COMMIS d'OFFICE

Thierry Chevillard

Description

Pour la première fois un avocat au barreau de Paris livre son expérience dans l'assistance des personnes placées en garde à vue, un moment critique qui place l'individu en situation de privation de liberté alors qu'il n'est pas encore jugé. La tension nerveuse de ces situations est extrême, et le stress des mis en cause, parfois même des enquêteurs dans certaines circonstances, est palpable. C’est dans cette atmosphère très particulière que Thierry Chevillard intervient en notant de façon clinique les transgressions sociales et psychologiques, mais aussi la part d’humanité qui existe chez tout un chacun. Ainsi, à travers son expérience de plusieurs années comme commis d'office, il donne dans cet ouvrage une analyse indirecte de la société en racontant près d'une vingtaine de gardes à vue. Une plongée hallucinante dans les abysses de la nature humaine.

Sujets

• Droit et juridique
• Police judiciaire
• Droit

Informations

• Publié par: Mareuil Éditions
• Nombre de lectures: 21
• EAN13: 9782372541657
• Langue: Français

Extrait

Du même auteur
The Bad Leitmotiv , Le Serpent à Plumes, coll. « Serpent noir », 2000
Gallimard, coll. « Folio policier », 2002
 
Dolores Escudo , Le Serpent à Plumes, coll. « Serpent noir », 2001
 
Ruth-Esther Weiller , Éditions Hors commerce, coll. « Hors bleu », 2002
 
Le Cabanon , Garance Éditions, coll. « Garance romans », 2004
Amazon Kindle, 2018
 
Le Bouc du mal, t. 1. Le carnet noir , Éditions Fides, 2014
 
Sept Tableaux de la vie d’une call-girl , Éditions Léo Scheer, 2014
 
Le Bouc du mal, t. 2. Le roi des rats , Éditions Fides, 2015
 
Le Bouc du mal, t. 3. La meute , Amazon Kindle, 2017
 
Chagatte , Amazon Kindle, 2018
 
Mohamed Laribhi , Amazon Kindle, 2018
 
Théâtre I. Laura I, II, III , Amazon Kindle, 2018
 
Théâtre II. Voyous , Amazon Kindle, 2018
 
Théâtre III. L’homme du camp , Amazon Kindle, 2018
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© MAREUIL ÉDITIONS – 2020
ISBN : 978-2-37254-165-7
Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo .
À Andrée RIPOLL et Gérard DECQ
AVANT-PROPOS

Avocat au barreau de Paris depuis de nombreuses années et membre du barreau pénal, j’ai décidé de tenir une chronique des permanences que j’effectue.
Tous les événements relatés sont vrais.
Seules les impressions m’appartiennent.
INTRODUCTION

C’est au titre de la commission d’office que je suis intervenu dans la plupart des procédures relatées.
 
Il s’agit d’un sacerdoce ingrat et passionnant.
 
Ingrat, car vous ne choisissez pas vos clients et ceux-ci ont tendance à sous-estimer vos capacités de défense pénale.
Ils ne vous connaissaient pas et ignoraient, avant cette rencontre, que vous existiez.
Votre cabinet est peu prospère, pensent-ils, et vous manquez certainement d’à-propos juridique.
Ces apparences assourdissent la complexe réalité de votre mission et votre ferme expérience.
Ainsi vont les impressions dominantes, que vous ne combattez plus, alors que, à la toute fin de votre intervention, les mis en cause sont rassérénés et satisfaits de vous avoir connu.
Ils demandent votre carte de visite que, pour ma part, je refuse de donner.
Ils ne perçoivent rien de cet échange implicite, tout occupés qu’ils sont à survivre dans les rets de leur dossier.
 
Passionnant, car vous faites preuve, dans un temps très court, d’une analyse précise des enjeux des poursuites.
Votre esprit est aiguisé et aucun détail ne vous échappe.
Vous pressentez les suites qui seront apportées à l’enquête.
Votre connaissance de la chaîne pénale est telle que la personnalité du mis en cause et les faits commis vous permettent, sans trop vous tromper, d’anticiper le devenir du gardé à vue.
Vous êtes un observateur des interactions psychologiques qui se joueront entre lui et vous, puis dans le bureau de l’enquêteur.
L’humain est palpable dans toutes ses dimensions transgressives et douloureuses.
Vous êtes le seul à prendre en compte son destin tragique, comme une fatalité malheureuse.
En retour, il vous en sait gré, par un « au revoir » respectueux.
Votre présence fluidifie les rapports avec les enquêteurs car l’homme reste « quelqu’un ».
Ni pire ni meilleur qu’un autre.
 
L’enjeu est de civilisation.
 
Vous participez dans l’indifférence générale, les contraintes de temps, en des lieux quelquefois répugnants, emplis d’odeurs âcres, si caractéristiques des maisons d’arrêt, à ce que chacun ne perde pas sa dignité.
« Écrire, c’est lever toutes les censures. »
Jean Genet

 
PREMIER ÉCRIT

Appel vendredi soir 22 heures.
 
Placement en garde à vue d’un majeur pour trafic de stupéfiants.
 
Je file vers le commissariat.
 
Arrivée à 23 heures.
 
Rencontre du mis en cause.
 
Grand, brun.
Encombré par son corps.
Le regard franc.
 
Nous nous saluons.
 
L’OPJ me rappelle que nous avons une demi-heure d’entretien confidentiel.
 
Le gardé à vue me déclare d’emblée qu’il a décidé de tout reconnaître.
 
En quelques phrases, il me raconte qu’il travaille, avec deux téléphones qui lui ont été attribués, pour un semi-grossiste en cannabis de l’Essonne et qu’il livre principalement le Val-de-Marne.
Il le connaît depuis quelques mois et officie par intermittence.
Son commanditaire a plusieurs dealers attitrés.
Les téléphones circulent entre eux.
 
J’approuve ses aveux.
Tout va être vérifié par les enquêteurs.
Les téléphones vont « parler ».
Les acheteurs l’identifieront et une perquisition sera effectuée chez sa mère.
 
L’audition se passe courtoisement.
 
L’OPJ se rend vite compte que le gardé à vue a la volonté de reconnaître les faits.
Sa seule objection : l’identité du grossiste.
 
— Je risque de recevoir une balle.
J’ai peur pour ma mère et mon petit frère.
 
Il est 1 heure du matin, je rentre.
 
Nouvel interrogatoire le lendemain.
 
Autre OPJ en charge de la procédure.
 
 
 
 
 
 
 
Femme.
La trentaine.
Arborant un collier et une étoile de David argentés.
 
Les faits de la veille sont de nouveau évoqués avec précision et confirmés en tout point par le mis en cause.
 
Propriété des téléphones.
Répertoire des acheteurs.
Fréquence des livraisons.
Gains mensuels…
 
La perquisition a eu lieu très tôt ce matin.
 
3 000 euros découverts au domicile de sa mère.
 
— J’ai gardé l’argent de mon boss.
C’était trop risqué pour lui.
Je lui dois maintenant.
 
Les téléphones vont être exploités.
La garde à vue est reconduite pour vingt-quatre heures.
 
 
Nouvel entretien.
 
 
Nous devisons.
 
Je sais maintenant que l’enjeu est la peine.
L’enquête l’a broyé.
 
— J’ai merdé pour l’argent.
J’aurais dû mieux le planquer.
Ça m’a fait chier pour ma mère.
La perquisition…
Chez elle…
 
J’ai agi comme un bleu.
Je fais toujours attention.
Je me déplace en scooter.
Là, j’ai voulu prendre une voiture pour venir à Paris.
 
J’avais du shit.
Il puait.
Les flics l’ont senti tout de suite.
 
Je n’étais plus vigilant.
Faut le rester tout le temps.
 
À force, c’est dur.
C’est un vrai métier.
 
— Pourquoi êtes-vous dans les stups ?
 
— J’veux pas vivre la vie des gens.
C’est juste un tremplin.
J’connais les risques.
J’m’en fous.
 
— Vous semblez solitaire ?
 
— Ouais.
J’ai des projets.
La montagne…
Ceux qui consomment ont tout.
J’comprends pas.
 
— Leur vie est vide…
 
— Ouais.
 
— Vous n’aimez pas les contraintes.
 
— Ouais.
 
— Une vie balisée vous semble insipide.
 
— Ouais.
 
— Vous avez un fond anarchiste ?
 
— Peut-être…
J’suis pas con.
J’ai mon intelligence.
J’me débrouille.
De toute façon, j’ferai ce dont j&#