EEL
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Description

Quel est ce mal, cette nouvelle épidémie, qui frappe la Terre ? Touchés au cœur de leur source principale d’évasion, le sexe, les hommes comme les femmes perdent la tête. Un petit groupe, de plus en plus seul au monde, cherche à percer le mystère, face à l’hystérie collective qui semble anéantir tous les réflexes civilisés.
Et si, justement, c’était la civilisation humaine dans son ensemble qui était visée, ou du moins ce qu’il en reste de vertueux, au bout d’une explosion démographique bien mal maîtrisée et totalement déséquilibrée ?
Après la lente conquête des terres émergées par la faune aquatique, après la disparition cataclysmique des dinosaures, l’anéantissement provoqué d’espèces entières au profit du seul être humain, ce mal n’est-il pas la raison d’une reprise en main par la Nature ?
Qui se cache derrière tout cela ?
Au fil de cette intrigue étonnante, le lecteur s’attachera à ses principaux personnages : Bertie et Domi, un couple jusqu’ici sans histoire, Enzo, le navigateur solitaire devenu solidaire, Odilon et sa petite Piplette, spécialistes du comportement animal.
À mi-chemin entre le roman catastrophe et l’analyse sociologique, cet ouvrage s’appuie sur une logique implacable, alliant rigueur scientifique et justesse psychologique. À ce titre, les comportements décrits sont emblématiques des dérives actuelles.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 13 mars 2018
Nombre de lectures 1
EAN13 9782312057910
Langue Français

Extrait

EEL
Pierre Boningre
EEL
LES ÉDITIONS DU NET
126, rue du Landy 93400 St Ouen
© Les Éditions du Net, 2018
ISBN : 978-2-312-05791-0
I
― – Je n’aime pas les couloirs d’hôpitaux ! J’ai toujours peur que des tas de microbes soient tapis dans un coin et attendent la première occasion pour me sauter dessus.
― – Moi c’est pareil quand je passe une radio. Au moment de me coller contre la plaque métallique, je me demande à chaque fois si un malade bien contagieux n’est pas venu s’y frotter juste avant moi…
Bertie laisse les filles entamer un débat prophylactique et nosocomial par ailleurs non totalement dénué de fondement, pour aborder une jeune femme dotée de tous les attributs blousants d’une infirmière.
― – La chambre d’Armel A., s’il vous plaît ?
Cela fait plus d’une heure qu’ils errent dans le service de chirurgie sans croiser âme qui puisse les renseigner.
A l’approche du printemps, les établissements hospitaliers du bord de mer ne sont pas encore entrés en effervescence. Dans quelques semaines, les vacances scolaires vont déverser les premiers flots de touristes, drainant avec eux leur lot de traumatismes pour un cerf-volant qui aura mal atterri, un rocher qui aura cédé, un bateau qui aura dessalé, une digestion qui aura mal tourné…
Afin d’absorber l’affluence à venir, aucun détail n’est laissé au hasard : les roues des brancards reçoivent leur quota annuel de graisse, les bistouris sont affûtés, les ampoules électriques changées, les salaires renégociés. Les chambres font peau neuve. Leurs occupants sont renvoyés chez eux à peine convalescents. Il faut faire place nette : la saison hospitalo-hôtelière va bientôt battre son plein et il faut à tout prix la rentabiliser.
Des techniciens élégamment vêtus d’une salopette épinard pausent bruyamment devant un distributeur de boissons au bout du couloir indiqué. Ils sont chargés de maintenir en état les téléviseurs permettant aux pensionnaires, moyennant quelque modeste participation, de profiter des émissions culturelles de l’après-midi avant de s’endormir sur leur plateau du soir.
Justement le récepteur dans la chambre d’Armel ne donne pas signe de vie, à part les grêlons habituels des jours de grève. Cela n’a pas l’air de le contrarier puisqu’il semble profondément assoupi. Profitant de la situation, les filles entament une subtile manœuvre d’approche de part et d’autre du lit. Sur un signe convenu, elles se mettent à hurler et à l’unisson :
― – AU VIOL ! AU SATI-I-I-IRE !
L’infortuné dormeur subit avec un sursaut compréhensible la puissance suraiguë et stéréophonique de leur organe vocal.
― – Salut l’artiste !
― – Ah, c’est vous !
― – Tu pourrais au moins nous remercier de nous être déplacés !
― – Ouais, mais vous m’avez interrompu au beau milieu d’un rêve. J’étais sur les bancs de la fac pour repasser un examen que j’avais déjà eu l’année d’avant. Je me disais que c’était du gâteau et qu’il y avait aussi un lot de petites étudiantes bien chaleureuses ma foi…
― – Dis-donc, je te signale que tu as passé l’âge de t’intéresser aux jeunes filles !
― – Tu sais, il n’y a plus beaucoup de vraies jeunes filles en fac de nos jours !
― – A propos, comment se porte notre eunuque tout frais ?
― – Qui te l’a dit ?
― – Qui m’a dit QUOI ?
Un regard discret mais appuyé en direction de Carol laisse comprendre qu’il vaudrait mieux changer de sujet. Préoccupée par l’intensité de son hâle, celle-ci s’est précipitée sur le balcon attenant sans témoigner le moindre intérêt pour son homme. Estimant qu’il ne serait pas seyant d’attraper des marques de bronzage, elle s’est carrément mise torse nu à la grande joie des pensionnaires de l’aile d’en face. Le plaisir après tout, même uniquement des yeux, est un médicament comme un autre, même s’il n’est pas remboursé par la sécurité sociale.
Depuis plusieurs mois Armel se plaignait d’une douleur lancinante qui lui irradiait le bas-ventre et le faisait se relever toutes les nuits. Après examens, le médecin avait diagnostiqué une déformation de l’appareil urinaire, soi-disant héréditaire, mais qui n’expliquait pas tout. Pressé par les autres autant que par la souffrance qui lui creusait les joues chaque jour davantage, Armel s’était enfin décidé à subir une intervention avant les grosses chaleurs.
Idéalement située sur les premières collines, la clinique a une vue imprenable sur la mer. Cette présence si bleue, si calme, donne certainement aux patients une bonne raison de se revigorer et l’envie de guérir plus rapidement.
Le bruit est un motif tout aussi pressant : si près du rivage, il n’y a pas moyen d’éviter la circulation, les grands immeubles ou la voie ferrée. Et pour corser le tout, à deux kilomètres à vol d’oiseau tout au plus, l’aéroport international, et son contingent de nuisances sonores s’affale au ras des vagues.
Comme Armel se plaît à le souligner toutefois, ni les avions ni les trains ne circulent entre deux heures et cinq heures du matin…
― – Dis-moi à propos de queues, en plus de t’amuser à faire des statistiques sur la provenance des avions dans ton fauteuil, comment est-ce que tu passes tes journées ?
― – Quand je n’ai aucune visite, c’est très banal. Bien trop !
― – Tu ne vas pas te plaindre tout de même : nous sommes venus te voir et ce n’est pas la porte à côté !
― – Je ne disais pas cela pour vous, mais pour les médecins que je ne vois pas souvent.
― – Sérieusement, t’as pas trop mal ? T’as pas de problème ?
― – C’est assez supportable. En ce qui concerne les suites de l’opération, il faut encore attendre. Tout ce que je sais c’est que j’ai paraît-il gagné cinq ou six centimètres de tuyau en ferraille fait avec une sorte de treillage élastique.
Carol, en se caressant les seins, entame une comparaison argumentée des rigidités relatives du métal et du fibrociment, qui se termine par une petite moue d’amertume sur les lèvres.
― – Du fibrociment ! Pourquoi pas du béton armé pendant que tu y es ?
― – Mais parce qu’il y a de l’amiante dans le fibrociment, mon chéri. Il faut bien que je me protège de la chaleur avec tous ces frottements !
L’apparition soudaine d’une blouse blanche interrompt à peine l’éclat de rire général. Le Docteur Bibetoux vient de faire son entrée dans la chambre. Le moins qu’on puisse dire est qu’il impose le respect. Il est d’une taille très au dessus de la moyenne. Son front légèrement dégarni paraît démesurément grand. Ses yeux céladon abrités derrière de fines lunettes à monture d’écaille s’arrêtent un bref instant sur chacun des visiteurs. Ses longues mains nerveuses aux ongles soignés ne cadrent pas vraiment avec la carrure du personnage : ce sont plutôt des mains d’artiste. Il est vrai que dans son domaine et de l’avis de ses confrères chirurgiens il a depuis longtemps le prestige et la réputation d’une star.
Il saisit mécaniquement… et repose aussitôt la plaque suspendue au pied du lit :
― – Comment vous sentez-vous ?
― – Ça va. Je…
Armel reste la bouche ouverte dans l’intention de commenter sa réponse plutôt laconique quand le chirurgien fait volte-face et sort. Apparemment , il ne souhaite pas engager une discussion avec autant de témoins. Bertie se lance à sa poursuite dans le couloir.
― – Docteur, je vous en prie !
― – Vous êtes un parent, je suppose ?
― – En effet, Armel est mon frère. Pouvez-vous m’en dire un peu plus sur sa maladie. C’est grave ?
Un voile imperceptible ternit rapidement le regard du praticien. Il déchausse ses lunettes et se met à les nettoyer machinalement avec le pan de sa blouse. En de courtes phrases entrecoupées de longs silences, il paraît suivre à voix haute un raisonnement particulièrement délicat.
― – Je ne sais pas encore si c’est grave ou pas… Ce qui est sûr c’est que les dégâts étaient plus importants que les examens ne le laissaient prévoir… J’ai dû pratiquer une orchidectomie, c’est-à-dire l’ab

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