LE POIDS DU SAC
112 pages
Français

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Description

Pierre est au bout de lui et de son entreprise qui vit la fin d'une époque.
Un sourire, une rencontre, Elle entre dans sa vie.
L'indécision des instants puis rapidement la suite à vivre...
Le temps et les pas vont-ils lui donner les réponses au pourquoi si souvent évoqué ?
Fuite ou courage, l'évidence s'impose : partir.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 décembre 2018
Nombre de lectures 0
EAN13 9782363159540
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0025€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Le poids du sac


Maschinot Philippe

2018
ISBN:9782363159533
Cet ebook a été réalisé avec IGGY FACTORY. Pour plus d'informations rendez-vous sur le site : www.iggybook.com
À mes parents, qui m’ont appris à marcher.
« Ne demandez jamais quelle est l’origine d’un homme ; interrogez plutôt sa vie, son courage, ses qualités et vous saurez ce qu’il est. » Abd El-Kader
Voilà une heure que je marche.
Au fond de moi monte déjà l’envie de tout laisser là, comme chaque fois, comme souvent…
Mon sac est trop lourd, mon corps pas adapté, ma tête absente et mes pensées en arrière.
J’ai mal partout. Ma nuque est souffrance.
Une barre de plomb traverse mes épaules, tout le haut de mon corps est ankylosé.
Je ne suis que douleur.
Je marche depuis une heure… qu’est-ce que je fous là   ?
Un pas après l’autre, je m’éloigne du confort de ma vie, de tout… je n’emporte rien qui ne me soit réellement utile. J’ai quitté ce que j’étais.
Je ne suis plus rien ici au fond du bois. Je ne suis que doutes…
Errant, en proie aux affres du questionnement, mon esprit me ramène aux dernières heures de la nuit précédente, dans cette chambre blanche de l’ancienne abbaye, reconvertie en hôtellerie, où je suis arrivé hier, épris de solitude, d’introspection, de complexité intérieure, de réflexions sur le cheminement et sur l’effort à accomplir.
Allongé sur le petit lit de l’ancienne cellule monacale, tendu par la charge des décisions, je suis resté immobile et figé, les yeux fixés sur le plafond, attendant ce matin.
Je suis mort.
J’ai froid en dedans.
J’ai peur.
Bien avant
 

 
«   Le choix est possible dans un sens, mais ce qui n’est pas possible, c’est de ne pas choisir. Je peux toujours choisir, mais je dois savoir que si je ne choisis pas, je choisis encore.  »
Jean-Paul Sartre
 
Quand je pense à Elle, je dis un mot pour essayer de la chasser de mon esprit : Stop !
Alors, des millions de fois par jour, je murmure, Stop !… je pense, Stop !… je cours, Stop !… je mange, Stop !… Il faut passer à autre chose, Stop !… Je n’ai pas le choix, Stop !…
Je suis au milieu d’un monde qui s’est écroulé et qui n’est plus rien.
Depuis des semaines, depuis ce vide qui me ronge, depuis ces nuits sans sommeil, ma vie ne tient à rien. Je me sens inutile, seul, triste, sans gaieté, sans joies. Elle ne me parle pas, ne m’appelle pas. Stop ! La fin d’année approche, les fêtes, les sourires, je n’en veux pas. Elle me manque. L’entreprise où j’ai passé toutes les dernières années a vécu elle aussi. Le stress, l’angoisse, tout est décuplé par Elle absente, et par les difficultés professionnelles insurmontables. Je m’enfonce, je glisse. Je n’arrive pas à me ressaisir. Il y a comme un gouffre sous mes pieds et y tomber serait en finir. Je fume et je bois. Trop. Beaucoup trop. Vie sociale inexistante également, je me suis enfermé dans un carcan de rien. Daniel et Virginie, mes amis, sont inquiets. Ils m’en font part. J’écoute, essaie de leur dire tout d’Elle. Stop ! Ils savent. Tout le monde sait. À moi de choisir.
Vers 5 heures, une douleur lancinante vient irradier ma poitrine, mon plexus, mon cœur, mon bras gauche, des sueurs, un rythme cardiaque anormalement élevé, des nausées, j’ai peur d’un coup. Parce que cette douleur, présente depuis des semaines, ces palpitations font partie de mon état accepté et de la perte d’Elle.
Je quitte mon canapé. Mon refuge… m’habille, prend ma voiture et à vitesse réduite, je vais à l’hôpital. Urgences… Seul.
L’infirmière de garde prend ma tension qui n’est pas normale puis qui chute brutalement et remonte, rythme cardiaque au-delà de cent trente, appelle le médecin, électrocardiogramme… Sueur. Peur.
Puis l’attente…
Je me retrouve sur un lit, branché de partout, échographie de la zone du cœur, myocarde allongé un peu… Prise de sang. Résultats. Pas très bons. Pas d’infarctus, mais une situation à surveiller.
Le cardiologue présent vient me voir et nous faisons le point sur mon état.
Je lui parle de mon travail, de la fin annoncée de mon entreprise et d’Elle.
Surtout d’Elle.
Il prend des notes, me regarde, écoute, pose quelques questions. Puis me dit :
— Votre état général nous montre un état d’épuisement physique et probablement moral. Savez-vous que nos émotions peuvent nous briser le cœur ? Le vôtre a quelques symptômes d’un Tako-Tsubo ou syndrome des cœurs brisés ! Le stress, l’anxiété, la peine d’amour irrésolue, tous ces facteurs ne sont pas bons pour le cœur. Vous avez associé le tout, pourquoi faire les choses à moitié ? Vous êtes un bon cobaye pour la psychocardiologie, cette discipline médicale qui explore notre cœur et nos émotions. Et le cocktail d’aujourd’hui n’est pas très sympathique et absolument dangereux pour vous, mais vous avez un organe sain qui se remettra… En plus vous fumez… vous buvez… votre vie a pris un virage d’autodestruction dont vous êtes le seul responsable. Idéalement… Repos et prendre de l’air, respirer, méditer, soyez zen, mangez sainement, arrêtez de boire, arrêtez de fumer et faites de l’exercice ! J’envoie un courrier avec le dossier à votre médecin. Allez le voir rapidement et faites-vous prescrire du repos !
Il me sourit et me laisse là. Ma tête tourne à cent à l’heure. Je viens de me faire dire Stop !
Je rentre chez moi. Sonné.
Quelques jours à regarder dehors, à faire mon tour au boulot, à vomir de ne plus vouloir, à aller chez le toubib qui ne me dit rien d’autre que de prendre tout le repos possible, et de me prescrire des antidépresseurs. Anti de tout, mais pas d’Elle !
L’ordonnance pliée au fond de ma poche, je sais que je ne prendrai rien. Que je suis solide et droit comme tous mes ascendants, ceux qui ont forgé, fabriqué, imprimé, labouré. Ces héros de mon enfance familiale, guides de mon adolescence, maîtres de mes débuts dans la profession, que j’entends au fonds de moi, dire : « tu t’en remettras ». D’ailleurs, un patron comme moi ne s’autorise pas à faillir ! Ainsi en quelques jours, l’alerte est passée…
Quel sentiment étrange de savoir que ton chemin n’est pas le bon, mais que tu le prends quand même. Trop dur de faire machine arrière, de faire demi-tour. Persister dans une erreur qui pourrait être fatale, mais Elle me pousse, mon ego me pousse, les autres me poussent, je me pousse.
En fait, je ne suis bien nulle part !
Chez moi, ailleurs, je ne fais que passer pour l’essentiel, le juste ce qu’il faut. Le nécessaire. Ma vie n’a plus de sens, je vais partout, mais je ne vais pas. Jour ou nuit, mon corps ou ma tête, vivent et marchent au hasard.
L’absence ronge, mine, tue. À petit feu intérieur.
Paroles d’amis, de rencontres, d’espoirs, vite éteintes, yeux levés, vite baissés, tout à l’envers.
Perte de moi. Solitaire. Errements nocturnes, je marche sur les quais, regarde glisser l’eau, quelques halos blafards, quelques phares, mon ombre apparaît. Disparaît.
Ma vie…
Mes mains prolongent des bras qui ne serrent plus…
Petits matins crémeux, le froid, la brume, je cherche au fond de la poche un paquet vide, je dois arrêter de fumer…
Café, travailleurs, ouvriers, comptoirs de bar, regards perdus, à peine levés, leurs buts ?
Le mien ?
Toutes ces dernières semaines sont jalonnées de solitudes pédestres. La marche de nuit, quel que soit le lieu me renvoie une image absente d’Elle. Et je dis Stop !
Je pense trop. Stop ! J’essaie d’être attentif. Stop !
J’en suis arrivé là. Plus d’envie, seulement être moi. Tout m’appelle vers un autre moi, vers autre chose. J’ai besoin de temps pour moi.
Par où je commence. J’ai déjà commencé…
L’irrésolution m’habite. Cauchemar et alcool. Cocktail pervers pour la tête.
Mes pas m’entraînent vers les quais, vers la gare.
Partir. Rien sur moi, rien avec moi, rien en dedans de moi. La nuit. Rien que la nuit.
Jamais je ne pourrai survivre à la douloureuse épreuve de l’absence. Il ne me reste rien que moi, et je ne sais pas m’en c

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