L auberge du tramway
313 pages
Français

L'auberge du tramway , livre ebook

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313 pages
Français

Description

Avec ses coups de sifflet et ses bouffées de fumée noire, le tramway local rythme le tempo du village où résonnent les cloches de l'église... mais une partie des fidèles se rend au temple vaudois. Catholiques et protestants vivent ensemble dans une communauté séparée par une subtile frontière invisible, même si les hommes partagent toujours un canon de rouge à l'« Auberge du Tramway ». Letizia est institutrcie et passe son temps à se venger des hommes suite à une décéption amoureuse. Son frère Alberto, paisible notaire du village, spécule à la bourse. Tout se complique au cours de ce mois d'octobre 1907, lorsqu'une crise financière explose à New York, boulversant le destin de Letizia et de son frère.

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Informations

Publié par
Date de parution 25 novembre 2020
Nombre de lectures 0
EAN13 9782140164293
Langue Français
Poids de l'ouvrage 7 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,1050€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Alessandro Giraudo
L’AUBER DU TMWAY R o m a n
© L’Harmattan, 2020 5-7, rue de l’École-Polytechnique, 75005 Parishttp://www.editions-harmattan.fr ISBN : 978-2-343-21383-5 EAN : 9782343213835
Alessandro Giraudo L’auberge du tramway Roman
Du même auteur
Il caso Mazzonis, Pinerolo, EDC, 1975. The European Car Industry (avec Alberto Tiazzoldi), Bruxelles, LECE, 1975. Pinerolo, fra storia e cronaca(dir. Giovanni Visentin), Pinerolo, Alzani, 1997. Toute la Finance(dir. Hervé Hutin), Paris, Eyrolles, 2007. Mythes et légendes économiques, Paris, Economica, 2007. Money Tales,Paris-Londres, Economica, 2008. Au temps des comptoirs (avec Philippe Chalmin), Paris, Éd. Bourin, 2010. Le nerf de la guerre, Paris, Éd. de Taillac, 2013 – prix des Cadets de l’École de Saint-Cyr. Quand le fer coûtait plus cher que l’or, Paris, Fayard, 2015 (traduit en espagnol, coréen et chinois). Vingt histoires pour comprendre l’économie,Paris, J’ai lu-Librio, 2016. Or, argent et folies des grandeurs,Paris, Economica, 2016. Histoires extraordinaires des matières premières,Paris, Éd. Bourin, 2017 (traduit en italien – prix littéraireCittà di Pontremolipour l’histoire économique – 2020). Nouvelles histoires extraordinaires des matières premières, Paris, Éd. Bourin, 2017. La courtisane du Rialto(roman), Paris, L’Harmattan, 2018 – prix littéraireCittà di Pontremoli(2019). La toge rouge et la courtisaneParis, L’Harmattan, (roman), 2018. Le lion et la courtisane (roman),Paris, L’Harmattan, 2019.
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Pour Régine,sine qua non
Ce mardi-là, Davide Piacentini, le petit vieux banquier de la ville, ne se promène pas sous les arcades qui entourent la place principale. Depuis une bonne vingtaine d’années, il sort tous les jours de chez lui un bon quart d’heure avant 8 heures, sauf le dimanche. Il se rend auxCaffé del Centro, où on lui sert un café très brûlant et très serré. Il échange quelques mots avec le garçon, surtout sur les dernières décisions du gouvernement qui vont toujours dans la mauvaise direction. Ce serveur est un homme grisonnant, célibataire, très obséquieux, cordial et fin connaisseur des qualités et, surtout, des défauts des hommes. Il accueille les habitués qui aiment s’adresser spécifiquement à lui. Il pense qu’il ne travaille même pas, il s’amuse et occupe ainsi sa vie qui, autrement, serait trop vide. Piacentini paie sa consommation et, tous les jours, avec beaucoup de regrets pour le temps qui passe trop vite, il admire les yeux verts de la caissière. Cette femme, déjà sur la quarantaine, a des formes plantureuses et harmonieuses. Elle est toujours habillée avec une grande élégance très discrète et ne choisit que des vêtements de couleur pâle : vert pâle, rose pâle, azur pâle et arbore des décolletés entourés par des dentelles qui valorisent son cou et sa poitrine. Adelaïde porte tous les jours un collier différent : améthyste, obsidienne, jade, corail, ambre, perles... On murmure qu’elle possède même un collier de pierres bleues, composé du larimar, une pierre qu’on trouve seulement dans l’île de Saint-Domingue. Il serait le cadeau d’un mystérieux baron avec lequel la femme aurait visité la moitié du monde, quand elle était beaucoup plus jeune...
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Piacentini plonge tous les matins dans la profondeur des yeux verts d’Adélaïde et rêve en se rendant à la banque. Ses employés l’attendent dans la petite rue latérale. Il tend la clé de la banque à son vieux caissier-chef qui ouvre la lourde porte. Clementina, sa secrétaire depuis plus de vingt années, arrive toujours avec deux journaux : laGazzetta del PopoloetIl Soleet surtout un bouquet de fleurs. Elle en place la moitié sur le bureau du banquier et la moitié sur le grand banc de la caisse de la banque. — J’aimerais placer un tiers du bouquet sur ma table, a-t-elle dit, plusieurs fois, à Piacentini. — Les fleurs sont pour les clients ; elles ne sont même pas pour moi. Le bouquet représente le signe de la vie et de la fraîcheur de la banque, lui a répondu sèchement le banquier. Clementina s’est battue, sans succès pendant longtemps contre ce dogme. Un jour, elle est arrivée avec un petit bouquet pour décorer son bureau. Piacentini l’a priée très gentiment, mais ses formes mielleuses sont des vrais ordres de sergent-chef, de ne pas changer la tradition de la banque... Eh bien, ce mardi-là, Piacentini ne s’est pas promené avec sa belle montre en or qu’il avait achetée au cours de son seul voyage à Genève ; elle a toujours été placée dans la poche gauche de son élégant gilet de ventru. Quand il arrive à une dizaine de mètres de sa petite banque, il la sort ; il regarde l’heure, en général une minute avant 8 heures, et s’enfile dans la petite rue où ses trois employés lui souhaitent, respectueusement, le bonjour. C’est un rituel mécanique qui est devenu banal. Mais cela lui fait plaisir. Ce mardi-là, les trois employés attendent avec impatience l’arrivée de leur patron. — Il a un peu de retard, affirme Goffredo, le chef caissier. — Impossible ! intervient Paolo, lejeune comptable.
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— Je crois que vous avez raison ; monsieur Piacentini est une montre suisse. Il n’est jamais en retard, affirme Clementina... et même pas en avance ! Ça fait plus de vingt ans qu’il arrive une minute, je ne dis pas deux, avant 8 heures. Il pourrait avoir un petit problème de santé. Mais c’est un homme qui se soigne beaucoup ; il boit peu et il goûte des confettis d’alimentation à chaque repas. Je suis préoccupée. Signor Paolo, voulez-vous, s’il vous plaît, aller le rencontrer sur son chemin ? Il fait toujours le même parcours. Je vous en remercie beaucoup. Nous attendons ici. On n’a pas la clé de la banque. — Je pars tout de suite, mademoiselle Clementina. Mais ne soyez pas préoccupée ; je vous en prie... Je vous vois nerveuse et vous n’êtes pas à l’aise... La vie est belle comme les roses que vous avez dans vos bras... — J’ai un mauvais pressentiment. Signor Paolo, vous êtes jeune et la vie vous paraît toujours belle... Les roses peuvent aussi faner... — Mademoiselle Clementina, qu’avez-vous mangé hier soir qui vous est resté sur l’estomac ce matin ? Et Goffredo, le vieux cassier, se met à rire. Mais Clementina n’esquisse même pas un sourire ; elle sait que quelque chose de mauvais est arrivé.Son banquierest trop précis. S’il n’est pas à la banque, il y a un problème, probablement sérieux... Elle le connaît très bien. Ils ne sont pas mariés, mais c’est tout comme... Depuis plus de quatre lustres, ce couple vit ensemble huit heures par jour. Elle sait interpréter toutes les pensées de l’homme : les très rationnelles, les très secrètes, les très intimes... même les très mystérieuses. Elle sait le fixer dans ses yeux, protégés par des lunettes avec une monture en or, mais pas pour elle. L’homme n’arrive jamais à soutenir le regard de sa complice qui peut l’interroger, le
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menacer, l’approuver, l’encourager en silence, avec un regard... Et Piacentini comprend le message ; souvent, il donne un petit coup de toux pour confirmer qu’il l’a saisi. Clementina est une femme qui a la sensibilité de félin à fleur de peau ; mais elle est d’une discrétion très subtile. Pour signaler àson banquierqu’elle a compris la réponse et qu’elle l’approuve, la femme caresse spontanément ses cheveux très longs, qui sont toujours recueillis avec beaucoup de soin dans un chignon, valorisant son cou très fin et élégant. Ce cou alimente les regrets et les souvenirs de Piacentini qui n’a jamais osé dire un mot un peu plus personnel à cette femme pour connaître ses sentiments sur une relation plus intime. Les autres deux hommes qui travaillent dans la banque ont toujours formulé des hypothèses les plus romanesques et farfelues sur les relations entre Clementina et Piacentini. Ils s’interrogent, se torturent, tirent des plans sur la comète, sans succès et restent dans le doute. Les premiers clients arrivent devant la porte de la banque qui est fermée. Ils bavardent du temps encore très chaud qui devrait être favorable à la récolte du maïs ; par contre, il pourrait endommager un peu la production de vin. Ensuite, le nombre des clients qui attend l’ouverture de la banque augmente. Les gens s’interrogent sur la raison du retard de l’ouverture des portes. Il y a surtout des éleveurs de bétail qui ont encaissé de l’argent à la foire du lundi dans la région et veulent déposer leursboutinsà la banque.
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