Un parfum de gentiane
172 pages
Français

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Description

Par un sombre dimanche de novembre, la vieille Mamène, cuisinière de son état, s'écroule raide morte sur les dalles de l'église, au beau milieu du sermon. Quelques jours plus tard, son frère, libre penseur convaincu, se tue dans un accident de cheval contre le mur de cette même église.

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Informations

Publié par
Nombre de lectures 14
EAN13 9782812917257
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0056€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Issue d’une lignée de paysans auvergnats,Bernadette Puijalon est originaire de Bourg-Lastic, aux confins du Puy-de-Dôme. Après des études à Clermont-Ferrand, elle obtient un doctorat d’anthropologie sociale à Paris et enseigne à l’Université Paris XII. Inspirée par les récits de vie recueillis pour ses recherches, elle s’est lancée avec brio dans l’écriture de romans. Son sens de l’intrigue et sa peinture du monde rural qu’elle connaît si bien ont enthousiasmé un large public. Le Moulin des retrouvaillesa remporté le Prix du Roman d’Auvergne en 2002 et Des monts de tempêtele Prix Lucien-Gachon en 2010.
UN PARFUM DE GENTIANE
Ues monts de tempête L’Heure de l’alouette L’Œil du vivier Le Loup d’Orcival Le Moulin des retrouvailles
La parole des vieux Le droit de vieillir
Du même auteur Aux éditions De Borée
Autres éditeurs
En application de la loi du 11 mars 1957, il est interdit de reproduire intégralement ou partiellement le présent ouvrage sans autorisation de l’éditeur ou du Centre français d’exploitation du droit de copie, 20 rue des Grands-Augustins, 75006 Paris. © , 2004
BERNADETTEPUIJALON
UN PARFUM
DE GENTIANE
I
Un coup de froid
E DIMANCHE DE NOVEMBRE 1897, les cloches sonnaient à toute volée C quand Amélie Verdier arrêta sa carriole sur le foir ail de Bourg-Lastic. De leurs lourds manteaux de bronze, les gardiennes du temps annonçaient à la communauté entière le jour du Seigneur. En ondes vi brantes, des grappes de notes montaient jusqu’aux nuages, rebondissaient ve rs les hameaux et les villages et appelaient les fidèles à la messe. «C’e st le quart d’heure, j’ai le temps» se dit Amélie. Le trajet depuis Bajouve ne d épassait pas la demi-heure, mais ce court chemin avait suffi pour que le froid la saisisse. Elle resserra autour d’elle son châle. Élégante, elle portait bien la to ilette, faite ce jour-là d’une robe noire et d’un manteau de serge. Novembre ressemblait à lui-même. Un brouillard dens e noyait les brandes, à * midi desniolesencore le creux des fossés, le vent arra chait les cachaient dernières feuilles des arbres tandis que renards et blaireaux épaississaient leur pelage. Avant de s’éloigner, la jeune femme couvrit l’échine de son cheval dont les articulations se raidissaient avec l’âge. Il était temps en effet de passer chercher son prom is avant de se rendre à l’église. En attendant leur mariage, Ernest Veyssiè res logeait chez le docteur Florent qui était veuf. Une même passion pour la li ttérature avait forgé leur amitié malgré leur différence d’âge et de condition social e. Ernest, un ancien commis de ferme originaire du Limousin, avait connu Amélie alors qu’il travaillait dans une ferme voisine de la sienne. Amélie n’avait pas fait trois pas dans la cour de g raviers qui entourait la grosse bâtisse carrée qu’Ernest ouvrit la porte. Il lui prit les mains; ses yeux brillaient: «Te voilà enfin, ma belle! Je t’ai entendue arriver. Le café est prêt.» Souriant à l’homme qu’elle aimait, elle entra dans la cuisine où il versa le breuvage brûlant dans un grand bol qu’il lui tendit. «Ça réchauffe», dit-elle en le prenant dans ses mains.
Ils formaient un couple bien assorti. Tous deux éta ient grands. Elle avait un visage volontaire que la tendresse adoucissait, des lèvres charnues, des yeux noirs et une chevelure brune indisciplinée qui, mal gré tous ses efforts, s’échappait de sa coiffe. Chez lui, on remarquait u n visage régulier, des yeux bleus, un front haut et des tempes légèrement dégarnies. D’une nature réservée, il n’avait pas le compliment facile, mais son regar d était suffisamment éloquent pour que derrière les mots de tous les jours, elle entende le souci qu’il avait d’elle: «Comment ça se passe à Bajouve? La mère garde la maisonnée. Avec les mauvais jours, les travaux ralentissent. Allons-y, dit-elle en reposant son bo l, sinon on sera en retard.» Devant l’église, ils se séparèrent. Amélie monta le s quelques gradins de pierre qui menaient au porche, trempa le bout des doigts d ans le bénitier, se signa et prit place dans la chapelle de saint Fergheon. Erne st entra par la petite porte située dans le chœur et s’assit dans le coin des ho mmes en saluant brièvement
son voisin de gauche. Les marches en bois de l’escalier en colimaçon au f ond de l’église craquèrent quand madameDemartel, préposée à l’harmonium, monta à la tribune d’où elle accompagnait les chants. Sa cuisinière s’installa d evant Amélie. Un manteau noir descendant jusqu’aux pieds donnait à la ronde Mamène l’aspect d’une tour. Son visage de pomme mûre respirait l’amour des bonn es choses. Les deux femmes se sourirent. Quelques derniers bruits de sa bots et de souliers résonnèrent encore sur les dalles froides, juste av ant les trois coups. Du haut de la tribune, madameDemartel attaqua un ch ant sur son instrument désaccordé:«Domine Jesu Christe…» Les notes emplirent la voûte qui arrondissait son ciel peint d’étoiles bleues et dor ées au-dessus des fidèles rassemblés. Construite au XIesiècle et régulièremen t agrandie depuis, la bâtisse romane qui alliait la rudesse des églises de montag ne et le charme des pierres blondes de celles du Midi, abritait les fidèles dan s sa robustesse immobile et sa généreuse ampleur. Les murmures des bavardages cessèrent quand le curé Chauvet, vêtu de la chasuble verte, symbole de l’espérance du ciel, sortit de la -sacristie précédé par quatre enfants de chœur en surplis. Arrivé au pied des marches de l’autel, le prêtre s’inclina:«In nomine Patris…»fidèles s’agenouillèrent dans un Les froissement de tissus et un raclement de chaises. L e curé gravit les marches et ouvrit le gros missel à une page marquée par un sig net. Petit, râblé, le visage sillonné de profondes rides, des yeux gris presque cachés par des sourcils broussailleux et blanchis, il montrait aux fidèles un dos voûté mais solide et une tonsure devenue calvitie. Assise au pied de la statue du saint patron de la p aroisse, la Mamène se balançait en cherchant une position confortable. Le civet de lapin dégusté avec tant de plaisir la veille au soir était mal passé. Pour tout arranger, elle s’était réveillée dans une chambre glacée après un sommeil lourd. Le froid qui montait des dalles s’insinuait sous ses jupes et lui gelait les jambes et les cuisses. Elle se recroquevilla dans son manteau en se recommandan t la patience; il n’y en avait que pour trois quarts d’heure. Les voix aigrelettes des femmes s’élevèrent pour le Gloria:«Laudamus te, Benedicimus te…»Les hommes, eux, se contentaient d’effectuer en si lence les automatismes de la messe: s’agenouiller, s’asseoir, se signer… La Mamène faisait de même avec difficulté. Les femmes autour d’elle n’en devinaient rien. Il n’était guère étonnant qu’une femme aussi forte se meuve avec lenteur. «Évangile selon saint Mathieu, annonça le curé aux fidèles qui se levèrent et se signèrent: “En ce temps-là, les pharisiens tinre nt conseil pour trouver un moyen de prendre Jésus au piège…”» «Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu» termina mentalement Ernest qui connaissait cet évangile par cœur. Il s’inscrivait avec plaisir dans les rites dont la messe du dimanche fa isait partie et était heureux de sentir Amélie proche. Son bonheur du temps présent emplissait l’entier de sa vie. La Mamène ne se dandinait plus. Le froid de l’églis e transformait la sueur qui couvrait son visage en un masque glacé. La douleur montait dans sa poitrine, sa respiration se faisait difficile. Dans sa niche, la statue couleur vieil or de saint Fergheon la fixait de sa tête penchée sur une douce ur résignée, sa main gauche tenant la palme des martyrs. La Mamène, qui ne sava it rien de l’histoire du saint, lui adressa une ardente prière: «Saint patron, aide z-moi à tenir jusqu’à la fin»,
cette fin qui tardait à venir. En rentrant, elle se préparerait un vin chaud avec une goutte de rhum et un peu de cannelle qui ferait dis paraître la pesanteur de son ventre. Elle n’avait jamais eu une telle indigestio n et s’étonnait de son début de vertige; la sauce du civet n’était pourtant pas gra sse et les champignons qu’elle avait fricassés en accompagnement étaient délicieux . Heureusement, l’évangile se terminait et elle s’assit lourdement sur sa chai se pour le sermon. Occupée par ses entrailles, elle ne l’écouta pas et ne fut pas la seule. Le curé Chauvet n’était pas un orateur. Debout dans la chaire, il débitait en français, car Bourg-Lastic se voulait une commune bourgeoise, quelques formules t outes faites, puisées dans un manuel destiné à aider les curés manquant d’insp iration. De temps à autre, il y ajoutait une formule en auvergnat, imagée mais ra rement du meilleur effet. Ce dimanche, il avait retenu comme thème l’amour de Dieu pour tous ses enfants et son infinie patience pour leurs faibless es. Bien que le sujet les concernât tous, peu de paroissiens étaient attentif s; même le regard des âmes pieuses vaguait dans le vide. Les femmes jouissaien t d’un des rares moments de répit que leur offrait la vie et détaillaient av ec soin les tenues de leurs voisines, mais ce dimanche n’étant pas un jour de f ête, aucune ne montrait de nouveauté. Les filles lorgnaient du côté des bancs des garçons: l’église est un lieu propice pour une observation discrète. Quant a ux hommes, assis suffisamment penchés pour faire reposer leurs avant -bras sur leurs genoux, ils examinaient leurs mains, les entailles et les cicat rices de la semaine, et attendaient patiemment que le curé avance dans son prêche. Quelques vieux luttaient contre la somnolence. Les rites cachaient tant bien que mal le vide et l’absence de dévotion. Les gestes mécaniques, immua bles fermaient la porte au doute mais pas à l’ennui. Seuls les enfants de chœu r gigotaient en échangeant des signes qui les plongeaient dans le rire silenci eux que tous les enfants qui ont passé de longues heures à l’église connaissent. Au premier rang des hommes, le sacristain fronçait les sourcils dans leur direc tion pour les faire tenir tranquilles. Devant ces présences résignées qui venaient là par habitude, pour ne pas se distinguer de la communauté villageoise, et qui att endaient que ça se passe, le curé Chauvet continuait à parler avec la même appar ente conviction. Pris dans une routine monotone, il compensait la faiblesse de ses prêches par leur longueur et la faible qualité par la quantité. Son père commerçant lui avait appris à faire bon poids bonne mesure et il pensait qu’en accumulant un grand nombre de phrases, il y en aurait toujours une ou deux qui compteraient. Mais ce qui vaut pour les légumes et les clous ne vaut pas pour les mots et ses paroissiens s’ennuyaient. À la fin du prêche, il n’y eut pas qu e les enfants qui bâillèrent de soulagement à s’en décrocher la mâchoire. Tous ceux qui allaient communier étaient à jeun depuis la veille. Parmi eux, la Mamè ne respirait avec de plus en plus de difficulté et se sentait défaillir: «Ça ne finira donc pas», gémit-elle intérieurement. Prenant son temps, le curé déplia une feuille pour lire les offices de la semaine: «Lundi 10 novembre, la messe de huit heures sera à l’intention de la famille Chassagny, d’Artiges. À partir de mardi, comme vous le savez, notre paroisse vivra pendant deux semaines un événement important, une mission qui s’annonce plus belle que celle de 1886. Il est temp s que ce moment privilégié de ferveur vienne réveiller nos âmes assoupies. Pendan t ces jours, nous serons
obligés de bouleverser l’ordonnancement de l’église pour accueillir les nombreux fidèles. Il n’y aura donc pas de places réservées p our le prône du soir. Je suis sûr que les personnes qui louent leur chaise à l’an née comprendront.» Il se souvenait des récriminations, lors la dernièr e mission, de ses nombreuses ouailles qui ne peuvent se défaire de le urs habitudes et de leurs prérogatives et il préférait, à tout hasard, prendre ses précautions. La Mamène, devenue un bloc de chair douloureuse, n’ entendait plus. Une brûlure irradiait maintenant l’ensemble de son corp s avec un point plus vif sur le côté. Mon Dieu, plutôt qu’un vin chaud, c’est une d écoction purgative qu’elle se ferait après la messe. Elle souffrait tant que les larmes lui venaient aux yeux. Le curé Chauvet continuait: «Je vous engage à vous montrer généreux pour la quê te afin que nous puissions accueillir dignement les missionnaires. M adameDemartel leur offre l’hospitalité de sa demeure, mais cela ne couvre pa s l’ensemble des frais et la souscription donne des résultats décevants. Certain s parmi vous connaissent déjà le père Chappaz qui a assuré la dernière missi on à Messeix. Malheureusement, l’évêché m’a averti qu’un problème d’intendance lui fera un retard de quelques jours. Nous commencerons donc ce temps de prière avec le père Montalvant. Ce jeune lazariste a la réputation d’être un prédicateur exceptionnel. Ce sera sa première mission en Auverg ne et je suis sûr que son ardente piété vous séduira. Il faudra…» Il n’eut pas le temps d’en dire plus. Un brouhaha s ’éleva de la chapelle de saint Fergheon: «La Mamène est tombée!» Le premier moment de stupeur passé, comme le calme ne revenait pas, le curé descendit rapidement de sa chaire et comprit l a gravité de la situation en voyant le visage blême de la forte femme, assise da ns les bras d’Amélie, qui avait juste eu le temps de les ouvrir pour amortir sa chute. «Qu’on aille chercher le docteur Florent, vite!» De sa démarche longue, Ernest se dépêchait déjà ver s la maison voisine. En l’entendant entrer le médecin leva les yeux desSouvenirs d’enfance et de jeunessed’Ernest Renan: «Pas moyen de lire tranquille, même un dimanche! Re marque, il vaut mieux que je m’arrête. Renan m’agace avec son sentimental isme complaisant. Lui qui toute sa vie a été un rat de bibliothèque ose écrir e que la littérature est une maladie et un phylloxéra moral!» Il saisit sa vieille mallette en cuir roux. Petit, vif, la barbiche et la moustache blanches, il portait une veste noire, une chemise b lanche boutonnée jusqu’au col et une cravate nouée sans goût. S’il n’avait pas le sourire facile, ses yeux noirs respiraient la bonté et l’intelligence. Dans l’église, un groupement s’était formé autour d e la chapelle de saint Fergheon et le docteur se fraya difficilement un pa ssage jusqu’à la Mamène allongée à même le sol. Quand il s’agenouilla près d’elle, il ne put que constater son décès. Le prêtre terminait le sacrement de l’ex trême-onction. À la nouvelle du malaise de sa cuisinière, madameDemartel avait d élaissé son harmonium et descendu rapidement l’escalier de la tribune. Quand elle comprit qu’il n’y avait plus rien à faire, elle vacilla avant de réagir: «Qu’on la porte chez moi. Il faut trois ou quatre hommes, intervint le docteu r, elle est corpulente.»
Ernest se proposa, rejoint par deux autres paroissi ens. Devant cette situation inédite dans la vie d’un curé de campagne, le prêtre garda son sang-froid: «Regagnez vos places, dit-il aux fidèles. Nous allo ns terminer la messe en priant pour elle que le Seigneur accueille en ce mo ment même dans sa demeure.» Ils s’exécutèrent, choqués par cette mort subite. P ersonne n’avait souvenir d’une telle histoire. Pendant la fin de l’office, u ne atmosphère de vertige régnait. La Mamène qui ne s’était distinguée jusqu’alors que par ses talents culinaires, avait trouvé un bon moyen de s’inscrire dans la mém oire collective. La quête finie, l’Agnus Dei aussi vite expédié que le Sanctus, les rangs s’ébrouèrent pour la communion. Seuls, cinq ou six hommes gagnèrent le devant du chœur et reçurent l’hostie sur la langue. Les fe mmes, nettement plus nombreuses, rejoignirent l’allée centrale et s’agen ouillèrent au bord de la balustrade de fer forgé qui séparait la nef du chœu r. Un fond de bruit confus montrait que peu avaient le recueillement nécessaire à cet acte de foi. Enfin, le curé prononça les mots tant attendus: «It e missa est.» Des dizaines de petits soupirs en composèrent un grand qui s’éle va de l’assistance; soupir qui traduisait le désarroi de la communauté, troubl ée par ce vent de la mort qui venait d’emporter un de ses membres. Des groupes se formèrent sur la place, avant que les hommes aillent dans les cafés alentou r prendre un remontant et commenter encore ce fait unique dans l’histoire de Bourg-Lastic.
Chez madameDemartel, la jeune bonne qui leur ouvrit la porte resta figée dans l’entrée avec un air ahuri. «Allons Louise, l’admonesta sa patronne d’une voix que l’émotion rendait chevrotante, poussez-vous, la Mamène a eu un malais e et nous a quittés. Je vous guide, dit-elle aux porteurs. Sa chambre est a u premier étage.» Les marches de bois plièrent sous leur poids. Sur l e palier, un gros matou tigré dont le poil terne trahissait l’âge s’approcha, cur ieux, avant de s’enfuir d’un air offensé devant l’incongruité de la présence de tant de visiteurs dans sa maison. Ils entrèrent dans une pièce meublée douillettement ; la Mamène aimait le confort autant que la bonne chère. «Le cœur a lâché, conclut le docteur Florent après un rapide examen. Si monsieur le curé tenait à commencer sa mission de m anière spectaculaire, c’est réussi! Elle a bien choisi son chemin, il n’y en a pas de plus court pour entrer au paradis. Elle est cependant partie bien rapidement!» Ernest identifia enfin l’odeur qui l’intriguait dep uis son arrivée: un léger parfum de gentiane flottait. Il ne put déterminer la prove nance de ces effluves amers qui apportaient une inhabituelle touche de nature et d’ espace dans l’atmosphère renfermée de cette demeure bourgeoise. «Ce matin, leur expliqua la jeune bonne choquée, qu and je partais pour la première messe, elle s’est plainte d’avoir pris fro id pendant la nuit. Elle m’a dit que sa fenêtre s’était ouverte sous une poussée du vent. La mienne aussi ferme mal, ajouta-t-elle avec un ton de reproche. Un coup de froid sur un repas trop lourd, pour une femme de sa corpulence et de son âge, ça ne pardonne pas, commenta le doct eur. Elle aurait dû se restreindre depuis des années. Enfin! elle aura jou i des bonnes choses qu’elle appréciait. Le péché véniel de gourmandise auquel e lle succombait ne devrait pas lui valoir de grosses foudres du Seigneur!»
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