L amère victoire des tikis
205 pages
Français

L'amère victoire des tikis , livre ebook

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205 pages
Français

Description

Juillet 2018, à Tahiti, le corps de Robert Leroux, journaliste en vue est découvert dans la baie de Tautira. La justice clôt l'enquête préliminaire à peine ouverte et classe l'affaire, la mort résulte d'une noyade accidentelle. Mais l'histoire ne s'arrête pas là ... Ainsi ce livre revêt l'apparence d'un roman policier, mais aussi d'une chronique historique, d'un récit d'anticipation, d'une histoire d'amour, d'un essai politique ou encore d'une... farce !

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Informations

Publié par
Date de parution 02 décembre 2017
Nombre de lectures 3
EAN13 9782140053870
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0850€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

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Jean-Claude Dinéty
L’amère victoire des tikis Roman
/ Littérature
Rue des Écoles
LAMÈRE VICTOIREDES TIKIS
Rue des Écoles
Le secteur « Rue des Écoles » est dédié à l’édition de travaux personnels, venus de tous horizons : historique, philosophique, politique, etc. Il accueille également des œuvres de fiction (romans) et des textes autobiographiques.
Déjà parus
Costéja (Jean-Max),Ne deviens pas trop humaine, roman, 2017. Boulenouar (Malika),Ciel, mon cousin !, roman, 2017. Guliani (Tamara),Mon dernier hiver soviétique, roman, 2017. Tripet (Arnaud),Embellies, nouvelles, 2017. Tanguy Taddonio (Anne),L’île dans la caatinga, roman, 2017. Matsas (Roméo),Le méridien d’Athènes, roman, 2017. Cohen (Olivia-Jeanne),La vie est un jeu, roman, 2017. Piot (Cyrille),Martin Luther King est bien mort le 4 avril 1968, roman, 2017. Michel (Jean-Claude),Cap sur les Baléares, roman, 2017. Robin (Jean-Paul),Du bout du cœur, récit, 2017. Rudant (Jérémie),Ambition fatale, roman, 2017. Rouquette (Ariane),Lapin à la marjolaine, roman, 2017.
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Ces douze derniers titres de la collection sont classés par ordre chronologique en commençant par le plus récent. La liste complète des parutions, avec une courte présentation du contenu des ouvrages, peut être consultée sur le site www.harmattan.fr
Jean-Claude Dinéty
L’amère victoire destikis
Roman
L’HARMATTAN
© L’HARMATTAN, 2017 5-7, rue de l’École-Polytechnique ; 75005 Paris
http://www.editions-harmattan.fr/
ISBN : 978-2-343-13336-2 EAN : 9782343133362
PRÉFACE
À Bob, in memoriam
Je n'aurais pas eu l'occasion de revoir Papeete si Izel Beaulaincourt ne m'avait pas contacté dans ma retraite. Elle disposait de nouvelles pistes pour retrouver l'assassin de son mari et comptait sur moi pour élucider l'énigme de sa mort. J'étais dubitatif : le corps avait été retiré de la mer depuis si longtemps, la grande majorité des témoins étaient décédés et les archives locales avaient presque totalement disparu. Izel, mon amie si chère, était hantée par le drame survenu le 14 juillet 2018, je ne pouvais donc pas me dérober. J'atterris à Faa'a le 5 mars 2037, jour de la fête nationale. Après avoir quitté la Polynésie en 2020, je n'y étais jamais revenu et n'y retournerai plus, bien que je fusse heureux de l'avoir foulée de nouveau. Nombre de mes prédictions se sont réalisées, et j'ai pu mesurer combien l'aventure de l'indépendance est exaltante comme semée d'embûches. Rien n'aurait été possible si je n'avais pas bénéficié d'interventions multiples, parfois inattendues. En premier lieu, qu'il me soit permis de remercier :
Izel pour sa précieuse amitié, Rodolphe Dalbardesseins pour sa vivacité d'esprit, Victor Haturau pour sa fidélité, Pauline Tehura pour ses conseils toujours pertinents.
Sans omettre :
Monsieur Huki Taupotini, directeur des Archives nationales, et son amical concours, Monsieur X, un ancien des Renseignements généraux, et sa complicité à toute épreuve, Monseigneur Ségalènes, évêque de Tahiti, et son aide providentielle, Monsieur Renaud Chaudron de la Caillerie, consul de France, et son prudent soutien, Monsieur Li Yifan, ambassadeur de la République populaire de Chine, et son entregent sans égal.
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Auckland, le 18 octobre 2037
RETROUVAILLES Toutes les prévisions se trompent, c'est l'une des rares certitudes qui a été donnée à l'homme.Milan Kundera,L'ignorance(2003)Ils sont tous là ! Au centre, les membres du gouvernement, à leur gauche, ceux du Conseil des Sages, à leur droite, le secrétaire particulier du roi, le président de l'Assemblée et le procureur général ; en retrait, le corps diplomatique avec les ambassadeurs de France, de République populaire de Chine, des États-Unis, d'Australie, de Nouvelle-Zélande, des Samoa, du Tonga et du Vanuatu. À l'arrière, un immense mât d'où pendouille le drapeau 1 national qui figure la proue d'unpahifendant les flots. Au-devant, un énorme bloc de basalte sur lequel sont gravés en lettres rouge écarlate, sur une face, « 5 MARS 2027, Jour glorieux de l'Émancipation du Peuple 2 3 Ma'ohi » et en dessous, « Proclamation du Royaume de la Porinetia », sur l'autre, « Porinetia, To Tatou Ai'a », soit en français, Polynésie, notre Patrie.  Izel est à mes côtés pendant la cérémonie. Toujours coquette sans afféterie, mutine sans malice, vive sans emportement. Elle me glisse quelques commentaires mi-enjoués, mi-attristés, me désigne certaines personnalités. Le personnel politique s'étant renouvelé en vingt ans, peu de visages connus.  Parmi les ministres et les secrétaires d'État, je n'en identifie pas un seul. Leur répartition me frappe. Au premier rang, des Maoris, au second, des Chinois ou des Demis - les sang-mêlé - et deux rejetons d'Occidentaux. Tous en demi-cercle, ils enveloppent Pomare VII, aux yeux engoncés dans les orbites, au cou escamoté et au tronc auréolé de majestueux bourrelets. Il semble sommeiller sur son trône en bois de rose, aux pieds cambrés, à l'entrecroise tournée en balustre et aux accotoirs à crosse. Dressé à ses côtés, un écu porte ses armes : coupé, d'azur, à une pirogue double à voile de sable et chargé d'une couronne d'or, comme les décrirait un blasonneur dans sa langue ésotérique.  Seuls quinze des dix-neuf membres du Conseil des Sages ont pu se déplacer, et uniquement trois femmes parmi eux. Assis dans des fauteuils de jardin, ils s'éventent à l'aide du programme des festivités et les rares encore aptes à se maintenir debout se soutiennent grâce à une canne ou à un déambulateur. Peu d'entre eux paraissent valides, pour autant beaucoup sont 1 Pahi:1: autrefois, pirogue double à pagaie utilisée pour la pêche ou la guerre ;2: aujourd'hui, navire. 2 Ma'ohi: indigène, autochtone ; ici, Maori, originaire de Polynésie française. 3 Porinetia: Polynésie.
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encore vifs d'esprit : les yeux pétillent, les sourires irradient, les messes basses fusent. Je crois en reconnaitre deux : Jacqui Drollet, invariablement droit dans ses bottes, est un ancien marxiste autogestionnaire métamorphosé en indépendantiste de choc et, derrière lui, Édouard Fritsch, de plus de dix ans son cadet et toujours aussi mollasson, est l'ancien bras droit de Gaston Flosse, l'homme fort de la Polynésie sous l'ère Chirac.  La cérémonie débute par un cantique du cru distribué à toute l'assistance : Grand Dieu, nous te bénissons, Nous célébrons tes louanges ! Éternel, nous t'exaltons, De concert avec les anges, Et, prosternés devant toi, Nous t'adorons, ô Grand Roi ! -Grand Dieu, tu nous as choisis Pour combattre le Malin. Nous, valeureux Ma'ohi, Te promettons que, demain, Par ta clairvoyance guidés, Il sera bientôt ruiné. -Gloire soit au Saint-Esprit ! Gloire soit à Dieu le Père ! Gloire soit à Jésus-Christ, Le Sauveur, notre frère ! Que ton immense bonté Dure pour l'éternité !  Ces louanges sont entonnées par le Chœur de la Garde royale. Les chanteurs sont disposés devant la stèle et face aux personnalités, quand le public, fort d'une petite centaine de personnes, est contenu derrière des barrières, au loin. Répartis autour du monument et en tenue d'apparat, les 1 gardes royaux : les pieds nus, unpare'uet un pectoral de nacre pour tout vêtement, de longs cheveux réunis en chignon au sommet du crâne, haut d'un mètre quatre-vingt-dix en moyenne. Impressionnant ! Leur dextérité dans le jonglage avec casse-têtes - des majorettes d'un genre nouveau... - détonne avec leur allure martiale tout comme leur désinvolture contraste avec leur air farouche. Les enfants les apostrophent, les femmes les dévorent des yeux et les hommes s'émerveillent de leur noblesse.
1 Pare'u: pagne traditionnel ou paréo, qui se porte noué à la hanche ou au-dessus de la poitrine, par les femmes et les hommes.
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 Les chanteurs de la Garde s'effacent devant l'Orchestre national et sa chorale chargés d'interpréter l'hymne. Les personnalités, après avoir écouté le cantique tête baissée et mains réunies sur le ventre dans une posture de prière, se redressent comme un seul homme, bombent le torse, repoussent le menton, raidissent les bras le long du corps. Les premières notes vibrent et les premières paroles, reprises à pleins poumons et à l'unisson, s'élancent vers le ciel immaculé. « Mais c'est en français !»,m'exclame je , au grand dam des spectateurs les plus proches.Le Conseil des Sages avait autorisé l’Assemblée constituante à se saisir de la question de la langue pour l’hymne. Son président, avant de soumettre la proposition de loi aux parlementaires, les pria de l’excuser pour ne pas avoir pu diffuser le grand œuvre à temps du fait de difficultés techniques, puis héla un huissier, lui chuchota quelques mots et, peu après, le texte fut distribué aux élus.  Selon leur appartenance politique et leur origine géographique, les réactions avaient été diverses : impassibilité, sourires narquois ou d'aise, crispations, stupeur sincère ou surjouée, tout y passa. Certains glissèrent avec solennité le précieux document dans leur maroquin, d'autres le plièrent en quatre avant de l'enfouir dans leur poche, d'autres encore le biffèrent rageusement avant de le repousser au fond du pupitre ou en firent une boule compacte rejetée sous les sièges !- Chers amis, chers amis, il semble que cet hymne, pourtant rédigé dans notre plus belle langue, exaltant les trésors de l'âme ma'ohi, louant le Seigneur, glorifiant notre combat pour l'indépendance et honorant nos martyrs, suscite quelques réserves... 1 - C'est enreo tahiti!éructa Koty, un représentant marquisien.- Mais qu'es-tu donc pour refuser notre hymne, espèce de député fantôme et fantoche ?rétorqua Laodioux, député tahitien.- Je suis l'un des deux représentants légaux deTe Fenua Enata! -Te Fenua Enata! Tes frères ont baissé leur froc? Marquises, oui devant les Français, voilà la vérité. Et maintenant, tu contestes, tu refuses le reo tahiti, mais quoi encore ? Tu oublies que les héros de notre révolution nationale sont d'ici, en premier lieu notre très regretté Oscar Temaru, que la capitale de notre État est ici, que nos institutions sont ici !  C'est alors que Koty se leva. Sa stature était connue de tous, mais dans ces circonstances, elle parut terrifiante. Ses cent seize kilos se frayaient un passage entre les travées, sa trogne grimaçait à la manière des danseurs de 2 putu, ses mains formaient deux poings de fer, ses muscles saillaient et roulaient. Il descendit l'allée centrale et se dirigea vers son contradicteur
1 Reo tahiti: langue tahitienne. 2 Putu: danse marquisienne de la guerre.
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