L Islam et la modernité dans le droit de la famille au Maghreb
366 pages
Français

L'Islam et la modernité dans le droit de la famille au Maghreb , livre ebook

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Description

Fortement marqué par l'Islam et le droit musulman, le droit maghrébin de la famille est controversé. Bien que les pays du Maghreb aient emprunté des chemins tantôt convergents tantôt différents, l'Islam en tant que religion et système de valeurs demeure très présent dans les législations de la famille. La norme religieuse constitue une marque de spécificité du droit familial au Maghreb. Le compromis entre l'Islam et la modernité et la quête du juste milieu devient dès lors la solution ultime.

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Date de parution 01 décembre 2013
Nombre de lectures 19
EAN13 9782336331294
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

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Extrait

tude comparaIve : Maroc, Algérie, Tunisie
MarIam Monjid
d
L’Islam et la modernité ans le droit de la famille au Maghreb
étude comparaIve : Maroc, Algérie, Tunisie
tude comparaIve : Maroc, Algérie, Tunisie
Histoire et Perspectives Méditerranéennes
L’Islam et la modernité dans le droit de la famille au Maghreb
Histoire et Perspectives méditerranéennes Collection dirigée par Jean-Paul Chagnollaud Dans le cadre de cette collection, créée en 1985, les Éditions L'Harmattan se proposent de publier un ensemble de travaux concernant le monde méditerranéen des origines à nos jours. Déjà parus Tahar RADDAD,La naissance du mouvement syndical tunisien, 2013. Geneviève FALGAS,Les Français de Tunisie de 1881 à 1931, 2013. Ismaïl REGRAGUI,La diplomatie publique marocaine : uns stratégie de marque religieuse ?, 2013. Anis BEN ALI,Le rapatriement des Français d’Afrique du Nord dans la presse. Alpes-Maritimes 1955-1962, 2013. Mohamed CHABANE,Heurs et malheurs du secteur agricole en Algérie, 1962-2012,2013 Hosni KITOUNI,La Kabylie orientale dans l’histoire. Pays des Kutuma et guerre coloniale, 2013. Geneviève GOUSSAUD-FALGAS,Les Français de Tunisie de 1881 à 1931, 2013. Jean BISSON,La guerre en Méditerranée 8 novembre 1942-9 septembre 1943. L’histoire revisitée, 2012. Adel BOUSNINA,Le littoral et le désert tunisiens. Développement humain et disparités régionales en Tunisie, 2012. Guy FEUER, Kamel YAHMI,Un dialogue pour la réconciliation, Un Algérien de France – Un Français d’Algérie, 2012.Abderrahman EL BERRHOUTI,Outils médiatiques et populations du Moyen Atlas marocain, 2012.Fedj MAÂTOUG,John F. Kennedy, la France et le Maghreb (1957-1963), 2012. Abdelkrim SAA,Migrants berbères marocains, De l’oasis de Figuig à Paris, 2012. Salah MOUHOUBI,L’Algérie face aux chocs extérieurs, 2012. Jean-Michel SALGON,Dictionnaire de l’islamisme au Maghreb, 2012. Mahmoud OURABAH,Premiers pas. Souvenirs autour d’un projet de développement de l’Algérie,1963-1980, 2012. Xavier JACQUEY,Ces appelés qui ont dit non à la torture,2012. Daniel LAGOT,Responsabilité de protéger et guerres « humanitaires ». Le Cas de la Libye, 2012. er Michel BUR,janvier 1960-16 février 1961Algérie 60. Mascara-Sétif, 1 , 2012.
Mariam Monjid L’Islam et la modernité dans le droit de la famille au Maghreb Etude comparative : Maroc, Algérie et Tunisie
© L'HARMATTAN, 2013 5-7, rue de l'École-Polytechnique ; 75005 Parishttp://www.librairieharmattan.com diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr ISBN : 978-2-336-30246-1 EAN : 9782336302461
Préface
La thèse soutenue à Toulouse 1 par Mariam Monjid le 14 décembre 2010 est prémonitoire. Trois jours avant l’immolation par le feu de Mohamed Bouazizi à Sidi Bouzid en Tunisie, signal de la révolte dans le monde arabo-musulman et qualifiée de Printemps arabela candidate confrontait l’Islam à la modernité dans le cadre du droit de la famille dans trois pays du Maghreb : la Tunisie, le Maroc et l’Algérie. Contrairement aux idées largement répandues en Occident l’Islam n’est pas incompatible avec la modernité ni avec la démocratie si l’on se débarrasse de l’ethnocentrisme européen. L’Islam n’est pas en soi un frein à la modernité. Cette dernière a été accélérée à certaines époques et ralentie à d’autres. Par rapport à la société préislamique la naissance de l’Islam a conduit à une véritable révolution du statut de la femme. Elle n’est plus l’objet d’une vente, d’un don, d’un héritage. Elle peut hériter, garder son nom en cas de mariage voire exercer une profession. Par ailleurs, s’adonner à la science et au progrès est un devoir religieux. Les Omeyades, les Abbassides, les Fatimides ont créé une civilisation et une culture parmi les plus remarquables de l’histoire de l’humanité plus e particulièrement aux IX et X siècles, synonymes d’âge d’or et dont l’occident a été largement tributaire. En effet, la science et la philosophie grecques, les contes de sagesse indienne, la morale iranienne, l’algèbre, l’astronomie, etc. ont été transmis à l’Europe par l’intermédiaire du monde arabo-musulman. Mais ce moment de grâce et de dialogue entre l’Europe et l’Islam fut malheureusement interrompu par des facteurs militaires, religieux, économiques, politiques et par la fermeture de l’ijtihad. e Au XI siècle en effet un calife va limiter l’interprétation du Coran et ne va retenir que quatre écoles de jurisconsultes dont l’école malékite en vigueur au Maghreb. e Certes au début du 20 siècle les réformistes modernes vont rouvrir partiellement la porte de l’ijtihad. Ils sont à l’origine des codifications qui vont intervenir ultérieurement dans les trois pays. Après la Seconde Guerre mondiale deux courants s’opposent : le nationalisme arabe porté par un républicain Nasser dont la démarche relève d’une vision moderne, laïque, universaliste et socialiste et l’«Omma islamiya» illustrée notamment par les Frères musulmans dont l’essor est croissant depuis les années 1970. Le mouvement nationaliste laïc a connu un certain succès mais a créé des dérives dictatoriales sanguinaires et réprimé sauvagement les tenants de l’autre vision. Les révolutions arabes actuelles ne sont pas cependant des révolutions islamiques. Elles souhaitent mettre en place un régime démocratique. Même si suite à des élections, de nombreux partis islamiques ont été portés au pouvoir selon certains analystes peut-être optimistes - l’avenir nous le dira - ils pourront difficilement occulter les mots d’ordre des manifestants,homme de l’année selon le magazine Time à savoir
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la dignité, la liberté, la démocratie, la justice sociale. Ces manifestations spontanées sans chef s’inscrivent dans la modernité par les moyens utilisés et par les finalités poursuivies. Même récupérés par les islamistes les mouvements peuvent aboutir. L’Islam n’est pas inconciliable avec la démocratie. Certes en Occident l’islamo-démocratie paraît un paradoxe. Mais si l’on se rallie au courant post-moderniste contemporain mettant sur le même plan toutes les cultures et les valeurs et adepte du mélange des genres. Ce compromis demeure possible. Il faut comprendre que la philosophie des lumières n’est plus la référence. Ces peuples aspirent à leur propre définition de la démocratie, de la modernité. Leur identité est par ailleurs indissociable de la religion. Mais pour que leurs revendications et aspirations se réalisent encore faut-il qu’ils développent l’ijtihadc'est-à-dire qu’ils fassent une relecture intelligente et appropriée de leur patrimoine religieux et culturel. Ghaleb Bencheikh, docteur es science et animateur d’Islam sur France 2 ne dit pas autre chose lorsqu’il déclare «pour faire émerger une nouvelle raison comme le dit bien Mohamed Arkoun, il nous faut faire preuve d’une pensée subversive, développer une investigation dévastatrice du patrimoine théologique qui n’est qu’un amoncellement de commentaires sur le commentaire et qu’on a sacralisé à travers le temps. Cela conduirait à l’ouverture d’une nouvelle ère» (l’Express, La grande histoire des peuples arabes, n° 355-356, 21 décembre 2011 au 3 janvier 2012, p.151 « Il faut pour l’Islam une pensée subversive »). C’est exactement la thèse de Mariam Monjid. À la lueur du bastion des normes sociales et religieuses à savoir les droits de la famille tunisien, marocain, algérien, elle démontre deux choses : les codes de la famille sont demeurés fidèles au droit musulman traditionnel malgré des tempéraments dus à la nécessité de la modernité (1re partie). La modernisation doit être restreinte par le label d’islamité, indispensable si l’on souhaite que le droit soit authentique, légitime et affectif (2e partie). Cette double démonstration est nuancée, équilibrée. L’auteur défend une opinion du juste milieu. Elle n’est pas favorable à une laïcité absolue à l’occidentale ni à une islamisation radicale des droits. Ses arguments sont convaincants et justifiés. Ils reposent en effet sur une vaste documentation presque exhaustive rédigée à la fois en langue arabe et en langue française et sur des développements très détaillés des rapports entre les époux et entre les parents et les enfants examinés dans la première partie. L’évolution des relations conjugales et parentales est décrite de manière très claire et précise et permet ainsi au lecteur même non averti d’accéder facilement aux dispositions et aux institutions du droit musulman et des trois droits positifs étudiés. Un index et un glossaire en facilitent la lecture. Toutefois, il ne s’agit pas seulement d’une simple analyse descriptive. Mariam Monjid démontre que la relation conjugale (Titre I) tend à devenir plus égalitaire. Certes la formation du mariage est encore très fidèle au droit musulman classique. Pièce angulaire du droit familial au Maghreb, le mariage hétérosexuel est la forme exclusive du couple. L’union libre et les partenariats enregistréssont ignorés par les droits positifs,a
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fortiori par le droit musulman. Toutefois, même si le droit matrimonial dans les trois droits est traditionnel, des tempéraments apparaissent. En outre, grâce aux codifications on constate une nuance par rapport au droit musulman : le mariage n’est plus seulement un contrat privé, il est aussi une institution puisque le législateur et le juge sont appelés à intervenir. S’agissant des rapports entre les conjoints, l’évolution est plus nette. Un concept émerge : celui de la coopération conjugale. La rupture du lien matrimonial révèle des divergences entre le droit tunisien et les deux autres droits puisque le droit tunisien n’admet plus la répudiation unilatérale par le mari. En revanche, les relations parentales (Titre II) sont régies de manière assez identique. Le conformisme est encore de rigueur. Le père est le tuteur légal de l’enfant. La mère est cependant de plus en plus souvent associée à la tutelle légale et le principe général d’intérêt de l’enfant restreint les dispositions patriarcales. Dans cette partie, l’auteur fait preuve d’une double maîtrise : celle des connaissances et celle de la méthodologie comparative. Elle compare les trois droits entre eux et ces droits positifs au droit musulman. Pour mener à bien cette double comparaison elle a choisi le petit Maghreb. Elle a exclu la Libye et la Mauritanie sujettes à d’autres influences. Elle a également rejeté certains points comme par exemple les incapacités ou les droits de l’enfant où elle n’a envisagé que partiellement le droit successoral, car au niveau de la comparaison cet examen n’aurait pas été pertinent ni fructueux, les divergences entre les droits étant minimes et peu significatives. La seconde partie de l’ouvrage est plus prospective, car elle est consacrée aux outils de la modernisation. Elle préconise une pièce maîtresse : un exercice approprié de l’ijtihad,instrument intrinsèque à la religion permettant une évolution conforme aux préceptes islamiques (Titre I). Son exercice ne peut cependant être abusif comme c’est parfois le cas en droit tunisien. La modernisation extrinsèque en dehors de la religion (Titre II) est plus périlleuse et aléatoire. Elle souligne toutefois l’importance des rôles du juge et du Ministère public susceptibles de freiner ou d’accélérer la modernisation. Elle constate aussi l’influence réduite des instruments internationaux et des droits fondamentaux et souhaite que ces outils soient davantage exploités même si elle reconnaît qu’ils ne reflètent pas les valeurs islamiques ni les réalités maghrébines. En bonne comparatiste elle termine son étude en posant la question suivante : un code maghrébin des personnes et de la famille est-il réalisable et opportun ? À cette interrogation elle répond avec sagesse par la négative. Même si ces trois droits suivent la doctrine malékite et ont subi des influences européennes notamment durant la période coloniale les divergences sont irréductibles. Ils n’ont pas le même contexte social et politique, ils n’ont pas la même histoire et ont des rythmes d’évolution différents. Certes une harmonisation des principes est possible mais une unité relèverait de l’utopie et serait en outre pernicieuse. Ajoutons enfin qu’un lecteur même profane pourra accéder au texte servi par une belle langue française et par un style très vivant et dynamique.
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Cette œuvre qui se lit presque comme un roman rendra en outre de nombreux services à tous ceux qui, à l’heure actuelle, essaient de comprendre la réalité des trois sociétés maghrébines. Les droits de la famille sont en effet indissociables de la sociologie. Le statut juridique de la femme notamment est révélateur du degré de modernité du droit et de la société. Espérons que les acquis antérieurs ne soient pas remis en cause à l’avenir et formons aussi des vœux pour l’auteur de ce bel ouvrage qui, lors de sa très brillante soutenance a obtenu la mention très honorable avec les félicitations du jury composé d’éminents spécialistes : Jean Hauser, Professeur de droit privé à l’Université de Montesquieu, Bordeaux IV ; Frédérique Ferrand, Professeur de droit privé à l’Université de Jean Moulin à Lyon III et directrice de l’institut de droit comparé ; André Cabanis, Professeur de droit et d’histoire du droit à UT1 Capitole ; Fanny Vasseur-Lambry, Maître de conférences à l’Université d’Artois et moi-même, Professeur émérite de droit à UT1 Capitole, directrice de la thèse et à l’époque de la soutenance co-directrice du Centre de droit comparé. Souhaitons que ce livre ne soit que le premier d’une longue série et que sa carrière universitaire soit couronnée de succès tant au Maroc qu’en France. Il est en effet primordial que ses connaissances et son expérience puissent profiter à un large public. Jacqueline Pousson-Petit Professeur émérite à UT1 Capitole Membre du Centre de droit comparé (IRDEIC)
Introduction
1 «L’art de vivre en famille ne s’enseigne point» .1.Quels que soient la société et son degré de développement, la famille reste une unité de base sur laquelle se construit la société. Un rapport étroit est établi 2 entre les deux de telle sorte que chaque société a sa famille voire ses familles . En vertu de ces liens profonds, la famille est sans doute le cadre privilégié pour l’observation des changements et des mutations que toute société connaît. Elle est 3 donc le miroir de cette dernière . Si l’évolution et les vicissitudes qui affectent la famille demeurent sans impact sur son importance dans la vie sociale, elles métamorphosent néanmoins les modèles familiaux. Ainsi, on passe de lagens4 romaine , un cercle très large basé principalement sur la parenté et sur la dépendance au chef de famille (lepater familias) audomus du droit romain, un 5 cercle assez restreint correspondant au ménage de l’Ancien droit . Le Code civil français offre également un exemple intéressant des transformations qui touchent la famille. Le code de 1804 a institué un modèle familial bouleversé progressivement de fond en comble par des réformes ultérieures. Le modèle de famille qu’il avait 6 institué était principalement inspiré de la morale judéo-chrétienne . C’était le modèle hiérarchique où l’homme exerçait une double puissance : paternelle en tant que père et maritale en tant qu’époux. Le mariage était au demeurant la seule institution possible et la filiation ne pouvait être que légitime et par le sang. On assiste de plus en plus au rétrécissement de la famille pour parler de nos jours de la famille nucléaire centrée autour du couple et de leurs enfants. Encore que la 7 mondialisation ne soit pas sans influer sur ce type de famille . Il s’agit donc d’un processus de changement continu qui s’échelonne dans le temps de sorte que chaque société produit le modèle ou les modèles de famille qui lui sont propres.
2.Que l’on soit en Occident ou en Orient, la conception de la famille n’est certes pas la même. Celle-ci est le produit des mœurs, des coutumes et de la culture
1 ème CARBONNIER (J.),Essais sur les lois, Defrénois, 2 édition, 1995, p. 194. 2 ème MALAURIE (Ph.), FULCHIRON (H.),La famille, Defrénois, 3 édition, 2008, p. 6. 3  Il pourrait même y avoir une certaine réciprocité à ce niveau de sorte que le changement des structures familiales pourrait avoir un effet sur l’évolution de la société. 4 FUSTEL DE COULANGES,La cité antique, Hachette, 1957, pp. 118 et s. 5 MALAURIE (Ph.), FULCHIRON (H.),La famille,op.cit., pp. 8-9. 6 ème SEGALEN (M.),Sociologie de la famille, Armand Colin, 6 édition, 2008, p. 302. 7 Ainsi, dans les sociétés occidentales on constate une diversification des formes de vie familiale. Le modèle dominant n’est plus uniquement la famille nucléaire mais aussi les familles monoparentales et recomposées. Le pluralisme est la conséquence de mutations sociales et économiques et culturelles. Cf. DECHAUX (J.-H),Sociologie de la famille, La découverte, 2007, pp. 24-25.
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