Nouvelles du Père Lachaise
163 pages
Français

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Description

Au cimetière du Père Lachaise, les morts célèbres parlent entre eux et parfois, avec les vivants.



30 auteurs de nouvelles, drôles ou poignants, toujours imaginatifs... Comment ont-ils abordé une telle situation ?




Autant d’approches du mystère, de la poésie, de la culture et de l’aventure post-mortem, que nous livre un recueil de nouvelles hors normes.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 27 avril 2015
Nombre de lectures 37
EAN13 9782361270438
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0056€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

NOUVELLES DU PÈRE-LACHAISE

R ECUEIL INSOLITE DE NOUVELLES ET RÉCITS

Saison 1
M entions légales :

ISBN : 978-2-36127-043-8


Tous droits réservés aux :

Éditions du Désir
06620 LEVENS
Copyright ©
http://editionsdudesir.fr
contact@editionsdudesir.fr

En partenariat avec
Nouvelles Magazine
http://nouvellesetrecits.com
Table des matières
LES RÊVES DE JAD
E.-ÉPISTOLAIRE
LE CHEVALIER BAYARD
L’INFATIGABLE
UN LOCATAIRE INDÉLICAT
ET APRÈS ?
MARIE 1883 — 1900
QUAND ON EST MORT, C’EST POUR LA VIE
CASE 5011 CONVERSATION DOUCES-AMÈRES POUR OCCUPER L’ÉTERNITÉ
ERRANCE NOCTURNE
LETTRE À ABÉLARD
DES ESPRITS FACÉTIEUX
SOIRÉE ENTRE DÉFUNTS
DES VOISINS GÊNANTS
LE PROMENEUR
TA SŒUR
LA MORT À BOUT DE BRAS
JOURNAL DE MADAME TOUT LE MONDE, DÉCÉDÉE
ENTRE DEUX CHAISES
PEAU DE CHAGRIN ET DORIAN GRAY
LA PENSÉE POSITIVE
NECROPHORUS HUMATOR
CI—GÎT PARIS
LE MYSTÈRE DE LACHAISE PERCÉ !
POST MORTEM
LA MORT VIDE SON SAC
THE PÈRE—LACHAISE DEAD BAND
L’OPÉRA D’OUTRE-TOMBE, EN QUATRE ACTES INTEMPORELS
ÉLISABETH
LA PARTIE DE CARTES
L’AMOUR S’EN EST ALLÉ
DISCOURS (PROBABLEMENT APOCRYPHES) DES DEUX MÉTHODES
UNE CHOSE SAINTE ET SUBLIME
LE CHANSONNIER DU PÈRE-LACHAISE
BIOGRAPHIE DES AUTEURS
LES RÊVES DE JAD
Gaëlle Chevet

Les relations entre les morts et les vivants sont complexes. C’est à travers les rêves qu’ils peuvent entrer en contact. Et seuls les vivants sensibles au surnaturel peuvent communiquer avec les morts. Car les morts doivent trouver la faille dans l’inconscient des vivants, leur propension à croire à l’irréel, pour s’y glisser et discuter avec eux, dans leurs rêves.
Je ne m’étais jamais intéressé à ce lien avec les vivants, contrairement à mon voisin de cercueil, Bernard. Lui est très disposé à faire des rencontres. Surtout des femmes. Il scrute à longueur de journée les promeneuses du bas de sa tombe, il jauge leur inconscient et, à la moindre ouverture, il leur rend visite la nuit. Rêver n’est pas tromper. Alors ses nuits sont souvent colorées, si vous voyez ce que je veux dire. Moi, je n’avais jamais cherché à parler aux vivants. Lorsque j’étais en vie, j’avais eu des enfants que j’avais aimés sincèrement, tendrement. Je les avais cachés aux yeux du monde pour leur garantir une vie tranquille. Tandis que mon nom avait donné naissance à une expression liée à ma passion pour la musique, l’Histoire les avait oubliés. Mais pas moi. Jamais. Même quand ils s’étaient détournés de moi, parce que j’étais trop absent, parce que je ne les avais pas reconnus, j’avais veillé sur eux du mieux que je le pouvais. Mais j’avais perdu la trace de ma descendance après ma mort. Je préférais ruminer sur mon sort, sur la brièveté de ma vie, pourtant longue, sur ce que je n’avais pas pu faire, sur mon amertume et l’injustice du comportement des êtres qui nous sont chers. Mais tout a changé il y a quelques mois.

C’était un beau matin de mai. La vie se réveillait doucement au cimetière du Père-Lachaise. La rosée chatouillait les branches des arbres. Les boutons de fleurs se tendaient vers un soleil printanier. Les senteurs du renouveau de la nature s’envolaient au gré du vent. Les oiseaux célébraient l’apparition de l’astre du jour. Comme d’habitude, je regardais avec passivité les promeneurs du matin, mon esprit tout occupé à ressasser encore et toujours mes vieux souvenirs et mes rêves perdus.
J’aperçus alors un petit garçon, sans doute de six ou sept ans, jouant seul dans les allées serpentant autour des tombes. Il semblait tout à son jeu, tout à l’univers que son imagination avait créé ce jour-là. Mais quand il arriva au pied de ma tombe, il s’arrêta net. Il fixait le petit buste me représentant. Et il se mit à rire. Un petit rire cristallin et innocent, un chant musical et léger que seule la pureté de l’enfance peut restituer. Je sentis soudain mon cœur cogner dans ma poitrine. Enfin, c’est l’impression que j’eus et, si je n’avais pas été mort, c’est ce qui se serait produit. Les enfants étaient rares au cimetière et cet enfant-là, et aucun autre, s’était arrêté devant ma pierre tombale et avait ri de moi ! Mon visage, pourtant si austère sur cette statue, l’avait amusé ! Les souvenirs affluaient dans ma mémoire. Mes enfants chéris, qui se gaussaient toujours de ma tête clownesque. Les blagues que je leur faisais, surtout dans les moments difficiles, pour voir leur visage s’éclairer de bonheur, entendre leur rire, le son de leur voix criant « Encore ! ». La tendresse et le bonheur réchauffèrent mon cœur mort depuis si longtemps. Cent quarante-sept ans pour être exact.
Je tendis alors mon âme vers ce petit être et touchai son inconscient, joyeux, chaleureux et vif. Une sensation oubliée depuis si longtemps. Je gardai en mémoire ce sentiment de jeunesse et de vigueur, mêlé de malice et d’un soupçon d’espièglerie.
Le soir venu, je décidai de ne pas laisser s’échapper ce nouvel intérêt pour la vie. J’attendis avec impatience que le dernier rayon de soleil disparaisse enfin et que vienne l’heure des morts. Car ce n’est que lorsque les ténèbres s’abattent sur la terre que les morts peuvent agir et discuter entre eux, fantômes invisibles aux yeux des hommes, mais qui animent notre beau cimetière sous la clarté lunaire. Je demandai donc à mon voisin, expert en la matière, de m’indiquer comment entrer en contact avec la personne rencontrée aujourd’hui. Il me fit un petit sourire coquin et me demanda :
« Une femme a réussi à susciter ton intérêt ! Elle doit être fabuleuse ! Me permettrais-tu de lui rendre visite dans quelques nuits ? Faut faire profiter les copains, hein ! D’ailleurs, j’en connais une qui…
Ça suffit, Bernard. Ce n’est pas du tout ce que tu crois. Il s’agit d’un petit garçon, et non d’une femme. Il me rappelle mes enfants, je veux juste en savoir un peu plus sur lui.
Oh, je vois ! C’est le petit qui s’est moqué de ta tronche ce matin. Il a l’air sympa. Ben, c’est pas compliqué. T’as touché son inconscient ce matin ?
Oui.
Et t’as bien enregistré ce que t’as ressenti à ce moment-là, hein ! Eh ben, cette sensation est unique. T’as plus qu’à parcourir le monde pour la rechercher. Et quand tu l’auras trouvée, tu auras trouvé ton petit garçon. Tu dois aussi attendre que son esprit glisse dans les rêves pour entrer en contact avec lui. Tiens, ça me rappelle…
Mais le monde est immense ! grommelai-je, découragé.
Bon sang ! JAD, t’es vraiment jamais sorti de ton cercueil !? Les morts se déplacent à la vitesse de l’éclair. Tu peux parcourir le monde en un rien de temps. Et le système solaire ne te prendrait que quelques heures ! Vu que ton petit garçon habite sûrement la planète Terre, tu devrais le trouver en quelques minutes.
Et c’est tout ? Pas de formule magique nécromancienne, pas de gestes mystiques ? »
Bernard secoua la tête en signe de négation. Je le remerciai et m’élançai aussitôt, enthousiaste. Un peu trop, peut-être. Ma vitesse me surprit au début et je tentai de freiner pour ne pas heurter le mur d’enceinte du cimetière. Je ne fus pas assez réactif et ne pus éviter le choc. Mais, à ma grande surprise, je passai au travers. J’avais complètement oublié, enfermé dans ma sépulture, que je ne faisais plus physiquement partie de ce monde. Je commençai alors mes investigations, fouillant de fond en comble la ville de Paris. Je ne m’encombrai pas de contourner les obstacles et observai tout ce qui s’offrait à moi. Le monde avait beaucoup changé depuis mon décès. Des voitures à l’aspect étrange stationnaient le long des trottoirs. Des éclairages multicolores jaillissaient dans chaque vitrine, à chaque carrefour. Des panneaux publicitaires géants envahissaient le paysage. Des tours vitrées immenses s’élevaient jusqu’à toucher les étoiles. Je croisai des femmes aux vêtements qui laissaient voir leurs jambes et une partie de leur poitrine, des jeunes avec des trous dans leurs chemises modernes, des pantalons moulants et des coiffures improbables. De mon temps, ça ne se faisait pas, mais je fus agréablement surpris de voir que les gens étaient bien plus libres qu’à mon époque, dans leur tenue vestimentaire, dans leur coupe de cheveux, mais aussi dans leur fréquentation. À un coin de rue, je vis un vieil homme noir plaisanter en compagnie d’un jeune homme asiatique. Plus loin, une jeune femme métisse dansait au son des djembés d’un trio d’hommes blancs. Quel plaisir de voir ce brassage des identités et des couleurs ! La société avait beaucoup changé, et c’était pour

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