Le POTAGER
175 pages
Français

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Description

Et s’il fallait porter un masque et des gants en permanence ? Faire ses provisions grâce à des coupons de rationnement ? Se débarrasser des chats faute de nourriture ? Se déplacer à vélo puisqu’il n’y a plus d’essence ? Et si l’apocalypse arrivait tout doucement, insidieusement ?
Depuis qu’un virus mortel s’est propagé partout dans le monde, Caroline voit chaque semaine son univers changer. Entre deux crises d’anxiété, elle doit néanmoins s’occuper de son mieux de ses deux jeunes garçons. Tout ce qui était auparavant si simple est devenu difficile. Même se nourrir. Les habitants de son quartier décident alors de s’unir pour cultiver un potager… mais les choses les plus banales prennent désormais des allures dramatiques.
Jusqu’où ses voisins iront-ils pour protéger leurs récoltes maintenant que chaque personne représente un concurrent dans cette course à la survie ? Et jusqu’où Caroline elle-même ira-t-elle ?
Quand il l’avait rencontrée, Caroline n’avait pas plu immédiatement à Samuel, ce à quoi il repensait parfois en éprouvant une petite gêne. Sans être laide, elle n’était pas non plus de celles qui donnent des torticolis aux garçons. La côtoyant par amis interposés au cours de leurs études universitaires, dans les 5 à 7 et les soirées dans les bars, il avait toutefois été peu à peu séduit par cette femme aux lèvres bien dessinées et à la poitrine généreuse. Elle n’avait pas toujours confiance en elle et s’appuyait sur lui à son insu. Cela donnait de l’importance à Samuel, le faisait se sentir fort à ses côtés. Il adorait ça. Qui plus est, Caroline était douce, attentionnée, drôle et réfléchie. Il la connaissait depuis plus de dix ans et il l’aimait toujours. Enfin, il croyait bien la connaître, mais en la voyant ce soir, ses mains gantées de jaune plongées dans l’eau savonneuse, la bouche tremblante et le regard dur, il eut des doutes. Son visage, habituellement si posé, menaçait de s’empourprer à nouveau. Deux fois en trois jours? Vraiment? Et toujours pour ce foutu potager? Samuel avait peine à le croire, mais sa femme semblait se métamorphoser devant lui. C’était un agneau à qui il poussait soudainement des griffes et une crinière, et ça, c’était plus surréaliste que tout le reste.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 20 septembre 2017
Nombre de lectures 5
EAN13 9782764433522
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0750€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

De la même auteure
La Fabrica , Éditions Québec Amérique, coll. Latitudes, 2014.
• Grand Prix du livre de la Ville de Sherbrooke 2016
• Finaliste aux Prix littéraires du Gouverneur général 2015





Projet dirigé par Marie-Noëlle Gagnon, éditrice
Conception graphique : Nathalie Caron
Mise en pages : Marquis Interscript
Révision linguistique : Sylvie Martin
En couverture : photomontage à partir des images
de Mooredesigns / shutterstock.com et adehoidar / shutterstock.com
Illustrations intérieures : Valérie Fortin
Conversion en ePub : Nicolas Ménard
Québec Amérique 7240, rue Saint-Hubert
Montréal (Québec) H2R 2N1
Téléphone : 514 499-3000, télécopieur : 514 499-3010
Nous reconnaissons l'aide financière du gouvernement du Canada par l'entremise du Fonds du livre du Canada pour nos activités d'édition.
Nous remercions le Conseil des arts du Canada de son soutien. L'an dernier, le Conseil a investi 157 millions de dollars pour mettre de l'art dans la vie des Canadiennes et des Canadiens de tout le pays.
Nous tenons également à remercier la SODEC pour son appui financier. Gouvernement du Québec – Programme de crédit d'impôt pour l'édition de livres – Gestion SODEC.



Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada
Fortin, Marilyne Le potager (Tous continents)
ISBN 978-2-7644-3350-8 (Version imprimée)
ISBN 978-2-7644-3351-5 (PDF)
ISBN 978-2-7644-3352-2 (ePub)
I. Titre. II. Collection : Tous continents.
PS8611.O777P67 2017 C843’6 C2017-941099-7 PS9611.O777P67 2017
Dépôt légal, Bibliothèque et Archives nationales du Québec, 2017
Dépôt légal, Bibliothèque et Archives du Canada, 2017
Tous droits de traduction, de reproduction et d'adaptation réservés
© Éditions Québec Amérique inc., 2017.
quebec-amerique.com



À William, Félix et leur papa.
À ma famille.


Pourquoi faut-il que tout ce que j’aime sur terre soit menacé ? Ce qui m’effraie bien plus que la guerre, c’est le monde de demain. Tous ces villages détruits, toutes ces familles dispersées. […] Je nous voudrais tous réunis autour d’une table blanche.
Lettres à sa mère , Antoine de Saint-Exupéry
So show me family All the blood that I will bleed I don’t know where I belong I don’t know where I went wrong But I can write a song
Ho Hey , The Lumineers


Prologue

L’invention de l’écriture est l’une des plus grandes révolutions de l’humanité. C’est avec son apparition que s’achève l’époque préhistorique et que débute l’Histoire. Aboutissement d’une lente maturation étalée sur des milliers d’années, pictogrammes, idéogrammes et alphabets de différentes natures se sont succédé afin de traduire le mieux possible toutes les subtilités de l’oralité. En mesure d’écrire, l’humain laisse désormais des traces concrètes de sa pensée et des événements qui ponctuent son existence. Le langage humain, sous forme écrite, devient mémoire commune.


Septembre, la rentrée
Depuis des semaines, entre deux mauvaises nouvelles, la télé et la radio enchaînaient les pubs de fournitures scolaires, toutes plus criardes les unes que les autres. Heureusement, ça cesserait rapidement dès le retour en classe. À l’extérieur flottait une odeur de fin de vacances : un mélange de verge d’or, d’humus, de crème solaire, d’asphalte chauffé et de livres neufs. Les grillons stridulaient du matin au soir, chant du cygne des chaleurs de l’été. Avec un peu de chance, même lorsqu’ils se seraient tus, des beaux jours, on en verrait encore pendant quelques semaines, et ce, malgré la venue imminente des gelées. Au Nord, l’automne était souvent frais, mais savait être ensoleillé.
Caroline était arrivée tôt ce matin-là. Elle n’avait presque rien mangé, elle était fébrile. Elle avait été la première à garer sa voiture dans le stationnement du collège, la première à s’engouffrer dans les corridors sombres et silencieux, la première à respirer ce parfum caractéristique des bâtiments désertés depuis trop longtemps. « Il faudra ouvrir les fenêtres dans la classe », nota-t-elle intérieurement.
Pour commencer, elle passa à son bureau, y laissa ses effets personnels. Pendant qu’elle cherchait les exemplaires de son plan de cours, elle s’aperçut que ses mains tremblaient. « Du calme, respire », s’ordonna-t-elle.
En se rendant à son local, elle remarqua que les corridors s’animaient peu à peu. Les étudiants faisaient claquer les portes métalliques de leurs cases, bavardaient entre eux. Elle aspira une grande goulée d’air et expira doucement par ses lèvres entrouvertes, alors qu’elle déverrouillait la porte de sa classe. Sur le bureau jouxtant le grand tableau noir, elle déposa la chemise qui contenait ses documents, puis contempla les tables vides devant elle, satisfaite de les trouver ainsi.
Caroline était d’un naturel anxieux. Elle avait eu de véritables ennuis avec la gestion de ses émotions tout au long de son adolescence, enchaînant, pour son plus grand malheur, maux de ventre, crises d’hyperventilation, nausées et urticaire, au point où, pendant un moment, elle s’en était trouvée sérieusement handicapée. Contre toute attente, graduellement et par elle-même, Caroline avait réussi à vaincre la bête. Ce démon ancien laissait néanmoins deviner son ombre en des moments de grand stress comme celui-ci. Qu’à cela ne tienne, Caroline, bien ancrée dans sa trentaine, était désormais outillée pour y faire face : la bête resterait dans sa tanière cette année encore.
Les étudiants arrivèrent un à un. Certains affichaient un air détaché ou détendu, d’autres semblaient aussi nerveux qu’elle. En le constatant, Caroline se sentit moins seule. C’était le but de la manœuvre. Les voir entrer ainsi, au compte-gouttes, lui permettait de prendre quelques instants pour lire ces visages neufs, pour tâter rapidement le pouls du groupe à partir des individus.
Caroline salua tous les étudiants à mesure qu’ils passaient la porte et observa la classe se remplir tranquillement. C’était tellement moins intimidant de cette façon ! L’enseignante ne pouvait s’imaginer arriver dans son local, le premier matin, et faire son entrée devant une classe pleine à craquer, remplie d’yeux évaluateurs, scrutateurs. Le jugement à son égard, elle le savait pourtant bien, était inévitable. Tout allait rapidement y passer : ses vêtements, ses cheveux, les traits de son visage, la forme de son corps, le timbre de sa voix, sa façon de bouger, de parler, de rire, tout. Heureusement, cette année, elle ne se pointait pas avec un feu sauvage au coin de la bouche. Pour la confiance, ça aidait. Tout comme le fait d’affronter à l’unité les membres du tribunal de l’inquisition scolaire qui se présentaient à tour de rôle devant elle.
La salle était presque pleine. Encore quelques minutes et elle pourrait commencer. Elle respira un bon coup, accrocha un sourire à ses lèvres puis activa inconsciemment son mécanisme de défense le plus aguerri : son armure d’enseignante. Calme, posée, drôle, sûre d’elle, en classe et parfois même en société, elle devenait cette personne fabuleuse, qu’elle ne reconnaissait pas toujours, mais qui, il fallait bien l’admettre, lui rendait de fiers services en lui permettant de vivre une vie d’adulte relativement épanouissante.
Les étudiants silencieux et attentifs, assis devant elle, ne se trouvaient pas tous là de gaieté de cœur. Le cours d’histoire occidentale était obligatoire, l’intérêt pour la matière, optionnel. Qu’importe, Caroline avait l’intention de gagner un à un ces étudiants dubitatifs et, à en croire sa réputation, elle y parvenait la plupart du temps.
Il faut dire qu’elle aimait son travail. Les étudiants d’abord, même les plus récalcitrants, et aussi sa matière. Dès son entrée à l’université, l’étude de l’histoire l’avait passionnée. Les heures passées dans le silence épais de la bibliothèque, à lire des textes oubliés, à contempler des gravures démodées, avaient eu un effet bénéfique sur elle. À la veille de ses examens ou des supervisions de stage, elle avait pri

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