur eut un geste vague. Son crâne avait co gné le sol. Il était resté étourdi un moment.
— Moi, j'ai tout vu ! intervint une marchande de jo urnaux qui était sortie de son kiosque. Le bandit, son coup fait, s'est instal lé au volant. Et le voilà qui file sans rien demander d'autre !
— Son signalement ?
— Un grand, avec une grosse moustache blonde et un complet de velours comme en portaient autrefois les charpentiers. Bell e allure quand même ! Il doit loger par ici, car il me semble bien l'avoir déjà v u. Attendez, monsieur l'agent, ce n'est pas tout... Il avait avec lui un gros cabot, couleur café-au-lait, qu'il a fait monter aussi dans le taxi...
L'agent, qui avait tiré son calepin pour prendre de s notes, venait d'avoir un sursaut. Son visage s'éclaira. Lui aussi était du q uartier. On l'entendit s'exclamer :
— Encore un coup de Monseigneur !
Monseigneur ! Il n'y avait sans doute pas bien long temps que la marchande exerçait son négoce place Saint-Michel. On pouvait supposer aussi que les témoins du drame n'habitaient pas les environs. Aut rement, tous eussent précédé l'agent 314 dans la découverte qu'il venait de faire.
Monseigneur ! Ce nom — ce surnom plutôt — appartena it à un personnage qu'auréolait une véritable célébrité. Cette célébri té, certes, ne dépassait guère les ponts et n'allait pas au-delà du boulevard Sain t-Germain. N'empêche qu'elle était réelle. Les clochards des berges, les sidis d es alentours de la place Maubert, les commerçants, tous connaissaient Monsei gneur.
Qui était-il au juste ? On savait qu'il se faisait appeler aussi Joachim, qu'il avait été déporté à Buchenwald pour faits de résist ance et qu'à son retour, il avait repris possession, rue de la Harpe, tout en h aut d'une vieille maison, d'un ancien colombier dont il s'était fait un logis asse z confortable. On colportait également qu'il était à la fois généreux et emporté , qu'il avait le billet de banque
aussi facile que le coup de poing. On n'ignorait pa s non plus qu'il fréquentait parfois les gens de la police. Mais ce qu'on savait , par-dessus tout, c'est qu'il était perpétuellement accompagné d'un chien, un mag nifique berger allemand, son « clebs », comme il disait.
Ainsi donc, on se trouvait aujourd'hui en présence d'un des exploits qui tissaient la légende de cet étrange Joachim, mi-boh ème, mi-grand seigneur, et dont il fallait mieux être l'ami que l'adversaire. C'était cette vérité que le chauffeur de taxi venait d'apprendre à ses dépens.
L'agent 314 le dit rondement :
— Vous auriez mieux fait de le charger et de le con duire là où il voulait aller. Estimez-vous heureux, encore, de n'avoir pas fait l a connaissance avec les crocs de son compagnon. Mais rassurez-vous : vous l e retrouverez, votre taxi !
L'autre ne l'entendait pas de cette oreille. Il vou lait porter plainte. Il exigeait que l'agent l'accompagnât jusqu'au commissariat, av ec des témoins. Il reçut cette réplique, qui tomba sur lui comme un pavé :
— Oh ! moi, je m'en balance. Je ne suis pas de serv ice. Dé... brouillez-vous !
Pourquoi Monseigneur avait-il éprouvé, aujourd'hui, l'impérieux besoin de se rendre à Neuilly ?
Une enquête approfondie eût révélé qu'après le déje uner, l'habitant de la rue de la Harpe avait pénétré au « tabac » le plus proc he, s'était rendu acquéreur d'un jeton de téléphone et était demeuré dans la ca bine environ cinq minutes. En sortant de la cabine, il avait confié à son chie n :
— Ça ne va pas, Diabolo... Ça ne va pas du tout !
Il était reparti précipitamment. Et la scène du tax i avait suivi, quelques secondes plus tard.
Monseigneur, désormais maître du véhicule, était do nc devenu son propre chauffeur. Par les quais, il filait maintenant en d irection de la Concorde, indifférent aux appels des gens qui croyaient voir passer un taxi libre, car il avait négligé de baisser le petit drapeau blanc.
Il « brûla » plusieurs feux rouges, se fit siffler par un agent de la circulation, demeura sourd. Il atteignit ainsi l'avenue des Cham ps-Élysées, qu'il remonta à belle allure. Arrivé à l'Étoile, il prit l'avenue d e la Grande-Armée. De toute évidence, il donnait suite à son projet primitif. C 'était bien Neuilly qui était le but de sa randonnée.
Il y parvint. Il stoppa, tout au bout de la rue Cha rles-Laffitte, devant une grille où, dès sa descente de voiture, il vint sonner.
Il fut reçu par un portier en uniforme. La grille, en s'ouvrant, avait démasqué
un jardin qui entourait une très spacieuse villa.
— J'ai rendez-vous avec le docteur Bellamourgue.
— Je ne sais pas s'il est là...
— Mais si ! Je viens de lui téléphoner. Laissez... je connais le chemin.
Toujours escorté de son chien, l'homme au complet d e velours atteignit la maison. Tout y était net, luisant. Les pas ne faisa ient aucun bruit sur le sol recouvert d'un épais tapis de caoutchouc. Un écrite au conviait les visiteurs au silence.
Une infirmière — blouse blanche et voile bleu — acc ueillit le visiteur. Il lui répéta ce qu'il avait dit au portier.
— Avec votre chien ? s'étonna-t-elle.
— Partout où je suis, mon « clebs » est à sa place .
Et sans se soucier de se faire annoncer, il se diri gea vers la porte des bureaux de la direction. Là, il eut affaire à un tr ès élégant garçon d'une trentaine d'années, au visage tout rasé, aux cheveux soigneus ement gominés. C'était le secrétaire du docteur Bellamourgue, lequel présidai t aux destinées de cette maison de santé dont il suffisait de franchir le se uil pour deviner qu'elle était réservée à une clientèle aisée.
Le secrétaire, assis à son bureau d'acajou, contemp lait d'un œil un peu narquois les deux arrivants : l'homme et l'animal,
— Vous désirez, mon brave ?
Le mot et la condescendance du ton durent déplaire à Joachim.
— Mon petit...
Il mit un indicible mépris dans ces syllabes et rep rit :
— Mon petit, soyez assez bon pour trouver la force de lever votre derrière de votre fauteuil et pour dire à votre maître...
Il appuya encore sur ce mot et termina :
— ... qu'il veuille bien me recevoir tout de suite. Il sait ce qui m'amène. Allez !
Il y eut un complet changement d'attitude chez le s ecrétaire. Subjugué, il obéit.
Deux minutes plus tard, Monseigneur et son « clebs » étaient admis à pénétrer dans le cabinet directorial.
Le docteur Bellamourgue, un homme d'une cinquantain e d'années, eût pu rivaliser d'élégance avec son secrétaire. Une gravu re de mode. Après avoir fait
asseoir Joachim, il prit tout de suite la parole :
— Évidemment cette histoire est fâcheuse, très fâch euse. Mais vous reconnaîtrez, cher monsieur, que ma responsabilité n'est nullement engagée.
— Voire ! grommela Monseigneur.
— C'est tout vu ! Récapitulons les faits, voulez-vo us ? Il y a quinze jours, après vous être mis d'accord avec moi, vous m'amene z ici une jeune fille que vous me chargez de surveiller médicalement. Je ne s ache pas que vous m'ayez prié de la surveiller autrement ? À la vérité, elle était moins une malade qu'une convalescente. Elle sortait d'une clinique chirurgi cale où elle avait été opérée. Vous estimiez qu'elle bénéficierait chez moi d'un m eilleur air, d'une meilleure alimentation et d'un cadre plus riant. C'était d'ai lleurs la vérité. La réputation de ma maison n'est plus à faire. Cette jeune personne, en effet, a très vite repris du poids, des couleurs, des forces. Si bien que lors d e votre visite d'hier, vous m'avez annoncé qu'elle me quitterait aujourd'hui et que vous viendriez la chercher vous-même...
— J'ai précisé que je viendrais la chercher dans l' après-midi ! rappela Joachim, l'œil sévère.
— J'entends bien. Mais est-ce ma faute si, ce matin , votre protégée, après avoir été appelée au téléphone, est venue m'annonce r qu'elle venait de communiquer avec vous et qu'il y avait une petite m odification au programme prévu ? Je l'entends encore me dire :« C'est tout de suite que je vais vous quitter, mon cher docteur. Monsieur Joachim exige q u'il en soit ainsi. Il m'attend pour déjeuner. »
— C'était faux !
— Encore une fois, pouvais-je m'en douter ?
— Vous auriez dû la retenir, gagner du temps, m'ale rter...
Se calmant un peu, le visiteur murmura, comme s'il pensait tout haut :
— Je la croyais guérie, bien guérie... Oh ! je ne p arle pas de sa guérison physique. Je fais allusion à sa folie, à cet excès de romanesque qui est en elle. Je l'avais ramassée dans le ruisseau, dans la fange(1). Elle n'avait pas encore trop subi la contamination des mauvais garçons qu'e lle fréquentait. Son sauvetage était possible. J'y croyais. Et voilà qu'elle retombe... Pauvre Pierrotte !
À ce nom, le chien, couché aux pieds de son maître, s'agita en dressant les oreilles. Monseigneur lui parla :
— Tu étais devenu son ami. Tu t'apprêtais à lui fai re fête. Mais nous la retrouverons. Dis-le, que nous la retrouverons... ?
Interrompant ce dialogue qu'il jugeait sans doute f ort puéril, le médecin se fit encourageant :
lle — Rien ne prouve que M Pierrotte soit retombée, comme vous dites...
— En ce cas, docteur, pourquoi vous a-t-elle menti ? Pourquoi ne m'a-t-elle pas attendu ? Pourquoi son premier soin n'a-t-il pa s été de venir me rejoindre ? Et quel est enfin ce mystérieux correspondant qui l ui a téléphoné ? Personne ne savait qu'elle était ici. Elle aura donc conservé d es relations suspectes, ignorées de tout le monde...
Le directeur de la maison de santé parut sincère :
— Je suis navré, absolument navré...
— Soyez moins navré, docteur, et renseignez-moi mie ux. À quelle heure, exactement, est-elle partie ? À pied ? En taxi ? Av ait-elle l'air contente ou préoccupée ?
— Je ne saurais vous dire. Mais peut-être que mon s ecrétaire...
— Appelez-le ! Je compte interroger aussi votre personnel.
« Je vous demanderai également de m'autoriser à vis iter la chambre abandonnée par la petite.
— Une enquête ?
— Ça me connaît un peu, oui. Tout le monde vous dir a qu'il nous arrive de travailler avec les...
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